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CA DOUAI (3e ch.), 17 janvier 2008

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (3e ch.), 17 janvier 2008
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 3e ch.
Demande : 06/06879
Date : 17/01/2008
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 1/12/2006
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2657

CA DOUAI (3e ch.), 17 janvier 2008 : RG n° 06/06879

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu qu'il est versé aux débats par la société Le Pain de la Bouche le contrat d'assurance qu'elle a souscrit le 1er juillet 2003 auprès de la MACIF ; qu'il est constant que la dite pièce ne porte pas la signature de son gérant, qui revendique toutefois son application, contestant seulement l'opposabilité des conditions générales ; Qu'il est également produit un exemplaire desdites conditions, édité en janvier 2002, soit avant la date d'établissement du contrat ;

Attendu qu'il résulte des conditions particulières que le vol figure au titre des garanties souscrites ; qu'au bas du document en cause, précédant la date et le nom du gérant, il est porté, en caractères gras se détachant du reste du texte, la mention suivante : « ces conditions particulières complètent et personnalisent les conditions générales qui vous ont été remises » ; Que cette mention suffit à rapporter la preuve de la remise des conditions générales et qu'elles ont été portées à la connaissance de l'assuré ; qu'il n'est d'ailleurs pas exigé de l'assureur qu'il procède à une lecture exhaustive de ces conditions ; Qu'il n'est pas non plus requis que ce document, dont la portée est générale puisque s'appliquant à tous les sociétaires, soit précisément revêtu de la signature de l'assuré ; Que la SARL Le Pain de la Bouche ne peut donc exciper de l'inopposabilité des conditions générales et des clauses exclusives de garantie ».

2/ « Attendu que l'article 9 des conditions générales dispose au titre de l'étendue de la garantie vol : « Ce qui est garanti : - le vol total du véhicule * la disparition du véhicule assuré et de ses accessoires par soustraction frauduleuse, menace ou violence à l'encontre de son propriétaire ou gardien, obtention du véhicule par paiement avec un chèque volé, effraction d'un garage privatif, clos et fermé à clef * si le véhicule est retrouvé, les détériorations du véhicule assuré et de ses accessoires s'il est prouvé qu'il y a eu forcement de la direction, détérioration des contacts électriques permettant la mise en route ou de tout système de protection antivol en état de fonctionnement, Ce qui est exclu : - le vol du véhicule alors que les clés sont à l'intérieur, sur ou sous le véhicule » ; Qu'au paragraphe « application de la garantie », il est précisé que le vol sans effraction n'est pas garanti ;

Attendu que la SARL Le Pain de la Bouche fait valoir que constitue une clause abusive, la clause imposant la preuve d'une effraction par forcement de la direction ou détérioration des contacts électriques, preuve impossible à rapporter, selon elle, en l'état de l'évolution de la fraude informatique ;

Attendu que la recommandation de la Commission des clauses abusives n° 89-01 du 19 mai 1989, concernant les clauses relatives aux contrats d'assurance des véhicules automobiles relève que les conditions générales précisent souvent qu'il appartient à l'assuré d'établir la preuve de la réalité du vol ou de la tentative de vol, garantis en outre si l'assuré peut apporter la preuve matérielle d'une effraction ; qu'elle précise que l'effraction ne faisant l'objet d'aucune définition contractuelle et étant strictement interprétée par la jurisprudence, l'assuré se trouve privé de garantie, en raison de l'absence d'effraction lorsque son véhicule est volé sous la menace d'une arme, grâce à la soustraction des clefs ou par suite de l'effraction du portail du garage dans lequel il est remisé, les clés se trouvant à l'intérieur ; que ladite recommandation prévoit que la clause, qui a pour objet ou effet de créer un déséquilibre significatif entre l'assureur et l'assuré, doit être écartée ;

Qu'en l'espèce, la garantie est expressément maintenue dans les deux cas susvisés ; qu'elle est en revanche exclue au cas où le véhicule a été dérobé, alors que les clés se trouvaient à l'intérieur, sur ou sous le véhicule et en l'absence de forcement de la direction ou de détérioration des contacts électriques, le véhicule se trouvant par hypothèse hors d'un garage privatif ».

