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T. COM. PARIS (8e ch.), 25 octobre 2000

Nature : Décision
Titre : T. COM. PARIS (8e ch.), 25 octobre 2000
Pays : France
Juridiction : TCom Paris. 8e ch.
Demande : 99/018658
Date : 25/10/2000
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 25/02/1999
Décision antérieure : CA PARIS (25e ch. sect. B), 28 juin 2002
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 CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 304

T. COM. PARIS (8e ch.), 25 octobre 2000 : RG n° 99/018658

(sur appel CA Paris (25e ch. B), 28 juin 2002 : RG n° 2001/07878)

 

Extrait : « Que dans le cadre de la recommandation du 14 juin 1996, a été déclarée abusive la clause qui prévoit le paiement par le locataire de la valeur du véhicule lorsqu’il est dans l’incapacité de restituer les clefs et les papiers alors que cette non-restitution ne lui est pas imputable. Qu’il est constant que cette clause correspond aux prescriptions de l’article L. 132-1 du Code de la Consommation aux termes duquel sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Qu’en l’espèce, la non restitution des clés et documents ne peut être imputée à DMF. Que le fait d’obliger le locataire à payer une somme équivalente à la valeur vénale du véhicule a pour objet de créer un déséquilibre significatif entre le droit et l’obligation des parties et en l’espèce au détriment de DMF. Que, dans ces conditions le Tribunal considère que l’article 6 suscité revêt un caractère parfaitement abusif, comme l’a retenu à raison la Commission des Clauses Abusives dans sa recommandation du 14 juin 1996. »

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

HUITIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 25 OCTOBRE 2000

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 99/018658.

 

ENTRE :

La SOCIÉTÉ ADC LOCADA

dont le siège est au [adresse], PARTIE DEMANDERESSE assistée du CABINET MEUNIER BALADINE, Avocats associés (P423) et comparant par Maîtres Michel et Jean TUBIANA, Avocats (P162) (T).

 

ET :

La SOCIÉTÉ DMF - DIFFUSION MENUISERIE FERMETURE

dont le siège social est [adresse], PARTIE DÉFENDERESSE assistée de la SCP HYEST et ASSOCIES, représentée par Maître Jean-Marie HYEST, Avocat (P311) et comparant par Maître GERMAIN-THOMAS TREHET, Avocat (C1303)

 

APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

I - LES FAITS :

ADC LOCADA a loué à DMF un véhicule de type « Transit » le 14 mai 1998, le contrat de location se terminant le 15 mai 1998 à 12 heures.

Le 15 mai 1998, DMF a déposé plainte contre un auteur inconnu pour le vol du véhicule loué, les papiers et les clefs ayant également été dérobés dans les bureaux de DMF pendant le cocktail d’inauguration de son magasin.

C’est dans ces circonstances que ADC LOCADA a sollicité de DMF qu’elle lui verse la somme de 76.100 francs, correspondant à la valeur vénale du véhicule volé.

 

II - LA PROCÉDURE :

* Par assignation en date du 25 février 1999, ADC LOCADA demande au Tribunal de Commerce de Paris de :

- condamner DMF au paiement de la somme de 76.100 Francs, en vertu de l’article 6 des Conditions Générales de location du contrat de location en date du 14 mai 1998.

- condamner DMF au paiement de la somme de 10.000 Francs, au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

- ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

- [minute page 2] condamner DMF aux entiers dépens d’instance.

* Par conclusions en date du 4 mai 1999, DMF demande au Tribunal :

- Vu la recommandation de la Commission des clauses abusives en date du 14 juin 1996 et portant le n° 96-02 ;

- de réputer non écrite la clause insérée dans le contrat de location conclu entre ADC LOCADA et DMF en son article 6 intitulé « Quand ne suis-je pas assuré ? » comme étant abusive ;

En conséquence :

- de débouter purement et simplement ADC LOCADA de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner ADC LOCADA à payer à DMF la somme de 10.000 Francs en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- de la condamner aux entiers dépens.

* Par conclusions en date du 1er mars 2000, ADC LOCADA demande au Tribunal de :

- déclarer recevable et bien fondé l’action intentée par ADC LOCADA ;

- débouter DMF de ses demandes reconventionnelles ;

- condamner DMF au paiement de la somme de 76.100 Francs ;

- ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;

- condamner DMF au paiement de la somme de 10.000 Francs au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamner DMF aux entiers dépens d’instance.

 

III - MOYENS DES PARTIES :

* Selon ADC LOCADA :

ADC LOCADA a loué à DMF un véhicule de type « Transit » immatriculé [numéro] suivant le contrat n° XX en date du 14 mai 1998.

Le contrat de location se terminait le 15 mai 1998.

Le 15 mai 1998 DMF a déposé une plainte pour le vol de ce véhicule.

Les conditions générales du contrat de location, article 6/ « Quand ne suis-je pas assuré », précisent : « si vous êtes dans l’incapacité de restituer au loueur les clefs originales du véhicule après avoir constaté le vol de celui-ci. Dans ce cas vous serez tenu au paiement de la valeur du véhicule estimée par l’expert ».

