CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 9 septembre 2025
- TJ Paris (Jcp), 1er mars 2023 : RG n° 22/06943
CERCLAB - DOCUMENT N° 24268
CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 9 septembre 2025 : RG n° 23/08983
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « En vertu de l'article 564 du code de procédure civile : « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. » La cour retient qu'en l'espèce, la demande de nullité de la clause litigieuse formée par l'appelante est opposée à l'association intimée pour voir échouer sa demande d'expulsion et qu'elle est donc recevable. »
2/ « Selon l'article L. 442-8-4 du code de la construction et de l'habitation […]
L'article 4. 1 relatif au congé est rédigé comme suit : « 4.1 Congé. Les parties pourront, l'une et l'autre, sans avoir à le motiver, mettre fin au présent contrat de sous-location avant l'arrivée du terme, sous réserve de respecter un préavis d'un mois. Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en mains propres contre récépissé. Pendant le préavis, chacune des parties restera redevable de ses obligations. A l'expiration du délai de préavis, l'étudiant devra libérer les lieux, et sera par ailleurs déchu de tout titre d'occupation des lieux. » Par courrier recommandé en date du 16 mai 2022 adressé à Mme X., l'association a donné congé à échéance du 30 juin 2022, au motif que la société Elogie-SIEMP prévoit d'entreprendre des travaux à compter du 1er juillet.
Le bail revêtant la qualification d'un contrat de gré à gré ne peut être qualifié de contrat d'adhésion auquel s'appliquerait l'article 1171 du code civil. Il résulte de l'article 1103 du code civil que : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. »
Or Mme X. ne démontre pas que le délai de préavis d'un mois, applicable au bailleur comme à la locataire, serait contraire aux dispositions légales, sachant que la loi du 6 juillet 1989 n'est pas applicable en l'espèce.
En outre, le caractère abusif de cette clause doit encore être envisagé au regard de l'économie générale du contrat. Or, l'association le Pari Solidaire est une association qui a institué une cohabitation entre un senior et un jeune au domicile du senior. La convention litigieuse propose à des étudiants la sous-location de logements. Le bailleur est un tiers, la société Elogie SIEMP. Dans ce contexte, il est normal qu'au regard des contraintes qu'elle rencontre, l'association le Pari Solidaire bénéficie d'un préavis de courte durée qui peut effectivement être d'un mois. La situation n'est donc pas comparable à celle d'une location en meublé ; l'association le Pari Solidaire a d'ailleurs aussi précisé dans le congé que le bailleur envisage des travaux, ce qui le justifie. L'appelante ne démontre donc pas davantage que ce délai de préavis d'un mois soit abusif.
L'appelante ne peut donc voir aboutir sa demande de nullité de l'article 4. 1 relatif au congé figurant au bail. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 4
ARRÊT DU 9 SEPTEMBRE 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 23/08983 (5 pages). N° Portalis 35L7-V-B7H-CHUSZ. Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er mars 2023 - Juge des contentieux de la protection de [Localité 8] - RG n° 22/06943.
APPELANTE :
Madame X.
née le [date] à [Localité 7] ([Pays]), [Adresse 4], [Localité 3], Représentée par Maître Sarah GARCIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C2182 (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/XXX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 8])
INTIMÉE :
Association LE PARI SOLIDAIRE
inscrite sous le numéro SIREN XXX, [Adresse 1], [Localité 2], Représentée à l'audience par Maître Patrick MAYET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0139
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 juin 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nicolette GUILLAUME, présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : Madame Nicolette GUILLAUME, présidente de chambre, Madame Agnès BODARD-HERMANT, présidente à la chambre, Monsieur Jean-Yves PINOY, conseiller.
Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre DARJ
ARRÊT : - Contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Nicolette GUILLAUME, Présidente de chambre et par Madame Aurély ARNELL, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Une convention de partenariat pour le développement d'un habitat partagé intergénérationnel a été signée le 4 décembre 2014 entre la société ElogieSIEMP et l'association le Pari Solidaire dans un immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 9] pour le logement du rez-de-chaussée, escalier D.
Par convention en date du 30 septembre 2019, l'association le Pari Solidaire a consenti à Mme X. la sous-location d'un logement situé dans cet immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 9] (rez-de-chaussée, escalier D) et ce pour une durée d'un mois renouvelable et moyennant le paiement d'une redevance d'un montant de 338,04 euros par mois dont 86,63 euros de charges.
