CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 6 janvier 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 2924
CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 6 janvier 2011 : RG n° 09/08258
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que l'article 1.3.1 du contrat relatif à l'utilisation du crédit prévoit que l'emprunteur peut à tout moment demander la mise à disposition du crédit ATALANTE par fractions ou en totalité dans la limite de l'autorisation ; Attendu que cette clause ne détermine pas des fractions périodiquement disponibles utilisables selon une périodicité définie, mais permet une augmentation du montant du capital prêté, alors que ce n'est pas conforme au modèle type n°4 réglementaire ; Que cette clauses ne stipule pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisée dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et lui ouvrir une faculté de rétractation ; Attendu que cette clause qui confère un avantage excessif à la SA ABBEY NATIONAL FRANCE dispensée ainsi de respecter les formalités protectrices du consommateur, est abusive et doit être déclarée non écrite, par application de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ».
COUR D’APPEL DE DOUAI
HUITIÈME CHAMBRE SECTION 1
ARRÊT DU 6 JANVIER 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 09/08258. Jugement (n° 11-08-260) rendu le 6 octobre 2009 par le Tribunal d'Instance de SAINT POL SUR TERNOISE.
APPELANTE :
SA FINANCO venant aux droits de la SA EOLE FINANCE,
ayant son siège social : [adresse], représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour, Assistée de Maître HANJANI, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉ :
Monsieur X.,
demeurant : [ville], représenté par la SCP COCHEME-LABADIE-COQUERELLE, avoués à la Cour, Assisté de Maître Jean-François TORILLEC, avocat au barreau d'ARRAS (bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)
DÉBATS : A l'audience publique du 22 septembre 2010 tenue par Sophie VEJUX magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Pierre CHARBONNIER, Président de chambre, Catherine CONVAIN, Conseiller, Sophie VEJUX, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 6 janvier 2011 après prorogation du délibéré du 2 décembre 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Suivant offre préalable acceptée le 30 avril 1999, la SA ABBEY NATIONAL FRANCE aux droits de laquelle vient la société EOLE FINANCE consentait à Monsieur X. une ouverture de crédit utilisable par fractions dénommée « ATALANTE », dont le montant maximum du crédit variait en fonction de l'épargne salariale acquise par l'emprunteur ; que l'offre mentionnait un montant initial des droits à crédit de 22.096,46 francs et un montant initial de l'autorisation de 10.000 francs (1.524,49 euros), pour une durée d'un an renouvelable et ouvrant droit, pour la société de crédit à la perception d'intérêts au taux effectif global variable calculées sur les sommes réellement empruntées.
Suivant offre préalable acceptée le 20 janvier 2004 se substituant à l'offre signée le 4 mai 1999, la SA ABBEY NATIONAL FRANCE consentait à Monsieur X. une ouverture de crédit utilisable par fractions, dénommée « ATALANTE », dont le montant maximum du crédit variait en fonction de l'épargne salariale acquise par l'emprunteur ; que l'offre mentionnait un montant initial des droits à crédit de 14.218,37 euros et un montant initial de l'autorisation de 10.929,41 euros, pour une durée d'un an renouvelable et ouvrant droit, pour la société de crédit à la perception d'intérêts au taux effectif global variable calculés sur les sommes réellement empruntées.
Par jugement du 6 octobre 2009, le tribunal d'instance de SAINT POL/ TERNOISE constatait l'irrecevabilité de l'action de la SA EOLE FINANCE venant aux droits de la société ABBEY NATIONAL FRANCE en raison de sa forclusion.
