CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 7 mars 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4717
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 7 mars 2014 : RG n° 11/14236
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant que l'article L. 121-20 du code de la consommation aux termes duquel le consommateur dispose d'un délai de sept jours francs pour exercer son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités ainsi que l'article L. 132-1 du même code relatif aux clauses abusives n'ont pas vocation à s'appliquer à M. X., le contrat de location de prestations de service conclu ayant été souscrit pour les besoins de son activité professionnelle de chirurgien-plasticien ; que M. X. n'est pas fondé à invoquer que les prestations souscrites sortent de son champ de compétence ; qu'en effet, dès lors qu'elles sont destinées à développer son activité professionnelle par le biais de nouvelles technologies, ces prestations ont un rapport direct avec l'activité qu'il exerce ce qui suffit à exclure les dispositions de code de la consommation ;
Considérant que les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière étant interdépendants, l'inexécution de la prestation est susceptible d'entraîner la cessation du paiement des loyers ; que cependant, M. X. n'est pas fondé à se prévaloir de l'inexécution du contrat alors qu'il n'a pas mis en cause le fournisseur du matériel de la société IDEP MULTIMÉDIA avec laquelle il a échangé des mels pour la mise en place de la charte graphique du site WEB ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 11
ARRÊT DU 7 MARS 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/14236. Décision déférée à la Cour : jugement du 23 juin 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - R.G. n° 09/14652.
APPELANT :
Monsieur X.
Représenté par Maître Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, représenté par Maître Georges BENELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0433
INTIMÉE :
SAS LOCAM-LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
Représentée par Maître Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT & CONSEIL, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430, représentée par Maître Jean-Jacques FANET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0675
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 novembre 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Annick PRIGENT, Conseillère, chargé du rapport.
Marie-Annick PRIGENT a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Fabrice JACOMET, Conseiller Hors Hiérarchie, faisant Fonction de Président, Mme Marie-Annick PRIGENT, Conseillère, Mme Irène LUC, Conseiller, désignée par Ordonnance du Premier Président pour compléter la Cour
Greffier, lors des débats : Melle Carole TREJAUT
ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile - signé par Madame Marie-Annick PRIGENT, Faisant Fonction de Président et par Patricia DARDAS, greffier présent lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X., chirurgien a sollicité les services de la société IDEP MULTIMÉDIA pour l'installation d'un site internet loué à la société LOCAM selon une convention de location financière en date du 18 juin 2008. M. X. ayant cessé le paiement des loyers à compter du mois de mai 2009, la société LOCAM l'a assigné en paiement le 10 septembre 2009 devant le tribunal de grande instance de PARIS afin d'obtenir sa condamnation à payer la somme de 11.264,29 euros, de restituer le matériel sous astreinte de 150 euros/jour de retard et 3.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par jugement du 23 juin 2011, le tribunal condamnait M. X. à payer la somme de 10.225,80 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2009.