Par avenant en date du 27 août 2021, la date d'expiration de la convention a été prorogée au 31 août 2022 et la redevance portée à la somme de 343,42 euros par mois.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 16 mai 2022, l'association le Pari Solidaire a délivré un congé à Mme X. avec effet au 30 juin 2022.
Or, Mme X. s'est maintenue dans les lieux.
Saisi par l'association le Pari Solidaire par acte d'huissier de justice délivré le 19 août 2022, par jugement contradictoire rendu le 1er mars 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a rendu la décision suivante :
- ordonne l'expulsion de Mme X. et de tout occupant de son chef du logement situé dans l'immeuble sis [Adresse 6] [Localité 9] (rez-de-chaussée, escalier D), le cas échéant avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier ;
- rejette la demande tendant à la suppression, du délai légal de deux mois après signification du commandement de quitter les lieux ;
- condamne Mme X. à payer à l'association le Pari Solidaire une indemnité d'occupation d'un montant de 342,43 euros et ce chaque mois à compter du mois de juillet 2022 jusqu'à la restitution ou l'expulsion des lieux ;
- condamne Mme X. à payer à l'association le Pari Solidaire la somme de 2.396,01 euros au titre des redevances et des indemnités d'occupation échues au mois de janvier 2023 inclus ;
- condamne Mme X. à payer à l'association le Pari Solidaire la somme de 290 euros au titre de son adhésion à l'association 2021/2022 ;
- condamne Mme X. à payer à l'association le Pari Solidaire la somme de 850 euros au titre des frais irrépétibles ;
- condamne Mme X. aux dépens.
Par déclaration reçue au greffe le 16 mai 2023, Mme X. a interjeté appel de ce jugement.
[*]
Dans ses dernières conclusions déposées le 24 juillet 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, Mme X. demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;
- y faisant droit :
- infirmer la décision déférée ;
- et statuant à nouveau :
- dire que la clause relative au congé est non écrite ;
- annuler la résiliation du bail et les actes subséquents ;
- lui accorder un échéancier de 36 mois pour régler sa dette locative, soit 91 euros par mois en plus du loyer ;
- à titre subsidiaire :
- lui accorder un délai de 12 mois pour quitter le logement.
Mme X. a été expulsée le 3 octobre 2023.
[*]
Dans ses dernières conclusions déposées le 3 mars 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, l'association le Pari Solidaire demande à la cour de :
- juger que la présente procédure n'a plus d'objet par suite de la mise en œuvre de l'expulsion ;
- prononcer l'irrecevabilité des demandes de Mme X. ;
- en tout état de cause :
- débouter Mme X. de ses demandes ;
- confirmer le jugement entrepris en procédant à la rectification de l'erreur matérielle en ce qui concerne le montant de la dette locative (redevances et indemnités d'occupation) qui était de 4 451,59 euros au mois de janvier 2023 inclus ;
- y ajoutant :
- actualiser la dette locative de Mme X. qui se chiffre à la somme de 7.191,03 euros au mois de juillet 2023 inclus ;
- condamner Mme X. au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Patrick Mayet.
[*]
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 mai 2025.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Contrairement aux allégations de l'association le Pari Solidaire, la procédure d'appel n'est pas dépourvue d'objet du fait de la mesure d'expulsion qui n'a été mise en œuvre qu'en exécution du jugement attaqué qui pourrait toujours être infirmé en appel, cette exécution n'étant qu'aux risque et péril de celui qui en décide.
Mme X. estime que la clause du contrat de sous-location en meublé qui autorise la résiliation du bail pour chacune des parties dans un délai d'un mois est irrégulière car elle ne tient pas compte de l'état de vulnérabilité du locataire, et elle est abusive comme créant un déséquilibre entre les droits et obligations des parties au contrat.
Elle sollicite un échéancier pour payer sa dette locative qu'elle ne conteste pas et un délai pour quitter les lieux.
L'association le Pari Solidaire rétorque que la convention est conclue en application de l'article L. 442-8-4 du code de la construction et de l'habitation et que les dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ne lui sont pas applicables.
Elle prétend que la demande de Mme X. tendant à voir contester la clause de la convention relative au congé est irrecevable car nouvelle en appel. Sur le fond, elle demande à voir appliquer le principe de la liberté contractuelle et soutient que la durée du préavis n'est pas contraire à la loi.
