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CA PARIS (pôle 1 ch. 4), 18 juin 2010

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 1 ch. 4), 18 juin 2010
Pays : France
Juridiction : Paris (CA)
Demande : 09/22999
Date : 18/06/2010
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Décision antérieure : TI JUVISY-SUR-ORGE (réf.), 16 octobre 2009
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2986

CA PARIS (pôle 1 ch. 4), 18 juin 2010 : RG n° 09/22999

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE renouvelle en appel sa demande d'application, sous astreinte, à M. X. de la clause des contrats de prêts qui prévoit la domiciliation des revenus des emprunteurs dans les livres de la banque alors que ses salaires sont versés dans une autre banque ;

Considérant que le juge des référés ne peut ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire qu'à condition que l'obligation ne soit pas sérieusement contestable ; Que ne répond pas à cette convocation le cas de l’obligation invoquée par la banque puisque l’article 132-1 du Code de la consommation dispose que, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et que dans cette hypothèse, les clauses abusives sont déclarées non écrites ; qu'en l'espèce la clause de domiciliation n'est accompagnée d'aucune contrepartie individualisée au profit des emprunteurs ;

Que la vérification du caractère abusif de la clause excède les pouvoirs du juge des référés ».

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 1 QUATRIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 18 JUIN 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/22999. Décision déférée à la Cour : ordonnance du 16 octobre 2009 - Tribunal d'Instance de JUVISY SUR ORGE - RG n° 12-09-000763.

 

APPELANTE :

SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE,

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux représentée par la SCP HARDOUIN, avoués près la Cour, ayant pour avocat la SCP GUEDJ, lequel a fait déposer son dossier par l'avoué.

 

INTIMÉS :

Monsieur X.,

Madame Y. épouse X.,

représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués près la Cour

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 21 mai 2010, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Jacques LAYLAVOIX, Président de chambre, Monsieur David PEYRON, Conseiller, Madame Catherine BOUSCANT, Conseillère, qui en ont délibéré sur le rapport de Madame Catherine BOUSCANT.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mademoiselle Fatia HENNI

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Monsieur Jacques LAYLAVOIX, président et par Mademoiselle Fatia HENNI, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'appel formé par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE contre l'ordonnance de référé rendue le 16 octobre 2009 par le tribunal d'instance de Juvisy sur Orge, qui a ordonné la suspension de l'exécution des contrats de prêts signés le 3 août 2006 avec M. X. et son épouse, née Y., pendant 9 mois à compter de la signification de l'ordonnance, dit qu'au terme de cette période de suspension, la durée du contrat serait prolongée de 9 mois et que les échéances seraient exigibles tous les mois avec un décalage de 9 mois par rapport à l'échéancier initial et que les échéances ainsi reportées ne produiraient pas intérêts, a rejeté les autres demandes et a laissé à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu les dernières conclusions de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE du 12 mai 2010 qui prie la cour :

- à titre principal, d'infirmer l'ordonnance,

- à titre subsidiaire,

* de limiter la suspension à un seul des deux prêts celui de 56.453 euros,

- en tout état de cause,

* de dire que les époux X. continueront d'acquitter les mensualités d'intérêts ainsi que les cotisations d'assurances,

* de leur enjoindre de justifier de leur situation actuelle notamment par la production des relevés du compte sur lequel le salaire de M. X. est domicilié,

- à titre reconventionnel,

* d'ordonner à M. X. de verser ses salaires sur un compte ouvert dans les livres de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, sous peine d'une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision,

- de condamner solidairement les époux X. à lui payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions du 12 mai 2010 de M. et Madame X. qui, poursuivant la confirmation de l'ordonnance déférée, demandent de condamner la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à leur payer la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts ainsi qu'aux entiers dépens ;

 

MOTIF (justification de la décision)                                                   (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

Considérant que le 3 août 2006, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a consenti à Monsieur X. et à Mademoiselle Y. deux prêt immobiliers ;

- le premier, d'un montant de 120.547 euros au taux de 4,26 % l'an, remboursable suivant des échéances mensuelles de 453,66 euros pendant un premier palier de 120 mois puis de 1.168,75 euros pendant un second palier de 132 mois,

- le second, d'un montant de 56.453 euros au taux de 4 % l'an remboursable suivant 120 mensualités de 583,14 euros ;

Que le montant total des remboursements mensuels s'élève à 1.036,80 euros ;

Qu'invoquant le fait qu'ils n'étaient plus en mesure de faire face au remboursement des échéances, les époux X. ont saisi, en application de l'article L. 313-12, le juge d'instance afin d'obtenir la suspension de l'exécution de leurs obligations, demande à laquelle il a été fait droit ;

Considérant que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE fait valoir à l'appui de son appel qu'elle a déjà accordé aux emprunteurs une suspension de l'amortissement du prêt de 56.453 euros pour une durée de 6 mois à compter du 7 novembre 2008 en raison de leurs difficultés financières, que Mme X. a caché au premier juge que sa situation professionnelle s'était améliorée, puisqu'elle perçoit un traitement mensuel hors primes de 1.725 euros par mois, que M. X. avait retrouvé son niveau de rémunération initial lorsque le juge a statué de sorte que les délais accordés ne se justifiaient pas ;

 

Sur les délais de grâce :

Considérant que l'article L. 313-12 du Code de la consommation dispose que l'exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de licenciement, suspendue par ordonnance du juge d'instance dans les conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil ; qu'il peut être décidé que, durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiraient point intérêt ;

Qu'en outre le juge peut déterminer dans son ordonnance les modalités de paiement des sommes qui seront exigibles au terme du délai de suspension, sans que le dernier versement puisse excéder de plus de deux ans le terme initialement prévu pour le remboursement du prêt ;

Considérant que M. X., en arrêt de maladie du 8 février 2008 au 16 mars 2008, a subi une réduction de son salaire d'environ 1.000 euros par mois jusqu'en juin 2008, percevant 1.023,24 euros en mars 2008, 1.117,21 euros en février 2008, 1.775,96 euros en mai 2008 et 1.296,05 euros en juin 2008 alors qu'il percevait en moyenne en 2007, 2.100 euros par mois et que Mme X. qui percevait une rémunération mensuelle de 2.200 euros a perdu son emploi en septembre 2008, ne disposant plus que de la somme de 1.450 euros par mois ; qu'ainsi la baisse des revenus du couple s'est élevée à environ 1.750 euros par mois environ de mars à juin 2008 puis à 750 euros par mois une fois que M. X. a pu reprendre normalement ses activités ; qu'ensuite la diminution de revenus qui ne concernait plus que son épouse, a, de toute évidence, obéré les facultés de remboursement des prêts par les époux de sorte que la situation financière n'était pas rétablie lorsque le juge d'instance a statué, Mme X. ayant seulement commencé sa formation d'inspecteur élève ;

Considérant que c'est donc à juste titre que le juge d'instance a accordé un délai de grâce aux époux X. selon des modalités auxquelles la cour souscrit sans qu'il y lieu d'y apporter les modifications sollicitées par la Société GÉNÉRALE ;

Que l'ordonnance sera, en conséquence, confirmée ;

 

Sur la demande de domiciliation des salaires de M. X. :

Considérant que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE renouvelle en appel sa demande d’application, sous astreinte, à M. X. de la clause des contrats de prêts qui prévoit la domiciliation des revenus des emprunteurs dans les livres de la banque alors que ses salaires sont versés dans une autre banque ;

Considérant que le juge des référés ne peut ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire qu'à condition que l'obligation ne soit pas sérieusement contestable ;

Que ne répond pas à cette convocation le cas de l’obligation invoquée par la banque puisque l’article 132-1 du Code de la consommation dispose que, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et que dans cette hypothèse, les clauses abusives sont déclarées non écrites ; qu'en l'espèce la clause de domiciliation n'est accompagnée d'aucune contrepartie individualisée au profit des emprunteurs ;

Que la vérification du caractère abusif de la clause excède les pouvoirs du juge des référés ;

 

Sur la demande de dommages et intérêts :

Considérant que les époux X. sollicitent des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le comportement de la banque et les tracas qu'elle leur a occasionnés ;

Mais considérant que les époux X. ne caractérisent pas le préjudice dont ils demandent réparation ; que leur demande de dommages et intérêts sera rejetée ;

Que l'ordonnance dont appel sera confirmée de ce chef ;

 

Sur l’article 700 du Code de procédure civile :

Considérant que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, qui succombe, sera déboutée de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et condamnée aux dépens d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme l'ordonnance,

Dit qu'il existe une contestation sérieuse sur la demande reconventionnelle de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE ;

Rejette les autres demandes des parties y compris la demande d'indemnité formée sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER                              LE PRÉSIDENT