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CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 7 mars 2014

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 7 mars 2014
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 11
Demande : 11/22922
Date : 7/03/2014
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 22/12/2011
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4718

CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 7 mars 2014 : RG n° 11/22922

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que la notion de consommateur au sens de la directive 93/13 CEE ne vise que les personnes physiques et est distincte de celle de non-professionnel au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui n'exclut pas les personnes morales de la protection contre les clauses abusives au sens de ce code, que, toutefois pour bénéficier de cette protection il importe que le contrat conclu n'ait pas de lien direct avec l'activité professionnelle ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites, que la CRCI exerce une activité de conseil en organisation dans les secteurs de banque et assurance automobile et industries nouvelles, secteur public et collectivités territoriales, télécommunications, postes, transports/logistiques, que l'utilisation de télécopieurs assortis le cas échéant d'équipements informatiques et donc des contrats qui s'y rapportent notamment de location financière qui participent d'une typologie juridique connue s'inscrit dans le cadre de ces activités, en sorte que la CRCI qui, au demeurant, a, par une stipulation librement consentie certifié l'affectation exclusive à un besoin professionnel et en rapport avec lui, ne peut bénéficier de la protection contre les clauses abusives ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 11

ARRÊT DU 7 MARS 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/22922. Décision déférée à la Cour : jugement du 22 novembre 2011 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2010044023.

 

APPELANTE :

SARL CHARLES R. CONSULTANTS INTERNATIONAL

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, représentée par Maître Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

 

INTIMÉE :

Société GE CAPITAL ÉQUIPEMENT FINANCE

Représentée par Maître Anne GRAPPOTTE-BENETREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, représentée par Maître Mathieu BOLLENGIER-STRAGIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0495

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 janvier 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice JACOMET, Conseiller Hors Hiérarchie, Faisant Fonction de Président, chargé d'instruire l'affaire, lequel a préalablement été entendu en son rapport.

M. Fabrice JACOMET a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Fabrice JACOMET, Conseiller Hors Hiérarchie, Faisant Fonction de Président, M. Paul-André RICHARD, Conseiller Hors Hiérarchie, Mme Marie-Annick PRIGENT, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRÊT : Contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Mme Marie-Annick PRIGENT, Conseiller, Faisant Fonction de Président, et par Patricia DARDAS, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement du 22 novembre 2011 du tribunal de commerce de Paris qui a confirmé la résiliation du contrat de location financière du 26 décembre 2005 aux torts et griefs de la SARL Charles R. Consultants International (CRCI) prononcée le 23 mars 2010 par ordonnance du 23 mars 2010, dit que dans ce contrat cette société n'a pas la qualité de non-professionnel, l'a condamnée à payer à la société GE Capital Equipement Finance la somme de 22.584 euros avec intérêts au taux légal à compter du 11 novembre 2009, celle de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à régler les dépens, l'exécution provisoire étant ordonnée,

Vu l'appel du 22 décembre 2011 de la SARL CRCI,

Vu les dernières conclusions du 11 juillet 2012 de l'appelante qui demande à la cour d'infirmer le jugement, de constater sa qualité de non professionnel au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, de réputer non écrites et prononcer la nullité à raison de leur caractère abusif de la clause portant obligation de certifier que le matériel loué est destiné exclusivement aux besoins de son activité professionnelle et est en rapport avec elle, comme l'article 12-2 de ce contrat, subsidiairement, de réduire, par application de l'article 1152 du code civil à, tout au plus, deux mois de loyers soit à la somme de 2.196 euros, en raison de son montant manifestement excessif la clause pénale que constitue l'indemnité de résiliation, en toute hypothèse, de déduire des condamnations éventuelles la valeur résiduelle des matériels objet du contrat et restitués le 8 avril 2010, de condamner la société GE Capital Equipement Finance à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à régler tous les dépens,

Vu les dernières conclusions du 10 septembre 2012 de la société en commandite simple GE Capital Equipement Finance qui demande à la cour de confirmer le jugement, d'ordonner la capitalisation des intérêts par application de l'article 1154 du code civil, de condamner la CRCI à lui payer la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de régler tous les dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 14 novembre 2013,

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Considérant que, au vu des pièces produites que :

- suivant contrat de location financière la CRCI a loué auprès de GE Capital Equipement Finance pour une durée de 60 mois expirant le 28 août 2010 cinq photocopieurs moyennant vingt loyers trimestriels d’un montant l’un de 3.294 euros HT,

- par lettres recommandées avec accusé de réception du 27 mars 2009 tant au bailleur qu'au fournisseur, la CRCI indiquait être contrainte de résilier tant le contrat de location financière que de maintenance des photocopieurs en cause, en invoquant le cas de force majeure que consistait pour elle l'obligation de quitter ses locaux et indiquait au bailleur qu'il pouvait venir récupérer les matériels,

