CA DIJON (1re ch. civ.), 16 avril 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4559
CA DIJON (1re ch. civ.), 16 avril 2013 : RG n° 12/00590
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « mais attendu qu'une demande de réparation suppose nécessairement la preuve de l'existence d'un préjudice pouvant être rattaché aux faits allégués ; or attendu que si l’article 1er de la loi du 6 juillet 1989 pose le principe de l'équilibre des relations entre bailleurs et preneurs, et si la rédaction du bail montre une insistance particulière sur les obligations du preneur au détriment de celles du bailleur, et ne se réfère pas expressément à la loi du 6 juillet 1989, le bail y demeurait obligatoirement soumis, en sorte que le bailleur était bien tenu des obligations imposées par la loi ayant précisément pour objet de veiller à cet équilibre ».
2/ « attendu s'agissant plus spécifiquement de l'insertion des clauses litigieuses, que Monsieur X. a aujourd'hui clarifié le fondement de ses réclamations en indiquant qu'elles reposent sur les dispositions d'ordre public de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 et soutient que la première clause relative à la charge de la réparation des dégradations des parties communes viole l'article 7 de la loi en ce sens que la responsabilité du preneur ne pourrait être présumée que pour les dégradations survenues dans les locaux dont il a l'usage exclusif, et que la seconde clause relative aux conséquences financières du non-paiement à son échéance des loyers, viole les articles 4 et 7 de la loi dans la mesure où la stipulation d'amendes est prohibée et où le locataire n'est pas tenu de régler des sommes supérieures au montant du loyer ;
mais attendu en premier lieu, qu'aucune des clauses objet de la présente instance ne se trouve visée par l’article 4 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction applicable à la date du bail, comme étant réputée non écrite ; attendu ensuite, que la SCI FIF répond à bon droit, s'agissant de la première clause, que le fait que l'article 7 prévoit en son paragraphe c), le principe d'une obligation pour le locataire de répondre des dégradations dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, n'exclut nullement, en application des règles générales de la responsabilité civile, une obligation éventuelle de la part du locataire à réparer les dégradations susceptibles d'être commises par lui ou par toute personne dont il répond et notamment, les dégradations pouvant être commises à la faveur d'un déménagement ; que la clause n'est pas illégale ;
attendu s'agissant de la clause prévoyant une indemnité en cas de manquement par le preneur à ses obligations de paiement, elle s'analyse en une clause pénale conforme aux prévisions de l’article 1152 du code civil, soumise, en tout état de cause, au pouvoir de modération du juge, si elle apparaît manifestement excessive ; que cette clause n'est en conséquence, nullement assimilable à l'amende prohibée par l'article 4 i) de la loi du 6 juillet 1989 ;
attendu que Monsieur X. qui, au surplus, ne justifie pas que la bailleresse ait eu à se prévaloir des clauses litigieuses à son encontre, ne démontre pas en quoi l'insertion ou l'exécution alléguée de ces deux clauses non proscrites a pu générer les préjudices dont il réclame réparation ; que l'absence de démonstration de l'illégalité de la première clause, et du caractère abusif de la seconde induit le rejet tant de la demande de nullité présentée, sans qu'il y ait lieu de répondre sur les fins de non recevoir soulevées par la SCI FIF quant à sa recevabilité, que des demandes d'indemnisation présentées par Monsieur X. en rapport avec l'insertion et l'exécution alléguée de ces clauses ».
