CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. C), 6 mai 2010
CERCLAB - DOCUMENT N° 2871
CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. C), 6 mai 2010 : RG n° 09/15743
Publication : Jurica
Extrait : « Pour faire échec aux prétentions financières de la Société GE, l'appelante soutient que les conditions générales du contrat, qu'elle n'a pas signées, ne lui sont pas opposables. Il s'avère cependant « les conditions générales de location » font partie intégrante de la convention signée par Madame X. et qu'une mention figurant en caractères lisibles sous les conditions particulières renvoie aux conditions générales en précisant que le locataire en a pris connaissance au verso. L'appelante a apposé sa signature et son cachet professionnel d'avocat juste au-dessous.
Par ailleurs, les dispositions du Code de la consommation n'ont pas vocation à recevoir application en l'espèce, la convention de location ayant été signée par un professionnel pour les besoins de son activité d'avocat.
Dès lors que l'appelante a pu prendre connaissance de ces conditions générales et qu'elle ne pouvait ignorer qu'elles faisaient partie du contrat, elle ne saurait prétendre qu'elles n'ont pas de valeur contractuelle et qu'elles lui sont inopposables. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
PREMIÈRE CHAMBRE C
ARRÊT DU 6 MAI 2010
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 09/15743. Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 29 juillet 2009 enregistrée au répertoire général sous le n° 09/01076.
APPELANTE :
Madame Y. épouse X.,
née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET-VIGNERON BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués à la Cour
INTIMÉE :
SCS GE CAPITAL EQUIPEMENT FINANCE,
dont le siège est [adresse], représentée par la SCP COHEN - GUEDJ, avoués à la Cour, plaidant par Maître François LIREUX, avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître Jean-Pierre OUDOT, avocat au barreau de VERSAILLES
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 29 mars 2010 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Nicole GIRONA, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de : Madame Marie Claire FALCONE, Président, Madame Anne FENOT, Conseiller, Madame Nicole GIRONA, Conseiller, qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Monsieur Serge LUCAS
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 6 mai 2010.
ARRÊT : Contradictoire. Prononcé par mise à disposition au greffe le 6 mai 2010. Signé par Madame Marie Claire FALCONE, Président et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Pour les besoins de son activité professionnelle, Maître X., avocat, a signé un contrat de location financière auprès de la Société GE CAPITAL EQUIPEMENT FINANCE ayant pour objet un photocopieur de marque CANON. Ainsi, à compter du 1er janvier 2007, elle s'est engagée à régler des loyers trimestriels de 1.789,15 euros TTC pour une durée de 63 mois.
A compter du 1er avril 2008, Madame X. née Y. n'a pas réglé l'échéance trimestrielle exigible et la Société GE CAPITAL EQUIPEMENT FINANCE a engagé à son encontre une procédure devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse, par exploit du 7 mai 2009, afin de voir constatée la résiliation du contrat à ses torts, d'obtenir la restitution du matériel, sous astreinte, ainsi que le paiement de différentes sommes.
Par ordonnance rendue le 29 juillet 2009, le juge des référés :
- a constaté la résiliation du contrat de location aux torts de Madame X.,
- a condamné cette dernière à restituer le photocopieur loué, sous astreinte,
- l'a condamnée à verser à titre provisionnel la somme totale de 6.936,13 euros, correspondant aux loyers impayés (3.578,30 euros), à une pénalité conventionnelle de 10 % sur ces derniers (357,83 euros) et à une indemnité de résiliation qu'il a réduit à 3.000 euros, le tout outre intérêts légaux,
- a rejeté les autres demandes, dont une demande d'expertise,
- et a mis les dépens de la procédure à la charge de Madame X.
Par déclaration en date du 25 août 2009, Madame X. a interjeté appel de cette décision.
Dans ses conclusions déposées le 22 décembre 2009, l'appelante sollicite la réformation de la décision entreprise. Elle soutient à titre principal qu'en considération de l'existence de contestations sérieuses, le juge des référés n'est pas compétent. En tant que de besoin et reconventionnellement, elle réclame une mesure d'expertise relativement à la valeur du photocopieur et du préjudice subi par son cocontractant. En tout état de cause, elle demande le règlement d'une indemnité de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Madame X. accuse la Société CANON de manœuvres dolosives viciant le contrat de location. Elle conteste le montant des indemnités réclamées du fait de la résiliation du contrat, n'ayant jamais signé les conditions générales de la convention, qui lui sont ainsi inopposables. Elle soutient que le contrat signé présente des clauses abusives et qu'en tout état de cause, l'indemnité de résiliation réclamée constitue une clause pénale réductible. Elle affirme que la Société CANON est seule responsable de la résiliation de la convention, à défaut d'exécution de ses obligations.
A titre reconventionnel, elle sollicite une expertise dont les conclusions lui seront utiles au fond.
Dans ses écritures en date du 8 février 2010, l'intimée sollicite la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a prononcé la résiliation du contrat aux torts de Madame X.. Elle forme appel incident sur le montant de l'astreinte fixée à défaut de restitution du photocopieur et sur celui mis à la charge de l'appelante à titre de provision demandant paiement d'une somme totale de 31.489,04 euros, outre 2.000 euros au titre de ses frais irrépétibles.
