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CA PAU (2e ch. sect. 1), 5 avril 2011

Nature : Décision
Titre : CA PAU (2e ch. sect. 1), 5 avril 2011
Pays : France
Juridiction : Pau (CA), 2e ch. sect. 1
Demande : 10/02765
Décision : 1714/11
Date : 5/04/2011
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 9/07/2010
Numéro de la décision : 1714
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3484

CA PAU (2e ch. sect. 1), 5 avril 2011 : RG n° 10/02765 ; arrêt n° 1714/11

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Selon l’article L. 141-4 du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application. En vertu de l’article 125 du Code de procédure civile le juge doit relever d'office les fins de non recevoir lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public.

En l'espèce, le premier juge en l'absence de comparution des défendeurs pouvait en se fondant sur les pièces soumises à son examen par la demanderesse, soulever d'office les moyens tirés de la forclusion de l’article L. 311-37 du code de la consommation et du caractère abusif de la clause d'augmentation du découvert conformément à l'article L. 132-1 du même code. »

2/ « Il est constant en vertu des articles L. 311-9 et L 311-10 du Code de la consommation, que toute augmentation du crédit initialement consenti doit donner lieu à l'établissement d'une nouvelle offre du crédit.

La clause contractuelle précitée qui prévoit que le découvert disponible à l'ouverture du compte pourra être augmenté de manière importante, en l'espèce de 9.000 euros à 12.500 euros, doit être considérée comme abusive au sens de l’article L.132-1 du Code de la consommation, et donc réputée non écrite, puisqu'elle crée un avantage excessif au profit du prêteur. Elle permet, en effet, d'augmenter le montant du crédit sans faire bénéficier l'emprunteur des dispositions protectrices du code de la consommation et en faisant obstacle à ce qu'il soit pleinement informé de l'ensemble des caractéristiques du prêt et des charges liées à son remboursement, sans également lui permettre de bénéficier de la faculté de rétractation, et sans que l'aggravation de sa situation soit compensée par l'avantage tiré de la mise à disposition d'une somme plus importante.

Ainsi, le découvert disponible à l'ouverture ne saurait constituer une première fraction du crédit autorisé, alors que selon la clause précitée, l'augmentation de la fraction disponible ne peut intervenir que sur demande spécifique de l'emprunteur, ce qui démontre que le dépassement de ce disponible est bien assimilé à une modification du découvert initialement consenti.

Il s'ensuit que la clause litigieuse ne peut être considérée comme ayant été stipulée dans l’intérêt de l'emprunteur, mais permet au contraire au prêteur de limiter l'octroi du crédit si l'emprunteur se trouve dans un des cas visés à l'article 6 des conditions générales du crédit.

Et contrairement à ce qui est également soutenu, la présente offre ne répond pas au modèle type n° 4 annexé à l’article R. 311-3 du Code de la consommation puisqu'elle ne comporte aucune mention quant aux fractions périodiquement disponibles du montant maximum autorisé, en se contentant de mentionner le découvert utile choisi par l'emprunteur. En outre, le modèle type invoqué par la partie appelante ne comporte pas de clause permettant à l'emprunteur de faire un tel choix et de le modifier ensuite.

[...] La SA MEDIATIS n'ayant fait délivrer assignation qu'à la date du 17 août 2009, passé le délai biennal prévu par l’article L. 311-37 du code de la consommation, l'action en paiement est forclose. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PAU

DEUXIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 5 AVRIL 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/02765. Arrêt n° 1714/11. Nature affaire : Prêt - Demande en remboursement du prêt.

ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 5 avril 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 24 février 2011, devant : Madame POELEMANS, magistrat chargé du rapport, assisté de Madame SAYOUS, greffier présent à l'appel des causes,

Madame POELEMANS, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de : Monsieur BEAUCLAIR, Conseiller faisant fonction de Président, Madame POELEMANS, Conseiller, Madame CLARET, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

 

APPELANTE :

SA MEDIATIS

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, représentée par la SCP RODON, avoués à la Cour, assistée de Maître GUILHEMSANG, avocat au barreau de DAX

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

assigné et réassigné

Madame X.

assignée

 

sur appel de la décision en date du 16 MARS 2010 rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE DAX

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Objet succinct du litige - Prétentions et arguments des parties :

Vu l'appel interjeté le 9 juillet 2010 par la SA MEDIATIS d'un jugement du Tribunal d'instance de Dax en date du 16 mars 2010,

Vu les conclusions de la SA MEDIATIS du 8 novembre 2010,

Vu l'acte d'assignation de Monsieur X. en date du 12 novembre 2010 et l'acte de réassignation délivré le 16 décembre 2010,

Vu l'ordonnance de clôture du 11 janvier 2011, l'affaire étant fixée à l'audience du 24 février 2011.