- par lettre du 7 avril 2009, le bailleur acceptait cette résiliation anticipée moyennant paiement avant le 31 mai 2009 d'une indemnité de 23.860,24 euros TTC,

- par lettre du 2 octobre 2009 dont elle réitérait les termes le 5 novembre 2009, la CRCI indiquait à ce bailleur que par suite du cas de force majeure que constituait la cessation de son activité et n'étant plus en mesure d'utiliser les matériels loués, elle n'avait plus à régler les mensualités relatives à ce contrat et demandait des explications sur le rejet d'un prélèvement intervenu le 1er juin 2009,

- par lettre du 6 novembre 2009 GE Capital Equipement Finance réitérait son accord sur une résiliation anticipée mais réclamait avant le 30 novembre 2009 le paiement d'une indemnité de 15.193,10 euros outre celui des loyers impayés d'un montant de 9.605,55 euros frais compris,

- par lettre du 7 décembre 2009 la CRCI contestait à nouveau devoir les sommes réclamées, soulignait l'urgence de régler la question de la restitution de matériels, et sollicitait les coordonnées du conseil habituel de GE Capital Equipement Finance,

- par lettre du 10 décembre 2009 GE Capital Equipement Finance indiquait transmettre le dossier à son service contentieux en maintenant sa demande de paiement et en précisant que la somme réclamée correspondait à la totalité des loyers restant dus, outre intérêts de retard et frais de recouvrement et une indemnité de résiliation de 10 %,

- le 2 février 2010, la CRCI délivrait à GE Capital Equipement Finance une sommation interpellative aux fins que cette dernière lui précise les lieux date et heure auxquels elle pourrait restituer ces matériels, à laquelle cette dernière déclarait que « réponse sera faite par courrier »,

- le 12 février 2010 GE capital Equipement Finance saisissait le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins de constater la résiliation, d'obtenir paiement des sommes qu'elle estimait lui être dues outre restitution sous huitaine des matériels sous astreinte, et communiquait par lettre du 16 février 2010 le lieu de restitution et le nom de la personne à contacter,

- par ordonnance de référé du 23 mars 2010, le président du tribunal de commerce de Paris constatait la résiliation de plein droit du contrat aux torts et griefs de la CRCI, condamnait cette dernière à payer par provision, la somme de12.318 euros TTC et de 1.231, 88 euros au titre des loyers échus et impayés, et pénalités de retard avec intérêts au taux légal à compter du 11 novembre 2009, renvoyait les parties devant le juge du fond, pour statuer sur le solde, donnait acte à la CRCI de son engagement de restituer les matériels dans la première semaine d'avril 2010 au plus tard,

- les matériels étaient restitués le 8 avril 2010 ce qu'a attesté le 12 avril 2010 le destinataire,

- le 10 juin 2010 GE Capital Equipement Finance a délivré l'assignation à l'origine du jugement déféré,

* * *

Considérant que, pour critiquer le jugement sur les condamnations prononcées, la CRCI excipe d'abord de la nullité de certaines clauses qui seraient abusives au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dont elle revendique l'application en faisant valoir qu'elle doit être considérée comme un non-professionnel, en faisant valoir que le contrat de location financière ne rentre pas dans son champ de compétence et ne participe pas directement à l'exercice de son activité ; qu'il s'ensuit que la qualité de consommateur de la CRCI ne saurait faire de doute, nonobstant l'obligation qui lui a été faite d'accepter une clause certifiant que les matériels étaient utilisés exclusivement pour l'activité professionnelle et en rapport avec celle-ci, clause qui est inadéquate dès lors qu’elle n'en précise pas les conséquences juridiques ;

Considérant que GE Capital Equipement Finance réplique qu'eu égard à cette dernière clause, la CRCI ne pouvait ignorer qu'elle s'engageait dans un contexte professionnel, que la location de photocopieurs a un lien direct avec l'activité de la CRCI, spécialiste du conseil en entreprise dans le secteur de l'automobile et de l'industrie qui a besoin de matériels informatiques ;

 

Considérant que la notion de consommateur au sens de la directive 93/13 CEE ne vise que les personnes physiques et est distincte de celle de non-professionnel au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui n'exclut pas les personnes morales de la protection contre les clauses abusives au sens de ce code, que, toutefois pour bénéficier de cette protection il importe que le contrat conclu n'ait pas de lien direct avec l'activité professionnelle ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites, que la CRCI exerce une activité de conseil en organisation dans les secteurs de banque et assurance automobile et industries nouvelles, secteur public et collectivités territoriales, télécommunications, postes, transports/logistiques, que l'utilisation de télécopieurs assortis le cas échéant d'équipements informatiques et donc des contrats qui s'y rapportent notamment de location financière qui participent d'une typologie juridique connue s'inscrit dans le cadre de ces activités, en sorte que la CRCI qui, au demeurant, a, par une stipulation librement consentie certifié l'affectation exclusive à un besoin professionnel et en rapport avec lui, ne peut bénéficier de la protection contre les clauses abusives ;

* * *

Considérant qu'ensuite, la CRCI se prévaut de ce que les stipulations de l'article 12.2 des conditions générales du contrat de location financière dont résulte un montant à payer manifestement excessif s'analysent en une clause pénale que le juge a la faculté de modérer et de ramener à un montant qui ne saurait dépasser deux mois de loyers en faisant valoir que ces matériels ont été restitués le 8 avril 2010, ce qui impose de déduire la valeur résiduelle de ces matériels à la date de leur restitution, les griefs formés par GE Capital Equipement Finance pour écarter toute force majeure à l'origine de la cessation d'activité de la CRCI étant controuvés ;

Considérant que GE Capital Equipement Finance réplique que les clauses relatives aux conséquences du non-paiement des loyers sont valables en sorte qu'une somme de 22.584,48 euros outre intérêts est due, que la stratégie de la CRCI depuis sa cessation d'activité tend à organiser son insolvabilité, la CRCI n'ayant pas cessé mais ayant transféré son activité à diverses entités pour échapper aux poursuites de ses créanciers ;

 

Considérant que, par application de l'article 12.1.2 des conditions générales du contrat litigieux, en cas de résiliation, le locataire est tenu de payer, en réparation du préjudice, une somme égale à la totalité des loyers TTC restant à échoir postérieurement à la résiliation, majorée du montant de la valeur vénale du matériel de la location pour garantir l'exécution du contrat, une peine égale à 10 % de la totalité des loyers restant à échoir, cette indemnité et cette peine portant intérêts à taux conventionnel de 1,5 % par mois ;

Considérant que par application de l'article 1152 du code civil, la somme due, au titre de la réparation du préjudice en cas de résiliation pour inexécution du contrat jusqu'à son terme, par l'anticipation de l'exigibilité des échéances impayées dès la résiliation du contrat à laquelle s'ajoute le paiement d’une pénalité de 10 % qui lui est indissociable, est stipulée à la fois pour contraindre le débiteur à l'exécution du contrat et comme évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice subi par le bailleur et s'analyse, en son entier comme une clause pénale susceptible d'être modérée si elle est manifestement excessive au regard du préjudice subi ;

Considérant qu'à l'évidence les conditions de la force majeure qui implique l'établissement d'une irrésistibilité pour celui qui s'en prévaut et une extériorité à celui qui l'invoque ne sont pas réunies puisque la condition d'extériorité fait défaut tandis que de la décision déférée confirmant sur ce point l'ordonnance de déféré, se déduit que le tribunal a fixé au mois de décembre 2009 la date de résiliation ce qu'aucune partie ne contredit, qu'il s'ensuit que jusqu'à cette date la CRCI était redevable des loyers, d'autant que tenue de restituer les matériels, à ses frais, par application des stipulations de l'article 10 des conditions générales du contrat, il lui incombait de s'enquérir des modalités de restitution ce qu'elle ne fera que le 7 décembre 2009, en sorte que, l'indemnité et la pénalité prévue par l'article 12.1.2 des conditions générales précitées dont il a été dit qu'elle constituait une clause pénale est d’un montant, comme retenu par GE Capital Equipement Finance de12.318, 81 euros outre 1.231,88 euros ;

Considérant qu'un tel montant correspond à l'équivalent de quatre échéances trimestrielles, alors qu'il restait à la date de la résiliation huit mois d'exécution du contrat s'il avait été poursuivi jusqu'à son terme, que la restitution des matériels est intervenue le 8 avril 2010 et alors qu'il n'est pas contredit que par suite d'une cessation d'activité elle n'utilisait plus les matériels objet du contrat depuis le mois d'avril 2009 et que GE Capital Equipement Finance s'abstient de préciser la valeur résiduelle du matériel à la date de sa restitution, est manifestement excessive et qu'il y a lieu de la ramener à la somme de 6.000 euros, étant observé que la circonstance, à la supposer établie, que le dirigeant de la CRCI poursuive sous d'autres formes et à travers diverses sociétés une activité similaire à cette dernière ne caractérise pas pour autant des manœuvres dolosives tendant à organiser l’insolvabilité de la CRCI ;

Considérant que les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas réunies le jugement étant confirmé sur cet article ;

Considérant que chaque partie supportera ses propres dépens d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Réforme le jugement sur le montant de la condamnation prononcée contre la SARL CHARLES R. CONSULTANTS INTERNATIONAL,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Ramène le montant de la condamnation prononcée contre la SARL CHARLES R. CONSULTANTS INTERNATIONAL au montant de 16.584 euros avec intérêt au taux légal à compter du 11 novembre 2009,

Rejette le surplus des demandes,

Laisse à chaque partie ses propres dépens d'appel.

Le Greffier     Le Président empêché