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CA PAU (1re ch.), 19 mars 2013

Nature : Décision
Titre : CA PAU (1re ch.), 19 mars 2013
Pays : France
Juridiction : Pau (CA), 1re ch.
Demande : 12/00374
Décision : 13/1162
Date : 19/03/2013
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 31/01/2012
Numéro de la décision : 1162
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4343

CA PAU (1re ch.), 19 mars 2013 : RG n° 12/00374 ; arrêt n° 13/1162

Publication : Jurica

 

Extrait : « La SAS France Cars a sollicité d'autre part le paiement de la somme de 1.313 euros correspondant aux frais d'immobilisation du véhicule loué, en s'appuyant sur l'article 13 les conditions générales du contrat dont il résulte que « l'immobilisation de la voiture pour quelque cause que ce soit, même à l'extérieur ou pour cause indépendante de la volonté du locataire, donnera lieu au paiement par celui-ci d'une indemnité égale au prix de la location de la voiture, sans kilométrage, pour une durée qui ne pourra toutefois excéder 30 jours, sous réserve de l'exécution par le locataire de toutes les obligations prévues au contrat ». […]

En l'espèce, l'application de cet article aurait pour effet de mettre à la charge du non professionnel le paiement d'une indemnité d'immobilisation du véhicule dans tous les cas, y compris celui où sa responsabilité ne serait pas engagée, ainsi que dans un cas de force majeure. Cette clause doit donc être réputée non écrite et la SAS France Cars sera donc également déboutée de cette demande. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PAU

PREMIÈRE CHAMBRE

ARRÊT DU 19 MARS 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/00374. Arrêt n° 13/1162. Nature affaire : Demande en exécution ou en dommages-intérêts pour mauvaise exécution d'un autre contrat.

ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 mars 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 19 novembre 2012, devant : Monsieur AUGEY, magistrat chargé du rapport, assisté de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes,

Monsieur AUGEY, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Madame BENEIX et en a rendu compte à la Cour composée de : Madame PONS, Président, Monsieur AUGEY, Conseiller, Madame BENEIX, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la loi, dans l'affaire opposant :

 

APPELANTE :

SAS FRANCE CARS venant aux droits de la SAS Walter SPANGHERO LCD

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, représentée par la SCP LONGIN - LONGIN-DUPEYRON - MARIOL, avocats à la Cour, assistée de Maître Laurent CALONNE, avocat au barreau de LILLE

 

INTIMÉ :

FOOTBALL ASSOCIATION X.

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège, représenté par la SCP DUALE - LIGNEY, avocats à la Cour, assisté de Maître David BONNEMASON-CARRERE, avocat au barreau de PAU

 

sur appel de la décision en date du 19 OCTOBRE 2011, rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le Football Association X. a loué le 19 février 2010 un véhicule auprès de la SAS France Cars, en vue d'assurer le déplacement de ses adhérents, et le véhicule a subi un accident le 20 février 2010 par suite d'un défaut de maîtrise du véhicule imputable à son conducteur.

L'expertise amiable a conclu au caractère économiquement irréparable du véhicule, et sa valeur vénale a été fixée à 13.801,84 euros.

La SAS France Cars a sollicité le paiement par le Football Association Bourbaki d'une somme de 15.459,82 euros au motif que les conditions générales du contrat d'assurance du véhicule mettent à la charge du locataire le montant des réparations ou de la valeur vénale du véhicule ainsi que le coût de son immobilisation, en cas de dommages causés en l'absence de tiers identifié.

Par acte d'huissier du 17 novembre 2010, elle a fait assigner cette association à cette fin devant le tribunal de grande instance de Pau.

Par jugement du 19 octobre 2011, cette juridiction a débouté la société France Cars de l'ensemble de ses demandes, et l'a condamnée à payer au Football Association X. une indemnité de 1.500 euros pour frais irrépétibles.

