CA LYON (1re ch. civ. A), 5 avril 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3901
CA LYON (1re ch. civ. A), 5 avril 2012 : RG n° 10/06274
Publication : Jurica
Extrait : « Mais, les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile ne sont pas applicables au professionnel qui conclut un contrat ayant un rapport direct avec son activité professionnelle. Monsieur X. a conclu le contrat d'abonnement et de location d'un site internet avec la Sarl Ascomedia dans le but, comme il le précise lui-même, d'assurer la promotion de son entreprise à l'approche de la rentrée de septembre. Le contrat litigieux avait un rapport direct avec l'activité professionnelle de Monsieur X., puisqu'il tendait à en assurer le développement. Il est indifférent que ce dernier n'ait pas de compétences particulières dans le domaine informatique. Dès lors, Monsieur X. doit être considéré comme un professionnel pour lequel les dispositions du code de la consommation sont inapplicables. La nullité du contrat d'abonnement et de location de site internet pour défaut de mentions prévues par ces dispositions n'est donc pas encourue. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION A
ARRÊT DU 5 AVRIL 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 10/06274. Décision du tribunal de commerce de Lyon, au fond du 6 juillet 2010 : R.G. n° 2010J1108.
APPELANT :
Monsieur X., exerçant sous l'enseigne […]
né le [date] à [ville], représenté par la SCP BAUFUME - SOURBE, avocats au barreau de LYON, assisté de Maître Julie CANTON, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
SARL ASCOMEDIA
représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, assistée de la SELARL PIVOINE, avocats au barreau de LYON
Date de clôture de l'instruction : 1er juillet 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 février 2012
Date de mise à disposition : 5 avril 2012
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Michel GAGET, président - François MARTIN, conseiller - Philippe SEMERIVA, conseiller, assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Michel GAGET a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.
Arrêt : Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 6 juillet 2010 qui constate la résiliation du contrat conclu entre la SARL Ascomedia et Monsieur X., exerçant sous l'enseigne Ajc Net, et ce, aux torts exclusifs de Monsieur X. et qui le condamne à payer diverses sommes, sauf une clause pénale ;
Vu la déclaration d'appel faite le 19 août 2010 par Monsieur X. ;
Vu les conclusions en date du 16 mai 2011 de Monsieur X. qui soutient la réformation de cette décision et qui fait valoir, au visa des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation et des articles 1134, 1183, 1184, 1382 du Code civil :
1°/ la nullité du contrat conclu le 10 juin 2009 comme une vente à domicile ;
2°/la résolution judiciaire pour inexécution des obligations contractuelles de la société Ascomedia ;
3°/ la constatation qu'il a exécuté, lui, ses obligations en s'acquittant du prix de l'abonnement ;
4°/ la condamnation de la société Ascomedia à rembourser la somme de 1.004,64 euros correspondant aux abonnements de juillet à octobre 2009 avec intérêts au taux légal à compter des conclusions initiales n° 1.
Vu les conclusions de la SARL Ascomedia en date du 8 avril 2011 soutenant la confirmation de la décision attaquée, sauf à porter à 3.000 euros l'indemnité due en vertu de l’article 700 du code de procédure civile aux motifs, d'une part, que les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile ne s'appliquent pas en l'espèce, et d'autre part qu'elle a exécuté le contrat, alors que Monsieur X. ne l'a pas fait en faisant opposition aux prélèvements des mensualités à compter d'octobre 2009 ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 1er juillet 2011 ;
Les conseils des parties ont présenté à l'audience du 15 février 2012 leurs explications orales après que Monsieur le Président Michel Gaget ait fait le rapport.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DÉCISION :
Le 10 juin 2009, Monsieur X., exerçant sous l'enseigne AJC NET, signait un contrat d'abonnement et de location d'un site internet avec la SARL Ascomedia, pour un montant mensuel de 251,16 euros pendant une durée de 48 mois.
Le 7 juillet 2009, Monsieur X. signait un procès-verbal de livraison et de réception mentionnant que le nom de domaine, l'adresse mail et la charte graphique étaient conformes et en parfait état de fonctionnement.
Le 16 octobre 2009, il manifestait son mécontentement et sa volonté de résilier le contrat, le site ne correspondant pas à ce qu'il attendait. Par la suite, il a fait opposition aux prélèvements de la société Ascomedia.
La société Ascomedia a mis Monsieur X. en demeure de lui payer les sommes dues par lettre recommandée du 25 janvier 2010.
Vu l'article L. 121-22 du code de la consommation,
Monsieur X. soulève la nullité du contrat, dès lors que celui-ci a été conclu à la suite d'un démarchage à domicile et que les mentions prévues à l'article L. 121-23 du code de la consommation n'ont pas été respectées. Il estime que cet article est applicable à sa situation dès lors qu'il ne possédait dans le cadre de son activité professionnelle d'aucune compétence particulière dans le domaine de l'informatique.
