CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 20 mai 1996

Nature : Décision
Titre : TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 20 mai 1996
Pays : France
Juridiction : TGI Paris. 1re ch. sect. 1
Demande : 20367/95
Date : 20/05/1996
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 28/09/1995
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 3664

TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 20 mai 1996 : RG n° 20367/95 ; RP n° 5919

 

Extraits : 1/ « Ordonne, dans tous les modèles de conventions proposées par l'Association ECI, la suppression, dans le mois de la signification de la présente décision, des clauses : - écartant toute responsabilité de cette association pour les retards et défaillances auxquels elle fait appel ;

- permettant l'annulation du voyage par ECI avec remboursement des sommes versées diminuées des frais engagés ;

- édictant l'irrecevabilité des réclamations qui n'auraient pas été formées durant le séjour ».

2/ « Attendu que la recommandation n° 94-03 du 18 mars 1994 de la Commission des Clauses Abusives préconisant l'élimination des contrats de séjours linguistiques des trois clauses ci-dessus examinées incrimine également les clauses ayant pour objet ou pour effet d'imposer l'adhésion, moyennant cotisation, du consommateur à une association sans l'informer préalablement de l'objet et des caractéristiques essentielles de cette association ; Attendu que le caractère abusif de la clause ainsi dénoncée résulte de l'absence d'informations suffisantes sur l'association et non de l'adhésion obligatoire qu'implique l'article 8 de la loi du 13 juillet 1992 disposant que les associations ne peuvent effectuer les opérations mentionnées par l'article 1er de la loi qu'en faveur de leurs membres ;  Que l'UFC Que Choisir doit être déboutée de sa demande tendant à la suppression de la clause organisant l'adhésion obligatoire qu'impose cet article ».

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS

PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

JUGEMENT DU 20 MAI 1996

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20367/95. RP 5819. Assignation du 29 septembre 1995.

 

DEMANDERESSE :

L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS – UFC QUE CHOISIR

dont le siège est [adresse] représentés par Maîtres Luc BIHL et M.H. ANTONINI, avocats - R 2130.

 

DÉFENDERESSE :

L'Association ECI

dont le siège est à [adresse], NON REPRESENTEE.

[minute page 2]

COMPOSITION DU TRIBUNAL Magistrats ayant délibéré : Madame FEYDEAU, Président, Madame THOMAS, Juge, Madame GELBARD-LE DAUPHIN, Juge.

GREFFIER : Madame BAYARD.

DÉBATS : à l'audience du 1er avril 1996, tenue publiquement,

JUGEMENT prononcé en audience publique, réputé contradictoire, susceptible d'appel.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte du 28 septembre 1995, l'Union Fédérale des Consommateurs - UFC Que Choisir, a assigné l'Association « Echanges Culturels Internationaux » ci-après dénommée sous le sigle ECI, qui propose l'organisation de séjours linguistiques, devant ce Tribunal en mettant en cause quatre clauses de ses conditions générales, concernant l'adhésion obligatoire à l'association, l'absence de responsabilité de celle-ci quant aux défaillances des services auxquels elle fait appel et les conditions d'annulation et de réclamation.

Faisant valoir que la [minute page 3] commission des clauses abusives a recommandé la suppression de telles clauses en observant de surcroît que celle relative à l'irresponsabilité de l'association est contraire à la loi et à la jurisprudence, l'UFC Que Choisir demande que ces clauses soient jugées abusives, que leur suppression de tous les modèles de contrat dans le mois de la signification du présent jugement soit ordonnée sous astreinte de 1.000 francs par infraction et sollicite la condamnation de l'ECI à lui payer la somme de 50.000 francs de dommages et intérêts en réparation du préjudice collectif subi par les consommateurs et celle de 8.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'Association défenderesse, assignée en mairie, n'ayant pas constitué avocat, le présent jugement sera réputé contradictoire.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la brochure éditée pour [N.B. minute originale : par] l'année 1995 par l'association ECI comporte dans ses conditions générales un article 7 incluant trois des quatre clauses dénoncées à l'assignation, ainsi libellées dans les alinéas 2, 3 et 4 :

« L'ECI agissant en qualité d'intermédiaire entre les familles et les prestataires de services, ne saurait être tenue responsable des retards ou défaillances des services compétents auxquels il est fait appel ;

D'autre part, l'organisation se réserve le droit d'annuler un voyage pour raisons majeures : dans ce cas, le participant ne pourra prétendre qu'au remboursement des sommes [minute page 4] versées par lui, diminuées des frais engagés...

