CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

TGI VANNES, 26 juin 2007

Nature : Décision
Titre : TGI VANNES, 26 juin 2007
Pays : France
Juridiction : Vannes (TGI)
Demande : 06/00714
Décision : 07/153
Date : 26/06/2007
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 13/01/2006
Décision antérieure : CA RENNES (1re ch. B.), 24 octobre 2008
Numéro de la décision : 153
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 3423

TGI VANNES, 26 juin 2007 : RG n° 06/00714 ; jugt n° 07/153

(sur appel CA Rennes (1re ch. B), 24 octobre 2008 : RG n° 07/05323 ; arrêt n° 641)

 

Extraits : 1/ « Attendu que le contrat litigieux a été conclu en 1999, avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 23 août 2001 qui exige, en cas de prestation à distance, la délivrance d'une information au consommateur relative à l'existence d'un droit de rétractation ; que l'article L. 121-16 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause et antérieure à l'ordonnance précitée, s'il prévoyait un délai de rétractation de sept jours en faveur du consommateur, n'imposait au professionnel la délivrance d'aucune information sur son existence et ses modalités d'exercice ; qu'il suit de là que le défaut d'information allégué est dénué d'incidence sur la validité de la convention ».

2/ « Attendu, cependant, que, selon l'article L. 132-1 du Code de la consommation, […] ; Attendu que la commission des clauses abusives, dans une recommandation du 20 septembre 1996, concernant les contrats de révélation de succession proposés par les généalogistes relève : […] ; que sur le fondement de cette motivation, la Commission des clauses abusives a recommandé : […] ;

Attendu que le contrat litigieux stipule : « A titre de rémunération, l'Héritier cède, délègue et transporte aux Archives Généalogiques ANDRIVEAU, après déduction du passif, des droits de mutation, des frais de recherches et de règlement, une quotité de l'actif mobilier (y compris tout contrat d'assurance) et immobilier devant lui revenir qu'elle qu'en soit l'importance, d'après le tarif d'honoraires hors taxes indiqué ci-dessous » ;

Attendu, d'une part, que cette stipulation n'indique pas à l’héritier, de manière explicite, que le remboursement des frais de recherches du généalogiste s'ajoutera à sa rémunération ; que, d'autre part, le montant des frais de recherches déjà engagés, à la date de l'envoi du contrat, le 12 juillet 1999, depuis le décès, récent, de Madame Y., survenu le 27 juin 1999, n'est pas justifié ; qu'enfin, la nature des dépenses restant à exposer n'est pas davantage précisée ; qu'il suit de là que, pour ces trois motifs, le mode de détermination de la rémunération du généalogiste, contenu dans le contrat litigieux a créé un déséquilibre significatif des droits et obligations des parties, au détriment de l'héritier ; qu'ainsi, la stipulation du contrat relative au prix de la prestation est abusive et doit être regardée comme non écrite ; que, ne pouvant subsister sans ladite clause, le contrat doit être annulé, dès lors que cette juridiction n'est saisie, de la part du généalogiste, d'aucune demande tendant à la fixation de sa rémunération, pour le cas où la clause serait reconnue abusive ».

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE VANNES

JUGEMENT DU 26 JUIN 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 06/00714. Jugement n° 07/153.

 

ENTRE :

La Société ARCHIVES GÉNÉALOGIQUES ANDRIVEAU,

ayant son siège social [adresse], Représentée par la SCP GRUNBERG, GRUNBERG-MOISSARD, avocats au barreau de VANNES, postulant de Maître Jean-François FERRAND, avocat au barreau de BORDEAUX

 

ET :

Monsieur X.,

demeurant [adresse], Représenté par Maître BOUIN, membre de la SELAFA FIDUCIAIRE GÉNÉRALE, avocats au barreau de VANNES (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 06/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VANNES)

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Monsieur Henri DE LAROSIERE DE CHAMPFEU, Président, Monsieur Yves DE SONIS, Vice-Président, Monsieur Laurent CHATELAIN, Vice-Président, en présence de Mademoiselle PICOT, Auditrice de Justice