Elle sollicite la rectification par la cour de la condamnation au titre du solde locatif. Elle s'oppose à tout délai de paiement.
Sur ce,
Sur la recevabilité :
En vertu de l'article 564 du code de procédure civile : « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
La cour retient qu'en l'espèce, la demande de nullité de la clause litigieuse formée par l'appelante est opposée à l'association intimée pour voir échouer sa demande d'expulsion et qu'elle est donc recevable.
Sur le fond :
Selon l'article L. 442-8-4 du code de la construction et de l'habitation
L'article 4. 1 relatif au congé est rédigé comme suit : « 4.1 Congé.
Les parties pourront, l'une et l'autre, sans avoir à le motiver, mettre fin au présent contrat de sous-location avant l'arrivée du terme, sous réserve de respecter un préavis d'un mois.
Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en mains propres contre récépissé.
Pendant le préavis, chacune des parties restera redevable de ses obligations.
A l'expiration du délai de préavis, l'étudiant devra libérer les lieux, et sera par ailleurs déchu de tout titre d'occupation des lieux. »
Par courrier recommandé en date du 16 mai 2022 adressé à Mme X., l'association a donné congé à échéance du 30 juin 2022, au motif que la société Elogie-SIEMP prévoit d'entreprendre des travaux à compter du 1er juillet.
Le bail revêtant la qualification d'un contrat de gré à gré ne peut être qualifié de contrat d'adhésion auquel s'appliquerait l'article 1171 du code civil. Il résulte de l'article 1103 du code civil que : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. »
Or Mme X. ne démontre pas que le délai de préavis d'un mois, applicable au bailleur comme à la locataire, serait contraire aux dispositions légales, sachant que la loi du 6 juillet 1989 n'est pas applicable en l'espèce.
En outre, le caractère abusif de cette clause doit encore être envisagé au regard de l'économie générale du contrat. Or, l'association le Pari Solidaire est une association qui a institué une cohabitation entre un senior et un jeune au domicile du senior. La convention litigieuse propose à des étudiants la sous-location de logements. Le bailleur est un tiers, la société Elogie SIEMP. Dans ce contexte, il est normal qu'au regard des contraintes qu'elle rencontre, l'association le Pari Solidaire bénéficie d'un préavis de courte durée qui peut effectivement être d'un mois. La situation n'est donc pas comparable à celle d'une location en meublé ; l'association le Pari Solidaire a d'ailleurs aussi précisé dans le congé que le bailleur envisage des travaux, ce qui le justifie. L'appelante ne démontre donc pas davantage que ce délai de préavis d'un mois soit abusif.
L'appelante ne peut donc voir aboutir sa demande de nullité de l'article 4. 1 relatif au congé figurant au bail.
L'association le Pari Solidaire ayant respecté les dispositions contractuelles lui permettant de délivrer un congé à Mme X., ce qui n'est pas contesté, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a validé, ordonné l'expulsion et le paiement d'une indemnité d'occupation.
L'association le Pari Solidaire versant aux débats un décompte de la dette locative qui n'est pas critiqué par Mme X., celle-ci sera condamnée à lui versée la somme de de 7 191,03 euros, par infirmation du jugement entrepris.
Mme X. n'apportant aucune garantie à la cour concernant le paiement de cette dette qui n'a par ailleurs pas cessé d'augmenter jusqu'à l'expulsion, sa demande de délais sera rejetée.
La demande de délais pour quitter les lieux est quant à elle devenue sans objet et sera rejetée.
Partie perdante, Mme X. ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles. Elle devra en outre supporter les dépens d'appel qui seront recouvrés avec distraction au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.
L'équité ne justifie pas en appel de faire droit à la demande de l'intimée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Rejette l'irrecevabilité soulevée par l'association le Pari Solidaire,
Confirme le jugement rendu le 1er mars 2023 sauf en ce qu'il a condamné Mme X. à payer à l'association le Pari Solidaire la somme de 2.396,01 euros au titre des redevances et des indemnités d'occupation échues au mois de janvier 2023 inclus,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Condamne Mme X. à payer à l'association le Pari Solidaire la somme de 7.191,03 euros au titre des redevances et des indemnités d'occupation échues au mois de juillet 2023 inclus,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Rejette toute autre demande,
Dit que Mme X. supportera la charge des dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,