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 17 JANVIER 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° RG : 06/06879. Jugement (N° 05/03847) rendu le 19 septembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE.

 

APPELANTE :

SARL LE PAIN DE LA BOUCHE

Ayant son siège social [adresse], représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour, assistée de Maître EHOKE, avocat au barreau d'ARRAS

 

INTIMÉE :

SOCIÉTÉ LA MACIF

Ayant son siège social [adresse], représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour, assistée de Maître VANCEUNEBROCKE, substituant Maître Bertrand MEIGNIÉ, avocat au barreau de DOUAI

 

DÉBATS à l'audience publique du 22 novembre 2007, tenue par Madame ALVARADE magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC).

[minute Jurica page 2] Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame DESFACHELLE, adjointe administrative, assermentée, faisant fonction

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame MERFELD, Présidente de chambre, Monsieur KLAAS, Conseiller, Madame ALVARADE, Conseillère

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 janvier 2008 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Présidente et Madame DESFACHELLE, adjointe administrative, assermentée, faisant fonction de greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 8 novembre 2007

Sur le rapport de Madame ALVARADE, Conseillère.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 27 juillet 2005, la SARL Le Pain de la Bouche a fait délivrer assignation à la compagnie d'assurances LA MACIF devant le Tribunal de Grande Instance de BETHUNE, exposant que le 1er juillet 2003, elle a pris en location une camionnette Peugeot immatriculée XX, avec option d'achat, auprès de la société CREDIPAR, que le véhicule, assuré le même jour auprès de la MACIF, a été volé le 3 octobre 2004, que le lendemain, elle a déposé plainte et effectué une déclaration de sinistre auprès de son assureur, qui a refusé de l'indemniser au motif que la garantie était exclue en application de l'article 9-1 des conditions générales, aucune trace d'effraction n'ayant été constatée.

Par jugement du 19 septembre 2006, ce Tribunal l'a déboutée de ses demandes, a rejeté les demandes reconventionnelles et l'a condamnée aux dépens.

La SARL Le Pain de la Bouche a relevé appel du jugement le 1er décembre 2006.

Suivant conclusions signifiées le 22 août 2007, elle demande à la Cour d'infirmer le jugement et de condamner la MACIF à lui payer les sommes de 11.669,73 €, correspondant à la valeur du véhicule volé, 16.717,05 € au titre des loyers payés, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, 3.000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et la condamner aux dépens de première instance et d'appel.

La SARL Le Pain de la Bouche a soutenu que la MACIF ne pouvait se prévaloir des clauses des conditions générales de la police d'assurance dont elle ne rapporte pas la preuve de la remise, que la pièce versée aux débats intitulée « conditions particulières automobiles utilitaire léger » ne contenait aucune définition du vol, qui devait dès lors se définir comme la soustraction frauduleuse de la chose d'autrui.

Les conditions générales produites, la SARL Le Pain de la Bouche maintient que la MACIF ne rapporte pas pour autant la preuve qu'elles aient été portées à sa connaissance. Elle fait en outre observer qu'elles ont été éditées en septembre 2004, alors que le contrat est daté de juillet 2003, que s'il s'agit de nouvelles conditions générales, elles ne lui ont pas été notifiées.

[minute Jurica page 3] Subsidiairement, elle fait valoir que les conditions édictées à l'article 9-1 constituent une clause abusive, l'indemnisation de l'assuré étant subordonnée à la preuve par ce dernier d'une effraction, preuve, de surcroît, impossible à rapporter pour les véhicules équipés d'un système d'antivol électronique.

Suivant conclusions signifiées le 18 octobre 2007, la MACIF demande à la Cour de confirmer le jugement et de condamner la SARL Le Pain de la Bouche au paiement d'une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux dépens d'instance et d'appel.

Elle fait observer que la SARL Le Pain de la Bouche a bénéficié d'un versement de 3.000 € accordé par le fonds de solidarité de la MACIF, intervenant auprès des sociétaires en difficulté financière lorsque l'événement n'est pas garanti, que le sociétaire avait en outre la possibilité de recourir à un médiateur, ce qu'il n'a pas fait.