M. X. a interjeté appel.
Vu les dernières conclusions de M. X. en date du 27 février 2012 demandant à la cour d'infirmer le jugement, de constater la nullité du contrat conclu le 18 juin 2008, de débouter la société LOCAM de ses demandes, à titre subsidiaire, de dire bien fondée l'exception d'inexécution invoquée, plus subsidiairement de déclarer non écrite la clause 18.3 du contrat conclu le 18 juin 2008, et de condamner la société LOCAM à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions de la société LOCAM en date du 18 avril 2013 tendant à la confirmation du jugement et à la condamnation de M. X. à lui payer la somme de 11.264,29 euros avec intérêts et capitalisation de ceux-ci, restituer le matériel sous astreinte de 150 euros/jour de retard et à lui payer 3.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions de M. X. en date du 24 avril 2013 tendant au rejet des conclusions de la société LOCAM comme tardives pour avoir été signifiées le jour du prononcé de l'ordonnance de clôture.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Considérant que M. X. fait valoir que :
- il a mentionné sur l'autorisation de prélèvement conservée par la société LOCAM que le paiement des loyers était subordonné à la création du site WEB qu'il aurait préalablement validé,
- à défaut de présenter un caractère direct avec son activité professionnelle, le contrat entre dans le champ d'application des dispositions des articles L. 121-22 et 23 du code de la consommation,
- dans la mesure où aucun bon de commande, cahier des charges ou validation de la charte graphique n'a été signé par lui-même, ce dernier ne peut valablement avoir accepté la livraison du site internet,
- la clause du contrat prévoyant à la suite du non-paiement d'une échéance le règlement par le locataire d'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat majorée d'une clause pénale de 10 % est abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, caractérisant un déséquilibre significatif entre les parties au seul avantage du professionnel en l'occurrence la société LOCAM,
- en tout état de cause, le montant des pénalités doit être réduit sur le fondement de l'article 1152 du code civil,
Considérant que la société LOCAM réplique que :
- la demande de nullité du contrat est irrecevable dès lors que celui qui s'en prévaut a commencé à l'exécuter,
- les dispositions du code de commerce sont inapplicables du fait que M. X. a contracté dans le cadre de son activité professionnelle,
- la réception sans réserve de la chose vendue couvre les défauts apparents de conformité,
- en régularisant le procès-verbal, M. X. l'a autorisée à régler la facture du fournisseur, ce qui entraîne l'exigibilité des loyers,
- la non mise en ligne du site WEB du fait d'une éventuelle défaillance du fournisseur ne peut être invoquée par le locataire à l'encontre du loueur pour s'opposer à l'exécution du contrat,
- l'indemnité de résiliation ne peut s'analyser en une clause pénale mais comme la contrepartie contractuelle du risque financier pris par la société LOCAM,
- la majoration de 10 % des loyers restant à courir ne peut être qualifiée de clause abusive mais peut seulement être réduite en tant que clause pénale,
Considérant que M. X. ayant eu la possibilité de solliciter la révocation de la clôture pour répondre à ces conclusions, l'audience ayant eu lieu deux mois plus tard, ces conclusions qui ne comportent pas de demande nouvelle seront déclarées recevables ; que la signification de la pièce 5 le même jour constituée d'une facture entre IDEP et LOCAM ne peut faire grief à M. X. ; qu'elle sera admise ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. X. a signé avec la société IDEP MULTIMÉDIA un contrat de location portant sur la livraison d'un ordinateur portable et un site internet le 18 juin 2008 pour un loyer mensuel de 299 euros. ;
Que le 3 juillet 2008, M. X. a signé un procès-verbal de livraison et de conformité.
Que la société IDEP MULTIMÉDIA adressait le 10 juillet 2008 une facture à la société LOCAM en paiement du matériel fourni ;
Considérant que M. X. soutient que le site WEB n'a jamais été finalisé ;
Considérant que M. X. n'est pas en mesure de rapporter la preuve qu'il a émis des réserves sur l'autorisation de prélèvement se trouvant sur l'original du contrat, laquelle a nécessairement été détachée pour être remise à la banque ;
Considérant que M. X. a signé le procès-verbal de réception, sans émettre de réserve ; que sur le procès-verbal de réception, il est mentionné que M. X. déclare : « - avoir pris livraison du bien, objet du contrat et être informé des modalités d'utilisation du site WEB » ;
Considérant que M. X. ne peut contester l'étendue de l'autorisation de prélèvement alors qu'il s'est acquitté des loyers durant 8 mois, du mois de septembre 2008 à avril 2009 ;