Elle rétorque à l'appelante :
- que les conditions générales de la location, qui sont au verso du contrat signé et dont elle indique avoir pris connaissance, lui sont opposables,
- qu'en sa qualité de professionnel, elle ne peut se prévaloir des dispositions du Code de la consommation,
- que le manquement à ses obligations de la société CANON ne lui est pas opposable, compte tenu des clauses du contrat,
- que le juge des référés n'a pas le pouvoir de modérer une clause pénale,
- et que la demande d'expertise ne se justifie qu'à l'encontre de la Société CANON
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
La Société GE CAPITAL EQUIPEMENT FINANCE fonde sa demande sur les dispositions de l'alinéa 2 de l’article 809 du Code de procédure civile qui donnent pouvoir au juge des référés d'accorder une provision au créancier dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Madame X. a souscrit auprès la Société GE un contrat de location longue durée portant sur un matériel qu'elle a choisi auprès de la Société CANON et dont la société financière a fait l'acquisition. Ce contrat de bail est entré en vigueur au jour de la signature du bon de livraison par Madame X. du photocopieur dans ses locaux professionnels.
Pour faire échec aux prétentions financières de la Société GE, l'appelante soutient que les conditions générales du contrat, qu'elle n'a pas signées, ne lui sont pas opposables. Il s'avère cependant « les conditions générales de location » font partie intégrante de la convention signée par Madame X. et qu'une mention figurant en caractères lisibles sous les conditions particulières renvoie aux conditions générales en précisant que le locataire en a pris connaissance au verso. L'appelante a apposé sa signature et son cachet professionnel d'avocat juste au-dessous.
Par ailleurs, les dispositions du Code de la consommation n'ont pas vocation à recevoir application en l'espèce, la convention de location ayant été signée par un professionnel pour les besoins de son activité d'avocat.
Dès lors que l'appelante a pu prendre connaissance de ces conditions générales et qu'elle ne pouvait ignorer qu'elles faisaient partie du contrat, elle ne saurait prétendre qu'elles n'ont pas de valeur contractuelle et qu'elles lui sont inopposables.
Madame X. oppose à la Société GE des agissements de la Société CANON, qui a fourni le matériel loué. Elle l'accuse de manœuvres dolosives viciant le contrat de location et de manquements à son obligation de livraison d'un appareil lui permettant d'adresser des fax. Non seulement elle ne fait état d'aucune mise en scène imputable au fournisseur l'ayant induit en erreur et ayant vicié son consentement, mais encore les clauses contractuelles (article 6-1-1 des conditions générales) lui interdisent d'exercer un recours contre le bailleur pour des défaillances du fournisseur ou des vices du matériel qui en affecteraient le fonctionnement ou le rendement, clause de limitation de la responsabilité du bailleur dont la validité est admise.
L'appelante n'a engagé aucune action à l'encontre de la Société CANON, n'a pas respecté les formalités prévues à l'article 2-2-2 des conditions générales en cas de non-conformité du matériel livré et n'établit pas que cette société aurait agi en qualité de mandataire de la Société GE.
A défaut de paiement du loyer échu le 1er avril 2008, la Société GE a adressé à Madame X. une mise en demeure, par lettre recommandée avec accusé de réception le 1er juillet 2008, d'avoir à lui payer la somme de 2.065 euros dans les 8 jours, délai au terme duquel la résiliation de la location interviendrait de plein droit.
Elle a constaté la résiliation du contrat, à l'expiration du délai imparti, et en application de l'article 12 des conditions générales, elle a réclamé à Madame X. la restitution du matériel et le paiement de différentes sommes.
L'appelante, qui ne justifie pas avoir restitué le photocopieur, conformément aux dispositions contractuelles, conteste le montant de l'indemnité de résiliation qui lui est réclamé à hauteur de la somme de 25.048.10 euros, correspondant à la totalité des loyers TTC restant à échoir, augmentée d'une pénalité contractuelle de 10 %.
La faculté de réduction de cette indemnité forfaitaire due en réparation du préjudice causé par la résiliation du contrat de location financière, qui constitue une clause pénale, appartient au juge du fond, en application de l’article 1152 du Code civil.
Toutefois, il entre dans les pouvoirs du juge des référés d'allouer une provision sur le montant de cette clause pénale, dans la mesure où la dette n'est pas sérieusement contestable.
Ainsi, en considération des pouvoirs susceptibles d'être exercés par le juge du fond, il convient de limiter l'indemnité provisionnelle allouée à l'intimée à la somme fixée par le premier juge, à savoir 3.000 euros, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une mesure d'expertise.
Il n'y a pas lieu de modifier le montant de l'astreinte fixée par le premier juge pour inciter Madame X. à restituer le photocopieur, objet du contrat de location.
Chaque partie succombant partiellement, les dépens d'appel seront partagés par moitié entre elles. Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, en référé et en dernier ressort,
Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
Partage les dépens d'appel par moitié entre les parties et dit qu'ils seront recouvrés dans cette proportion conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile,
Le Greffier Le Président
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