GREFFIER : Madame Stéphany HODE

DÉBATS en audience publique le 22 mai 2007

AFFAIRE mise en délibéré au 26 juin 2007

Ce jour a été rendu par Monsieur DE LAROSIERE DE CHAMPFEU, le jugement dont la teneur suit :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Exposé du litige :

Madame Y. divorcée Z. est décédée le 27 juin 1999. Le 12 juillet 1999, la société Archives Généalogiques Andriveau, ci-après dénommée la société Andriveau ou le généalogiste, a proposé à M. X. de conclure un contrat de révélation de succession que ce dernier a accepté, le 12 août 1999. M. X. refusant de lui verser la rémunération demandée, le généalogiste a signifié au notaire chargé de la liquidation de la succession une opposition à partage, le 13 mai 2004.

La société Andriveau a assigné M. X., le 13 janvier 2006, en paiement, sous exécution provisoire, de la somme de 40.184,92 € au titre de sa rémunération, outre, 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile. Le généalogiste a repris ses demandes dans ses dernières conclusions du 26 mars 2007, où il s'oppose aux prétentions et moyens du défendeur.

Dans ses dernières écritures du 24 avril 2007, M. X. conclut au rejet des demandes du généalogiste et réclame la mainlevée de l'opposition à partage, ainsi que 10.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle lui a causé, outre 3.000 € pour frais irrépétibles. Il souligne que le contrat de révélation est nul, en l'absence d'information sur l'existence du délai de rétractation, et faute de précision suffisante sur le montant du prix. Il soutient encore que la clause fixant la rémunération du généalogiste est abusive. Au surplus, il indique que le montant de la créance n'est pas justifié, et que l'intervention du généalogiste était inutile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs du jugement :

Attendu que la société Andriveau a adressé à M. X., par courrier, à son domicile, un contrat de révélation de succession, lui demandant de le retourner, revêtu de sa signature ; qu'une telle prestation n'est pas soumise aux règles régissant le démarchage à domicile, faute de visite du généalogiste au domicile de l'héritier, ou de contact téléphonique avec lui, mais aux dispositions relatives aux ventes de biens et aux fournitures de prestations de services à distance, qui instituent un régime autonome de protection du consommateur, dont les garanties ne se cumulent pas avec celles prévues en cas de démarchage à domicile ;

Attendu que le contrat litigieux a été conclu en 1999, avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 23 août 2001 qui exige, en cas de prestation à distance, la délivrance d'une information au consommateur [minute page 3] relative à l'existence d'un droit de rétractation ; que l'article L. 121-16 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause et antérieure à l'ordonnance précitée, s'il prévoyait un délai de rétractation de sept jours en faveur du consommateur, n'imposait au professionnel la délivrance d'aucune information sur son existence et ses modalités d'exercice ; qu'il suit de là que le défaut d'information allégué est dénué d'incidence sur la validité de la convention ;

Attendu, cependant, que, selon l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'aux termes du même texte, les clauses abusives sont réputées non écrites, le contrat restant applicable dans toutes les autres clauses que celles jugées abusives, s'il peut subsister sans elles ;

Attendu que la commission des clauses abusives, dans une recommandation du 20 septembre 1996, concernant les contrats de révélation de succession proposés par les généalogistes relève : « si certains contrats laissent expressément au généalogiste la charge de ses frais de recherches des héritiers, d'autres, assez nombreux, prévoient que la rémunération du professionnel sera calculée en fonction de la part d'actif net recueillie par l'héritier cocontractant après déduction, notamment, des frais de recherches, ce qui revient, implicitement, à reconnaître le droit pour le professionnel d'obtenir, avant le calcul de sa rémunération, le remboursement de ces frais dont le montant n'est au demeurant jamais indiqué ; que cette stipulation doit être rapprochée d'autres clauses, contenues dans les mêmes contrats, qui pourraient laisser entendre que le généalogiste aurait pour seul droit le paiement de la rémunération prévue ; que l'absence de mention expresse de droit au remboursement des frais de recherches en sus du droit à rémunération, de justification du montant des frais déjà engagés, ainsi que d'indication de la nature des dépenses pouvant encore être exposées ne permet pas au consommateur de mesurer la portée de son engagement et est donc susceptible de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties » ; que sur le fondement de cette motivation, la Commission des clauses abusives a recommandé : « que soient éliminées des modèles de contrat de révélation de succession proposés par les généalogistes aux héritiers qu'ils ont découverts les clauses qui ont pour objet ou pour effet (..) de permettre au professionnel de percevoir le remboursement de ses frais de recherches sans mentionner explicitement que ce remboursement s'ajoutera à sa rémunération, sans justifier le montant des frais engagés et sans préciser la nature de ceux restant éventuellement à exposer » ;