 

Par déclaration au greffe du 31 janvier 2012, la société France Cars a relevé appel de ce jugement.

Dans ses dernières écritures déposées le 19 septembre 2012, elle a conclu à la réformation de ce jugement ainsi qu'à la condamnation du Football Association X. au paiement de la somme de 15.459,82 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2010, représentant le montant de la franchise, ainsi que des frais de sinistre, de gestion, et d'immobilisation du véhicule, outre une indemnité de 2.000 euros pour frais irrépétibles.

Elle fait valoir qu'elle se réfère exclusivement aux stipulations dénuées d'ambiguïté de l'article 12 des conditions générales du contrat de location, dont il résulte que le locataire reste redevable du montant des réparations ou de la valeur vénale du véhicule lorsque les dommages ont été causés en l'absence de tiers identifié, et qu'elle ne met donc pas en cause l'existence d'une faute inexcusable ou d'une négligence caractérisée commise par le chauffeur du véhicule.

Elle ajoute qu'elle n'a pas manqué à son obligation d'information et de conseil, le contrat stipulant en caractères gras et dans un encadré que le locataire a reconnu avoir pris connaissance des conditions générales de location.

Elle soutient par ailleurs que contrairement à ce qu'a décidé le tribunal, l'article 13 des conditions générales de ce contrat qui prévoit le paiement d'une indemnité en cas d'immobilisation du véhicule ne constitue pas une clause abusive, puisqu'il n'est pas démontré en quoi cette clause créerait un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat.

 

Dans ses dernières écritures du 2 novembre 2012, le Football Association X. a conclu à la confirmation du jugement, et sollicité le paiement d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts et d'une indemnité de 2.000 euros pour frais irrépétibles.

Elle fait valoir que la clause d'exclusion de garantie édictée par l'article 12 n'est ni claire ni précise, et que sa formulation implique nécessairement la participation d'un tiers autre que le locataire dans le cadre de la réalisation du dommage, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Elle ajoute que cette convention s'inscrit dans le cadre de la souscription d'une assurance de groupe, puisque l'association loue régulièrement des autobus destinés au transport de joueurs, et que cela implique donc une obligation spéciale d'information du souscripteur.

Elle s'appuie sur les dispositions de l’article L. 141-1 du code des assurances pour soutenir que le loueur s'est comporté en qualité de souscripteur d'assurance groupe lorsqu'il loue des véhicules automobiles, puisqu'il s'agit d'un contrat souscrit par une personne morale en vue de l'adhésion d'un ensemble de personnes répondant à des conditions définies au contrat pour la couverture des risques dépendants de la durée de la vie humaine ainsi que ceux portant atteinte à l'intégrité physique de la personne.

Elle fait observer que la notice d'information ne dispense pas le souscripteur de l'assurance de son devoir contractuel de mise en garde et de conseil de la solution adaptée aux intérêts personnels de son client.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 novembre 2012.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs de l'arrêt :

La SAS France Cars s'oppose à la prise en charge du sinistre survenu le 20 février 2010 résultant d'un accident subi par le véhicule qui avait été loué au Football Association X. en invoquant les dispositions de l'article le 12 des conditions générales de la police d'assurance qui stipulent que : « le locataire sera redevable du montant total des réparations ou de la valeur vénale du véhicule dans les cas suivants :

- dommages causés en l'absence de tiers identifié ».

Le Football Association X. a soutenu en premier lieu que la SAS France Cars a manqué à son obligation édictée par l’article L. 141-1 du code des assurances relatives au contrat d'assurance - groupe mettant à la charge de l'assureur une obligation spécifique d'information claire et précise sur les risques garantis ainsi que sur les modalités de la mise en jeu de l'assurance.

L’article L. 141-1 du code des assurances a pour objet de garantir « les risques dépendants de la durée de la vie humaine, ainsi que ceux portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maladie, et les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité ou du risque de chômage ».

