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5739 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Modalités - Suppression relative

Nature : Synthèse
Titre : 5739 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Modalités - Suppression relative
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5739 (4 novembre 2023)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - RÉGIME

ACTION D’UN CONSOMMATEUR - EFFETS DE L’ACTION

SUPPRESSION DE LA CLAUSE ABUSIVE - MODLITÉS DE LA SUPPRESSION - SUPPRESSION RELATIVE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2023)

 

Présentation. La suppression du déséquilibre crée par la clause ne passe pas toujours par son élimination absolue et certaines décisions se contentent d’éliminer une interprétation possible de la clause (A) ou d’imposer des conditions à l’existence ou non du déséquilibre (B).

A. IMPOSITION D’UNE INTERPRÉTATION DANS UN SENS NON ABUSIF

Présentation. En cas de doute, le contrat doit être interprété en faveur du consommateur (art. L. 211-1 C. consom., anciennement art. L. 133-2 C. consom. et Cerclab n° 6006). Certaines décisions adoptent un raisonnement différent en déclarant abusive et en condamnant par avance une interprétation d’une clause qui conduirait à la considérer comme abusive. Les deux solutions ne sont pas forcément contradictoires, dès lors que la seconde est également applicable même en l’absence de doute dans l’interprétation de la clause.

Illustrations. Pour des décisions estimant que la clause est abusive dans l’une de ces interprétations. V. par exemple : TI Lyon, 13 septembre 2004 : RG n° 11-03-003586 ; jugt n° 269 ; Cerclab n° 2775 (assurance annulation voyage ; « il convient donc, en application des anciens art. 1157 [1191 nouveau] et 1162 C. civ. [comp. 1190 nouveau] d’interpréter largement la notion de chambre, comme étant celle du domicile ou de la résidence » ; jugement estimant que dans une conception restrictive, la clause serait abusive, en ce qu’elle viderait la garantie de sa substance), confirmé pour d’autres motifs par CA Lyon (6e ch. civ.), 2 mars 2006 : RG n° 04/06687 ; Legifrance ; Cerclab n° 1213 (en raison de la gravité de l’opération chirurgicale subie, quelques jours avant le départ projeté, il doit être relevé que la notion de repos à domicile recouvre dans le cas présent la notion de garder la chambre) - CA Chambéry (2e ch.), 21 mars 2006 : RG n° 05/00682 ; Cerclab n° 589 ; Juris-Data n° 2006-299500 (assurance annulation voyage ; l’application littérale de l’expression « interdiction de quitter la chambre » rendrait la clause abusive en ayant pour effet d’exclure la quasi totalité des pathologies de la garantie annulation, puisqu’elle ne garantirait que des maladies très lourdes qui par hypothèse seront très rares pour des cocontractants désireux de voyager et se trouvant généralement en bonne santé sans affections particulières) - Jur. Prox. Thionville, 26 janvier 2010 : RG n° 91-09-000102 ; Cerclab n° 1644 (interprétation d’une clause d’un contrat de téléphonie mobile en faveur du consommateur, dans le cas d’un renouvellement de l’abonnement avec changement de mobile ; l’interprétation suggérée par le professionnel, si elle était retenue, créerait un déséquilibre significatif) - CA Aix-en-Provence (4e ch. A), 12 mars 2010 : RG n° 08/14037 ; arrêt n° 2010/91 ; Cerclab n° 2869 (la clause d’un mandat non exclusif de vente d’immeuble imposant au mandant d’avertir « immédiatement » le mandataire en cas d’acceptation d’une offre sans son intervention, est respectée lorsque le mandant conclut un samedi et envoie la lettre recommandée avec accusé de réception le lundi ; si la clause est interprétée comme exigeant l’envoi le jour même, quel que soit le jour, elle est impossible à respecter, compte tenu des horaires des bureaux de poste et serait dans ce cas non écrite), sur appel de TGI Marseille (10e ch. civ.), 6 mai 2008 : RG n° 06/4476 ; jugt n° 283 ; Cerclab n° 3712 (absence de caractère abusif de la clause obligeant le mandant à informer le mandataire, cette clause pénale étant la contrepartie du caractère non exclusif du mandat et du droit dont dispose l’acquéreur de contracter avec d’autres acquéreurs ; rejet de l’argument tiré de l’absence de réciprocité, puisque si le mandataire n’informe pas le mandant du fait qu’il a trouvé un acquéreur, il se sanctionne lui même puisqu’à défaut de réalisation de la vente, il ne percevra pas la commission prévue) - CA Rennes (2e ch.), 3 juillet 2020 : RG n° 17/00979 ; arrêt n° 368 ; Cerclab n° 8497 (crédit immobilier ; arrêt écartant l’interprétation de la clause par la banque qui conduirait à la déclarer abusive), sur appel de TGI Quimper, le 24 janvier 2017 : Dnd - CA Rennes (2e ch.), 29 septembre 2023 : RG n° 21/00700 ; arrêt n° 432 ; Cerclab n° 10444 (si cette clause devait s’interpréter comme dispensant le prêteur d’une mise en demeure préalable, elle serait abusive), sur appel de TJ Lorient, 15 janvier 2020 : Dnd.