La SARL Ascomedia soutient pour sa part que ces dispositions ne lui sont pas applicables dès lors que Monsieur X. a conclu un contrat ayant un rapport direct avec son activité professionnelle, puisqu'il servait à promouvoir et développer cette activité.
Mais, les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile ne sont pas applicables au professionnel qui conclut un contrat ayant un rapport direct avec son activité professionnelle.
Monsieur X. a conclu le contrat d'abonnement et de location d'un site internet avec la Sarl Ascomedia dans le but, comme il le précise lui-même, d'assurer la promotion de son entreprise à l'approche de la rentrée de septembre.
Le contrat litigieux avait un rapport direct avec l'activité professionnelle de Monsieur X., puisqu'il tendait à en assurer le développement. Il est indifférent que ce dernier n'ait pas de compétences particulières dans le domaine informatique.
Dès lors, Monsieur X. doit être considéré comme un professionnel pour lequel les dispositions du code de la consommation sont inapplicables.
La nullité du contrat d'abonnement et de location de site internet pour défaut de mentions prévues par ces dispositions n'est donc pas encourue.
Monsieur X. conclut également à la résolution du contrat litigieux au motif que la SARL Ascomedia n'aurait pas exécuté certaines de ses obligations. Il souligne que la livraison du site a été tardive, puisqu'elle a été effectuée le 21 octobre 2009, que le référencement du site dans les moteurs de recherche et que le « push mailing » n'ont pas été mis en place.
Sur les éléments de preuve, il estime que le procès-verbal de livraison ne lui est pas opposable, puisqu'il l'a signé sur seule présentation d'une impression de la page d'accueil non achevée de son site et qu'il pensait ne valider que le graphisme de cette page.
De plus, il relève que le procès-verbal de livraison ne mentionne pas la conformité du site mais simplement le nom de domaine, de l'adresse mail et de la charte graphique.
La SARL Ascomedia relève que Monsieur X. a affirmé être satisfait de la qualité graphique du site dans un courrier du 16 octobre 2009, ce qui montre qu'il a été mis en ligne avant le 21 octobre 2009, le mail visé ayant simplement pour but de lui transmettre le login et le mot de passe.
Le procès-verbal de livraison signé par Monsieur X. mentionne que « le locataire/client reconnaît sans réserve qu'il a pris livraison de l'ensemble des noms de domaines, adresses, logiciels et matériels désignés ci-dessous. Il les déclare conformes et en parfait état de fonctionnement et les accepte sans restriction ni réserve ».
Il ressort de ce document que la société Ascomedia avait bien, le 7 juillet 2009, délivré le nom de domaine, les adresses mails et la charte graphique.
Il ressort également d'une lettre du 16 octobre 2009 que le site internet était bien créé puisque Monsieur X. se montrait satisfait du logo et de la page d'accueil, et demandait à la société Ascomedia de compléter le site web avec certaines données.
Il s'évince de ce qui précède que la société Ascomedia a rempli ses obligations contractuelles en mettant en ligne le site internet, dont il n'est pas démontré qu'il n'est pas conforme.
De plus, Monsieur X. ne démontre pas que le référencement du site sur les moteurs de recherche et le « push mailing » n'ont pas été mis en place.
La résiliation du contrat a donc eu lieu aux torts exclusifs de Monsieur X., qui doit en assumer les conséquences.
En conséquence, la demande reconventionnelle tendant à obtenir la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts en raison du préjudice causé par la défaillance de la société Ascomedia est rejetée.
Il résulte de l'article 9 des conditions générales de prestations de services du contrat d'abonnement de prestations qu'à titre d'indemnité contractuelle de résiliation anticipée, le solde des loyers de la période contractuelle en cours deviendra immédiatement et de plein droit exigible.
La société Ascomedia demande sur ce point la confirmation du jugement.
Conformément à ce qui a été retenu par les premiers juges, Monsieur X. est condamné à payer à la société Ascomedia la somme de 753,48 euros (mois de novembre, décembre et janvier 2009 à 251,16 euros chacun) au titre des loyers impayés, ainsi que la somme de 10.297,56 euros (41 mois restants à 251,16 euros chacun) au titre des loyers à échoir.
Il n'y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en appel.
Monsieur X. qui perd supporte les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 juillet 2010 par le tribunal de commerce de Lyon ;
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en appel,
Condamne Monsieur X. au paiement des dépens d'appel,
Autorise ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande à recouvrer les dépens d'appel dans les formes et conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Joëlle POITOUX Michel GAGET
- 5829 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’ordre public - Conséquences : reconnaissance du caractère professionnel du contrat
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