CA PARIS (5e ch. sect. A), 28 mai 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 2686
CA PARIS (5e ch. sect. A), 28 mai 2008 : RG n° 06/05430 ; arrêt n° 116
Extraits : 1/ « Considérant que la société Parfip sollicite le rejet comme nouveaux des moyens de l'appelante par lesquels elle revendique le bénéfice des dispositions protectrices des consommateurs en matière de clause abusive ; qu'à titre subsidiaire, la société Parfip soutient que Mme X., qui a contracté pour les besoins de son commerce, ne peut bénéficier des dispositions applicables à la protection des consommateurs ; Considérant que la fin de non recevoir tirée de la nouveauté de la demande ne peut être accueillie dès lors que les arguments litigieux ne sont pas des prétentions mais des moyens présentés à l'appui des demandes inchangées de l'appelante ».
2/ « Considérant qu'ont ainsi été conclus des contrats distincts en la forme et faisant l'objet de rémunération spécifique et autonome, que les termes sus-énoncés du contrat de location excluent que le locataire puisse se prévaloir à rencontre de son bailleur, des manquements du prestataire dans l'exécution de ses obligations, qu'il ne peut donc être considéré que les contrats litigieux puissent former un ensemble indivisible sauf à dénaturer la portée des engagements pris et à méconnaître directement la commune intention des parties ».
3/ « Considérant que l'art 10.1 précité du contrat dispose qu'en cas de résiliation pour non paiement, le locataire s'oblige, outre à restituer les biens loués, à verser au bailleur en sus de toute autre somme due, une indemnité de résiliation égale au montant des loyers TTC non encore échus majorés de 10 % ; Considérant que pour s'opposer à cette disposition Mme X. invoque l'application des dispositions du Code de la consommation relatives aux clauses abusives ;
Mais considérant que l'appelante, qui a agi, comme elle le reconnaît dans ses écritures, dans le cadre de l'exercice de son commerce, ne peut prétendre bénéficier des dispositions particulières protectrices des consommateurs ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
CINQUIÈME CHAMBRE SECTION A
ARRÊT DU 28 MAI 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 06/05430. Arrêt n° 116. Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 janvier 2006 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2005F00414.
APPELANTE :
Mademoiselle X.
[adresse], représentée par la SCP BLIN, avoués à la Cour, assistée de Maître Olivier FARGETON, avocat au barreau de PARIS, toque : P178
INTIMÉE :
Société PARFIP FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux
[adresse], représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour, assistée de Maître Benoît VARENNE, avocat au barreau de PARIS, toque C 301, substituant Maître SAGNES JIMENEZ, avocat au barreau de BOURG EN BRESSE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 19 mars 2008, en audience publique, après qu'il en ait été fait rapport par Monsieur BYK, Conseiller, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile, devant la Cour composée de : Madame CABAT, Présidente, Monsieur ROCHE, Conseiller, Monsieur BYK, Conseiller, qui en ont délibéré
Greffière lors des débats : Madame KLEIN [minute page 2]
ARRÊT : contradictoire, prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Madame CABAT, Présidente de Chambre, qui a remis la minute à Madame KLEIN, greffière, pour signature.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Reprochant à la société Parfip France le caractère non satisfaisant de prestations de télé-surveillance, Mme X. a cessé de payer les loyers dus en application du contrat du 22 décembre 2000, entraînant sa condamnation, par ordonnance du président du tribunal d'instance de Bobigny du 15 juin 2004, à verser à la société Parfip 6.392,90 € avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2004. Sur opposition à cette ordonnance, le tribunal de commerce de Bobigny a, par jugement du 5 janvier 2006, condamné Mme X. au paiement de ces sommes, outre la restitution du matériel et 400 euros au titre de l'art.700 du Code de procédure civile ;
Vu la déclaration d'appel de Mme X. en date du 22 mars 2006 et ses dernières écritures du 11 mars 2008 ;
Vu les dernières écritures de la société Parfip France du 12 mars 2008 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 12 mars 2008 ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
- Sur la fin de non recevoir tirée de la nouveauté des moyens avancés par Mme X. :
Considérant que la société Parfip sollicite le rejet comme nouveaux des moyens de l'appelante par lesquels elle revendique le bénéfice des dispositions protectrices des consommateurs en matière de clause abusive ; qu'à titre subsidiaire, la société Parfip soutient que Mme X., qui a contracté pour les besoins de son commerce, ne peut bénéficier des dispositions applicables à la protection des consommateurs ;
Considérant que la fin de non recevoir tirée de la nouveauté de la demande ne peut être accueillie dès lors que les arguments litigieux ne sont pas des prétentions mais des moyens présentés à l'appui des demandes inchangées de l'appelante ;
- Sur l’inopposabilité des contrats d'abonnement de télésurveillance avec option de prestation sécuritaire :
Considérant que Mme X. estime que ces contrats signés le 3 décembre 2001 et en janvier 2002 sont opposables à l'intimée dès lors qu'il résulte des recommandations de la Commission des clauses abusives que les sociétés donnant à bail le matériel ne peuvent exciper du caractère indépendant entre le contrat de location et le contrat de télésurveillance ;
Considérant que la société Parfip réplique que du fait que ces contrats ont été signés entre la société X. pneus et les sociétés art 1 et 2, ils ne concernent pas les parties au présent litige ;
[minute page 3] Considérant qu'il résulte des pièces aux débats que seuls ont été signés par Mme X. en son nom personnel, le contrat de location du 22 décembre 2000 avec l'intimée et le contrat d'abonnement et de télésurveillance avec option de prestation sécuritaire avec la société ERT, qu'il convient de dire inopposables à Parfip les contrats conclus par la société X. Pneus respectivement avec les sociétés Art 1 et Art 2 le 3 décembre 2001 et en janvier 2002 ;
Considérant que le jugement querellé sera donc confirmé de ce chef ;
- Au fond :
Considérant que l'appelante estime que la société Parfip a commis une faute dans l'exécution du contrat qui justifie le prononcé de la résolution de celui-ci, que la faute consiste en l'espèce dans un vice caché du matériel, que la société Parfip ne saurait se retrancher derrière l'existence d'un contrat de prestation de télésurveillance pour éluder sa responsabilité dans l'inexécution de ses prestations, qu'il résulte, au contraire de cette responsabilité, la déchéance du paiement de la clause pénale ;
Considérant que la société Parfip, qui soutient le principe d'indépendance des contrats de location et de prestation, ajoute que l'appelante n'a ni démontré l'existence d'un dysfonctionnement du contrat de prestation ni résilié le contrat de location ;
Considérant qu'il résulte des pièces aux débats que c'est la SARL X. Pneus qui a adressé à la société A 1 la lettre de résiliation ; que les parties concernées par ce courrier étant distinctes de celles soumises au présent contrat, Mme X. ne peut se fonder sur cette pièce, et les autres courriers subséquents adressés par X. Pneus à ERT, pour justifier sa résiliation ;
Considérant que l'art. 10.1 du contrat signé entre Mme X. et la société Parfip dispose que le contrat se trouve résilié de plein droit, sans formalité, en cas de non-paiement même partiel d'un seul terme de loyer ;
Considérant que pour contester l'application à l'espèce de cette disposition, Mme X. avance le caractère de lien nécessaire qui unirait le contrat de prestation de services, allégué comme non exécuté, avec le contrat de location ;
Considérant que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ;
Considérant qu'il résulte de l'art. 2c du contrat de location que « le bailleur n'assume aucune responsabilité quant à l'exécution des prestations (de services) et ne garantit pas les obligations des prestataires pour les prestations concernées. L'encaissement des prestations par le bailleur bien que réalisé en même temps que la location n 'implique aucune indivisibilité entre les conventions qui restent distinctes » ;
