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CA PAU (2e ch. sect. 1), 31 décembre 2013

Nature : Décision
Titre : CA PAU (2e ch. sect. 1), 31 décembre 2013
Pays : France
Juridiction : Pau (CA), 2e ch. sect. 1
Demande : 12/03535
Décision : 13/4962
Date : 31/12/2013
Nature de la décision : Avant dire droit
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 22/10/2012
Numéro de la décision : 4962
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4658

CA PAU (2e ch. sect. 1), 31 décembre 2013 : RG n° 12/03535 ; arrêt n° 13/4962

Publication : Jurica

 

Extrait : « Selon l’article L. 141-4 du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application.

L'offre préalable de crédit mentionne que le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est fixé à 21.000 euros et que le montant choisi par l'emprunteur dans cette limite, constituant la fraction disponible du découvert, est de 6.000 euros. […]

La cour observe qu'il n'est justifié d'aucune demande spécifique de l'emprunteur portant augmentation du crédit initialement accordé jusqu'à la somme de 6000 euros ; que le découvert disponible à l'ouverture n'apparaît pas constituer une première fraction du crédit autorisé, la clause précitée des conditions générales prévoyant en effet l'augmentation du disponible sur demande spécifique de l'emprunteur, ce qui démontre que son dépassement est assimilé à une modification du découvert initialement consenti, et que par ailleurs, la dite clause prévoyant l'augmentation importante du découvert disponible est susceptible d'être qualifiée d'abusive au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation et donc réputée non écrite, comme créant un avantage excessif au profit du prêteur en ce qu'il peut augmenter le montant du crédit sans faire bénéficier à l'emprunteur des dispositions protectrices du Code de la consommation, faisant obstacle à ce qu'il soit pleinement informé de l'ensemble des caractéristiques du prêt et des charges liées à son remboursement, sans également la faculté de rétractation, et sans que l'aggravation de sa situation soit compensée par l'avantage tiré de la mise à disposition d'une somme plus importante. […]

Il ressort de l'historique de compte que le dépassement du crédit initialement consenti de 6.000 euros est intervenu le 12 décembre 2007, sans jamais avoir été ensuite régularisé. Il en résulte que la SA LASER COFINOGA qui a engagé son action par assignation du 18 juin 2010, est susceptible d'encourir la forclusion biennale prévu par l'article L. 311-37 susvisé.

Il convient donc d'ordonner la réouverture des débats et d'enjoindre aux parties de faire valoir leurs observations sur ce moyen soulevé d'office par la cour et de réserver les dépens. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PAU

DEUXIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 31 DÉCEMBRE 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/03535. Arrêt n° 13/4962. Nature affaire : Prêt - Demande en remboursement du prêt.

ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 31 décembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 18 novembre 2013, devant : Madame BUI-VAN, Conseiller faisant fonction de Président, Monsieur SCOTET, Vice-Président placé, désigné par ordonnance du 9 septembre 2013 chargé du rapport, Monsieur LE-MONNYER, Conseiller, assistés de M. CASTILLON, Greffier, présent à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

 

APPELANTE :

SA LASER COFINOGA

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualités audit siège,Représentée par Maître PETIT de la SCP LUZ AVOCATS, avocat au barreau de Bayonne

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

le [date] à [ville], de nationalité Française

Madame Y. épouse Y.

née le [date] à [ville], de nationalité Française

Représentés par Maître LOUMAGNE, avocat au barreau de Pau, assistés de Maître DUBOIS, avocat au barreau d'Auch

SA CARDIF ASSURANCES RISQUES DIVERS

Représentée par Maître MARIOL de la SCP LONGIN/MARIOL, avocat au barreau de Pau, assistée de Maître BRUGIERE, avocat au barreau de Tours

 

sur appel de la décision en date du 23 AOÛT 2012 rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE TARBES

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant une offre préalable acceptée le 21 mars 2007, la SA LASER COFINOGA a consenti à M. X. et Mme Y. épouse X. un crédit utilisable par fractions.

Parallèlement Monsieur X. a adhéré à l'assurance facultative souscrite auprès de la compagnie AIG VIE FRANCE, aux droits de laquelle vient actuellement la société CARDIF ASSURANCES RISQUES DIVERS.

Le 3 mars 2009 Monsieur X., victime d'un accident de la circulation a été en interruption de travail. Il a repris ensuite son activité professionnelle le 1er juin 2009 jusqu'au 16 juin 2009, date à laquelle il a fait l'objet d'un nouvel arrêt de travail. Il été licencié le 30 décembre 2009.

La compagnie a pris en charge au titre de la garantie « ITAM » (interruption de travail pour accident ou maladie) les mensualités du prêt à compter du mois de juillet 2009 et jusqu'en novembre 2009.

Monsieur X. a été licencié pour inaptitude le 30 décembre 2009. Les échéances ont de nouveau prises en charge par la compagnie au titre de la garantie « Perte d'emploi » à compter du mois d'avril 2010.