Elle fait valoir que l'appelante ne peut arguer de l'inopposabilité des conditions générales pour avoir reconnu qu'elles lui avaient été remises et verse aux débats celles éditées en janvier 2002, donc applicables au jour du sinistre.

Elle se prévaut des termes de l'article 1134 du Code Civil, faisant de la convention la loi des parties et indique qu'en application de la police d'assurance, la garantie est exclue en cas de vol, lorsque les clés étaient dans, sur ou sous le véhicule, qu'elle est également exclue en l'absence d'effraction, dont il est toujours possible d'en rapporter la preuve.

Elle ajoute que sont considérées comme abusives, les clauses excluant la garantie lorsque les clés sont à l'intérieur du véhicule se trouvant dans un garage privé fermé ou lorsque des violences sont exercées à l'encontre du conducteur.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur l'opposabilité des conditions générales :

Attendu qu'il est versé aux débats par la société Le Pain de la Bouche le contrat d'assurance qu'elle a souscrit le 1er juillet 2003 auprès de la MACIF ; qu'il est constant que la dite pièce ne porte pas la signature de son gérant, qui revendique toutefois son application, contestant seulement l'opposabilité des conditions générales ;

Qu'il est également produit un exemplaire desdites conditions, édité en janvier 2002, soit avant la date d'établissement du contrat ;

Attendu qu'il résulte des conditions particulières que le vol figure au titre des garanties souscrites ; qu'au bas du document en cause, précédant la date et le nom du gérant, il est porté, en caractères gras se détachant du reste du texte, la mention suivante : « ces conditions particulières complètent et personnalisent les conditions générales qui vous ont été remises » ;

Que cette mention suffit à rapporter la preuve de la remise des conditions générales et qu'elles ont été portées à la connaissance de l'assuré ; qu'il n'est d'ailleurs pas exigé de l'assureur qu'il procède à une lecture exhaustive de ces conditions ;

Qu'il n'est pas non plus requis que ce document, dont la portée est générale puisque s'appliquant à tous les sociétaires, soit précisément revêtu de la signature de l'assuré ;

Que la SARL Le Pain de la Bouche ne peut donc exciper de l'inopposabilité des conditions générales et des clauses exclusives de garantie ;

[minute Jurica page 4]

Sur la garantie :

Attendu qu'il est constant que le véhicule assuré a fait l'objet d'un vol le 3 octobre 2004, qu'il a été retrouvé le 4 octobre 2004 entièrement brûlé, puis restitué au crédit-preneur, la SARL Le Pain de la Bouche ;

Attendu que l'article 9 des conditions générales dispose au titre de l'étendue de la garantie vol :

« Ce qui est garanti :

- le vol total du véhicule

* la disparition du véhicule assuré et de ses accessoires par soustraction frauduleuse, menace ou violence à l'encontre de son propriétaire ou gardien, obtention du véhicule par paiement avec un chèque volé, effraction d'un garage privatif, clos et fermé à clef

* si le véhicule est retrouvé, les détériorations du véhicule assuré et de ses accessoires s'il est prouvé qu'il y a eu forcement de la direction, détérioration des contacts électriques permettant la mise en route ou de tout système de protection antivol en état de fonctionnement,

Ce qui est exclu :

- le vol du véhicule alors que les clés sont à l'intérieur, sur ou sous le véhicule » ;

Qu'au paragraphe « application de la garantie », il est précisé que le vol sans effraction n'est pas garanti ;

Attendu que la SARL Le Pain de la Bouche fait valoir que constitue une clause abusive, la clause imposant la preuve d'une effraction par forcement de la direction ou détérioration des contacts électriques, preuve impossible à rapporter, selon elle, en l'état de l'évolution de la fraude informatique ;