V. aussi pour le Conseil d’État à propos d’un acte règlementaire : constitue une clause abusive et doit être déclarée illégale la disposition d’un règlement des abonnements du service de l’eau en tant seulement qu’elles exonèrent de toute responsabilité le service des eaux dans le cas où une fuite dans les installations intérieures de l’abonné résulterait d’une faute commise par ce service. CE (3e ch. 8e sect.), 30 décembre 2015 : req. n° 387666 ; Rec. Lebon (tables) ; Cerclab n° 5460, réformant TA Marseille, 16 décembre 2014 : req. n° 1103577 ; Dnd, sur demande de T. com. Marseille, 21 avril 2010 : RG n° 2008F02130 et n° 2008F02334 ; Dnd. § V. aussi, pour le juge administratif, subordonnant la légalité d’un règlement de service des eaux à une réserve d’interprétation : TA Lyon (3e ch.), 2 février 2023 : req. n° 2207360 ; Cerclab n° 10088 (il est déclaré que l'article du règlement de la régie municipale de l'eau n'est pas illégal, sous réserve de ce qui est dit au point 6 du présent jugement ; l’article qualifiant la canalisation située chez l’abonné d’ouvrage public ne peut être légalement interprété, sans le revêtir d'un caractère abusif, comme déchargeant par principe l'exploitant du réseau de toute responsabilité pour les dommages subis sur cette partie de branchement).

Pour une décision privilégieant l’interprétation en faveur du consommateur : jugé qu’en présence d’une clause d’un contrat de prêt, souscrit par un couple, stipulant que la plus élevée des assurances est obligatoire et l’autre facultative, l’imprécision de la clause de résolution du prêt en cas de refus de l’assurance, qui ne précise pas celle qui est visée, n’est pas source de déséquilibre significatif, et qu’elle est seulement de nature à justifier une interprétation de la clause résolutoire, sans que soit remise en cause la stipulation, formulée en des termes clairs, dépourvus d'équivoque, du caractère facultatif de l'assurance souscrite par le mari. CA Aix-en-Provence (ch. 3 - 3), 13 juin 2019 : RG n° 18/13467 ; arrêt n° 2019/277 ; Cerclab n° 7753 (assurance de groupe d’un prêt immobilier souscrit par un couple, avec garantie des risques décès, perte d'autonomie et ITT pour l’épouse, le mari n’étant pas couvert pour l’ITT ; emprunteurs prétendant que cette imprécision rendait les deux assurances obligatoires), sur appel de TGI Aix-en-Provence, 28 juin 2018 : RG n° 16/02680 ; Dnd.

Cas des clauses obscures. Pour une illustration de sanction d’une clause obscure : caractère abusif d’une clause fondée sur son absence de clarté, dès lors qu’elle faisait croire qu’elle offrait une garantie totale, alors qu’elle se limitait à un report des échéances : retour à l’obligation pure et simple de prise en charge telle qu’elle apparaissait à la lecture du paragraphe « personne assurée ». CA Paris (15e ch. B), 15 juin 2001 : RG n° 1998/17051 ; Cerclab n° 914 ; Juris-Data n° 2001-153910, sur appel de TGI Paris (9e ch. 1re sect.), 13 janvier 1998 : RG n° 97/17051 ; Cerclab n° 1014 (problème non examiné).

B. CARACTÈRE ABUSIF CONDITIONNEL

Clause abusive en combinaison avec une autre stipulation. Une clause peut être abusive uniquement lorsqu’elle est combinée avec une autre. TGI Bourgoin-Jallieu, 12 avril 2000 : RG n° 199900069 ; Cerclab n° 338 (« dit abusives les dispositions contenues dans les contrats de dépôt-vente […] et ainsi rédigées : […], 2° « X. ne prévient pas les déposants en cas de vente de leurs objets. Les règlements des ventes du mois en cours se font uniquement la dernière semaine du mois », mais uniquement lorsque cette clause est associée à une clause autorisant le dépositaire à disposer du bien déposé à l’expiration d’un certain délai ») - TGI Nanterre (1re ch. A), 17 mars 1999 : RG n° 12004/98 ; site CCA ; Cerclab n° 4013 ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729 (téléphonie mobile ; est abusive la clause de résiliation sans indemnité, fondée sur le non respect d’une clause elle-même jugée abusive, la clause restant non abusive pour les autres motifs de résiliation).

Clause abusive en l’absence d’adjonction d’une précision. Pour des illustrations dans le cadre d’une action d’une association : CA Paris (25e ch. A), 20 septembre 2002 : RG n° 2001/03498 ; Cerclab n° 902 ; Juris-Data n° 2002-209293 (club de vacances ; 1°/ clause stipulant que l’assurance du club de vacances ne remboursera pas le vol des valeurs et bijoux non déposés au coffre principal du village ; clause abusive si la mention « sauf faute prouvée du Club » n’est pas ajoutée ; 2°/ clause d’annulation sans aucune restitution abusive s’il n’est pas ajouté « sauf cas fortuit ou force majeure... »). § Sur les adjonctions recommandées, V. aussi Cerclab n° 5775.

Option laissée au professionnel. V. dans le cadre d’une action d’une association de consommateurs, laissant une option au professionnel : TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 2 avril 1997 : RG n° 20364/95 ; Cerclab n° 1016 (clause d’adhésion à une association organisatrice de voyages, sans information du consommateur sur son objet, jugée abusive et devant être supprimée, sauf pour l’association à insérer le texte de ses statuts dans sa brochure).

C. CARACTÈRE ABUSIF POUR UNE HYPOTHÈSE AUTRE QUE CELLE DE L’ESPÈCE

Pour une illustration : CA Paris (pôle 4 ch. 9), 8 octobre 2015 : RG n° 14/09638 ; Cerclab n° 5434 (clause non abusive, conforme au Code du tourisme qui ne met à la charge de l'agence de voyages une obligation d'information sur les conditions administratives de franchissement des frontières qu'au profit des ressortissants des nationalités des pays de l'Union européenne), sur appel de TI Paris (8e arrdt), 25 mars 2014 : RG n° 11-13-000537 ; Dnd. § N.B. La clause semblait avoir une rédaction générale et elle aurait été déclarée illicite et abusive pour un ressortissant de l’Union.