Entre temps, la société LASER COFINOGA s'est prévalue de la déchéance du terme suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 13 février 2010, et a fait ensuite M. et Mme X. devant le tribunal d'instance de Tarbes, par acte d'huissier du 18 juin 2010.

Le 2 mars 2011, ces derniers ont fait assigner en garantie la compagnie d'assurances CARDIF.

Par décision du 23 août 2012, à laquelle il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, le tribunal a :

- ordonné la jonction des dossiers,

- débouté la SA LASER COFINOGA de son action,

- condamné la société LASER COFINOGA à payer à M. et Mme X. les sommes de 7.500 euros, à titre de dommages et intérêts et de 3.000 euros, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

- déclaré en tant que de besoin la société CARDIF ASSURANCES garante du paiement de la mensualité du 2 juin 2009 et de celles du 2 décembre 2009 au 2 août 2010 incluses,

- condamné la SA LASER COFINOGA aux dépens.

 

Par déclaration du 22 octobre 2012, la SA LASER COFINOGA a relevé appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions du 25 juillet 2013, elle demande de :

- réformer le jugement,

- débouter Monsieur et Madame X. de leurs demandes,

- les condamner à payer la somme en principal de 15.993,83 euros avec intérêt au taux de 17,62 % à compter du 13 août 2010, sauf montant à parfaire en tenant compte des sommes prises en charge par l'assurance ou des règlements opérés par les défendeurs.

- les condamner à payer une indemnité de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi que les dépens.

Elle fait valoir notamment en ce qui concerne la garantie ITAM que c'est à tort que le tribunal a considéré qu'elle aurait dû garantir le sinistre à compter du 2 juin 2009, au motif que l'obligation n'existait pas à ce moment puisque M. X. avait repris son activité professionnelle, reprise constituant une cause de cessation de l'indemnisation au titre des garanties souscrites. En ce qui concerne la garantie perte d'emploi elle prétend que la prise en compte n'a débuté qu'au mois d'avril 2010, et ce conformément aux dispositions contractuelles, M. X. ayant perçu les indemnités de licenciement jusqu'à cette date, et que s'il justifie d'une inscription à Pôle Emploi au 4 janvier 2010, celle-ci n'a pas entraîné d'ouverture de droits à l'ARE, point de départ de la garantie, ce dont il été informé par la compagnie ; qu'entre le 2 décembre 2009 et le 2 mars 2010, il ne pouvait être considéré en situation de perte d'emploi et demander application de la garantie faute de justifier de la perception d'indemnités ASSEDIC, auxquelles ils n'avaient pas droit de toutes façons.

 

Dans leurs dernières conclusions du 30 septembre 2013, M. et Mme X. demandent de :

A titre principal,

- confirmer le jugement,

- dire et juger que la société LASER COFINOGA, mandataire de la compagnie AIG VIE France, n'a pas respecté les dispositions de la « notice d'information sur l'assurance facultative du compte confiance Cofinoga ».

- en conséquence, débouter la société LASER COFINOGA de ses demandes.

- la condamner à supporter l'ensemble des mensualités au titre des garanties « ITAM » et « perte d'emploi ».

- la condamner à leur payer la somme 10.000 euros, à titre de dommages et intérêts.

A titre subsidiaire,

- condamner la compagnie CARDIF à les relever et garantir de toutes condamnations et à leur verser la somme de 10.000 euros, à titre de dommages et intérêts.

En toute hypothèse,

- condamner tout succombant à la somme de 6.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens, avec application de l’article 700 du Code de procédure civile.

En ce qui concerne la garantie ITAM, ils font valoir notamment que la société LASER COFINOGA n'a pas respecté ses obligations alors qu'elle aurait dû prendre en charge les mensualités dès le mois de juin 2009, la notice d'information prévoyant que deux ITAM dues à la même cause et séparées par une reprise d'activité de moins de 60 jours sont considérées comme ne faisant qu'une ; que la société LASER COFINOGA a appliqué une franchise de 104 jours au lieu de 60 jours, comprenant les périodes du 3 mars au 2 juillet 2009, hormis la période de reprise de travail de 15 jours du 1er au 15 juin 2009 ; que le 16 juin 2009 M. X. a rechuté pour la même cause initiale et n'aurait donc pas dû supporter une nouvelle franchise ; que la société LASER COFINOGA a appliqué des intérêts et des indemnités de retard aggravant ainsi leur découvert en dépit de son obligation de prise en charge des mensualités ; qu'en outre, la société LASER COFINOGA n'a pas pris en charge la mensualité du mois de décembre 2009 alors que M. X. n'a été licencié que le 30. En ce qui concerne la garantie perte d'emploi, ils soutiennent que la société LASER COFINOGA a appliqué sans aucun motif une seconde franchise du 2 décembre 2009 au 2 avril 2010. Ils font valoir que le tribunal a justement retenu une gestion calamiteuse du dossier par la société LASER COFINOGA un manquement à son obligation d'exécuter de bonne foi la convention et l'existence d'un préjudice certain et important du fait d'une inscription au fichier des incidents de paiement, d'une résiliation intempestive du contrat, d'un refus de poursuivre la garantie initialement accordée alors que les faits d'interruption de travail et de licenciement étaient dus à la même cause.

 

Dans ses conclusions déposées le 5 août 2013, la société CARDIF ASSURANCES RISQUES DIVERS demande de :

- infirmer le jugement,

- débouter M. et Mme X. de leurs demandes,

- faire application de la limite contractuelle de garantie et dire qu'elle n'est tenue de régler que quatre mensualités,

- condamner M. et Mme X. à payer la somme de 2.000 euros, en application de l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens.

Elle fait valoir notamment, en ce qui concerne la garantie ITAM que le tribunal de manière incompréhensible a estimé que la prise en charge de l'incapacité de travail devait prendre effet dès le 2 juin 2009 alors que selon la notice d'information, en cas d'interruption de l'activité l'assureur verse une indemnité égale aux mensualités venant à échéance après les 60 premiers jours consécutifs d'interruption de travail ; qu'elle a normalement versé à l'assuré les échéances de juillet à novembre 2009, date à laquelle il a cessé de justifier de son arrêt de travail. En ce qui concerne la garantie perte d'emploi, il appartient à l'assuré de démontrer qu'il a perçu l'allocation de retour à l'emploi et de produire les relevés de paiement de Pôle Emploi ; qu'il justifie avoir bénéficié d'une indemnisation à compter du 6 mars 2010 jusqu'au 30 septembre 2010 ; que contrairement à ses affirmations la compagnie n'a jamais appliqué de nouvelle franchise, se contentant de faire application des clauses contractuelles aux termes desquelles la garantie perte d'emploi débute à la date d'ouverture des droits à l'allocation de retour à l'emploi.

 

L'instruction a été clôturée le 2 octobre 2013 et l'affaire fixée le 18 novembre 2013.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Selon l’article L. 141-4 du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application.

L'offre préalable de crédit mentionne que le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est fixé à 21.000 euros et que le montant choisi par l'emprunteur dans cette limite, constituant la fraction disponible du découvert, est de 6.000 euros.

L'article 4 des conditions générales prévoient que la fraction disponible du découvert peut évoluer sur demande spécifique de l'emprunteur dans la limite du montant maximum du découvert autorisé, sauf si depuis l'ouverture du crédit ou la dernière augmentation de la fraction disponible l'emprunteur se trouve dans un des cas visés à l'article II.6, c'est à dire en cas de suspension du droit à découvert par le prêteur.

Selon l’article L. 311-9 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable avant la loi du 1° juillet 2010, toute augmentation du crédit initialement consenti doit donner lieu à l'établissement d'une nouvelle offre du crédit.

La cour observe qu'il n'est justifié d'aucune demande spécifique de l'emprunteur portant augmentation du crédit initialement accordé jusqu'à la somme de 6000 euros ; que le découvert disponible à l'ouverture n'apparaît pas constituer une première fraction du crédit autorisé, la clause précitée des conditions générales prévoyant en effet l'augmentation du disponible sur demande spécifique de l'emprunteur, ce qui démontre que son dépassement est assimilé à une modification du découvert initialement consenti, et que par ailleurs, la dite clause prévoyant l'augmentation importante du découvert disponible est susceptible d'être qualifiée d'abusive au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation et donc réputée non écrite, comme créant un avantage excessif au profit du prêteur en ce qu'il peut augmenter le montant du crédit sans faire bénéficier à l'emprunteur des dispositions protectrices du Code de la consommation, faisant obstacle à ce qu'il soit pleinement informé de l'ensemble des caractéristiques du prêt et des charges liées à son remboursement, sans également la faculté de rétractation, et sans que l'aggravation de sa situation soit compensée par l'avantage tiré de la mise à disposition d'une somme plus importante.

Il est constant en application des dispositions de l’article L. 311-37 du code de la consommation, que le dépassement du crédit initialement accordé constitue le point de départ du délai biennal de forclusion, faute de restauration ultérieure du crédit ou d'augmentation de son montant par la souscription d'une offre régulière dans ce délai. (Cf. Cass. civ 1re, 22 mars 2012, Bull. 2012, I, n° 71).

Il ressort de l'historique de compte que le dépassement du crédit initialement consenti de 6.000 euros est intervenu le 12 décembre 2007, sans jamais avoir été ensuite régularisé.

Il en résulte que la SA LASER COFINOGA qui a engagé son action par assignation du 18 juin 2010, est susceptible d'encourir la forclusion biennale prévu par l'article L. 311-37 susvisé.

Il convient donc d'ordonner la réouverture des débats et d'enjoindre aux parties de faire valoir leurs observations sur ce moyen soulevé d'office par la cour et de réserver les dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et avant dire droit,

Ordonne la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire à l'audience de mise en état du 12 février 2014.

Invite les parties à faire valoir leurs observations sur le moyen soulevé d'office tiré de la forclusion prévue par l’article L. 311-37 du Code de la consommation,

Réserve les dépens.

Arrêt signé par Madame Hélène BUI-VAN, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame SAYOUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT