TGI MARSEILLE (10e ch. civ.), 6 mai 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 3712
TGI MARSEILLE (10e ch. civ.), 6 mai 2008 : RG n° 06/04476 ; jugt n° 233
(sur appel CA Aix-en-Provence (4e ch. A), 12 mars 2010 : RG n° 08/14037 ; arrêt n° 2010/91)
Extrait : « Le défendeur excipe du caractère abusif de la clause qui impose au mandant une obligation d'information du mandataire et sanctionne son irrespect par le versement d'une indemnité équivalente au montant de la rémunération du mandataire.
Cette clause pénale sanctionne l'inexécution contractuelle du mandant mais elle est aussi la contrepartie du caractère non exclusif du mandat et du droit dont dispose l'acquéreur de contracter avec d'autres acquéreurs. A l'inverse, si le mandataire n'informe pas le mandant du fait qu'il a trouvé un acquéreur, il se sanctionne lui même puisqu'à défaut de réalisation de la vente, il ne percevra pas la commission prévue. Ainsi aucune disproportion n'apparaît entre les droits et les obligations des parties. »
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MARSEILLE
DIXIÈME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 6 MAI 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 06/04476. Jugement n° 233.
COMPOSITION DU TRIBUNAL : L'affaire a été débattue le 20 mars 2008 en audience publique devant le Tribunal composé de : Madame Corinne HERMEREL, Vice-président,
Greffier lors des débats : Madame VIDAL Michèle
Le Président entendu en son rapport, A l'issue de laquelle une date de délibéré a été fixée au : 6 mai 2008.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 6 mai 2008.
NATURE DU JUGEMENT : Contradictoire et en premier ressort,
[minute page 2]
EN LA CAUSE DE :
DEMANDERESSE :
La SARL NOTRE-DAME sous l'enseigne « CONNEXION IMMOBILIER »
au [adresse], agissant poursuites et diligences de son syndic « CONNEXION IMMOBILIER SARL SYNDIC », dont le siège social est sis [adresse], agissant elle-même poursuites et diligences de ses dirigeants légaux domiciliés audit siège en cette qualité, Représentée par Maîtres PIERI & DUPIELET ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE, postulant et par Maître ATTIA du Cabinet COHEN, avocats au barreau de PARIS, plaidant,
INTERVENANT VOLONTAIRE :
La SARL SAINT MICHEL, exploitant sous l'enseigne « CONNEXION IMMOBILIER », dont le siège social est sis [adresse], représentée par son gérant domicilié audit siège,
CONTRE :
DÉFENDEUR :
Monsieur X.,
né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par la SCP FOURNIER- DE VILLERS Maître DELFAUD DE BELFORT, Avocats au barreau,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] Suivant acte du 4 octobre 2005, Monsieur X. a confié un mandat non exclusif à la SARL SAINT MICHEL, exerçant sous l'enseigne « CONNEXION IMMOBILIER », pour la vente de son appartement situé [adresse], moyennant un prix net vendeur de 280.000 €.
La rémunération de l'Agence Connexion Immobilier était contractuellement fixée à « 7 % maximum du prix de vente » à la charge de l'acquéreur.
L'agent immobilier a informé par télégramme du 11 février 2006 qu'il avait trouvé un acquéreur aux conditions fixées dans le mandat.
Le 13 février 2006, Monsieur X. a indiqué à l'agent immobilier qu'il avait un acquéreur.
Par lettre recommandée en date du 17 février 2006 Monsieur X. a été mis en demeure de régler la commission d'agence soit 15.000 €.
Par la présente instance, CONNEXION IMMOBILIER réclame la condamnation de Monsieur X., avec exécution provisoire, à lui verser la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts, celle de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Vu l'assignation délivrée le 13 mars 2006 à Monsieur X., à la requête de la SARL NOTRE DAME, exerçant sous l'enseigne CONNEXION IMMOBILIER,
Vu le bordereau de pièces communiquées signifié par Monsieur X. le 20 novembre 2006,
Vu le bordereau de pièces communiquées signifié par la SARL NOTRE DAME le 22 mai 2006,
Vu les conclusions de Monsieur X. signifiées le 22 novembre 2006,
Vu les conclusions de la SARL NOTRE DAME et de la SARL SAINT MICHEL, cette dernière intervenante volontaire, exploitant sous l'enseigne Connexion Immobilier, signifiées le 10 mai 2007,
Vu l'ordonnance de clôture intervenue le 27 septembre 2007.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'agent immobilier soutient que la révocation du mandat présente un caractère abusif.
Monsieur X. soulève l'irrecevabilité de la SARL NOTRE DAME. Par ailleurs, il rétorque que le mandat est nul puisqu'il ne comporterait pas les conditions de détermination de la rémunération due au mandataire.
[minute page 4] Il soutient également que la clause pénale est nulle faute d'être déterminée puisqu'elle fait référence à une rémunération elle-même indéterminée.
Il considère en outre que la clause pénale est abusive puisqu'elle impose au mandant une obligation d'information du mandataire dès lors qu'il a trouvé un acquéreur et qu'en cas de non respect de cette obligation, elle prévoit que le mandant doit verser une indemnité compensatrice équivalente au montant de la rémunération, alors que l'agent immobilier, lui, n'est pas sanctionné s'il n'informe par le mandant en temps utile. La clause pénale créerait ainsi un avantage excessif au profit du professionnel, sans contrepartie.