Or, en l'espèce, le contrat d'assurance a pour objet exclusif d'assurer la couverture des dommages purement matériels causés au véhicule automobile, et les dispositions précitées ne sont donc pas applicables.

L'article 12 des conditions générales du contrat de location édicte une série d'exclusions de garantie qui s'applique « aux dommages causés en l'absence de tiers identifié, ou à la suite d'une faute inexcusable ou encore d'une négligence caractérisée ».

Les clauses d'exclusion de garanties figurant dans un contrat d'assurance doivent être interprétées de manière stricte, notamment lorsqu'il a été conclu entre un professionnel et un non professionnel, ce qui est le cas en l'espèce.

La clause invoquée par la société France Cars ne peut s'appliquer à l'accident en cause, puisque sa formulation implique nécessairement la participation d'un tiers autre que le locataire du véhicule dans la réalisation du dommage, et en outre, elle ne permet pas d'affirmer qu'elle est susceptible de viser la participation du locataire lui-même en tant que chauffeur du véhicule.

En effet, la clause d'exclusion de garantie visant la faute commise par l'assuré est expressément stipulée à l'article 12 du contrat à la suite de celles relative à la participation d'un tiers.

Le locataire était donc légitimement en droit de croire que cette clause d'exclusion visait des dommages causés par une personne autre que lui-même, et dont l'identité n'aurait pas pu être établie, par exemple dans le cas d'un délit de fuite, d'autant que la clause d'exclusion de garantie relative à la faute de l'assuré n'a été invoquée à aucun moment par la SAS France Cars.

Or, il est constant et non contesté que l'accident n'a mis en cause aucun tiers puisque c'est le conducteur qui, en voulant régler le chauffage, a commis une manœuvre malencontreuse qui a été à l'origine de la perte de la maîtrise du véhicule.

La SAS France Cars ne peut donc opposer cette exception de non-garantie, et il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement d'une indemnité correspondant à la valeur vénale du véhicule accidenté.

La SAS France Cars a sollicité d'autre part le paiement de la somme de 1.313 euros correspondant aux frais d'immobilisation du véhicule loué, en s'appuyant sur l'article 13 les conditions générales du contrat dont il résulte que « l'immobilisation de la voiture pour quelque cause que ce soit, même à l'extérieur ou pour cause indépendante de la volonté du locataire, donnera lieu au paiement par celui-ci d'une indemnité égale au prix de la location de la voiture, sans kilométrage, pour une durée qui ne pourra toutefois excéder 30 jours, sous réserve de l'exécution par le locataire de toutes les obligations prévues au contrat ».

Le Football Association X. soutient qu'il s'agit d'une clause abusive en invoquant les dispositions de l’article L. 132 du code de la consommation dont il résulte que « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat ».

En l'espèce, l'application de cet article aurait pour effet de mettre à la charge du non professionnel le paiement d'une indemnité d'immobilisation du véhicule dans tous les cas, y compris celui où sa responsabilité ne serait pas engagée, ainsi que dans un cas de force majeure.

Cette clause doit donc être réputée non écrite et la SAS France Cars sera donc également déboutée de cette demande.

En définitive, il y a lieu de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Pau du 19 octobre 2001, y compris en ce qui concerne la condamnation de la société France Cars au paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles.

Le Football Association X. ne justifie pas « d'une atteinte à l'intégrité de son consentement », pas plus que d'un préjudice indemnisable, et elle sera donc déboutée de sa demande en dommages-intérêts.

Par contre, il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel ; la SAS France Cars sera condamnée à lui payer à ce titre une indemnité de 2.000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Pau du 19 octobre 2011, et y ajoutant,

Condamne la SAS France Cars à payer au Football Association X. pris en la personne de son représentant légal, une indemnité de 2.000 euros (deux mille euros) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne la SAS France Cars aux dépens.

Autorise les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer contre la partie condamnée ceux dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,

Mireille PEYRON     Françoise PONS