CA AIX-EN-PROVENCE (4e ch. A), 13 avril 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 2379
CA AIX-EN-PROVENCE (4e ch. A), 13 avril 2007 : RG n° 04/09988 ; arrêt n° 2007/91
Publication : Jurica
Extrait (motifs) : « 1/ Attendu qu'en indiquant, dans le corps de ses conclusions, et même si cette intention n'est pas reprise dans le dispositif des dites conclusions que la clause litigieuse du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux » doit être de même réputée non écrite, le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » formule bien cette prétention tendant à ce que la dite clause soit réputée non écrite ;
Attendu qu'une clause contenue dans un contrat d'adhésion imposée à son abonné par une société en situation de monopole et qui a pour effet, en cas de carence de cette société dans le décompte contractuel de la consommation de l'abonné, de lui imposer soit une facturation automatique fondée sur sa consommation de l'année antérieure soit un renversement de la charge de la preuve au préjudice de cet abonné est abusive comme étant de nature à créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; Attendu que tel est le cas en l'espèce où aucune carence dans l'entretien du regard et de la niche abritant le compteur qui incombe à l'abonné n'est démontrée ni même alléguée et où aucune faute de ce dernier qui serait à l'origine de la panne du compteur n'est également prouvée ni même alléguée, alors que le fonctionnement correct des compteurs relève, selon le contrat, du fournisseur d'eau, et alors que le dysfonctionnement de ce compteur est avéré ;
Attendu en conséquence et en application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, qu'il y a lieu de réputer non écrite la clause édictée par l'article 3.6 du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux » ».
Extrait (dispositif) : « Répute non écrite la clause constitué par l'article 3.6 du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux » aux termes de laquelle « En cas d'arrêt du compteur, la consommation pendant l'arrêt est calculée, sauf preuve contraire apportée par l'une ou l'autre des parties, sur la base de la consommation pendant la période correspondante de l'année précédente ou, à défaut, sur celle de l'année en cours, s'il y a eu mesure de consommation pendant un laps de temps nettement déterminé. ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
QUATRIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 13 AVRIL 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 04/09988. Arrêt n° 2007/191. ARRÊT AU FOND DU 13 AVRIL 2007. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de GRASSE en date du 13 avril 2004 enregistré au répertoire général sous le n° 03/222.
APPELANT :
Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier LES JARDINS DE X.,
sis [adresse], représenté par son syndic en exercice la SARL CABINET FRANCE ADMINISTRATION, [adresse], représenté par la SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER, avoués à la Cour, plaidant par Maître Stéphane MONET, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉE :
Société LYONNAISE DES EAUX FRANCE,
[adresse], elle-même prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès-qualité audit siège, représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, plaidant par la SCP MONCHO-VOISIN-MONCHO, avocats au barreau de GRASSE substituée par Maître Céline DENARO, avocat au barreau de GRASSE
COMPOSITION DE LA COUR : [minute Jurica page 2] L'affaire a été débattue le 13 mars 2007 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur Guy ROMAN, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de : Monsieur Guy ROMAN, Président, Monsieur André FORTIN, Conseiller, Monsieur Philippe COULANGE, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie AUDOUBERT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 avril 2007.
ARRÊT : Contradictoire. Magistrat Rédacteur : Monsieur André FORTIN, Conseiller. Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 avril 2007. Signé par Monsieur Guy ROMAN, Président et Madame Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » est abonné de la société « Lyonnaise des Eaux ». Un dysfonctionnement du compteur d'eau consistant selon le fournisseur en un blocage étant apparu au cours de la période de consommation relative au 1er semestre 2000, la société « Lyonnaise des Eaux » procédait au remplacement de ce compteur et émettait une facturation forfaitaire conformément à la clause suivante qui constitue l'article 3.6 du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux » :
« En cas d'arrêt du compteur, la consommation pendant l'arrêt est calculée, sauf preuve contraire apportée par l'une ou l'autre des parties, sur la base de la consommation pendant la période correspondante de l'année précédente ou, à défaut, sur celle de l'année en cours, s'il y a eu mesure de consommation pendant un laps de temps nettement déterminé. »
Contestant cette facturation qui lui avait été faite pour la période du 1er semestre 2000, le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » a, par exploit délivré le 13 mars 2003, fait assigner la société « Lyonnaise des Eaux » à comparaître devant le Tribunal d'instance de Grasse pour la voir condamner à lui payer la somme de 4.258,73 € en remboursement de la facturation selon lui abusive ainsi que la somme de 1.524,49 € à titre de dommages et intérêts complémentaires.
[minute Jurica page 3] La société « Lyonnaise des Eaux » s'étant opposée à ces demandes et ayant elle-même formulé une demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts, par jugement prononcé le 13 avril 2004, le Tribunal d'instance de Grasse :
- Rejetait les demandes,
- Disait n'y avoir lieu à allouer de sommes en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- Laissait à chaque partie la charge de ses dépens.
Par déclaration au greffe de la présente Cour le 3 mai 2004, le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » a interjeté appel de ce jugement prononcé le 13 avril 2004 par le Tribunal d'instance de Grasse.
Il entend :
- Que le jugement entrepris soit infirmé,
- Que la société « Lyonnaise des Eaux » soit condamnée à lui payer la somme de 4.258,73 € outre celle de 1.524,49 € à titre de dommages et intérêts,
- Qu'elle soit encore condamnée à lui payer la somme de 1.219,59 € en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
- Qu'elle soit enfin condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de son recours, il fait valoir :
- Que la consommation d'eau en 1999 qui a servi de référence du fait de la carence de l'équipement posé par la société « Lyonnaise des Eaux » était importante du fait que certains bureaux dépendant de la copropriété étaient équipés de climatiseurs à eau perdue, alors que ces équipements ont été depuis lors démontés,
- Que la panne du compteur est imputable au service des eaux et que dès lors il doit supporter toutes les conséquences de ce dysfonctionnement, alors que ne peut être mis à la charge de l'abonné les conséquences pécuniaires du dérèglement d'un compteur dont il n'a pas la faculté de s'assurer du fonctionnement correct,
- Qu'est donc abusive et doit être en conséquence réputée non écrite la clause constituée par l'article 3.6 du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux », et ce, au sens de l'article 35 de la Loi du 10 janvier 1978 et qu'elle n'est pas davantage conforme aux énonciations de l'article L 132-1 du Code de la consommation.
