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CA PARIS (pôle 4 ch. 1), 16 février 2012

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 1), 16 février 2012
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 1
Demande : 10/14087
Décision : 12/64
Date : 16/02/2012
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 64
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3643

CA PARIS (pôle 4 ch. 1), 16 février 2012 : RG n° 10/14087 ; arrêt n° 64

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Que le contrat de mandat de vente, qui consiste en la fourniture de services, est donc soumis à la réglementation sur le démarchage à domicile ».

2/ « Qu'enfin, le mandat de vente donné par les époux Y. en vue de la vente de leur appartement à usage pour partie d'habitation et pour partie professionnel est sans rapport direct avec l'activité de gynécologie exercée dans une partie de l'appartement par M. Y. et n'est donc pas visé par l'article L 121-22 du code de la consommation, la spécialité de M. Y. ne lui conférant aucune connaissance particulière en matière immobilière ;

Qu'il s'ensuit que le contrat de mandat de vente, soumis aux formalités de l'article L 121-23 du code de la consommation, aurait du comporter, à peine de nullité, un formulaire permettant l'exercice par le mandant de sa faculté de rétractation ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 1

ARRÊT DU 16 FÉVRIER 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/14087. Arrêt n° 64 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 juin 2010 - Tribunal de Grande Instance de PARIS : R.G. n° 07/01098.

 

APPELANTE :

SARL SOREPHIMMO

agissant en la personne de son gérant en exercice, ayant son siège [adresse], représentée par Maître Frédéric INGOLD, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055, assistée de Maître Serge SADOUN, avocat au barreau de PARIS, toque B 241

 

INTIMÉS :

Madame X. épouse Y.

Monsieur Y.

demeurant [adresse], représentés par la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocats au barreau de PARIS, toque : L0050, assistés de Maître Pauline DROUAULT plaidant pour BOISSIERE AVOCATS, toque P 290

 

COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 janvier 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Lysiane LIAUZUN, présidente.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Lysiane LIAUZUN, présidente, Madame Christine BARBEROT, conseillère, Madame Anne-Marie LEMARINIER, conseillère

Greffier : lors des débats : Madame Béatrice GUERIN

ARRÊT : CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Lysiane LIAUZUN, présidente et par Madame Béatrice GUERIN, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Les époux Y., propriétaires d'un appartement dans l'immeuble sis [adresse], ont par acte sous seing privé du 25 septembre 2006 consenti à la société Sorephimmo un mandat de vente exclusif portant sur la vente de leur appartement pour le prix de 1.450.000 euros « net vendeur ».

Le 27 septembre 2006, M. Z. a fait une proposition d'achat au prix visé dans le mandat, laquelle a été acceptée par les époux Y. le 28 septembre 2006 par mention sur la proposition d'achat.

Les époux Y. ayant refusé de régulariser la promesse de vente et, par lettre du 23 novembre 2006, dénoncé le mandat de vente, la société Sorephimmo, invoquant le non respect de leurs obligations contractuelles, les a assignés devant le Tribunal de Grande Instance de Paris sur le fondement des articles 1142 et 1147 du code civil en paiement de la somme de 43.500 euros en application de l'article 4 du titre 2 du mandat de vente.

Par jugement du 15 juin 2010, le tribunal a :

- déclaré nul le mandat de vente du 25 septembre 2007 pour non respect de la législation sur le démarchage à domicile,

- débouté le cabinet Sorephimmo de toutes ses demandes,

- débouté les époux Y. de leur demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts,

- condamné le cabinet Sorephimmo à payer aux époux Y. la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le cabinet Sorephimmo aux entiers dépens.

 

Appelant, la société Sorephimmo, aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 15 décembre 2011 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses prétentions et de ses moyens, demande à la Cour, au visa des articles 1142, 1356 et 1590 du code civil, de l'article L. 121-22 du code de la consommation et de la directive 85-577 du 20 décembre 1985, de :

- dire que la réglementation sur le démarchage à domicile est inapplicable

- déclarer valable le mandat du 25 septembre 2006 et la proposition d'achat du 28 septembre 2006

- constater que le refus de vendre notifié par les époux Y. est abusif

- condamner in solidum les époux Y. à lui payer la somme de 43.500 euros avec intérêt au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance et capitalisation des intérêts en application de l'article 4 du titre 2 du mandat de vente

- à titre subsidiaire, dire que la dénonciation du mandat est abusive et lui a occasionné la perte de chance de présenter de nouveaux acquéreurs et en conséquence, condamner les époux Y. à lui payer la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts

- condamner in solidum les époux Y. à lui payer la somme de 10.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile

- les condamner in solidum aux entiers dépens lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

 

Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2011 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de leurs prétentions et de leurs moyens, les époux Y., visant les articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, 1134, 1147 et 1152 du code civil, demandent à la Cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris

A titre subsidiaire,

- dire que la société Sorephimmo n'a pas rempli les obligations lui incombant en vertu du mandat exclusif de vente,

- dire que la révocation anticipée du mandat n'est pas abusive,

- débouter la société Sorephimmo de l'ensemble de ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire,

- réduire le montant de la clause pénale prévue à l'article 4 du titre 2 du mandat de vente à un euros symbolique,

En tout état de cause,

- condamner la société Sorephimmo à leur verser la somme de 8.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive outre 4.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Considérant que selon les dispositions d'ordre public de l'article L. 121-21 alinéa 1er du code de la consommation, est soumis à la réglementation sur le démarchage à domicile « quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage, au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d'achat de biens ou la fourniture de services » ;

Que le contrat de mandat de vente, qui consiste en la fourniture de services, est donc soumis à la réglementation sur le démarchage à domicile ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que le mandat exclusif de vente consenti au profit de la société Sorephimmo le 25 septembre 2006 a été signé au domicile des époux Y. ;

Considérant que le déplacement d'un professionnel de l'immobilier au domicile d'un particulier pour lui proposer un mandat exclusif de vente constitue un acte de démarchage, peu important que ce professionnel de l'immobilier ait été préalablement contacté téléphoniquement par le particulier et peu important les relations contractuelles qui ont pu exister par le passé entre les parties, dès lors que le mandat est conclu au domicile des mandants ;

Que, certes, M. Y. avait, par lettre du 21 septembre 2006 (pièce n° 15 de la société Sorephimmo), fait état de son accord pour consentir à la société Sorephimmo un mandat exclusif de vente pour trois mois avec renouvellement éventuel sur la base de 1.450.000 euros net vendeur, mais qu'il résulte des termes de cette lettre que l'accord de M. Y. avait été donné à la suite d'un déplacement d'un représentant de l'agence immobilière à son domicile le 20 septembre 2006, ce qui constitue bien un démarchage à domicile, le délai de cinq jours entre l'offre faite au domicile des époux Y. par l'agent immobilier et la signature du mandat, également au domicile des époux Y., étant insuffisant pour soustraire le mandat de la réglementation du démarchage à domicile, peu important le haut niveau intellectuel des mandataires et peu important qu'ils aient déjà, l'année précédente, donné un mandat exclusif de vente à la même agence ;

Qu'enfin, le mandat de vente donné par les époux Y. en vue de la vente de leur appartement à usage pour partie d'habitation et pour partie professionnel est sans rapport direct avec l'activité de gynécologie exercée dans une partie de l'appartement par M. Y. et n'est donc pas visé par l'article L. 121-22 du code de la consommation, la spécialité de M. Y. ne lui conférant aucune connaissance particulière en matière immobilière ;

Qu'il s'ensuit que le contrat de mandat de vente, soumis aux formalités de l'article L. 121-23 du code de la consommation, aurait du comporter, à peine de nullité, un formulaire permettant l'exercice par le mandant de sa faculté de rétractation ;

Considérant que la méconnaissance des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, édictées dans l'intérêt des personnes démarchées à domicile, est sanctionnée par une nullité relative, qui est relative en ce qu'elle ne peut être invoquée que par la personne qu'elle a vocation à protéger, mais qui constitue une nullité de fond et n'est pas soumise à la justification d'un grief dont l'exigence ne concerne que les nullités de forme régies par le code de procédure civile ;

Considérant que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré nul le mandat de vente du 25 septembre 2007 pour n'avoir pas comporté un formulaire permettant au mandant de renoncer au contrat dans les sept jours suivant sa signature ;

Que le mandat de vente étant nul, c'est à juste titre que le premier juge a débouté la société Sorephimmo de sa demande en paiement fondée sur l'article 4 du titre 2 dudit mandat ;

Considérant que le mandat étant nul, la société Sorephimmo sera déboutée de sa demande subsidiaire aux fins de condamnation des époux Y. en paiement de dommages et intérêts pour révocation abusive du mandat ;

Considérant que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a débouté les époux Y. de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, ces derniers ne justifiant pas non plus d'une faute de l'appelante ayant fait dégénérer en abus son droit d'exercer une voie de recours ;

Considérant que la société Sorephimmo, qui succombe en son appel, sera condamnée aux entiers dépens et devra en outre indemniser les époux Y. des frais non répétibles qu'elle les a contraints à exposer devant la Cour ainsi qu'il est dit au dispositif ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

Par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Sorephimmo à payer aux époux Y. la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société Sorephimmo aux entiers dépens de l'appel lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière,             La Présidente,