La SA FINANCO venant aux droits de la SA EOLE FINANCE interjetait appel de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées le 30 août 2010, elle sollicite à ce qu'il plaise à la cour d'appel :
- recevoir l'appel et le déclarer bien fondé ;
- donner acte à la société FINANCO de sa substitution aux droits de la société EOLE FINANCE et de la société ABBEY NATIONAL FRANCE ;
- dire et juger recevable l'action de la société FINANCO venant aux droits de la société EOLE FINANCE et de la société ABBEY NATIONAL FRANCE ;
- constater la résiliation du contrat ATALANTE aux torts et griefs de Monsieur X. à compter du 7 mai 2008 ;
- condamner Monsieur X. à payer à la société FINANCO la somme de 13 852,53 euros ;
- dire et juger que cette somme, conformément aux articles 1.8 et 2.1.1 du contrat ATALANTE portera intérêts au taux moyen monétaire (TMM) publié par la Banque de France, augmenté de 4,39 % l'an et ce jusqu'à complet paiement à compter de la mise en demeure en date du 28 mars 2008 ;
- débouter Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
- condamner Monsieur X. à payer la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
Elle conteste le premier juge en ce qu'il a considéré que les clauses du contrat permettant au bénéficiaire de disposer de façon fractionnée du montant du crédit consenti devaient être considérées comme correspondant à une clause abusive, réputée non écrite. Elle fait valoir que les utilisations de crédit n'ont jamais dépassé les 80 % de la valeur de l'épargne salariale acquise par Monsieur X. et soutient que la première échéance impayée non régularisée remonte au mois de mars 2007, que dés lors, son action est parfaitement recevable et n'encourt pas la forclusion.
Monsieur X. sollicite la confirmation du jugement querellé et la condamnation de la SA FINANCO au paiement de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Attendu qu'il est justifié par l'extrait K bis du 29 avril 2010 de ce que la société EOLE FINANCE a fait l'objet d'une fusion-absorption par la SA FINANCO le 30 septembre 2009, que dés lors, l'universalité de son patrimoine a été transférée à la SA FINANCO, laquelle démontre ainsi sa qualité et son intérêt à agir ;
Attendu que selon offre préalable d'ouverture de crédit souscrite le 30 avril 1999, la société ABBEY NATIONAL FRANCE a consenti à Monsieur X. une offre de crédit initial autorisé de 10.000 francs, soit 1.524,49 euros ; que les parties ont entendu le soumettre aux dispositions du Code de la consommation régissant les crédits à la consommation, l'offre renvoyant au chapitre contentieux à l'application de l’article L. 311-37 du Code de la consommation ;
Attendu que les opérations de crédit visées à l'article L. 311-2 du Code de la consommation sont conclues dans les termes d'une offre préalable ; que lorsqu'il s'agit d'une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable est obligatoire pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti ;
Attendu que l'offre préalable souscrite le 30 avril 1999 a été souscrite pour un montant de 10.000 francs, soit 1.524,49 euros ; que les conditions particulières de l'offre mentionnent que le montant maximum du crédit est égal à 80 % de l'épargne salariale acquise par l'emprunteur au titre de sa participation ou du versement sur un plan d'épargne entreprise, que le montant initial des droits à crédit ATALANTE s'élève à 22.096,46 francs, que le montant maximum des droits à crédit ATALANTE variera en fonction de la valeur du total de l'épargne salariale acquise, l'emprunteur déterminant dans la limite des droits à crédit ATALANTE le montant des sommes qu'il souhaite utiliser ; que le montant de l'autorisation a, au cas d'espèce, été fixé à 10.000 francs soit 1.524,49 euros ;
Attendu que l'article 1.3.1 du contrat relatif à l'utilisation du crédit prévoit que l'emprunteur peut à tout moment demander la mise à disposition du crédit ATALANTE par fractions ou en totalité dans la limite de l'autorisation ;
Attendu que cette clause ne détermine pas des fractions périodiquement disponibles utilisables selon une périodicité définie, mais permet une augmentation du montant du capital prêté, alors que ce n'est pas conforme au modèle type n°4 réglementaire ;
Que cette clauses ne stipule pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisée dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et lui ouvrir une faculté de rétractation ;
Attendu que cette clause qui confère un avantage excessif à la SA ABBEY NATIONAL FRANCE dispensée ainsi de respecter les formalités protectrices du consommateur, est abusive et doit être déclarée non écrite, par application de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ;