Considérant que l'alinéa suivant précise que « le locataire s'interdit par conséquent de refuser le paiement des loyers suite à un contentieux entre le locataire et le/les prestataires de service lié à l'exécution des-dites prestations et renonce à tout recours contre le bailleur en cas de défaillance quelconque du fournisseur ou prestataires de services. Le locataire approuve ces conditions ci-dessus » ;
Considérant qu'il était conclu in fine du-dit article que « le locataire a été rendu attentif à l'indépendance juridique existant entre le contrat de location et le contrat du distributeur » ;
Considérant qu'ont ainsi été conclus des contrats distincts en la forme et faisant l'objet de rémunération spécifique et autonome, que les termes sus-énoncés du contrat de location excluent que le locataire puisse se prévaloir à rencontre de son bailleur, des manquements [minute page 4] du prestataire dans l'exécution de ses obligations, qu'il ne peut donc être considéré que les contrats litigieux puissent former un ensemble indivisible sauf à dénaturer la portée des engagements pris et à méconnaître directement la commune intention des parties ;
Considérant qu'à titre subsidiaire, Mme X. sollicite que la cour analyse la clause de durée irrévocable de 60 mois en clause pénale et en modère l'application ;
Considérant que la société Parfip fait valoir qu'elle a respecté les clauses du contrat et que la condamnation de l'appelante doit être confirmée ;
Considérant que l'art 10.1 précité du contrat dispose qu'en cas de résiliation pour non paiement, le locataire s'oblige, outre à restituer les biens loués, à verser au bailleur en sus de toute autre somme due, une indemnité de résiliation égale au montant des loyers TTC non encore échus majorés de 10 % ;
Considérant que pour s'opposer à cette disposition Mme X. invoque l'application des dispositions du Code de la consommation relatives aux clauses abusives ;
Mais considérant que l'appelante, qui a agi, comme elle le reconnaît dans ses écritures, dans le cadre de l'exercice de son commerce, ne peut prétendre bénéficier des dispositions particulières protectrices des consommateurs ;
Considérant que s'agissant de qualifier les dispositions de l'art. 10.1 précité en clause pénale pour en modérer le montant, il y a lieu de relever que cette clause prévoyant une indemnité forfaitaire et définitive en cas de résiliation anticipée d'un contrat de location doit effectivement s'analyser en une clause pénale ayant pour objet, d'une part, de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation et, d'autre part, de sanctionner la non exécution de l'obligation de paiement ;
Considérant qu'eu égard au montant manifestement excessif de cette clause (4.211,82 €), il y a lieu d'en modérer le montant en le réduisant à 2.211,82 €, le solde dû s'élevant en conséquence à 4.392,90 € ;
Considérant en conséquence que Mme X. devra être condamnée à payer à la société Parfip la somme de 4.392,90 €, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2004, le jugement querellé devant être infirmé de ce chef ;
Considérant que l'équité commande en outre de condamner Mme X. à verser 1.000 € à la société Parfif au titre des frais irrépétibles d'appel, ceux-ci s'ajoutant au montant fixé de ce chef par les premiers juges ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Déboute la société Parfip France de sa fin de non recevoir ;
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné Madame X. à régler à la société Parfip France la somme de 6.392,90 € ;
Statuant de nouveau de ce seul chef :
Substitue au montant de la condamnation au paiement de la somme de 6.392,90 €, celui de 4.392,90 € ;
[minute page 5] Condamne Mme X. à payer 1.000 € à la société Parfip France au titre des frais
irrépétibles d'appel ;
La condamne aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP FISSELIER CHILOUX BOULAY, titulaire d'un office d'avoué.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
- 5829 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’ordre public - Conséquences : reconnaissance du caractère professionnel du contrat
- 5730 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Voies de recours - Appel
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- 5879 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : cadre de l’activité
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- 7287 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit antérieur aux arrêts de Chambre mixte