Suivant offre préalable acceptée le 2 avril 2003, la SA MEDIATIS a consenti à Monsieur X. et à son épouse, Madame X. née Y. une ouverture de crédit par découvert en compte d'un montant maximum autorisé de 12.500 euros, la fraction disponible du découvert étant fixée à 9.000 euros.

Par acte d'huissier du 17 août 2009, la SA MEDIATIS a fait citer Monsieur X. et Madame X. en paiement de la somme de 26.809,18 euros en principal, avec intérêts au taux contractuel de 18,91 % sur la somme de 25.145,22 euros à compter du 6 février 2009, outre une indemnité de 700 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 16 mars 2010, le tribunal d'instance de Dax a débouté la SA MEDIATIS de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens.

* * *

La SA MEDIATIS demande à la Cour de :

- réformer le jugement déféré,

- constater que l'ordonnance d'injonction de payer signifiée le 26 mars 2008 est devenue définitive à l'égard de Madame X., qui n'a pas formé opposition,

- dire que la forclusion de l'action ne peut être relevée d'office,

- subsidiairement, vu les articles L. 311-30 et suivants du code de la consommation, dire que la sanction applicable ne peut être que la déchéance du droit aux intérêts,

- condamner Monsieur et Madame X. solidairement à lui payer la somme de 26.809,18 euros en principal avec intérêts au taux de 18,81 % sur la somme de 25.145,32 euros à compter du 6 février 2009,

- condamner les mêmes au paiement d'une indemnité de 700 euros au titre des frais irrépétibles et en tous les dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.

La partie appelante soutient en substance que le juge d'instance qui a soulevé d'office le moyen tiré de la forclusion biennale, ne pouvait le faire sans inviter les parties à conclure sur ce point.

Au fond, elle fait également grief au premier juge d'avoir considéré que le dépassement du découvert de 9.000 euros constituait le premier incident de paiement alors que cette somme correspondait à la première fraction débloquée par l'emprunteur sur le montant autorisé de 12.500 euros, la distinction fraction utilisée et découvert maximum étant conforme au modèle type n° 4 annexé à l’article R. 311-6 du code de la consommation.

Il n'y avait pas lieu à l'établissement d'une nouvelle offre tant que le crédit ne dépassait pas ce montant et la clause de variation du capital est conforme également au modèle type et ne peut être considérée comme abusive, puisqu'elle ne crée aucun déséquilibre au détriment de l'emprunteur.

De plus, les clients ont reçu mensuellement les relevés de compte sans émettre une quelconque contestation, ce qui suffit à démontrer qu'ils étaient informés de son fonctionnement.

La SA MEDIATIS conclut que la forclusion n'est pas encourue, alors que le premier incident de paiement non régularisé doit être fixé à l'échéance du mois de juillet 2008 et que l'assignation est intervenue dans le délai biennal.

Assignée en personne, par acte d'huissier en date du 12 novembre 2010, Madame X. n'a pas constitué avoué.

Assigné à son domicile, par acte d'huissier du 12 novembre 2010, puis réassigné le 16 décembre 2010, Monsieur X. n'a pas constitué avoué.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'office du juge :

Selon l’article L. 141-4 du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application.

En vertu de l’article 125 du Code de procédure civile le juge doit relever d'office les fins de non recevoir lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public.

En l'espèce, le premier juge en l'absence de comparution des défendeurs pouvait en se fondant sur les pièces soumises à son examen par la demanderesse, soulever d'office les moyens tirés de la forclusion de l’article L. 311-37 du code de la consommation et du caractère abusif de la clause d'augmentation du découvert conformément à l'article L. 132-1 du même code.

Il sera également observé que l'affaire ayant été plaidée le 22 septembre 2009 et le juge ayant soulevé d'office ces moyens, il a alors renvoyé l'affaire à l'audience du 19 janvier 2010 afin de permettre aux parties de conclure sur ce point.

Ainsi, le moyen soulevé par la partie appelante selon lequel la forclusion de l'action ne pouvait être relevée d'office, ne peut qu'être écarté.