3/ « attendu que si Monsieur X. a eu gain de cause, devant la Cour de Cassation en ce que l’arrêt de la Cour d'appel de Reims du 20 février 2008 n'avait relevé aucune transgression par le premier juge des règles procédurales, alors qu'il y avait eu atteinte au principe de l'oralité des débats, il reste que l'abus du droit d'ester en justice est caractérisé en l'espèce, par l'acharnement de Monsieur X. à maintenir des procédures destinées à obtenir, plusieurs années après la fin du bail, la nullité de clauses de celui-ci sans intérêt actuel, et des réparations sur l'allégation de préjudices non justifiés, en rapport avec l'illégalité ou le caractère abusif de ces clauses ne reposant sur aucun motif sérieux, et est encore démontré par la démultiplication de procédures venues à la même audience, portant chacune sur des clauses différentes du même contrat de bail révélant en réalité, un détournement de l'institution judiciaire, à des fins de nuisance à l'égard de son ancien propriétaire dont le préjudice est caractérisé, indépendamment des frais engendrés réparés par les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, par le trouble entretenu pour le bailleur par le maintien, en toute inutilité, des années durant, de l'existence de procédures artificiellement multipliées en nombre ; que Monsieur X. sera condamné envers la SCI FIF au paiement de la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice spécifique à la présente instance. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DIJON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 16 AVRIL 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/00590. Décision déférée à la Cour : AU FOND du 8 JANVIER 2004, rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE TROYES : R.G. 1ère instance n° 11-03-000967. Sur renvoi après cassation du 29 SEPTEMBRE 2010, par la 3ème Chambre Civile (pourvoi n° D-09-10044), de l'arrêt rendu le 20 FÉVRIER 2008 par la COUR D'APPEL de REIMS (R.G. n° 05-2692).
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], domicilié [adresse], bénéficie d'une aide juridictionnelle totale n°XX du [date] accordé par le bureau d'aide juridictionnelle de DIJON, représenté par Maître Karima MANHOULI, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
SCI FAMILIALE IMMOBILIÈRE ET FONCIÈRE « FIF »
dont le siège social est [adresse], représentée par Maître Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, assistée de Maître Xavier COLOMES, membre de la SCP COLOMES - MATHIEU, avocat au barreau de TROYES
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 janvier 2013 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame BOURY, Présidente de Chambre, ayant fait le rapport et Monsieur BESSON, Conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Madame BOURY, Présidente de Chambre, Président,
Madame JOURDIER, Présidente de Chambre,
Monsieur BESSON, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame MARC, Greffière en Chef
ARRÊT : rendu contradictoirement, PRONONCÉ publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, SIGNÉ par Madame BOURY, Présidente de Chambre, et par Madame MARC, greffière en chef adjoint auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Historique des faits et de la procédure :
Par acte sous seing privé du 2 novembre 2000, la SCI Familiale Immobilière et Foncière (ci-après FIF) a donné à bail d'habitation à Monsieur X. un appartement [...].
Par déclaration au greffe du 26 septembre 2003, Monsieur X. a fait convoquer la SCI FIF devant le tribunal d'instance de Troyes pour obtenir, outre la condamnation de la défenderesse au paiement des dépens et d'une indemnité de procédure,
- la condamnation de la bailleresse au paiement envers lui d'une somme de 1.900 euros à titre de dommages-intérêts pour avoir inséré au contrat de location la clause qu'il juge illégale suivante : 1° « .....le preneur est responsable de toutes dégradations aux parties communes de l'immeuble notamment lors des emménagements et déménagements » qui, selon lui, exclut la faute du bailleur ou l'intervention d'un tiers ;
- la condamnation de la bailleresse à lui payer la somme de 1.900 euros à titre de dommages-intérêts pour l'insertion dans le contrat de location de la clause jugée abusive suivante : « D'autre part, en cas de non-paiement à son échéance d'une quittance de loyer, celle-ci sera remise immédiatement au contentieux et son montant, du fait de cette remise, sera de plein droit majorée de 10 % pour couvrir le bailleur ou son mandataire des frais exposés par lui pour obtenir le recouvrement de la quittance impayée et ce, non compris les frais taxables. Tous les frais de recouvrement et judiciaires seront intégralement à la charge du preneur » (article 4 i) de la loi du 6 juillet 1989).
Par des conclusions additionnelles remises le jour de l'audience devant le tribunal d'instance, Monsieur X., reprenant les mêmes demandes de condamnations fondées sur l'illégalité ou le caractère abusif des deux clauses, tout en modifiant les montants réclamés (1.800 euros au lieu de 1.900 euros) et (1.800 euros au lieu de 1.900 euros), a ajouté une demande tendant au prononcé de la nullité des deux clauses, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Le tribunal, par décision du8 janvier 2004 (RG n° 11-03-967), cette dernière précision étant apportée eu égard au nombre de procédures ayant donné lieu à plusieurs décisions du même jour, correspondant à différentes clauses du même contrat, a débouté Monsieur X. de ses demandes initiales, déclaré irrecevables ses demandes additionnelles, l'a condamné au paiement d'une amende civile de 500 euros, ainsi qu'aux dépens.
