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TI BELFORT, 26 juillet 2010

Nature : Décision
Titre : TI BELFORT, 26 juillet 2010
Pays : France
Juridiction : Belfort (TI)
Demande : 11-10-000390
Date : 26/07/2010
Nature de la décision : Irrecevabilité
Mode de publication : Lexbase
Date de la demande : 25/05/2010
Décision antérieure : CA BESANÇON (2e ch. civ.), 14 septembre 2011
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4206

TI BELFORT, 26 juillet 2010 : RG n° 11-10-000390

(sur appel CA Besançon (2e ch. civ.), 14 septembre 2011 : RG n° 10/02449)

Publication : Lexbase

 

Extraits : 1/ « L'article L. 141-4 du Code de la consommation dispose que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. En outre, conformément aux dispositions de l'article 125 du Code de procédure civile, les fins de non-recevoir, au nombre desquelles figure le délai préfix, doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public. Conformément à l'article L. 311-37 du Code de la consommation, l'action en paiement du solde d'un crédit engagée devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur, doit être formée dans le délai de deux ans qui suit l'événement qui lui a donné naissance à peine de forclusion. Ce délai présente bien un caractère d'ordre public et il appartient au Tribunal de veiller à l'application de cette disposition. »

2/ « D'autre part, en matière de crédit à la consommation, en application de l'article L. 311-10 du Code de la consommation, toute modification du montant du crédit précédemment accordé doit être conclue dans les termes d'une nouvelle offre préalable. Ce texte a pour but d'éclairer l'emprunteur sur la portée du nouvel engagement qu'il va souscrire, de lui permettre de mesurer le poids des remboursements à effectuer, de son endettement corrélatif et d'user éventuellement de son droit de rétractation. L’existence d'une convention tacite de découvert est incompatible avec la conclusion préalable d'une convention expresse de découvert d'un montant déterminé sur un même compte. […]

Enfin, la clause susnommée inscrite dans les conditions générales figurant au verso de l'offre préalable signée par Monsieur X. et Madame Y. épouse X. s'interprète comme une clause permettant au prêteur d'augmenter le découvert maximum autorisé, sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit. […] Une telle clause apparaît, dès lors, non seulement comme une atteinte à la protection accordée à l'emprunteur, non-professionnel ou consommateur, mais également comme une atteinte aux règles de la concurrence. Cette clause est dès lors une clause abusive qui doit être réputée non écrite. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE BELFORT

JUGEMENT DU 26 JUILLET 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-10-000390. Nature de l’affaire : 53B - 0A.

 

DEMANDEUR :

SA LASER COFINOGA

[adresse], Représentée par la SCP BELIN-SCHARTNER-DAREY, avocats du barreau de BELFORT

 

DÉFENDEUR :

Monsieur X.,

Madame Y. épouse X.

[adresse], Non comparants

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Louis-Albert DEVILLAIRS, Juge d'instance

Maryse TORMENA, faisant fonctions de Greffier

DÉBATS : Audience publique du 17 juin 2010

JUGEMENT : prononcé le 26 juillet 2010, par mise à disposition au greffe par Louis-Albert DEVILLAIRS, Juge d'instance, assisté de Maryse TORMENA, faisant fonctions de Greffier

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte introductif d'instance en date du 25 mai 2010, la SA LASER COFINOGA a assigné Monsieur X. et Madame Y. épouse X. devant le Tribunal d'Instance de céans et ce aux fins de les condamner solidairement à lui verser les sommes suivantes

- 18.689,33 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 17,99 % l'an à compter du 24 février 2009, date de la mise en demeure de payer,

- 1.203,30 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification à compter de la même date,

- 300,00 euros au titre de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens. Elle sollicite également l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

A l'appui de ses prétentions, la SA LASER COFINOGA fait valoir que suivant acte sous seing privé en date du 4 mars 2000, elle a consenti à Monsieur X. et Madame Y. épouse X. une ouverture de crédit dans une limite maximale de 21.500,00 euros, la première tranche du découvert étant fixée à 3.048,98 euros. Elle précise que les sommes empruntées étaient stipulées remboursables à raison d'acomptes mensuels en fonction du montant de celles-ci, avec intérêts au taux de 17,99 %. Elle déclare que les débiteurs n'ayant pas tenu leurs engagements, ils restent lui devoir la somme totale de 19.892,63 euros.

A l'audience du 17 juin 2010, la SA LASER COFINOGA a réitéré l'ensemble de ses prétentions et moyens et a déclaré s'en rapporter sur le moyen de droit soulevé par le Tribunal tiré de la forclusion de son action en paiement.

Bien que régulièrement cités, conformément à l'article 656 du Code de procédure civile, Monsieur X. et Madame Y. épouse X. n'ont pas comparu et ne se sont pas faits représenter à l'audience du 17 juin 2010.

Il y a donc lieu de statuer par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, eu égard à la valeur en litige.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande en paiement :

Selon l'article 472 du Code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Aux termes de l'article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour causes que la loi autorise et elles doivent être exécutées de bonne foi.

Suivant acte sous seing privé en date du 4 mars 2000, la SA LASER COFINOGA a consenti à Monsieur X. et Madame Y. épouse X. une ouverture de crédit dans une limite maximale de 21 500,00 euros, la première tranche du découvert étant fixée à 3. 048,98 euros.

En vertu des dispositions de l'article L. 311-30 du Code de la consommation et de l'article 2 du décret du 17 mars 1978, reprises au contrat, le prêteur, en cas de défaillance de l'emprunteur, peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, jusqu'à la date du règlement [minute page 3] effectif, les sommes restant dues produisent des intérêts de retard à un taux égal à celui du contrat de crédit, en outre le prêteur peut en vertu du contrat signé entre les parties demander à l'emprunteur défaillant une indemnité égale à 8 % du capital restant dû,

A l'appui de ses prétentions, la partie demanderesse produit les pièces suivantes

- une offre préalable d'ouverture de crédit signé par Monsieur X. et Madame Y. épouse X.,

- un décompte de la créance daté du 31 mars 2010,

- un historique des paiements,

- une lettre de mise en demeure avec accusé de réception adressée respectivement à Monsieur X. le 19 février 2010.

Il ressort de l'offre préalable de crédit produite aux débats et signée par Monsieur X. et Madame Y. épouse X. le 4 mars 2000 que le montant maximum de crédit autorisé était fixée à la somme de 140.000 francs et le montant du découvert maximum autorisé à l'ouverture du compte était arrêté à celle de 20.000,00 francs soit 3.048,98 euros.

L'article L. 141-4 du Code de la consommation dispose que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. En outre, conformément aux dispositions de l'article 125 du Code de procédure civile, les fins de non-recevoir, au nombre desquelles figure le délai préfix, doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public.

Conformément à l'article L. 311-37 du Code de la consommation, l'action en paiement du solde d'un crédit engagée devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur, doit être formée dans le délai de deux ans qui suit l'événement qui lui a donné naissance à peine de forclusion. Ce délai présente bien un caractère d'ordre public et il appartient au Tribunal de veiller à l'application de cette disposition.

Or, il résulte des éléments du dossier produits par la SA LASER COFINOGA, notamment de l'historique de compte que le découvert a dépassé la somme de 3.048,98 euros à partir du 12 mars 2007 et a duré plus de deux ans, pour ne plus revenir en dessous de ce seuil.

Il importe de souligner que la SA LASER COFINOGA s'est expliquée sur ce moyen de droit à l'audience du 17 juin 2010.

Les conditions générales figurant au verso de l'offre préalable de crédit signée par Monsieur X. et Madame Y. épouse X. stipulent dans son article 4 que « sauf accord préalable de COFINOGA, le montant du financement ne devra en aucun cas conduire à un dépassement du montant maximum du découvert autorisé, ou tel qu'il aura été révisé après que vous en ayant été avisé par COFINOGA ». De même, cet article énonce que « l'accord de COFINOGA pour une augmentation à votre demande, du plafond du découvert autorisé au terme de la présente offre résultera de la mise à disposition effective du montant représentatif de l'augmentation sollicitée et/ou l'inscription effective de l'opération débit domiciliée ».