 

Sur la forclusion de l'action :

L'offre préalable de crédit mentionne que le montant maximum du découvert autorisé est de 12.500 euros et que le montant de la fraction disponible choisie à l'ouverture du compte est de 9.000 euros.

L'article 4 des conditions générales contient la clause selon laquelle la fraction disponible du découvert peut évoluer sur demande spécifique de l'emprunteur dans la limite du montant maximum du découvert autorisé, sauf si depuis l'ouverture du crédit ou la dernière augmentation de la fraction disponible l'emprunteur se trouve dans un des cas de suspension du droit à découvert prévus par l'article 6.

Il est constant en vertu des articles L. 311-9 et L 311-10 du Code de la consommation, que toute augmentation du crédit initialement consenti doit donner lieu à l'établissement d'une nouvelle offre du crédit.

La clause contractuelle précitée qui prévoit que le découvert disponible à l'ouverture du compte pourra être augmenté de manière importante, en l'espèce de 9.000 euros à 12.500 euros, doit être considérée comme abusive au sens de l’article L.132-1 du Code de la consommation, et donc réputée non écrite, puisqu'elle crée un avantage excessif au profit du prêteur.

Elle permet, en effet, d'augmenter le montant du crédit sans faire bénéficier l'emprunteur des dispositions protectrices du code de la consommation et en faisant obstacle à ce qu'il soit pleinement informé de l'ensemble des caractéristiques du prêt et des charges liées à son remboursement, sans également lui permettre de bénéficier de la faculté de rétractation, et sans que l'aggravation de sa situation soit compensée par l'avantage tiré de la mise à disposition d'une somme plus importante.

Ainsi, le découvert disponible à l'ouverture ne saurait constituer une première fraction du crédit autorisé, alors que selon la clause précitée, l'augmentation de la fraction disponible ne peut intervenir que sur demande spécifique de l'emprunteur, ce qui démontre que le dépassement de ce disponible est bien assimilé à une modification du découvert initialement consenti.

Il s'ensuit que la clause litigieuse ne peut être considérée comme ayant été stipulée dans l’intérêt de l'emprunteur, mais permet au contraire au prêteur de limiter l'octroi du crédit si l'emprunteur se trouve dans un des cas visés à l'article 6 des conditions générales du crédit.

Et contrairement à ce qui est également soutenu, la présente offre ne répond pas au modèle type n° 4 annexé à l’article R. 311-3 du Code de la consommation puisqu'elle ne comporte aucune mention quant aux fractions périodiquement disponibles du montant maximum autorisé, en se contentant de mentionner le découvert utile choisi par l'emprunteur.

En outre, le modèle type invoqué par la partie appelante ne comporte pas de clause permettant à l'emprunteur de faire un tel choix et de le modifier ensuite.

En l'absence d'un avenant augmentant dans des conditions régulières le montant du découvert initialement autorisé, le dépassement de ce découvert, dès lors qu'il n'a pas été ultérieurement restauré, constitue un incident de paiement caractérisant la défaillance de l'emprunteur, comme l'a à bon droit relevé le premier juge.

En l'espèce, il ressort de l'historique de compte que le dépassement du découvert initialement consenti de 9.000 euros est intervenu dès le mois d'avril 2006 (solde de 14.574,05 euros), sans jamais avoir été ensuite régularisé jusqu'à la déchéance du terme.

Et la signature d'un avenant intervenue seulement le 12 mars 2007 et portant le montant de la fraction disponible à 20.000 euros est sans incidence, puisqu'elle est intervenue tardivement. Il sera d'ailleurs observé que dès le mois de juin 2007, le solde impayé s'élevait déjà à 20.357,31 euros jusqu'à atteindre la somme de 26.809,18 euros à la date de déchéance du terme.

La SA MEDIATIS n'ayant fait délivrer assignation qu'à la date du 17 août 2009, passé le délai biennal prévu par l’article L. 311-37 du code de la consommation, l'action en paiement est forclose.

Par conséquent, le jugement sera confirmé à ce sujet.

 

Sur les demandes annexes :

La SA MEDIATIS, qui succombe, supportera la charge des dépens tant de première instance que d'appel, et sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté la SA MEDIATIS de ses demandes,

Statuant à nouveau,

Dit que la SA MEDIATIS est forclose en son action en paiement,

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA MEDIATIS aux dépens.

Signé par Monsieur André BEAUCLAIR, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Catherine SAYOUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT