T. COM. NANTES, 20 mars 2000
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 241
T. COM. NANTES, 20 mars 2000 : RG n° 1999/01615
(sur appel CA Rennes (1re ch. B), 6 juillet 2001 : RG n° 00/03741 ; arrêt n° 641)
Extrait : « Mais attendu que l'appareil téléphonique installé a en l'espèce vocation à servir exclusivement la clientèle du café qui l'utilise à sa guise contre monnaie ; que n'assurant pas la marche du café mais complétant seulement le confort du client et ne pouvant être rattaché un tant soit peu à l'activité spécifique de limonadier mais à un service public, les dispositions du Code de Consommation lui [demeurent] bien applicable ».
TRIBUNAL DE COMMERCE DE NANTES
JUGEMENT DU 20 MARS 2000
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 1999-01615. Jugement contradictoire.
ENTRE :
La Société LOCAM SA
[adresse], Demanderesse à l'injonction de payer, Défenderesse à l'opposition, Comparant par Maître LEBEL, Avocat à NANTES (83), D'UNE PART
ET :
M. X.
Affaire personnelle [nom de l’établissement], [adresse] Défendeur à l'injonction de payer, Demandeur à l'opposition, Comparant par Maître J. C. MERAND, Avocat à NANTES (5), D'AUTRE PART.
Attendu que les parties ont été entendues à l'audience du deux décembre mil neuf cent quatre vingt dix neuf à laquelle siégeaient Messieurs LEROUX, Président de Chambre, SAMBRON, BOLLORE, Juges, qui ont délibéré conformément à la Loi ;
Qu'en application des articles 450 et suivants du Nouveau Code de Procédure Civile, le jugement a été renvoyé à l'audience de ce jour pour être prononcé par Monsieur SAMBRON, Juge faisant fonction de Président de Chambre ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu qu'à la date du 15 juillet 1998, la Sté LOCAM a déposé une requête en injonction de payer tendant à obtenir de M. X. le paiement de la somme de 17.141,90 Francs correspondant aux loyers impayés ou à échoir au titre d'un contrat de téléphonie et celle de 1.726,33 Francs. par application de la clause pénale du contrat ;
Vu l'ordonnance en date du 28 août 1998 enjoignant M. X. à payer à la Société LOCAM la somme de 18.868,23 Francs., formée de l'addition des loyers échus et à échoir et de l'application de la clause pénale, outre les intérêts sur le principal (17.141,90 Francs.) au taux légal à compter du 7 avril 1998 ainsi que la somme de 153,64 Francs au titre des dépens ;
[minute page 2] Vu la signification de cette ordonnance en date du 22 septembre 1998, soit dans les six mois de sa date ;
Que M. X. a formé opposition le 12 octobre 1999, soit dans le délai prévu à l'article 1416 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Que les parties ont été convoquées à l'audience par lettre recommandée avec accusé de réception
LES FAITS :
A la suite d'un démarchage à domicile M. X. a régularisé avec la Société LOCAM le 20 novembre 1997 un contrat de téléphonie destiné à la clientèle de son café qu'il a dénoncé une 1ère fois par courrier simple le 19 décembre 1997 puis par courrier recommandé avec AR le 27 février suivant ;
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
OPPOSANT :
M. X. fait grief au Tribunal d'être rentré en condamnation contre lui ;
ALORS QUE
Représentant de la Société LOCAM mais en fait démarcheur de la Société HAPPENING (fournisseur du matériel), M. Y. ne pouvait avoir la qualité de tiers ;
Il avait été abusé sur les prix ;
La loi sur le démarchage à domicile n'avait pas été respectée ;
M. X. demande en conséquence au Tribunal de :
- débouter la Société LOCAM de toutes ses demandes, prononcer la nullité du contrat de location pour dol, erreur sur le prix et atteinte à la réglementation concernant la vente à domicile,
- condamner la Société LOCAM aux dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 5.000,00 Francs. par application de l'article 700 du NCPC ;
DEMANDERESSE
La Société LOCAM oppose :
Au premier moyen :
Que la notion de dol soulevée à tort par M. X. impliquait par logique que la Société HAPPENING soit appelée à la procédure puisque le contrat de location, contrat accessoire, ne pouvait être remis en question qu'autant que le contrat de fourniture, contrat principal, était mis à néant ;
Au deuxième moyen :
Que le contrat ne laissait planer aucun doute sur la périodicité des échéances qui n'étaient pas bimestrielles mais mensuelles, ce qui excluait que M. X. puisse invoquer sérieusement avoir été trompé sur le montant véritable des remboursements ;