[minute page 4] Attendu que le contrat litigieux stipule : « A titre de rémunération, l'Héritier cède, délègue et transporte aux Archives Généalogiques ANDRIVEAU, après déduction du passif, des droits de mutation, des frais de recherches et de règlement, une quotité de l'actif mobilier (y compris tout contrat d'assurance) et immobilier devant lui revenir qu'elle qu'en soit l'importance, d'après le tarif d'honoraires hors taxes indiqué ci-dessous » ;

Attendu, d'une part, que cette stipulation n'indique pas à l’héritier, de manière explicite, que le remboursement des frais de recherches du généalogiste s'ajoutera à sa rémunération ; que, d'autre part, le montant des frais de recherches déjà engagés, à la date de l'envoi du contrat, le 12 juillet 1999, depuis le décès, récent, de Madame Y., survenu le 27 juin 1999, n'est pas justifié ; qu'enfin, la nature des dépenses restant à exposer n'est pas davantage précisée ; qu'il suit de là que, pour ces trois motifs, le mode de détermination de la rémunération du généalogiste, contenu dans le contrat litigieux a créé un déséquilibre significatif des droits et obligations des parties, au détriment de l'héritier ; qu'ainsi, la stipulation du contrat relative au prix de la prestation est abusive et doit être regardée comme non écrite ; que, ne pouvant subsister sans ladite clause, le contrat doit être annulé, dès lors que cette juridiction n'est saisie, de la part du généalogiste, d'aucune demande tendant à la fixation de sa rémunération, pour le cas où la clause serait reconnue abusive ;

Attendu, à titre surabondant, [que] M. X. relève, à bon droit, que le généalogiste ne produit aucun décompte de sa créance, permettant au tribunal de vérifier la pertinence du mode de calcul de la somme réclamée au titre des honoraires ; qu'une telle preuve ne résulte pas du seul document versé aux débats par la société Andriveau, dénommé « décompte de répartition », qui ne précise ni le montant exact de l'actif successoral, ni celui des frais de recherches du généalogiste, ce qui ne permet pas de vérifier le bien fondé de la méthode de calcul de la rémunération demandée ; qu'en particulier, aucun acte liquidatif de la succession, ni même aucun projet notarié d'acte liquidatif n'est versé aux débats, la déclaration de succession à l'administration fiscale, n'étant pas davantage communiquée ; qu'il est, par suite, impossible de vérifier le bien fondé de la demande de la société Andriveau, qui ne rapporte pas, à cet égard, la preuve qui lui incombe ;

Attendu qu'en raison de l'annulation du contrat, lequel est réputé n'avoir jamais existé, la société Andriveau, qui doit être tenue comme n'ayant jamais été créancière [de] M. X., n'a pu valablement former une opposition sur ses droits dans la succession ; que, pratiquée à tort, cette opposition revêt un caractère fautif de la part du généalogiste ; que cette faute a porté préjudice à l'héritier, l'empêchant de jouir de sa part dans la succession ; que le dommage en résultant sera intégralement indemnisé par une indemnité de 3.000 € ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 5] PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL ;

Statuant publiquement, contradictoirement, et en premier ressort ;

DÉBOUTE la société Archives Généalogiques Andriveau ;

ANNULE le contrat de révélation d'héritier, conclu entre M. X. et la société Archives Généalogiques Andriveau ;

ORDONNE la mainlevée de l'opposition à partage formée par la société Archives Généalogiques Andriveau sur les droits [de] M. X. dans la succession de Madame Y.

CONDAMNE la société Archives Généalogiques Andriveau au paiement, à M. X., d'une indemnité de 3.000 € à titre de dommages et intérêts, d'une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;

ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement, sauf dans ses chefs relatifs aux dépens et aux frais irrépétibles ;

En foi de quoi, la présente décision a été signée par le président et par le greffier.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT