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CA AGEN (1re ch. civ.), 24 mars 2010

Nature : Décision
Titre : CA AGEN (1re ch. civ.), 24 mars 2010
Pays : France
Juridiction : Agen (CA), 1re ch. civ.
Demande : 09/00490
Décision : 312/10
Date : 24/03/2010
Nature de la décision : Annulation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 30/03/2009
Numéro de la décision : 312
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2612

CA AGEN (1re ch. civ.), 24 mars 2010 : RG n° 09/00490 ; arrêt n° 312/10 

Publication : Juris-Data n° 2010-005709

 

Extraits : 1/ « Il résulte cependant, d'une lecture attentive des arrêts invoqués par la SA FINAREF que l'office du juge ne lui impose pas de changer la dénomination ou le fondement juridique des demandes des parties, et qu'il appartient à celui qui invoque la forclusion d'apporter la preuve des faits allégués, ce qui ne signifie nullement qu'il lui soit fait interdiction de relever une fin de non recevoir d'office. Toutefois, si l’article 16 du Code de Procédure Civile autorise le juge à fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevé d'office, il doit avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations. Il ne résulte pas de la procédure que le premier juge ait soumis aux débats des parties, la forclusion tirée de l’article L. 311-37 du Code de la Consommation. Il convient donc d'annuler le jugement déféré et d'évoquer le fond du litige, en application de l’article 562 du Code de Procédure Civile. »

2/ « Devant la Cour, M. X. soulève la forclusion sus évoquée. Il sera observé, à titre liminaire que cette demande ne peut être déclaré irrecevable au motif qu'elle aurait été présentée pour la première fois en cause d'appel. Certes, l'intimé faisait défaut en première instance et n'a présenté aucune demande, cependant c'est à tort que la SA FINAREF qualifie de demande nouvelle ce qui doit en réalité être analysé comme un moyen nouveau et doit donc être examiné étant posé que du fait de l'effet dévolutif de l'appel, la Cour doit statuer sur ce problème compte tenu de l'argumentation développée par l'appelant. »

3/ « En application de ce principe, doit être réputée non écrite comme abusive, la clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit, car elle exonère le prêteur du respect des exigences légales protectrices de l'emprunteur à l'occasion de l'augmentation du découvert utile et le prive de sa faculté de rétractation. Il s'ensuit que le point de départ du délai de forclusion de l’article L.311-37 du Code de la Consommation est le jour du dépassement non régularisé du montant initial du découvert. Au cas présent, le montant du Découvert Utile a été dépassé le 25 mai 2005, l'action en paiement intentée le 14 août 2008 par la SA FINAREF est donc forclose. »

 

COUR D’APPEL D’AGEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 24 MARS 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/00490. Arrêt n° 312/10. Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l’article 450 et 453 du Code de procédure civile le vingt quatre mars deux mille dix, par Bernard BOUTIE, Président de Chambre, assisté d'Isabelle BURY, Greffier,

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

 

ENTRE :

SA FINAREF,

prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège, Dont le siège social est [adresse], représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués, assistée du CABINET D'AVOCATS DECKER & ASSOCIES, avocats, APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal d'Instance d'AGEN en date du 4 novembre 2008, D'une part,

 

ET :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité française, Profession : militaire, Domicilié [adresse], représenté par la SCP Guy NARRAN, avoués, INTIMÉ, D'autre part,

 

a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 2 décembre 2009, devant Bernard BOUTIE, Président de Chambre, Dominique NOLET, Conseiller et Dominique MARGUERY, Conseiller (laquelle, désignée par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable), assistés d'Isabelle BURY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Un jugement du Tribunal d'Instance d'AGEN rendu le 4 novembre 2008 a pour l'essentiel :

- constaté la forclusion de l'action en paiement de la SA FINAREF ;

- dit les demandes de la SA FINAREF irrecevables ;

- débouté la SA FINAREF de sa demande fondée sur l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Dans des conditions de forme et de délais non contestées, la SA FINAREF a relevé appel de cette décision par déclaration du 30 mars 2009.

Elle demande à la Cour de dire que la demande de forclusion formulée par M. X. constitue une demande nouvelle et de la déclarer irrecevable, de réformer la décision déférée et de condamner l'intimé à lui payer les sommes de :

* 6.057,16 euros à titre principal majoré des intérêts au taux contractuel depuis le 5 août 2008,

* 500 euros à titre de dommages et intérêts,

* 600 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

* * *

M. X. sollicite la confirmation de la décision des premiers juges et la condamnation de l'appelante à lui payer 1.500 euros de dommages et intérêts et 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Vu les conclusions de l'appelante déposées le 18 novembre 2009 ;

Vu les conclusions de l'intimé déposées le 29 septembre 2009 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 25 novembre 2009.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il est constant que le 17 décembre 2002, la SA FINAREF a consenti à M. X. une ouverture de crédit, dénommée « Compte Mistral », dont le montant utilisable était de 3.000 euros, ne pouvant dépasser le maximum autorisé de 10.000 euros.

Par acte du 14 août 2008, la SA FINAREF a assigné M. X. en paiement de 6.057,16 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 5 août 2008, 500 euros de dommages et intérêts et 600 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Le premier juge a relevé d'office le caractère abusif de la clause autorisant les parties à augmenter le découvert initial sans obligation pour le préteur de délivrer une nouvelle offre préalable. Il a considéré que le point de départ du délai de forclusion prévu à l’article L.311-37 du Code de la Consommation était la date à laquelle le découvert initial de 3.000 euro avait été dépassé en déduisant dès lors que la SA FINAREF devait être déboutée de sa demande.

 

- Sur l'office du juge :

L'appelante, s'appuyant sur les décisions rendues par la Cour de Cassation, fait valoir qu'en application de l’article 12 du Code de Procédure Civile, le juge n'est pas tenu de relever d'office un moyen de droit, et de statuer au regard d'un fondement juridique non invoqué par les parties, alors même que le défendeur était défaillant en première instance.

Il résulte cependant, d'une lecture attentive des arrêts invoqués par la SA FINAREF que l'office du juge ne lui impose pas de changer la dénomination ou le fondement juridique des demandes des parties, et qu'il appartient à celui qui invoque la forclusion d'apporter la preuve des faits allégués, ce qui ne signifie nullement qu'il lui soit fait interdiction de relever une fin de non recevoir d'office.

Toutefois, si l’article 16 du Code de Procédure Civile autorise le juge à fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevé d'office, il doit avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations.

Il ne résulte pas de la procédure que le premier juge ait soumis aux débats des parties, la forclusion tirée de l’article L. 311-37 du Code de la Consommation. Il convient donc d'annuler le jugement déféré et d'évoquer le fond du litige, en application de l’article 562 du Code de Procédure Civile.

 

- Sur la forclusion :

Devant la Cour, M. X. soulève la forclusion sus évoquée. Il sera observé, à titre liminaire que cette demande ne peut être déclaré irrecevable au motif qu'elle aurait été présentée pour la première fois en cause d'appel. Certes, l'intimé faisait défaut en première instance et n'a présenté aucune demande, cependant c'est à tort que la SA FINAREF qualifie de demande nouvelle ce qui doit en réalité être analysé comme un moyen nouveau et doit donc être examiné étant posé que du fait de l'effet dévolutif de l'appel, la Cour doit statuer sur ce problème compte tenu de l'argumentation développée par l'appelant.

Au fond, l’article 132-1 alinéa 1 du Code de la Consommation dispose que : « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».

En application de ce principe, doit être réputée non écrite comme abusive, la clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit, car elle exonère le prêteur du respect des exigences légales protectrices de l'emprunteur à l'occasion de l'augmentation du découvert utile et le prive de sa faculté de rétractation.

Il s'ensuit que le point de départ du délai de forclusion de l’article L.311-37 du Code de la Consommation est le jour du dépassement non régularisé du montant initial du découvert. Au cas présent, le montant du Découvert Utile a été dépassé le 25 mai 2005, l'action en paiement intentée le 14 août 2008 par la SA FINAREF est donc forclose.

 

- Sur les demandes de dommages et intérêts :

La demande l'appelante n'est étayée par aucun élément concernant l'existence d'une faute commise par M. X. lui ayant causé un préjudice, elle en sera donc déboutée.

L'intimé sollicite la condamnation de la SA FINAREF pour appel abusif. Il suffira de rappeler que l'exercice d'une action en justice et de voies de recours sont des droits qui ne dégénèrent en abus que s'ils constituent des actes de malice ou de mauvaise foi ce qui n'est nullement démontré dans la présente instance.

Il sera également rappelé que l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute.

 

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Les dépens seront à la charge de la SA FINAREF, partie succombante.

L'équité commande de faire application de l’article 700 du Code de Procédure Civile en condamnant l'appelante à verser à M. X. une indemnité de 1.500 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable,

Annule le jugement rendu le 4 novembre 2008 par le Tribunal d'Instance d'AGEN,

Et, statuant à nouveau,

Constate la forclusion de l'action en paiement de la SA FINAREF à l'encontre de M. X. ;

Dit que la demande de paiement de la SA FINAREF est irrecevable ;

Déboute les parties de leurs demandes de dommages et intérêts ;

Condamne la SA FINAREF aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP NARRAN, avoués, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile ;

Condamne la SA FINAREF à payer à M. X. somme de 1.500 euro en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Le présent arrêt a été signé par Bernard BOUTIE, Président de Chambre et par Isabelle BURY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.