Considérant que l'article L. 121-20 du code de la consommation aux termes duquel le consommateur dispose d'un délai de sept jours francs pour exercer son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités ainsi que l'article L. 132-1 du même code relatif aux clauses abusives n'ont pas vocation à s'appliquer à M. X., le contrat de location de prestations de service conclu ayant été souscrit pour les besoins de son activité professionnelle de chirurgien-plasticien ; que M. X. n'est pas fondé à invoquer que les prestations souscrites sortent de son champ de compétence ; qu'en effet, dès lors qu'elles sont destinées à développer son activité professionnelle par le biais de nouvelles technologies, ces prestations ont un rapport direct avec l'activité qu'il exerce ce qui suffit à exclure les dispositions de code de la consommation ;
Considérant que les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière étant interdépendants, l'inexécution de la prestation est susceptible d'entraîner la cessation du paiement des loyers ; que cependant, M. X. n'est pas fondé à se prévaloir de l'inexécution du contrat alors qu'il n'a pas mis en cause le fournisseur du matériel de la société IDEP MULTIMÉDIA avec laquelle il a échangé des mels pour la mise en place de la charte graphique du site WEB ;
Considérant que par courrier recommandé avec avis de réception en date du 23 juillet 2009, la société LOCAM a mis en demeure, en vain, M. X. d'avoir à régulariser le montant des loyers impayés et qu'à défaut, le courrier adressé vaudrait résiliation du contrat en vertu de la clause résolutoire de plein droit pour non-paiement des loyers ;
Considérant que M. X. sera condamné à payer à la société LOCAM la somme de 807,30 euros correspondant aux mensualités impayées des mois de mai, juin et juillet 2009 ; que cette somme sera augmentée de la clause pénale de 80,13 euros et des intérêts de retard de15,91 euros soit un total de 903,94 euros ; le jugement sera réformé sur le montant de la somme allouée à ce titre ;
Considérant que l'indemnité due en cas de résiliation pour inexécution du contrat qui, tant par l'anticipation de l'exigibilité des échéances impayées dès la résiliation du contrat que par le paiement d'une pénalité de 10 %, est stipulée à la fois pour contraindre le débiteur à l'exécution du contrat et comme évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice subi par la société LOCAM, s'analyse bien en une clause pénale susceptible d'être modérée ou augmentée conformément à l'article 1152 alinéa 2 du code civil et non en une clause de dédit ;
Que l'indemnité entière prévue à l'article 18.3 du contrat constituée de la somme des mensualités à échoir majorée d'une pénalité de 10 % est susceptible d'être modérée si elle apparaît manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi ;
Que le paiement par M. X. de la somme de 9.418,50 euros sollicitée par la société LOCAM correspondant à la somme des mensualités à échoir augmentée d'une pénalité de 10 % soit 941,85 euros au titre de la clause pénale entraînerait une disproportion excessive mise à sa charge eu égard au préjudice effectivement subi par la société créancière, qui sera ainsi remboursée de son investissement et indemnisée du profit auquel elle peut prétendre ; qu'il convient donc de réduire cette somme à 6.000 euros ; que le jugement sera réformé sur ce point ;
Considérant que les sommes dues seront augmentées des intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2009, date de l'assignation et la capitalisation des intérêts sera ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;
Considérant que les articles 18.3 et 19 prévoient la restitution du seul site WEB ; qu'il apparaît à la lecture des échanges de mels entre M. X. et la société IDEP MULTIMÉDIA entre juin 2008 et avril 2009 que la charte graphique du site de M. X. n'a pas été validée par celui-ci et que cette validation était nécessaire afin de poursuivre les étapes suivantes du projet selon les termes mêmes du mail adressé à M. X. par M. Y. de la société IDEP, le 2 avril 2009 ; qu'en conséquence, la demande de restitution du site WEB, sans objet, sera rejetée ; que le jugement sera réformé de ce chef ;
Considérant qu'il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant que M. X. assumera la charge des dépens ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Déclare recevables les conclusions signifiées le 24 avril 2013 par la société LOCAM (LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS) et la pièce n° 5 communiquée par elle,
Infirme le jugement,
Statuant à nouveau,
Condamne M. X., à payer à la société LOCAM (LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS) :
- la somme de 903,94 euros au titre des mensualités impayées et de la clause pénale,
- la somme de 6.000 euros au titre de l'indemnité de résiliation,
Dit que ces sommes seront augmentées des intérêts au taux légal à compter du 10 septembre 2009,
Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. X., aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président empêché
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