Pour rejeter la demande initiale, le tribunal, notant que la demande de Monsieur X. était fondée sur « les dispositions d'ordre public » de la loi de 86 ou 88, a considéré qu'en réalité, il s'agissait des articles 1 à 25-2 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 régissant le bail du 2 novembre 2000 dont il était le preneur et a retenu d'une part, qu'aucun des articles précités ne fondait un droit à obtenir des dommages-intérêts pour l'insertion d'une clause illégale, à supposer qu'elle le soit et, tout en notant que Monsieur X. n'invoquait pas le fondement délictuel, a relevé qu'il ne faisait état d'aucun préjudice personnel et certain présentant un lien causal direct avec le fait ou la faute reprochée.
Pour déclarer irrecevables les demandes additionnelles, le juge, se fondant sur l'article 16 du (nouveau) code de procédure civile, a estimé que les conclusions additionnelles remises le jour de l'audience contrevenaient au principe de la contradiction, dès lors qu'il n'était pas allégué qu'elles aient été préalablement portées à la connaissance de la partie défenderesse.
Enfin, pour justifier l'amende civile infligée au demandeur, le tribunal a retenu l'existence d'un abus de procédure caractérisé par l'existence de vingt-quatre procédures diligentées par Monsieur X. à l'encontre de sa bailleresse et un comportement procédural malicieux de celui-ci.
Monsieur X. ayant interjeté appel de cette décision, le 21 octobre 2005, la Cour d'appel de Reims, par arrêt du 20 février 2008 (RG n° 05/2692) a confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions, y ajoutant, a débouté Monsieur X. de toutes ses demandes, l'a condamné à une amende civile de 1.500 euros, a rejeté sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens.
Pour écarter la demande de nullité du jugement présentée devant elle par Monsieur X. au motif que le premier juge aurait violé le principe de la contradiction qu'il prétendait défendre, aurait dénaturé le principe de l'oralité des débats devant le tribunal d'instance, aurait statué sur un incident de communication dont il n'était pas saisi s'agissant de ses conclusions additionnelles, et aurait été de parti pris à son encontre, la Cour d'appel de Reims a retenu, en l'absence d'aucun fondement juridique à la demande, que la nullité du jugement n'était pas encourue faute pour Monsieur X. d'avoir introduit une demande en récusation avant la clôture des débats et a estimé qu'il ne ressortait pas du jugement déféré ou des pièces que le premier juge avait effectivement violé les principes procéduraux.
Pour confirmer le rejet de la demande de nullité des clauses insérées au bail et des demandes subséquentes, la cour d'appel de Reims a retenu en substance,
- que Monsieur X. ne justifiait pas que la bailleresse se soit prévalue à son encontre des clauses litigieuses,
- qu'en outre, l’article 4 de la loi du 6 juillet 1989 donnant la liste des clauses réputées non-écrites, ne prévoyait aucune indemnisation du chef de l'insertion au bail de telles clauses.
Par ailleurs, sur la motivation spécifique aux clauses concernées par le dossier, il sera précisé que, par suite, soit d'une erreur consécutive à une inversion de pages des différentes décisions rendues le même jour entre les mêmes parties, soit, par suite d'une erreur informatique liée à la pratique du « copié-collé » dans l'élaboration de l'arrêt de la Cour par le magistrat rédacteur, la motivation spécifique aux clauses figurant dans la décision, concerne un autre dossier.
Enfin, la cour d'appel de Reims, sur l'amende civile, a considéré que le caractère abusif pouvait se déduire de ce que les moyens de l'appelant ne reposaient que sur des allégations dépourvues de preuves.
Sur le pourvoi formé par Monsieur X., la Cour de Cassation, par arrêt du 29 septembre 2010, a cassé, sur le premier moyen, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la Cour d'appel de Reims et a renvoyé la cause et les parties devant la présente cour au motif qu'en retenant qu'il ne ressortait pas du jugement et des pièces de la procédure que le premier juge ait violé les principes procéduraux invoqués par Monsieur X., la cour de Reims avait violé les textes, dès lors que la procédure orale devant le tribunal d'instance ne permettait pas au juge de déclarer irrecevables les prétentions formulées par une partie à l'audience, mais qu'il devait, s'il y avait lieu, renvoyer l'affaire à une autre audience afin de respecter le principe de la contradiction.
Le 6 avril 2012, Monsieur X. a saisi la présente cour de renvoi.
Demandes des parties devant la Cour :
En l'état des dernières conclusions récapitulatives de Monsieur X. régulièrement transmises le 28 décembre 2012, il demande à la Cour, le déclarant recevable et fondé en son appel, et y faisant droit, au visa des articles 6, 1134, 1135, 1142, 1145 du code civil, L. 132-1 du code de la consommation, 4, 5, 7, 12, 15, 16, 30 à 32-1 du code de procédure civile, des dispositions de la loi du 6 juillet 1989, des articles 1382 et 1383 du code civil, des articles R. 221-37 et R. 221-38 du code de l'organisation judiciaire, des articles 70, 480, 484, 488 et 489 du code de procédure civile, et vu le contrat de location du 2 novembre 2000 et les pièces versées, de
- rejeter la demande de jonction de l'intimée,
- dire les irrecevabilités des demandes initiales et additionnelles soulevées par l'intimée infondées et en conséquence les rejeter,
- confirmer, à la suite de la Cour de Cassation, que le tribunal d'instance de Troyes a délibérément violé le principe du contradictoire,
- constater que le tribunal d'instance de Troyes a dénaturé la procédure, de nature orale, propre au tribunal d'instance,
- constater que le tribunal d'instance de Troyes a délibérément statué sur un incident de communication non soulevé par la partie adverse,
- constater le parti pris et le manquement à l'impartialité du premier juge au préjudice du concluant,
en conséquence, annuler le jugement entrepris,
puis statuant à nouveau,
- dire que la disposition d'ordre public de l’article 1er de la loi du 6 juillet 1989 selon laquelle « les droits et obligations réciproques des bailleurs et des locataires doivent être équilibrés dans leurs relations individuelles comme dans leurs relations collectives » est pleinement applicable au bail litigieux,
- constater que le contrat de location rédigé par l'intimée est une liste de quatre pages d'obligations mises à la charge du preneur, qu'il ne mentionne aucune obligation du bailleur et qu'il ne renvoie pas à la loi du 6 juillet 1989,
- constater que la clause insérée au bail par l'intimée : « ...le preneur est responsable de toutes dégradations aux parties communes de l'immeuble notamment lors des emménagements et déménagements », est illégale,
- en conséquence, annuler cette clause,
- constater que la clause insérée au bail par l'intimée : « D'autre part, en cas de non-paiement à son échéance d'une quittance de loyer, celle-ci sera remise immédiatement au contentieux et son montant, du fait de cette remise, sera de plein droit majorée de 10% pour couvrir le bailleur ou son mandataire des frais exposés par lui pour obtenir le recouvrement de la quittance impayée et ce, non compris les frais taxables. Tous les frais de recouvrement et judiciaires seront intégralement à la charge du preneur », est illégale et abusive,
- en conséquence, annuler cette clause,
- constater qu'avant même la signature du bail, l'intimée avait instauré un rapport de force défavorable à l'appelant en exigeant de ce dernier un règlement pour la réservation du logement,
- constater que la violation de dispositions d'ordre public dans le cadre de relations contractuelles réglementées constitue un préjudice,
- constater que l'exécution de clauses contraires à des dispositions d'ordre public dans le cadre de relations contractuelles réglementées caractérise un préjudice,
- constater que l'intimée a volontairement déséquilibré la relation contractuelle au préjudice de l'appelant,
- en conséquence,
- condamner l'intimée à compléter le bail par l'indication de la surface habitable du logement,
- condamner l'intimée à communiquer à l'appelant le dossier technique prévu à l’article 31 de la loi du 6 juillet 1989,
- condamner l'intimée au paiement d'une indemnité de 4.000 euros en réparation du préjudice causé par l'insertion des deux clauses susvisées dans un bail dûment actualisé avant sa signature,
- condamner l'intimée au paiement d'une indemnité de 2.000 euros en réparation du préjudice causé par l'exécution de l'une des deux clauses susvisées dans un bail dûment actualisé avant sa signature,
- condamner l'intimée au paiement d'une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens et autoriser pour ceux d'appel, son conseil à les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La SCI FIF, par ses dernières conclusions transmises 15 janvier 2013, demande à la Cour de :
- ordonner la jonction de la présente instance en application de l’article 367 du code de procédure civile avec les cinq autres instances (n° 12/00582, 12/00583, 12/00587, 12 /00586, et 12/00591) engagées par Monsieur X. contre la SCI concluante,
- dire Monsieur X. irrecevable en application des articles 122 et 847-1 du code de procédure civile en sa demande d'annulation de clauses du bail,
- dire et juger que le bail consenti par la concluante à M. X. ne contient aucune clause illicite et que les clauses de ce bail parfaitement consenties sont insusceptibles d'avoir causé un quelconque préjudice à M. X.,
- dire M. X. mal fondé en son appel et l'en débouter,
- dire M. X. mal fondé en ses fins, moyens et prétentions,
- condamner M. X. à lui payer une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et injustifié ainsi qu'une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- le condamner en tous les dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile par Maître Claire Gerbay, avocat aux offres de droit.
La procédure a été clôturée par ordonnance du21 janvier 2013.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI :
Sur la jonction :
Attendu que faisant valoir l'existence de six procédures fondées sur le même bail du 2 novembre 2000 dont Monsieur X. conteste les clauses, la SCI FIF demande la jonction des dites procédures eu égard à l'identité des écritures et des moyens avancés ;
que la SCI FIF considère que la multiplication des procédures est un moyen artificiel pour multiplier les demandes de dommages-intérêts ;
attendu que si l’article 367 du code de procédure civile permet au juge d'ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il s'agit d'une simple faculté ;
que Monsieur X. s'oppose à bon droit à la demande de jonction de la procédure 12/582 qui concerne une opposition à injonction de payer un solde de charges ne présentant pas de lien avec la présente instance quand bien même, elle est fondée sur le même bail ;
que si l'identité de parties, de fondement et d'argumentation entre les cinq autres procédures n° 12/583, 586, 587, 590 et 591 pouvaient justifier une jonction, il apparaît qu'aucune considération tirée d'une bonne administration de la justice ne la commande en l'espèce, dès lors qu'une telle jonction aurait plutôt pour effet de compliquer la procédure, les instances ayant toujours été jugées séparément, tant devant le tribunal d'instance de Troyes, que devant la Cour d'appel de Reims et devant la Cour de Cassation ;
que si Monsieur X. a formulé autant de demandes de dommages-intérêts, que de procédures distinctes ayant un objet identique mais portant sur des clauses du bail différentes, il s'est pareillement exposé aux demandes de dommages-intérêts formulées par la SCI FIF dans chacun des dossiers ;
que dans ces conditions, il n'y a pas lieu de joindre les procédures ;
Sur la nullité du jugement :
Attendu que selon Monsieur X. sa demande de nullité du jugement se justifie à ses yeux, par
- la violation par le premier juge des règles procédurales applicables, dès lors qu'en déclarant irrecevables ses demandes additionnelles présentées lors de l'audience, sans renvoyer le dossier à une prochaine audience, il a violé le principe de l'oralité des débats devant le tribunal d'instance, et qu'en soulevant d'office un problème de communication de pièces, il ne lui a pas permis de justifier d'une telle communication régulière,
- la violation du principe de la contradiction, dès lors que le premier juge a, sans inviter les parties à s'en expliquer, soulevé d'office, d'une part, qu'aucun article de la loi de 1989 ne fondait un droit à obtenir des dommages-intérêts pour insertion de clause illégale, et d'autre part, qu'au regard du fondement délictuel qu'il n'invoquait pas, il ne faisait état d'aucun préjudice personnel et certain en lien de causalité avec le fait ou la faute reprochée,
- la partialité du juge l'ayant privé d'un procès équitable en violation de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales et caractérisée par sa condamnation à une amende civile, tant dans la présente procédure que dans le cadre d'une autre procédure relative au paiement de charges ;
attendu que si selon l’article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations, en l'espèce, il résulte des énonciations du jugement, que Monsieur X. fondait ses demandes sur « les dispositions d'ordre public de la loi de 86 ou 88 » ce qui s'assimilait à une absence de fondement de la demande ; qu'ainsi, le premier juge qui, comme l'y invite l’article 12 du code de procédure civile, était tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, et qui relève explicitement dans sa motivation que Monsieur X. a été spécialement interrogé sur le fondement juridique de ses demandes en paiement, ce dont résulte qu'il a bien respecté le principe de la contradiction, ne peut se voir reprocher d'avoir examiné les faits sous plusieurs aspects de manière à trouver la règle de droit applicable et à donner son exacte qualification au fondement avancé par Monsieur X. au soutien de ses prétentions ;
que la SCI FIF soutient donc à bon droit, que ce grief est sans fondement ;
