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CA COLMAR (2e ch. civ. sect. B), 8 avril 2011

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (2e ch. civ. sect. B), 8 avril 2011
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 2e ch. civ. sect. B
Demande : 10/00737
Décision : 319/11
Date : 8/04/2011
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 28/01/2010
Décision antérieure : TGI MULHOUSE (1re ch. civ.), 5 janvier 2010
Numéro de la décision : 319
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2904

CA COLMAR (2e ch. civ. sect. B), 8 avril 2011 : RG n° 10/00737 ; arrêt n° 319/11

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu qu'aux termes du bulletin d'adhésion à l'assurance crédit en date du 11 mars 2000, l'appelant a souscrit aux garanties décès, invalidité permanente et absolue et incapacité totale de travail ; Attendu que l'article 6 du contrat prévoit notamment que cette dernière garantie prend fin au plus tard dès la mise à la retraite ou à la préretraite (quelle qu'en soit la cause) et au plus tard au 65ème anniversaire de l'assuré, sans entraîner de modification du montant des primes ;

Attendu qu'ainsi que l'a relevé le premier juge, ces dispositions ne s'analysent ni en une restriction, ni en une limitation ou en une exclusion de garantie, mais se bornent à énoncer qu'en l'absence de risque, et donc d'aléa, à savoir la perte de revenu liée à la fin ou à la suspension du contrat de travail, qui n'est plus encourue dès lors que l'emprunteur est parti à la retraite, la garantie cesse faute de cause ;

Attendu que cette clause n'apparaît nullement abusive, au sens de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, ni de la recommandation n° 90-01 de la Commission des clauses abusives relative à l'assurance crédit du 10 novembre 1989, dès lors qu'elle est énoncée des plus clairement dans les « principales dispositions du contrat d'assurance collective décès-invalidité » (annexe n° 2 de Maître Tassel) en caractère d'imprimerie gras ou en italique ; dès lors, ensuite, que l'assuré ne pouvait les ignorer puisqu'il produit lui-même l'extrait l'énonçant ; dès lors, enfin, qu'il n'est ni allégué, ni même justifié que cette simple application de la théorie de la cause dans le droit des obligations crée, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au contrat ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION B

ARRÊT DU 8 AVRIL 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 2 B 10/00737. Arrêt n° 319/11. Décision déférée à la Cour : jugement du 5 janvier 2010 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de MULHOUSE

 

APPELANT et demandeur :

Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté par Maître TASSEL-BENCHABANE, avocat à COLMAR

 

INTIMÉES et défenderesses :

1 - La CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'ALSACE (ÉCUREUIL)

prise en la personne de son représentant légal, ayant son siège social [adresse], représentée par la SCP CAHN &ASSOCIES, avocats à COLMAR

2 - La SA CNP ASSURANCES

prise en la personne de son représentant légal, ayant son siège social [adresse], représentée par Maîtres ACKERMANN & HARNIST, avocats à COLMAR

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 février 2011, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Adrien LEIBER, Président, Madame Clarisse SCHIRER, Conseiller, Monsieur Olivier DAESCHLER, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier ad hoc, lors des débats : Madame Astrid DOLLE

ARRÊT : Contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile. - signé par Monsieur Adrien LEIBER, Président et Madame Astrid DOLLE, greffier ad hoc, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Ouï Monsieur Adrien LEIBER, Président de Chambre en son rapport,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suivant acte sous seing privé du 25 mars 2000, les époux X. ont souscrit un prêt auprès de la Caisse d'Epargne portant sur un montant de 700.000 F (106.714,31 euros), remboursable en 180 mensualités. En garantie de remboursement, ils ont souscrit un contrat d'assurance décès, invalidité absolue et définitive et incapacité de travail, auprès de la société CNP Assurances. En décembre 2003, M. X. a été placé en incapacité de travail en raison de problèmes cardiaques et le remboursement du prêt a été pris en charge par l'assureur à compter de mai 2004. Le 25 mai 2007, l'assureur a notifié à l'assuré la fin de la prise en charge à compter du 1er janvier 2007, du fait de la date de prise d'effet de sa retraite, en application de l'article 6 du contrat.

Sur saisine de M. X. en date du 18 juillet 2007, le tribunal de grande instance de Mulhouse, statuant contradictoirement le 5 janvier 2010, a déclaré la demande mal fondée et débouté le demandeur de ses demandes, à l'encontre de la banque et de l'assureur, en paiement de la somme de 87.165,54 euros de dommages et intérêts du fait du défaut de prise en charge du prêt, sur le fondement respectivement d'un manquement à l'obligation de conseil et d'information et de l'exécution du contrat, en paiement d'un montant de 2.000 euros pour résistance abusive, d'un même montant pour les frais irrépétibles et des dépens, l'a condamné à payer à chacune des défenderesses une somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe le 28 janvier 2010, M. X. a interjeté appel général.

Par arrêt du 28 mai 2010, la Cour de céans a fait droit à une requête en rectification d'une erreur matérielle dans le jugement en ce qui concerne les frais irrépétibles.

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions, avec demande additionnelle, de M. X., reçues le 22 avril 2010, aux fins, au visa des recommandations de la Commission des clauses abusives et de l’article 1147 du Code civil, d'infirmer le jugement entrepris, de constater la nullité de la clause limitant la garantie ITT et IPA au 65ème anniversaire de l'assuré en raison de son caractère abusif, de condamner solidairement la Caisse d'Epargne et la CNP Assurances à lui payer 101.624 euros correspondant au montant du crédit restant dû à compter du 1er janvier 2007, de les condamner solidairement à lui payer 10.000 euros pour préjudice moral, subsidiairement, de constater la faute contractuelle de la Caisse d'Epargne d'Alsace, de la condamner à lui payer les mêmes montants en principal et au titre du préjudice moral, en tout état de cause, de débouter les intimés de leurs fins et conclusions, de les condamner aux dépens et à lui payer 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions de la Caisse d'Epargne d'Alsace et de Prévoyance d'Alsace, reçues le 10 novembre 2010, tendant à confirmer le jugement entrepris et à condamner l'appelant aux dépens des deux instances, ainsi qu'à lui payer 1.500 euros au titre des frais irrépétibles de l'instance d'appel ;

Vu les dernières conclusions de la SA CNP Assurances, reçues le 8 septembre 2010, visant à débouter l'appelant de son appel, à confirmer le jugement en toutes ses dispositions, à le condamner à lui payer 800 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi que les dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 12 janvier 2011 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Sur ce :

Vu les pièces de la procédure et les documents joints ;

 

Sur la prise en charge :

Attendu que pour contester le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de remboursement au titre de la prise en charge du remboursement du prêt par l'assureur, aux motifs que la nullité d'aucune clause du contrat n'a été demandée, que ni la banque ni l'assureur n'ont manqué à leur obligation de renseignement et de conseil et qu'aucun préjudice financier n'est au demeurant démontré, l'appelant rappelle que le contrat comporte une clause prévoyant que la prise en charge de la garantie ITT cesse à l'âge de 65 ans, alors qu'il a souscrit le contrat à l'âge de 59 ans pour une durée de prêt de 15 ans ; que cette clause est abusive et nulle au sens de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, dès lors que son attention n'a pas été attirée spécialement sur cette clause restreignant ou limitant la garantie, de façon à lui permettre d'y remédier par une extension de garantie ou une formule complémentaire ; qu'ainsi, la garantie doit être assurée ; qu'en tout état de cause, la banque engage sa responsabilité contractuelle, dès lors qu'elle n'a pas éclairé le client sur l'inadaptation de la garantie au risque, nonobstant la remise d'une notice d'information, ainsi que le décide la jurisprudence, ainsi que l’article 520-16-II-2° du Code des assurances et alors que l'emprunteur a été trompé par les mentions du tableau d'amortissement du prêt mentionnant la perception de primes tout au long du remboursement ; que le préjudice indemnisable résulte de la perte de chance d'avoir souscrit une assurance adaptée ;

Attendu que la Caisse d'Epargne conclut à la confirmation, en faisant valoir qu'il a été proposé à l'emprunteur une garantie couvrant l'ensemble des risques susceptibles d'affecter les capacités financières de l'emprunteur, dont le risque ITT, qui a été effectivement couvert pendant plusieurs années ; que par définition, une garantie incapacité de travail ne pouvait plus s'exercer après le départ à la retraite de l'assuré ou la survenue de son 65ème anniversaire, ainsi qu'il est clairement indiqué à l'article 6 des conditions générales de la police ; qu'au demeurant, il a volontairement devancé l'âge de la retraite en optant pour un départ dès son 60ème anniversaire ;

Attendu qu'aux termes du bulletin d'adhésion à l'assurance crédit en date du 11 mars 2000, l'appelant a souscrit aux garanties décès, invalidité permanente et absolue et incapacité totale de travail ;

Attendu que l'article 6 du contrat prévoit notamment que cette dernière garantie prend fin au plus tard dès la mise à la retraite ou à la préretraite (quelle qu'en soit la cause) et au plus tard au 65ème anniversaire de l'assuré, sans entraîner de modification du montant des primes ;

Attendu qu'ainsi que l'a relevé le premier juge, ces dispositions ne s'analysent ni en une restriction, ni en une limitation ou en une exclusion de garantie, mais se bornent à énoncer qu'en l'absence de risque, et donc d'aléa, à savoir la perte de revenu liée à la fin ou à la suspension du contrat de travail, qui n'est plus encourue dès lors que l'emprunteur est parti à la retraite, la garantie cesse faute de cause ;

Attendu que cette clause n'apparaît nullement abusive, au sens de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, ni de la recommandation n° 90-01 de la Commission des clauses abusives relative à l'assurance crédit du 10 novembre 1989, dès lors qu'elle est énoncée des plus clairement dans les « principales dispositions du contrat d'assurance collective décès-invalidité » (annexe n° 2 de Maître Tassel) en caractère d'imprimerie gras ou en italique ; dès lors, ensuite, que l'assuré ne pouvait les ignorer puisqu'il produit lui-même l'extrait l'énonçant ; dès lors, enfin, qu'il n'est ni allégué, ni même justifié que cette simple application de la théorie de la cause dans le droit des obligations crée, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au contrat ;

Attendu, pour le surplus, que la garantie n'était nullement inadaptée, lors de sa souscription, aux besoins de l'emprunteur, puisqu'alors âgé de 54 ans, comme né le 1er janvier 1946, il pouvait y avoir recours, ce qui n'a pas manqué par la suite, puisque l'assureur a pris en charge les mensualités d'emprunt de ce chef entre mai 2004 et janvier 2007, de telle sorte qu'il ne saurait être sérieusement soutenu que la banque a manqué à son obligation d'information et de conseil, d'autant qu'on discerne mal quelle garantie aurait pu conseiller la banque aux fins de pallier la perte de revenu de l'assuré, consécutive à son départ à la retraite, qui ne présente aucun caractère aléatoire et ne saurait, par conséquent, être pris en charge par un mécanisme d'assurance ;

Attendu, au demeurant, qu'il est incontesté que l'assuré a adhéré volontairement à un dispositif de cessation anticipée d'activité, choix que ne pouvait anticiper la banque au jour de l'adhésion à l'assurance et qui a eu pour effet de mettre fin, prématurément au jeu de la garantie ;

Attendu, enfin, que les mentions du tableau d'amortissement concernant le prélèvement des primes d'assurance jusqu'à la fin du prêt n'emportent, par elles-mêmes, aucun effet sur la durée de la garantie et ne prouvent nullement que le consentement de l'emprunteur a été vicié faute d'information suffisante, alors qu'il est énoncé par la notice d'information que la cessation de la garantie n'entraîne pas de modification du montant des primes ;

Attendu, en conséquence, que le jugement entrepris mérite pleine et entière confirmation.

 

Sur l’article 700 du Code de procédure civile :

Attendu qu'il convient d'indemniser les intimées au titre des frais irrépétibles qu'elles ont exposés à hauteur d'appel à concurrence de 800 euros chacune.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE l'appel et la demande additionnelle non fondés ;

Les REJETTE ;

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

DIT n'y avoir lieu de constater la nullité de la clause limitant la garantie ITT et IPA au 65ème anniversaire de l'assuré en raison de son caractère abusif ;

REJETTE toutes conclusions plus amples ou contraires ;

CONDAMNE M. X. à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Alsace Ecureuil et à la SA CNP Assurances, prises en la personne de leur représentant légal respectif, la somme de 800 euros (HUIT CENTS EUROS) chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. X. aux dépens.

Le Greffier     Le Président