Attendu que le jugement du tribunal d'instance de SAINT POL/TERNOISE sera donc confirmé sur ce point ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable lors de la conclusion du contrat, les actions nées d'un contrat de crédit à la consommation doivent être engagées, à peine de forclusion, dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance; que s'agissant d'une action en paiement, le point de départ du délai de forclusion est fixé à la date de l'exigibilité des sommes dont le recouvrement est poursuivi; que plus précisément, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie de l'obligation de remboursement à échéances convenues, le point de départ de ce délai se situe au moment où le montant du dépassement maximum du découvert autorisé n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident caractérisant la défaillance de l'emprunteur ;
Attendu que conformément à la règle selon laquelle le point de départ du délai à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée se situe nécessairement à la date de l'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion court, dans le cas de l'ouverture de crédit d'un montant déterminé et reconstituable, assortie de l'obligation de remboursement à échéances convenues, soit à partir d'une échéance échue impayée non régularisée, soit à compter du moment où le montant maximal du découvert initial convenu entre les parties est constamment dépassé sans régularisation ultérieure, situation qui constitue bien un incident caractérisant la défaillance de l'emprunteur ;
Attendu que les opérations de crédit visées à l’article L. 311-2 du Code de la consommation sont conclues dans les termes d'une offre préalable et lorsqu'il s'agit d'une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable est obligatoire pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti, une nouvelle offre intervenue à ce titre devant intervenir avant la forclusion acquise au titre de la première offre et ce dans la mesure où les parties ne peuvent y renoncer ;
Attendu que l'historique des mouvements enregistrés sur le compte du mois du 12 mai 1999 au 23 avril 2008 établit que le 3 septembre 2001, l'emprunteur a utilisé la somme de 4.785,07 euros, sans que ce tirage n'ait fait l'objet d'une offre préalable alors qu'il dépassait le montant d'utilisation autorisé de 1.524,49 euros ;
Attendu que l'article L. 311-9 du Code de la consommation même dans sa rédaction contemporaine du contrat ne dispensait pas d'une réitération de l'offre même pour les nouvelles ouvertures de crédit selon la jurisprudence en vigueur à cette époque ;
Attendu que la nouvelle offre de crédit portant le montant de l'utilisation à 10.929,41 euros n'a été signée que le 15 janvier 2004 ;
Attendu qu'en conséquence, en l'absence de régularisation d'une nouvelle offre préalable ou d'un avenant augmentant des conditions régulières le crédit initial autorisé initial avant le 3 septembre 2003, le dépassement de celui-ci sans rétablissement ultérieur dans les limites de débit autorisé manifeste la défaillance de l'emprunteur et marque le point de départ du délai de forclusion ;
Attendu que l'action en remboursement des sommes prêtées initiée le 1er août 2006, soit très postérieurement à l'expiration du délai biennal prévu par l’article L. 311-37 du Code de la consommation expiré le 4 septembre 2003, doit en conséquence être déclarée atteinte de forclusion et à ce titre irrecevable ;
Attendu que le jugement sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu que la SA FINANCO qui succombe en l'essentiel de ses prétentions sera condamnée aux dépens de l'appel ;
Que toutefois, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X. ses frais irrépétibles et il convient de rejeter sa demande fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Constate que la SA FINANCO vient aux droits de la SA EOLE FINANCE venant elle-même aux droits de la SA ABBEY NATIONAL FRANCE ;
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Dit n'y avoir lieu à l'application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne la SA FINANCO venant aux droits de la SA EOLE FINANCE aux dépens qui seront recouvrés par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
A. DESBUISSONS P. CHARBONNIER
- 5744 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Présentation
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 5816 - Code de la consommation - Clauses abusives - Application dans le temps - Clauses abusives - Illustrations : Loi n° 95-96 du 1er février 1995
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives
- 6636 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 7 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Conformité aux modèles-type