Attendu que la recommandation de la Commission des clauses abusives n° 89-01 du 19 mai 1989, concernant les clauses relatives aux contrats d'assurance des véhicules automobiles relève que les conditions générales précisent souvent qu'il appartient à l'assuré d'établir la preuve de la réalité du vol ou de la tentative de vol, garantis en outre si l'assuré peut apporter la preuve matérielle d'une effraction ; qu'elle précise que l'effraction ne faisant l'objet d'aucune définition contractuelle et étant strictement interprétée par la jurisprudence, l'assuré se trouve privé de garantie, en raison de l'absence d'effraction lorsque son véhicule est volé sous la menace d'une arme, grâce à la soustraction des clefs ou par suite de l'effraction du portail du garage dans lequel il est remisé, les clés se trouvant à l'intérieur ; que ladite recommandation prévoit que la clause, qui a pour objet ou effet de créer un déséquilibre significatif entre l'assureur et l'assuré, doit être écartée ;

Qu'en l'espèce, la garantie est expressément maintenue dans les deux cas susvisés ; qu'elle est en revanche exclue au cas où le véhicule a été dérobé, alors que les clés se trouvaient à l'intérieur, sur ou sous le véhicule et en l'absence de forcement de la direction ou de détérioration des contacts électriques, le véhicule se trouvant par hypothèse hors d'un garage privatif ;

Attendu que les circonstances du vol sont discutées ; que le gérant de la SARL Le Pain de la Bouche a précisé dans la déclaration de sinistre effectuée le 4 octobre 2004 que le véhicule était verrouillé au moment des faits, qu'il disposait de deux clés et se trouvait en possession de l'une d'elles ; qu'ayant constaté la présence de débris de verre à terre à l'emplacement du véhicule, il avait émis l'hypothèse ; que le double de la clé était resté dans la boîte à gants, ce qu'il avait confirmé par écrit dans sa [minute Jurica page 5] déclaration au fonds de solidarité ; que par suite, il a déclaré avoir retrouvé le double de la clé ;

Qu'il n'est dès lors pas contesté que la société était en possession de deux clés, l'original ayant été remis à l'expert mandaté par la MACIF ;

Qu'au regard de ces éléments, il ne peut être affirmé que le ou les auteurs du vol ont subtilisé le véhicule au moyen d'une clé restée à l'intérieur ; que la MACIF ne peut donc se prévaloir de cette cause d'exclusion ;

Attendu toutefois qu'il résulte du rapport d'expertise établi le 24 novembre 2004, que le véhicule était équipé d'origine d'un antidémarrage, qu'aucune effraction apparente sur la colonne de direction n'a été constatée ;

Que dans un courrier du 25 avril 2007, l'expert a indiqué qu'il était impossible de dérober le véhicule par manipulation informatique ; qu'il a en effet précisé que « les télécommandes radiofréquences, très complexes, comportent un code tournant changeant à chaque cycle et que même s'il était possible de capter l'un deux, il est impossible de prévoir, vu le nombre de combinaisons, le code suivant, que les systèmes transpondeurs à code fixe ont une très courte portée, ce qui rend la capture d'une émission irréalisable » ;

Qu'il a, en outre, indiqué n'avoir constaté aucun shuntage du faisceau antivol et aucune trace d'effraction sur la colonne de direction, ayant par ailleurs relevé que son blocage mécanique indépendant des systèmes électroniques, n'avait pas été détérioré ; qu'il a observé qu'eu égard à ces constatations, la conduite du véhicule sans les clefs s'avérait impossible ;

Attendu que la SARL Le Pain de la Bouche ne rapporte pas la preuve contraire, se contentant d'affirmer que l'effraction ne peut être démontrée, alors même qu'il lui était loisible de faire procéder à une contre-expertise ;

Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la garantie était exclue et débouté la SARL Le Pain de la Bouche de ses demandes ;

* * *

Attendu que l'indemnité procédurale due par la SARL Le Pain de la Bouche à la MACIF au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile sera fixée à 700 € ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne de la SARL Le Pain de la Bouche aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP DELEFORGE-FRANCHI, avoués,

Condamne de la SARL Le Pain de la Bouche à payer à la MACIF la somme de 700 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La Greffière F.F.,                  La Présidente,

M. DESFACHELLE             E. MERFELD