Sur l'intervention volontaire de la SARL SAINT MICHEL :
Il apparaît que la SARL SAINT MICHEL, comme la SARL NOTRE DAME, exerce sous l'enseigne « CONNEXION IMMOBILIER ». La SARL SAINT MICHEL est intervenue volontairement à l'instance par conclusions signifiées le 10 mai 2007. Il convient de lui en donner acte.
Monsieur X. soulève l'irrecevabilité de la SARL NOTRE DAME mais cette exception relève de la compétence exclusive du juge de la mise en état. En l'état de l'intervention volontaire du cocontractant de Monsieur X., le débat sur l'irrecevabilité de la SARL NOTRE DAME est privé d'intérêt.
Sur la régularité du mandat :
Monsieur X. invoque la nullité du mandat pour cause d'indétermination du montant de la commission d'agence.
Or le contrat intitulé « Mandat privilège » stipule que « le bien doit être proposé au prix de 280.000 € et que la rémunération du mandataire sera de 7 % maximum à la charge de l'acquéreur ».
En l'espèce, la rémunération du mandataire était donc déterminée puisqu'elle ne devait pas excéder la somme de 19.600 €.
Le mandat est donc régulier.
Sur la régularité de la clause pénale ;
Le défendeur excipe du caractère abusif de la clause qui impose au mandant une obligation d'information du mandataire et sanctionne son irrespect par le versement d'une indemnité équivalente au montant de la rémunération du mandataire.
Cette clause pénale sanctionne l'inexécution contractuelle du mandant mais elle est aussi la contrepartie du caractère non exclusif du mandat et du droit dont dispose l'acquéreur de contracter avec d'autres acquéreurs.
A l'inverse, si le mandataire n'informe pas le mandant du fait qu'il a trouvé un acquéreur, il se sanctionne lui même puisqu'à défaut de réalisation de la vente, il ne percevra pas la commission prévue.
Ainsi aucune disproportion n'apparaît entre les droits et les obligations des parties.
Sur l'application de la clause pénale :
La clause pénale n'a vocation à s'appliquer qu'en cas de faute du mandant. En l'espèce, l'agence reproche à Monsieur X. de ne pas l'avoir [minute page 5] immédiatement avertie de la signature d'une offre d'achat reçue antérieurement au 11 février 2006, date à laquelle l'agent immobilier a lui-même reçu une offre d'achat.
Il résulte des explications de Monsieur X. que ce dernier ne disposait pas d'une offre d'achat définitive. Il justifie ainsi des diligences qu'il a entreprises pour tenter de donner suite à une offre formulée le 13 janvier 2006, conditionnée par la résolution d'un problème de stationnement.
Monsieur X. démontre qu'il s'est employé à le résoudre en tentant de transférer à l'acquéreur potentiel son propre emplacement de parking, en vain, comme en atteste le courrier de la société VINCI en date du 18 janvier 2006. Monsieur X. n'avait pas l'obligation, à ce stade de la négociation et tant que la condition n’était pas réalisée ou que l'acquéreur n'y avait pas renoncé, d'en informer le mandant.
Le samedi 11 février 2006 à 18 heures 10 l'agence CONNEXION l'informait par télégramme qu'elle avait recueilli une offre aux conditions du mandat et l'agence confirmait cette annonce par lettre recommandée datée du lundi suivant soit le 13 février 2006.
Monsieur X. justifie avoir appris le même jour, par courrier que « son » acquéreur renonçait à la condition du stationnement et qu'il confirmait son offre. La renonciation à la condition posée validait l'offre du 13 janvier 2006. Monsieur X. a respecté les termes de son contrat en informant l'agence de l'existence de cette offre acceptée, dès le premier jour ouvrable suivant, par fax adressé à l'agence à 11 heures 53, le 13 janvier 2006, pour confirmer que le bien n'était plus disponible.
Ainsi Monsieur X. n'a commis aucune faute dans l'exécution de ses obligations contractuelles et la clause pénale invoquée ne saurait s'appliquer. Il serait inéquitable de laisser Monsieur X. supporter la charge de ses frais irrépétibles au titre desquels la SARL CHAVE [N.B. conforme à la minute] devra lui verser la somme de 1.200 €.
Compte tenu de la nature de la décision, le prononcé de l'exécution provisoire n'apparaît pas nécessaire.
La SARL CHAVE [N.B. conforme à la minute] supportera les dépens de l'instance.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal statuant en audience publique, par jugement contradictoire, en matière civile ordinaire, en premier ressort et après en avoir délibéré conformément à la Loi ;
Donne acte à la SARL SAINT MICHEL, exerçant sous l'enseigne CONNEXION IMMOBILIER de son intervention volontaire ;
Dit que le contrat de mandat de vente non exclusif est régulier ainsi que la clause pénale qu'il contient ;
Déboute la SARL SAINT MICHEL de ses demandes à l'encontre de Monsieur X. ;
[minute page 6] Condamne la SARL SAINT MICHEL à verser la somme de 1.200 € à Monsieur X. sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision ;
Condamne la SARL SAINT MICHEL aux dépens qui seront distraits au profit de la SCP FOURNIER-DE VILLERS, avocat, sur son affirmation de droit ;
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe de la Dixième Chambre du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, le 6 mai 2008. Signé par Madame HERMEREL, Président, et Madame VIDAL, Greffier présent lors de la mise à disposition au greffe.
Le Greffier Le Président
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