Enfin toute plainte ou réclamation sera irrecevable si elle nous parvient après le séjour ; en effet, pour être fondée, elle devra être formulée en cours de séjour, auprès d'un responsable local ECI » ;

Que ces dernières dispositions sont reprises à l'article 10 précisant que « toute réclamation doit être formulée sur place auprès du responsable français et pendant le séjour » ;

Attendu que la loi n° 92-645 du 13 juillet 1992 fixant les conditions d'exercice des activités relatives à l'organisation et à la vente de voyages ou de séjours énonce en son article 23 que toute personne se livrant aux activités qu'elle vise est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci ;

Qu'ECI, responsable du choix des prestataires des services qu'elle propose n'est pas en droit de s'exonérer, comme elle tente de le faire par l'insertion dans ses conditions générales par la clause précitée, de toute responsabilité du fait des retards ou des défaillances de ces services ;

Que la suppression de cette clause doit être ordonnée ;

Attendu qu'il doit en être de même pour la cause permettant à ECI d'annuler le voyage « pour raisons majeures » en ne remboursant pas l'intégralité des sommes versées, puisqu'elle se réserve le droit d'en [minute page 5] déduire des frais, ce qui apparaît contrevenir aux dispositions de l'article 21 de la loi du 13 juillet 1992 et de l'article 102 du décret n° 94-490 du 15 juin 1994 ;

Attendu que les dispositions des conditions générales prévoyant l'irrecevabilité des réclamations qui n'auraient pas été formées pendant le séjour consacrent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au sens de l'article L.132-1 du Code de la Consommation ;

Qu'elles aboutissent en fait dans bon nombre de cas, en ce qui concerne en particulier les séjours linguistiques destinés à des mineurs ne se trouvant pas en mesure de faire valoir utilement leurs droits, à interdire l'exercice de réclamation ;

Que l'UFC Que Choisir est fondée à solliciter, en application de l'article L. 421-6 du Code de la Consommation, la suppression de la clause considérée ;

Attendu que la recommandation n° 94-03 du 18 mars 1994 de la Commission des Clauses Abusives préconisant l'élimination des contrats de séjours linguistiques des trois clauses ci-dessus examinées incrimine également les clauses ayant pour objet ou pour effet d'imposer l'adhésion, moyennant cotisation, du consommateur à une association sans l'informer préalablement de l'objet et des caractéristiques essentielles de cette association ;

Attendu que le caractère abusif de la clause ainsi dénoncée résulte de l'absence d'informations suffisantes sur l'association et non de l'adhésion obligatoire qu'implique l'article 8 de la loi du 13 juillet 1992 disposant que les associations ne peuvent effectuer les opérations mentionnées par l'ar­ticle 1er de la loi qu'en faveur de leurs membres

[minute page 6] Que l'UFC Que Choisir doit être déboutée de sa demande tendant à la suppression de la clause organisant l'adhésion obligatoire qu'impose cet article ;

Attendu que n'a été versée aux débats que la brochure qu'a fait éditer l'association ECI pour l'.année 1995 ;

Que le Tribunal n'est pas en mesure de vérifier si les documents contractuels proposés par l'assignation défenderesse n'ont pas depuis lors été modifiés pour prendre en considération les dispositions ci-dessus examinées ;

Que la suppression des trois clauses qui sera ordonnée devra être mise en œuvre dans tous les modèles de conventions proposés par ECI dans le mois suivant la signification de la présente décision, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner l'astreinte sollicitée ;

Attendu que l'inobservation par l'association ECI des règles précitées porte à l'intérêt collectif des consommateurs une atteinte justifiant l'allocation de la somme de 10.000 francs de dommages et intérêts ;

Attendu qu'il y a lieu de décharger la demanderesse de partie des frais non compris dans les dépens en condamnant ECI à lui verser la somme de 8.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL,

Ordonne, dans tous les modèles [minute page 7] de conventions proposées par l'Association ECI, la suppression, dans le mois de la signification de la présente décision, des clauses :

- écartant toute responsabilité de cette association pour les retards et défaillances auxquels elle fait appel ;

- permettant l'annulation du voyage par ECI avec remboursement des sommes versées diminuées des frais engagés ;

- édictant l'irrecevabilité des réclamations qui n'auraient pas été formées durant le séjour ;

Condamne l'Association ECI à payer à l'UFC Que Choisir la somme de DIX MILLE francs (10.000) à titre de dommages et intérêts et celle de HUIT MILLE francs (8.000) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Déboute l'UFC Que Choisir du surplus de ses demandes ;

Condamne l'Association ECI aux dépens.

Fait et jugé à PARIS, 20 mai 1996.