DMF n’a pas restitué à ADC LOCADA les clefs du véhicule [minute page 3] immatriculé [numéro].

Le véhicule [numéro] a été retrouvé fortement endommagé et un rapport d’expertise a été effectué concluant que les dommages sur le véhicule ne permettaient pas la réparation. La valeur vénale du véhicule s’élevait à la somme de 76.100 Francs HT. Conformément aux conditions générales de location, ADC LOCADA a facturé à DMF la somme de 76.100 Francs HT. Une mise en demeure  a été adressée à DMF le 8 septembre 1998. ADC LOCADA a tenté de régler à l’amiable ce litige

A ce jour, DMF n’a procédé à aucun règlement.

Par conséquent, ADC LOCADA a saisi la présente juridiction pour obtenir le paiement de la somme de 76.100 Francs HT en vertu de l’article 6 des Conditions Générales de location contenu dans le contrat de location en date du 14 mai 1998.

 

* Selon DMF :

Pour fonder sa demande, ADC LOCADA vise les Conditions Générales du contrat de location et en particulier son article 6 intitulé « Quand ne suis-je pas assuré ? » et dont les termes sont les suivants : « vous n’êtes pas assuré si vous êtes dans l’incapacité de restituer au loueur les clefs originales du véhicule après avoir constaté le vol de celui-ci. Dans ce cas, vous serez tenu au paiement de la valeur du véhicule estimée par l’expert ».

Or, cette clause insérée dans le contrat de location est constitutive d’une clause abusive qui ne pourra qu’être réputée non écrite.

En effet, la commission des clauses abusives a émis une recommandation n° 96-02 du 14 juin 1996 relative aux contrats de location de véhicules automobiles.

C’est la raison pour laquelle DMF est bien fondée à solliciter du Tribunal qu’il répute non écrite la clause n° 6 stipulée dans les Conditions Générales du contrat de location conclu entre ADC LOCADA et DMF.

En conséquence, il est demandé au Tribunal de débouter purement et simplement ADC LOCADA de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LE TRIBUNAL :

Attendu que le Tribunal rappellera que l’article 6 des Conditions Générales de location prévoit que, non seulement DMF n’est pas assurée si elle ne peut pas restituer les clefs originales du véhicule après le vol mais doit au surplus rembourser au loueur la valeur vénale du véhicule.

Que de son côté, ADC LOCADA bénéficie, en tout état de cause, de l’indemnisation de sa compagnie d’assurance, la MAAF.

[minute page 4] Que dans le cadre de la recommandation du 14 juin 1996, a été déclarée abusive la clause qui prévoit le paiement par le locataire de la valeur du véhicule lorsqu’il est dans l’incapacité de restituer les clefs et les papiers alors que cette non-restitution ne lui est pas imputable.

Qu’il est constant que cette clause correspond aux prescriptions de l’article L. 132-1 du Code de la Consommation aux termes duquel sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Qu’en l’espèce, la non restitution des clés et documents ne peut être imputée à DMF.

Que le fait d’obliger le locataire à payer une somme équivalente à la valeur vénale du véhicule a pour objet de créer un déséquilibre significatif entre le droit et l’obligation des parties et en l’espèce au détriment de DMF.

Que, dans ces conditions le Tribunal considère que l’article 6 suscité revêt un caractère parfaitement abusif, comme l’a retenu à raison la Commission des Clauses Abusives dans sa recommandation du 14 juin 1996.

Qu’en outre, le Tribunal condamnera ADC LOCADA à payer 10.000 francs au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que l’intégralité des dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant en premier ressort par un jugement contradictoire

Vu la recommandation de la Commission des clauses abusives en date du 14 juin 1996 portant le n° 96-02,

- Déclare non écrite la clause insérée dans le contrat de location conclu entre la SOCIÉTÉ ADC LOCADA et la SOCIÉTÉ DMF (DIFFUSION MENUISERIE FERMETURE) en son article 6 intitulé « Quand ne suis-je pas assuré ? » comme étant abusive ;

EN CONSÉQUENCE

- déboute la SOCIÉTÉ ADC LOCADA de l’ensemble de ses [minute page 5] demandes, fins et conclusions,

- condamne la SOCIÉTÉ ADC LOCADA à payer à la SOCIÉTÉ DMF (DIFFUSION MENUISERIE FERMETURE) la somme de 10.000 francs (dix mille francs) en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

- condamne la SOCIÉTÉ ADC LOCADA aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de : 255,23 Francs TTC (App. 12,56 + Aff. 18,70 + Emol. 178,20 + TVA 38,59) + (Aff. 6,00, TVA 1,18 = 7,18) + (Aff. 6,00, TVA 1,18 = 7,18).

Confié lors de l’audience du 26 avril 2000 à Madame LANG-PETITMENGIN en qualité de Juge Rapporteur.

Mis en délibéré le 17 mai 2000.

Délibéré par Monsieur PESKINE, Madame LANG-PETITMENGIN, Monsieur PIERRE et prononcé à l’audience publique où siégeaient:

Monsieur PESKINE, Président, Messieurs LEVY et PIERRE, Juges, assistés de Madame VASSEUR, Greffier.

La Minute du jugement est signée par le Président du délibéré et le Greffier.