attendu sur la partialité alléguée du premier juge, que Monsieur X. prétend que celle-ci ressort des termes mêmes du jugement qui violeraient les dispositions impératives garantissant une procédure équitable, ainsi que les dispositions applicables aux contrats, pour le faire succomber et le condamner à une amende civile ;
que de même, Monsieur X. invoque les termes d'un autre jugement relatif aux charges locatives qui révéleraient la partialité du magistrat ;
mais attendu qu'on peut éliminer l'argument tiré du contenu d'une autre décision rendue par un juge différent ainsi qu'il appert du jugement du 11 septembre 2003 versé aux débats ;
qu'ensuite, Monsieur X. qui n'allègue aucun élément extérieur au contenu des décisions rendues dans la présente procédure, ne démontre pas en quoi les énonciations du jugement révèlent une partialité du juge, laquelle ne résulte pas de la condamnation prononcée à l'encontre du plaideur pour procédure abusive,
alors que le juge s'est contenté, sans que sa plume ne révèle un quelconque manquement à son obligation d'impartialité, de trouver notamment dans le nombre de vingt-quatre procédures introduites par Monsieur X. à l'encontre de son bailleur (chiffre non contesté par lui), ainsi que dans l'absence de fondement juridique à ses demandes, la preuve d'un comportement procédural abusif justifiant une amende ;
attendu en revanche, que Monsieur X. est fondé à reprocher au premier juge d'avoir, dans le cadre de la procédure orale applicable devant le tribunal d'instance, déclaré irrecevables ses demandes additionnelles motif pris de ce qu'elles étaient contenues dans des conclusions déposées le matin de l'audience, alors même que l'intimée ne soulevait aucune difficulté et que le principe de l'oralité des débats lui interdisait de refuser de prendre en compte des demandes additionnelles exprimées lors de l'audience, sauf à devoir assurer le renvoi à une date ultérieure pour permettre une éventuelle réplique ;
attendu que pour autant, le non-respect par le premier juge de la règle de l'oralité des débats qui a conduit à une déclaration erronée d'irrecevabilité de la demande additionnelle, n'entache par le jugement en son entier et ne justifie pas son annulation, alors au surplus que la Cour se trouve régulièrement saisi d'un appel qui lui permet de réparer l'erreur procédurale relevée par la Cour de Cassation en statuant sur l'ensemble des demandes ;
Sur les demandes de nullité et de réparation en lien avec l'insertion et l'exécution alléguée des clauses litigieuses :
attendu qu'à bien comprendre les demandes de Monsieur X. dont le dispositif des conclusions mêle demandes et moyens, il sollicite en réalité une indemnité unique de 4.000 euros en réparation du préjudice causée par l'insertion des deux clauses au bail et une autre indemnité de 2.000 euros en rapport avec l'exécution alléguée de ces clauses, et entend démontrer que son préjudice résulte d'une part, de l'instauration délibérée par le bailleur, dès le début du bail, d'un déséquilibre dans les relations contractuelles entre eux au mépris de l’article 1er de la loi du 6 juillet 1989 et de la violation par le bailleur des dispositions d'ordre public, d'autre part, spécifiquement, de l'insertion des deux clauses objet de la présente procédure ;
mais attendu qu'une demande de réparation suppose nécessairement la preuve de l'existence d'un préjudice pouvant être rattaché aux faits allégués ;
or attendu que si l’article 1er de la loi du 6 juillet 1989 pose le principe de l'équilibre des relations entre bailleurs et preneurs, et si la rédaction du bail montre une insistance particulière sur les obligations du preneur au détriment de celles du bailleur, et ne se réfère pas expressément à la loi du 6 juillet 1989, le bail y demeurait obligatoirement soumis, en sorte que le bailleur était bien tenu des obligations imposées par la loi ayant précisément pour objet de veiller à cet équilibre ;
que par ailleurs, si le bailleur a exigé du locataire un chèque lors de la réservation de l'appartement en septembre, avant la signature du bail prévu pour le 2 novembre 2000, Monsieur X. ne justifie pas et n'allègue même pas que, contrairement à l'indication figurant sur le reçu établi le 21 septembre 2000 spécifiant expressément que le chèque ne serait mis en recouvrement que le jour de la signature du bail et de l'entrée dans les lieux, celui-ci aurait été encaissé avant l'entrée en vigueur du bail, en sorte qu'il ne justifie sur ce point, d'aucun préjudice indemnisable ;
attendu encore qu'en l'état de l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction découlant de la loi du 21 juillet 1994 applicable à la date d'entrée en vigueur du bail, celui-ci contenait bien les mentions prescrites qui n'incluaient pas alors, celle de la superficie du logement imposée par une modification de la loi postérieure à l'établissement du bail ;
qu'en tout état de cause, la seule sanction prévue par cet article est l'ouverture au locataire du droit de faire établir un bail conforme aux dispositions de la loi, sans fonder un droit direct à obtenir une réparation ;
attendu s'agissant plus spécifiquement de l'insertion des clauses litigieuses, que Monsieur X. a aujourd'hui clarifié le fondement de ses réclamations en indiquant qu'elles reposent sur les dispositions d'ordre public de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 et soutient que la première clause relative à la charge de la réparation des dégradations des parties communes viole l'article 7 de la loi en ce sens que la responsabilité du preneur ne pourrait être présumée que pour les dégradations survenues dans les locaux dont il a l'usage exclusif, et que la seconde clause relative aux conséquences financières du non-paiement à son échéance des loyers, viole les articles 4 et 7 de la loi dans la mesure où la stipulation d'amendes est prohibée et où le locataire n'est pas tenu de régler des sommes supérieures au montant du loyer ;
mais attendu en premier lieu, qu'aucune des clauses objet de la présente instance ne se trouve visée par l’article 4 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction applicable à la date du bail, comme étant réputée non écrite ;
attendu ensuite, que la SCI FIF répond à bon droit, s'agissant de la première clause, que le fait que l'article 7 prévoit en son paragraphe c), le principe d'une obligation pour le locataire de répondre des dégradations dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, n'exclut nullement, en application des règles générales de la responsabilité civile, une obligation éventuelle de la part du locataire à réparer les dégradations susceptibles d'être commises par lui ou par toute personne dont il répond et notamment, les dégradations pouvant être commises à la faveur d'un déménagement ; que la clause n'est pas illégale ;
attendu s'agissant de la clause prévoyant une indemnité en cas de manquement par le preneur à ses obligations de paiement, elle s'analyse en une clause pénale conforme aux prévisions de l’article 1152 du code civil, soumise, en tout état de cause, au pouvoir de modération du juge, si elle apparaît manifestement excessive ;
que cette clause n'est en conséquence, nullement assimilable à l'amende prohibée par l'article 4 i) de la loi du 6 juillet 1989 ;
attendu que Monsieur X. qui, au surplus, ne justifie pas que la bailleresse ait eu à se prévaloir des clauses litigieuses à son encontre, ne démontre pas en quoi l'insertion ou l'exécution alléguée de ces deux clauses non proscrites a pu générer les préjudices dont il réclame réparation ;
que l'absence de démonstration de l'illégalité de la première clause, et du caractère abusif de la seconde induit le rejet tant de la demande de nullité présentée, sans qu'il y ait lieu de répondre sur les fins de non recevoir soulevées par la SCI FIF quant à sa recevabilité, que des demandes d'indemnisation présentées par Monsieur X. en rapport avec l'insertion et l'exécution alléguée de ces clauses ;
qu'en ce qu'il a débouté Monsieur X. de ses demandes, le jugement sera donc confirmé ;
Sur les autres demandes :
- Sur la demande de Monsieur X. tendant à la production d'un dossier technique et d'un bail complété par la superficie du logement :
Attendu que Monsieur X. demande à son ancien bailleur la production du dossier technique en vertu de l’article 3-1 de la loi du 6 juillet 1989 et la condamnation de l'intimée à compléter le bail par la mention de la superficie du logement ;
