CA REIMS (1re ch. civ. sect. inst.), 23 avril 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 2701
CA REIMS (1re ch. civ. sect. inst.), 23 avril 2008 : RG n° 07/02134
Publication : Jurica
Extrait : « Aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet de créer, au détriment de ces derniers, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Ces clauses sont réputées non-écrites. L'article L. 311-30 du même Code prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.
En l'espèce, chacun des contrats signés par Monsieur X. (page 7 pour le premier et page 6 pour le second) comporte une clause selon laquelle en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.
Outre le fait que cette clause est formellement conforme au modèle-type n° 1 figurant à l'annexe 4 de l'article R. 311-6, en application de l'article L. 311-13 du Code de la Consommation, aucun des textes susvisés ne prévoit que la clause résolutoire de déchéance du terme ne peut jouer qu'à la condition que plusieurs échéances soient restées impayées. Ainsi, c'est à tort que le premier juge a cru pouvoir déclarer cette clause abusive et illicite en ce qu'elle stipule que dès le premier incident de paiement, le prêteur peut se prévaloir de la déchéance du terme « alors que les textes en vigueur ne le permett(rai)ent qu'à compter de plusieurs échéances impayées », et qu'elle aggraverait indûment les obligations de l'emprunteur, alors que l'hypothèse du défaut de paiement d'une mensualité à son échéance représente pour celui-ci un manquement à son obligation contractuelle essentielle. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE REIMS
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION INSTANCE
ARRÊT DU 23 AVRIL 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G n° 07/02134.
APPELANTE :
CRCAM DU NORD-EST
agissant poursuites et diligences du Président et des Membres du Conseil d'Administration domiciliés de droit au siège social [adresse], COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT - JACQUEMET - CAULIER-RICHARD, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Sylvie RIOU-JACQUES, avocat au barreau de CHARLEVILLE-MEZIERES.
Appelante d'une décision rendue par le Tribunal d'Instance de CHARLEVILLE-MÉZIÈRES le 25 juin 2007.
INTIMÉ :
Monsieur X.
Chez Madame X. [adresse], N'AYANT PAS CONSTITUÉ AVOUÉ, bien que régulièrement assigné.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame Christine SOUCIET, CONSEILLER faisant fonction de Président, Madame Anne HUSSENET, CONSEILLER, Madame Odile LEGRAND, CONSEILLER.
GREFFIER D'AUDIENCE : Madame Frédérique BIF, Greffier lors des débats et du prononcé.
DÉBATS : [minute Jurica page 2] A l'audience publique du 19 mars 2008, où l'affaire a été mise en délibéré à l'audience du 23 avril 2008.
ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Christine SOUCIET, Conseiller, et par Madame Frédérique BIF, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
La CAISSE RÉGIONALE DU CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DU NORD-EST, ci-après désignée CRCA, a consenti à Monsieur X. deux prêts en date du 5 novembre 2005, l'un pour un montant de 10.000 euros sur 48 mois au taux effectif global de 3,4536 % et l'autre pour un montant de 2.000 euros sur 24 mois au taux effectif global de 6,1317 %.
Après défaillances dans le remboursement de ces prêts, la CRCA a fait assigner Monsieur X. devant le Tribunal d'Instance de CHARLEVILLE-MÉZIÈRES afin d'obtenir sa condamnation à remboursement.
Par jugement du 25 juin 2007, ce tribunal a :
- condamné Monsieur X. à payer à la CRCA la somme de 8.705,43 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2006 au titre du premier prêt de 10.000 euros,
- condamné Monsieur X. à payer à la CRCA la somme de 1.716,08 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2006 au titre du second prêt de 2.000 euros,
- ordonné l'exécution provisoire,
- débouté la CRCA de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné Monsieur X. aux dépens.
La CRCA a interjeté appel de ce jugement le 14 août 2007.
Par conclusions signifiées le 18 janvier 2008 à la personne de Madame X., mère de Monsieur X., l'appelante demande à la Cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
- infirmer le jugement dans la mesure utile,
- condamner Monsieur X. à lui payer 9.872,35 euros outre les intérêts au taux de 3,4 % à compter du 22 décembre 2006 au titre du premier prêt, ainsi que 2.000,68 euros outre les intérêts au taux contractuel de 5,6 % à partir du 22 décembre 2006 en vertu du second prêt,
- débouter Monsieur X. de toutes demandes plus amples ou contraires,
- le condamner à lui payer 1.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- le condamner aux dépens avec droit de recouvrement direct pour ceux d'appel pour ceux d'appel.