[minute page 3] Au troisième moyen :
Que la protection offerte en matière de démarchage à domicile au consommateur n'était pas ouverte aux professionnels ;
La Société LOCAM demande en conséquence au Tribunal de :
- débouter M. X. de son opposition,
- condamner M. X. à lui payer la somme de 18.868,23 Francs en principal, 5.000,00 Francs au titre de l'article 700 du NCPC et les entiers dépens ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Attendu que l'article L. 121-22 du Code de la consommation dont se prévaut, la demanderesse stipule :
« ne sont pas soumis aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 : 1° … 4° Les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou de prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession » ;
Mais attendu que l'appareil téléphonique installé a en l'espèce vocation à servir exclusivement la clientèle du café qui l'utilise à sa guise contre monnaie ; que n'assurant pas la marche du café mais complétant seulement le confort du client et ne pouvant être rattaché un tant soit peu à l'activité spécifique de limonadier mais à un service public, les dispositions du Code de Consommation lui [demeurent] bien applicable ;
Attendu qu'il convient en conséquence de rechercher si le contrat de téléphonie est conforme à l'article L. 121-23 de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 rédigé en ces termes :
« les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes : 1 ° ... 7° faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25 ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et de façon apparente le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 » ;
[minute page 3] Attendu qu'il convient de constater que le contrat signé le 20 novembre 1997 contrevient aux dispositions énumérées, dès lors qu'il ne les transpose pas fidèlement mais se contente de les reproduire dans une forme abrégée et sans jamais faire référence à l'article du Code de la Consommation auquel elles se rapportent et que de plus la faculté de rétractation ouverte au consommateur durant 7 jours par l'article L. 121-25 reste ignorée du locataire à défaut d'avoir été spécifiée en caractère de taille suffisante et donc apparente mais en lettres minuscules et semblables ;
Attendu dès lors que le but de protection du consommateur recherché par le législateur n'a pas été atteint ce qui permet de déclarer nul et de nul effet le contrat de location mais à charge par le locataire de restituer au bailleur le matériel placé sous sa garde sous un mois et ce sans qu'il soit nécessaire de rechercher plus avant si d'autres conditions prévues par la Loi ont été transgressées ;
Attendu que la Société LOCAM qui succombe, supportera les dépens ;
Qu'elle ne peut de ce fait bénéficier des dispositions de l'article 700 du NCPC ; que l'équité commande en revanche de faire droit partiellement à la demande de M. X. fondée sur ce texte, lequel se verra allouer 3.000,00 Francs.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, après en avoir délibéré
conformément à la Loi, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :
Reçoit M. X. en son opposition et la dit fondée ;
Prononce la nullité de la convention de location du 20 novembre 1997 souscrite entre M. X. et la Société LOCAM ;
Dit que le locataire devra procéder à la restitution du matériel de téléphonie et de ses accessoires dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement ;
Condamne la Société LOCAM à payer à M. X. la somme de TROIS MILLE francs par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ;
Condamne la Société LOCAM en tous les dépens les frais du présent jugement, soit QUATRE CENT DIX HUIT francs TRENTE SIX centimes toutes taxes comprises.
Dit que le présent jugement se substitue à l'Ordonnance d'injonction de payer rendue le vingt huit août mil neuf cent quatre vingt dix huit.
Ainsi fait et jugé en audience publique du Tribunal de Commerce de NANTES, ledit jour vingt mars deux mil.
Le Greffier, Le Juge f.f. [N.B. faisant fonction] de Président de Chambre.
F. BARBIN D. . AMBRON
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- 5900 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Amélioration des résultats financiers
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- 5916 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus en vue d’une activité - Adjonction d’une activité supplémentaire : moyens de communication