D'une part, le découvert d'un montant de 3.048,98 euros inscrit dans l'offre de crédit préalable signée le 4 mars 2000 par Monsieur X. et Madame Y. épouse X. constitue le découvert maximum autorisé, dès lors que l'emprunteur n'a, dès la signature du contrat, aucune assurance de bénéficier d'un découvert supérieur à cette somme et pouvant atteindre 140.000 francs, le [minute page 4] dépassement de la somme de 3.048,98 euros devant faire ainsi l'objet d'un accord du prêteur et étant soumis à des conditions qui ne sont pas uniquement une condition de temps (périodicité) telles que prévues par l'article L 311-9 du Code de la consommation.

De plus, la dispense d'offre prévue par l'article L. 311-9 du Code de la consommation doit par ailleurs s'appliquer de manière stricte et être limitée aux seuls financements successifs consentis dans le cadre du montant maximal arrêté contractuellement par les parties et au fur et à mesure du remboursement du capital emprunté.

En l'espèce, si les modalités de fonctionnement de l'offre de crédit mentionnaient qu'elles étaient faites pour un montant maximal de découvert autorisé de 140.000 francs, les parties avaient expressément limité le montant du découvert autorisé, en l'espèce le découvert disponible à l'ouverture du compte à la somme de 20.000 francs (3 048,98 euros).

D'autre part, en matière de crédit à la consommation, en application de l'article L. 311-10 du Code de la consommation, toute modification du montant du crédit précédemment accordé doit être conclue dans les termes d'une nouvelle offre préalable. Ce texte a pour but d'éclairer l'emprunteur sur la portée du nouvel engagement qu'il va souscrire, de lui permettre de mesurer le poids des remboursements à effectuer, de son endettement corrélatif et d'user éventuellement de son droit de rétractation.

L’existence d'une convention tacite de découvert est incompatible avec la conclusion préalable d'une convention expresse de découvert d'un montant déterminé sur un même compte.

En l'absence, d'un avenant augmentant dans des conditions régulières le montant du découvert initialement autorisé, le dépassement de ce découvert dès lors qu'il n'a pas été restauré, manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai de forclusion.

Enfin, la clause susnommée inscrite dans les conditions générales figurant au verso de l'offre préalable signée par Monsieur X. et Madame Y. épouse X. s'interprète comme une clause permettant au prêteur d'augmenter le découvert maximum autorisé, sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit.

Or cette clause a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat en ce que l'emprunteur ne dispose pas, à l'occasion de l'augmentation du découvert autorisé de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation, que ce soit parce que le nouveau crédit excède ses capacités contributives ou parce que la concurrence offre de meilleures conditions.

Une telle clause apparaît, dès lors, non seulement comme une atteinte à la protection accordée à l'emprunteur, non-professionnel ou consommateur, mais également comme une atteinte aux règles de la concurrence. Cette clause est dès lors une clause abusive qui doit être réputée non écrite.

En conséquence, compte tenu de l'ensemble des éléments qui précèdent et du fait que Monsieur X. et Madame Y. ont été assignés par la SA LASER COFINOGA devant le Tribunal d'instance de céans le 25 mai 2010 et le découvert de 20.000 francs, soit 3.048,98 euros a été dépassé à partir du 12 mars 2007, c'est-à-dire pendant plus de deux ans, pour ne plus revenir en dessous [minute page 5] de ce seuil, il y a lieu de déclarer l'action de la demanderesse forclose, et, dès lors, irrecevable, en application de l'article L. 311-37 du Code de la consommation.

En application de l'article 696 du Code de procédure civile, la SA LASER COFINOGA sera condamnée aux dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal statuant par jugement par réputé contradictoire et en premier ressort mis à disposition au greffe,

DÉCLARE abusive la clause ci-après rédigée dans l'offre préalable de crédit émanant de la SA LASER COFINOGA acceptée le 20 mars 2000 par Monsieur X. et Madame Y. épouse X. :

article 4 : « l'accord de COFINOGA pour une augmentation à votre demande, du plafond du découvert autorisé au terme de la présente offre résultera de la mise à disposition effective du montant représentatif de l'augmentation sollicitée et/ou l'inscription effective de l'opération débit domiciliée ».

En conséquence,

DÉCLARE l'action en paiement de la SA LASER COFINOGA contre Monsieur X. et Madame Y. épouse X. au titre du crédit en cause irrecevable comme forclose ;

CONDAMNE la SA. LASER COFINOGA aux entiers frais et dépens de la présente instance.

LE GREFFIER,        LE JUGE D'INSTANCE,

Louis-Albert DEVILLAIRS