Elle conclut à la légalité de la clause résolutoire dite de déchéance du terme ainsi qu'à la validité de la clause pénale.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 mars 2008.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la légalité de la clause résolutoire de déchéance du terme :
Aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels [minute Jurica page 3] ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet de créer, au détriment de ces derniers, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Ces clauses sont réputées non-écrites.
L'article L. 311-30 du même Code prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.
En l'espèce, chacun des contrats signés par Monsieur X. (page 7 pour le premier et page 6 pour le second) comporte une clause selon laquelle en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.
Outre le fait que cette clause est formellement conforme au modèle-type n° 1 figurant à l'annexe 4 de l'article R. 311-6, en application de l'article L. 311-13 du Code de la Consommation, aucun des textes susvisés ne prévoit que la clause résolutoire de déchéance du terme ne peut jouer qu'à la condition que plusieurs échéances soient restées impayées.
Ainsi, c'est à tort que le premier juge a cru pouvoir déclarer cette clause abusive et illicite en ce qu'elle stipule que dès le premier incident de paiement, le prêteur peut se prévaloir de la déchéance du terme « alors que les textes en vigueur ne le permett(rai)ent qu'à compter de plusieurs échéances impayées », et qu'elle aggraverait indûment les obligations de l'emprunteur, alors que l'hypothèse du défaut de paiement d'une mensualité à son échéance représente pour celui-ci un manquement à son obligation contractuelle essentielle.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce sens, aucune déchéance du droit aux intérêts n'étant encourue par la CRCA.
Sur la validité de la clause pénale :
De même, c'est par une inexacte appréciation des faits que le premier juge a réduit la clause pénale à 1 euro pour chacun des deux prêts.
En effet, l'indemnité légale de 8 % qui aboutit à une somme de 208,46 euros (sur 9.413,98 euros de capital restant dû) pour le premier prêt et 88,04 euros (sur 1.841,73 euros de capital restant dû) pour le second, alors que le taux d'intérêt conventionnel est respectivement de 3,4 et 5,6 %, ne revêt aucun caractère manifestement excessif, puisque ces taux ne sont pas particulièrement élevés au regard des montants empruntés et de la durée de remboursement.
Le jugement déféré sera donc également infirmé sur ce point et le montant des indemnités sollicitées au titre des clauses pénales sera réintégré dans la créance de la CRCA.
Sur les autres demandes :
Monsieur X., qui succombe, sera condamné aux dépens avec pour ceux d'appel application de l'article 699 du Code de Procédure Civile au bénéfice de la SCP DELVINCOURT - JACQUEMET - CAULIER-RICHARD.
L'équité commande par ailleurs de rejeter la demande de l'appelante au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant publiquement et par arrêt rendu par défaut,
Infirme le jugement rendu le 25 juin 2007 par le Tribunal d'Instance de CHARLEVILLE-MÉZIÈRES, mais uniquement sur le quantum des condamnations prononcées à l'égard de Monsieur X. au profit de la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DU NORD-EST au titre de deux prêts de 10.000 et 2.000 euros ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne Monsieur X. à payer à la CRCA les sommes de : [minute Jurica page 4]
- NEUF MILLE HUIT CENT SOIXANTE-DOUZE EUROS TRENTE-CINQ CENTIMES (9.872,35 euros), avec intérêts au taux conventionnel de 3,4 % à compter du 23 décembre 2006 au titre du premier prêt de 10.000 euros,
- DEUX MILLE EUROS SOIXANTE-HUIT CENTIMES (2.000,68 euros), avec intérêts au taux conventionnel de 5,6 % à compter du 23 décembre 2006 au titre du second prêt de 2.000 euros ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
Rejette la demande de la CRCA sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Condamne Monsieur X. aux dépens d'appel, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile au bénéfice de la S.C.P. DELVINCOURT - JACQUEMET - CAULIER-RICHARD, Avoués.
LE GREFFIER, LE CONSEILLER,
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