La société « Lyonnaise des Eaux » demande à la Cour :
- De confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté sa demande reconventionnelle,
- [minute Jurica page 4] De condamner le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » à lui payer la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts,
- De le condamner encore à lui payer la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
- De le condamner enfin aux dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :
- Qu'elle s'est contentée d'appliquer strictement l'article 3.6 du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et elle-même,
- Que les consommations postérieures au semestre litigieux sont du même ordre,
- Que ce n'est que pour la deuxième période 2003 et la première période 2004 que les consommations ont très nettement diminué suite à la suppression de la climatisation à eau dont les dysfonctionnements entraînaient, de toute évidence, des surconsommations importantes,
- Que le règlement du service des eaux a été rédigé au regard de la recommandation de la commission des clauses abusives du 19 novembre 1982 aux termes de laquelle il était conseillé d'éliminer treize clauses dont aucune ne figure dans le règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et elle-même,
- Que le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » a eu un comportement fautif, a fait preuve d'une mauvaise foi évidente et d'une résistance particulièrement abusive.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1/ Attendu qu'en indiquant, dans le corps de ses conclusions, et même si cette intention n'est pas reprise dans le dispositif des dites conclusions que la clause litigieuse du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux » doit être de même réputée non écrite, le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » formule bien cette prétention tendant à ce que la dite clause soit réputée non écrite ;
Attendu qu'une clause contenue dans un contrat d'adhésion imposée à son abonné par une société en situation de monopole et qui a pour effet, en cas de carence de cette société dans le décompte contractuel de la consommation de l'abonné, de lui imposer soit une facturation automatique fondée sur sa consommation de l'année antérieure soit un renversement de la charge de la preuve au préjudice de cet abonné est abusive comme étant de nature à créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu que tel est le cas en l'espèce où aucune carence dans l'entretien du regard et de la niche abritant le compteur qui incombe à l'abonné n'est démontrée ni même alléguée et où aucune faute de ce dernier qui serait à l'origine de la panne du compteur n'est également prouvée ni même alléguée, alors que le fonctionnement correct des compteurs relève, selon le contrat, du fournisseur d'eau, et alors que le dysfonctionnement de ce compteur est avéré ;
[minute Jurica page 5] Attendu en conséquence et en application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, qu'il y a lieu de réputer non écrite la clause édictée par l'article 3.6 du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux » ;
2/ Attendu cependant qu'en l'espèce, abstraction faite de toute application de la clause abusive, la prétention de la société « Lyonnaise des Eaux » apparaît légitime par application du droit commun de la preuve ;
Attendu, en effet, le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » ne contestant pas avoir consommé durant la période litigieuse, que la société « Lyonnaise des Eaux » soutient sans être contredite et démontre par la justification des consommations antérieures et postérieures du syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » que les consommations postérieures au semestre litigieux sont du même ordre que celles facturées forfaitairement et que ce n'est que pour la deuxième période 2003 et la première période 2004 que les consommations ont très nettement diminué suite à la suppression de la climatisation à eau dont les dysfonctionnements entraînaient, de toute évidence, des surconsommations importantes, d'où il résulte que la consommation objet de la facturation contestée n'apparaît pas supérieure à la consommation effective ;
Attendu, ainsi, qu'il y a lieu de rejeter les demandes en remboursement formulées par le syndicat des copropriétaires « Les Jardins de X. » ;
3/ Attendu que chacune des parties succombant sur une part de ses prétentions, les procédure et résistance respectives de chacune d'elle ne sauraient être qualifiées d'abusives ;
4/ Attendu qu'aucune considération tenant à l'équité ou aux situations économiques respectives des parties ne justifie qu'il soit fait en l'espèce application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile et que les dépens doivent être partagés par moitié ;
Vu à cet égard les articles 696, 699 et 700 du Nouveau Code de procédure civile,
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT ET CONTRADICTOIREMENT,
Reçoit l'appel,
Infirme le jugement prononcé le 13 avril 2004 par le Tribunal d'instance de Grasse,
Répute non écrite la clause constitué par l'article 3.6 du règlement du service des eaux de la commune de Valbonne régissant les règles entre les usagers et la société « Lyonnaise des Eaux » aux termes de laquelle « En cas d'arrêt du compteur, la consommation pendant l'arrêt est calculée, sauf preuve contraire apportée par l'une ou l'autre des parties, sur la base de la consommation pendant la période correspondante de l'année précédente ou, à défaut, sur celle de l'année en cours, s'il y a eu mesure de consommation pendant un laps de temps nettement déterminé. »,
Déboute le Syndicat des Copropriétaires LES JARDINS DE X. de sa demande
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
Fait masse des dépens de première instance et d'appel,
Dit qu'ils seront pris en charge à raison de moitié chacun par les deux parties,
[minute Jurica page 6] En ordonne distraction au profit des SCP LATIL - PENARROYA-LATIL - ALLIGIER et SIDER avoués, sur leur affirmation d'en avoir fait l'avance.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S. AUDOUBERT G. ROMAN
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- 6142 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Preuve - Encadrement des modes de preuve
- 6314 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Eau (fourniture) - Obligations du consommateur