mais attendu que - outre le caractère parfaitement irrecevable de telles demandes formulées sept ans après la fin du bail qui enlève tout intérêt pour Monsieur X. à ces prétentions - la SCI FIF rétorque à bon droit que l'exigence de l'indication de la superficie du logement a été imposée par l’article 78 de la loi du 25 mars 2009 et ne figurait pas à l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction applicable lors de l'entrée en vigueur du bail ;
que de même, l'article 3-1 de la loi du 6 juillet 18989 relatif à la production d'un dossier technique n'existait pas dans la version de la loi applicable au temps du bail puisqu'il a été inséré par l’article 22 de l’ordonnance du 8 juin 2005 ;
- Sur la demande de la SCI FIF de dommages-intérêts pour appel abusif :
Attendu que selon l’article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière abusive, peut être condamné à une amende civile, sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent être alloués ;
attendu que si Monsieur X. a eu gain de cause, devant la Cour de Cassation en ce que l’arrêt de la Cour d'appel de Reims du 20 février 2008 n'avait relevé aucune transgression par le premier juge des règles procédurales, alors qu'il y avait eu atteinte au principe de l'oralité des débats, il reste que l'abus du droit d'ester en justice est caractérisé en l'espèce, par l'acharnement de Monsieur X. à maintenir des procédures destinées à obtenir, plusieurs années après la fin du bail, la nullité de clauses de celui-ci sans intérêt actuel, et des réparations sur l'allégation de préjudices non justifiés, en rapport avec l'illégalité ou le caractère abusif de ces clauses ne reposant sur aucun motif sérieux, et est encore démontré par la démultiplication de procédures venues à la même audience, portant chacune sur des clauses différentes du même contrat de bail révélant en réalité, un détournement de l'institution judiciaire, à des fins de nuisance à l'égard de son ancien propriétaire dont le préjudice est caractérisé, indépendamment des frais engendrés réparés par les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, par le trouble entretenu pour le bailleur par le maintien, en toute inutilité, des années durant, de l'existence de procédures artificiellement multipliées en nombre ;
que Monsieur X. sera condamné envers la SCI FIF au paiement de la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice spécifique à la présente instance ;
que la même motivation substituée à celle du premier juge, ajoutée au fait que Monsieur X. est titulaire de l'Aide juridictionnelle dont il détourne la vocation justifie sa condamnation au paiement d'une amende civile de 500 euros
- Sur les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile :
Attendu que Monsieur X. qui succombe en ses prétentions, sera débouté de sa demande de ce chef ;
qu'en revanche, la SCI FIF a exposé des frais non récupérables comme dépens ; que l'équité commande de condamner Monsieur X. au paiement envers elle d'une indemnité dont le montant sera justement limitée pour la présente instance à 500 euros au regard du nombre de procédures reprenant le même schéma de motivation et venues à la même audience ;
- Sur les dépens :
Sttendu que Monsieur X. qui succombe supportera les dépens en ce compris ceux inhérents à la procédure d'appel aboutissant à l'arrêt cassé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
dit n'y avoir lieu à jonction de la présente procédure avec les instances n° 12/00582, 12/00583, 12/00587, 12 /00586, et 12/00591,
dit n'y avoir lieu à annulation du jugement déféré,
confirme le jugement en toutes ses dispositions,
ajoutant,
condamne Monsieur X. au paiement envers la SCI FIF de la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts,
condamne Monsieur X. au paiement envers la SCI FIF de la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
rejette toutes demandes plus amples ou contraires des parties,
condamne Monsieur X. aux dépens en ce compris ceux de l'instance d'appel ayant abouti à l'arrêt du 20 février 2008 objet de la cassation,
accorde à Maître Gerbay le droit prévu par l’article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,
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