CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. civ.), 10 octobre 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4904
CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. civ.), 10 octobre 2014 : RG n° 13/01088 ; arrêt n° 14/826
Publication : Jurica
Extrait : « Monsieur X. soutient que cette clause qui stipule : « la caution entend par ailleurs s'attacher personnellement au suivi des opérations réalisées par le débiteur principal. Elle dispense à cet effet la banque de lui notifier toute mesure d'information non requise par la loi et notamment de lui signifier tous avis de non-paiement, de prorogation ou autre événement affectant la situation du débiteur principal ou de toute autre caution de l'engagement de celle-ci », est abusive car elle « crée un véritable déséquilibre dans le cadre des engagements triangulaires entre le créancier, le débiteur et la caution ».
Cependant, et comme évoqué ci-dessus, Monsieur X. s'est impliqué dans cette société, vu son compte courant associé. Il était parfaitement informé de la situation financière de la société puisqu'il a été en mesure de déclarer sa créance. En conséquence, comme l'a relevé le premier juge, cette clause ne recèle pas d'avantage particulièrement excessif en faveur de la banque. »
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/01088. Arrêt n° 14/826. Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-DENIS en date du 22 mai 2013 suivant déclaration d'appel en date du 11 juin 2013 : R.G. n° 12/00357.
APPELANT :
Monsieur X.
Représentant : Maître Jean-Pierre BIGONNET, avocat au barreau d'ALES, Représentant : Maître Sanaze MOUSSA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-RÉUNION
INTIMÉS :
Monsieur Y.
SA BANQUE DE LA RÉUNION
Représentant : la SELARL CABINET CODET-CHOPIN-RIGAULT(PRAGMALEXIS), avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-RÉUNION
CLÔTURE LE : 19 février 2014
DÉBATS : en application des dispositions de l'article 779 alinéa 3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 5 septembre 2014.
Par bulletin du 5 septembre 2014, le président a avisé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de : Président : Monsieur Philippe BRICOGNE, Conseiller, Conseiller : Mme Marie Thérèse RIX-GEAY, Conseillère, Conseiller : Mme Annick BEAU, Vice-présidente déléguée à la cour d'appel de Saint Denis de la Réunion en vertu de l'ordonnance n° 123/2014 du 1er septembre 2014 du Premier Président qui en ont délibéré et que l'arrêt serait rendu le 10 octobre 2014 par mise à disposition au greffe.
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 10 octobre 2014.
Greffier : Mme Manuela DEFFOIS, Greffier en Chef.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 15 mars 2007, L. X., S. Z. épouse Y. et D. Y. ont créé la SARL L.D.G.S sise [adresse], les parts sociales étant réparties comme suit :
- Monsieur Y. : 121 parts
- Monsieur X. : 199 parts
- Madame Y. : 80 parts
Par acte sous seing privé du 2 mai 2007, la SA BANQUE DE LA RÉUNION a accordé à la Société L.D.G.S. un prêt d'un montant de 380.000 euros remboursable en 84 mensualités. En garantie de ce prêt, la banque a obtenu les cautions de Messieurs Y. et X., à hauteur de 247.000 euros chacun et ce pour une durée de 9 ans et 3 mois.
Par acte sous seing privé du 19 octobre 2007, la BANQUE DE LA RÉUNION a consenti à la même société un prêt de 60.000 euros moyennant 60 échéances mensuelles de 1.141,92 euros. En garantie de ce prêt, la banque a obtenu les cautions de Messieurs Y. et X., à hauteur de 78.000 euros chacun sur une durée de 7 ans.
Le 20 avril 2009, Monsieur Y. s'est porté caution au titre du solde du compte ouvert au nom de la société L.D.G.S. sous le numéro 5115XXXX010 à hauteur de 97.500 euros pour une durée de 5 ans.
Suivant jugement en date du 20 avril 2011, le Tribunal Mixte de Commerce de Saint-Denis a prononcé la liquidation judiciaire de la Société L.D.G.S.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 mai 2011, la BANQUE DE LA RÉUNION a mis en demeure les cautions de lui régler les sommes dues.
La BANQUE DE LA RÉUNION a prononcé la déchéance du terme des prêts le 6 juin 2011. Elle a déclaré sa créance auprès du mandataire liquidateur le 9 juin 2011.
Par actes d'huissier du 11 janvier 2012, la BANQUE DE LA RÉUNION a fait assigner Messieurs Y. et X. en paiement des sommes suivantes :
- prêt de 380.000 euros
* montant impayé : 126.357,86 euros
* Capital restant dû : 193.427,58 euros
* Intérêts de retard jusqu'au 16 juin 2011 : 11.931,76 euros,
outre les intérêts de retard jusqu'à parfait paiement
- prêt de 60.000 euros
* montant impayé : 26.264,16 euros
* Capital restant dû : 18.655,22 euros
* Intérêts de retard jusqu'au 16 juin 2011 : 2.197,86 euros,
outre les intérêts de retard jusqu'à parfait paiement
Elle demandait en outre la condamnation de Monsieur Y. à lui verser, au titre du solde débiteur du compte n° 5115XXXX010, la somme de 30.431,24 euros.
Suivant déclaration enregistrée au Greffe de la Cour le 11 juin 2013, Monsieur X. a interjeté appel d'un jugement rendu le 22 mai 2013 par le Tribunal de grande instance de Saint-Denis qui a :
- rejeté les demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation formées par Monsieur X.,
- rejeté les demandes en réparations formées par Monsieur X.,
- condamné L. S. X. et D. Y. au paiement à la SA BANQUE DE LA RÉUNION de la somme de 319.785,44 euros outre intérêts au taux de 4,99 % à compter du 11 janvier 2012,
- condamné L. S. X. et D. Y. au paiement à la SA BANQUE DE LA RÉUNION de la somme de 44.919,38 euros outre intérêts au taux de 5,35 % à compter du 11 janvier 2012,
- condamné Denis Y. au paiement à la SA BANQUE DE LA RÉUNION de la somme de 18.837,65 euros,
- condamné L. S. X. et D. Y. au paiement à la SA BANQUE DE LA RÉUNION de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné L. S. X. et D. Y. aux dépens.
Vu les conclusions déposées au Greffe le 7 août 2013 par Monsieur X. qui demande à la Cour de :
- dire et juger que la BANQUE DE LA RÉUNION a manqué à ses obligations contractuelles en ne l'informant pas dans un délai suffisant des manquements de la société cautionnée L.D.G.S.,
- dire et juger que le manquement de la BANQUE DE LA RÉUNION dans son obligation d'information l'a empêché de prendre en charge les quelques échéances impayées pour continuer à bénéficier du terme et que ledit manquement fautif est source de préjudice,
- condamner la BANQUE DE LA RÉUNION à réparer le préjudice qu'il a subi en lui payant des dommages et intérêts à hauteur de ses engagements de caution,
- ordonner la compensation des sommes allouées à titre de dommages et intérêts avec toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre,
En tout état de cause :
- faire application de l'article L. 313-2 du code monétaire et financier,
- constater que la BANQUE DE LA RÉUNION n'a jamais respecté son obligation d'information annuelle de la caution,
- prononcer la déchéance des intérêts échus depuis l'origine du contrat de prêt consenti par la BANQUE DE LA RÉUNION,
- confirmer le jugement sur ce point qui n'a pas prononcé la déchéance des intérêts mais qui en a tenu compte dans le calcul des condamnations,
À titre infiniment subsidiaire,
dans l'hypothèse où la BANQUE DE LA RÉUNION opposerait le point n° 8 de l'engagement de caution de Monsieur X.,
Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation,
- dire et juger que la clause correspondant au point 8 de l'engagement de caution est réputée non écrite,
- demander s'il plaît à la Cour, à la Commission des clauses abusives un avis sur le caractère abusif ou non de la clause correspondant au point n° 8 de son engagement de caution,
- dans l'attente de cet avis, ordonner le sursis,
- condamner LA BANQUE DE LA RÉUNION aux entiers dépens de première instance et d'appel et à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions déposées au Greffe le 12 novembre 2013 par la BANQUE DE LA RÉUNION qui demande à la Cour :
- de confirmer l'entier jugement entrepris,
- de débouter Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes,
Y ajoutant :
- de condamner Monsieur X. et Monsieur Y. à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1°) Sur l'obligation d'information de la caution :
Monsieur X. soutient que la banque n'a pas respecté l'obligation d'information annuelle de la caution en lui envoyant une première et dernière information le 20 mai 2011, à une adresse erronée, par le biais d'une mise en demeure avec déchéance du terme alors que la société L.D.G.S. bénéficiait d'une procédure de sauvegarde ouverte par jugement du tribunal de commerce de Saint-Denis le 1er juillet 2009. Il ajoute que l'inertie de la banque lui a été gravement préjudiciable car en l'informant en temps utile, il aurait pu se substituer à la société défaillante et bénéficier du terme. Il estime que les manquements de la banque justifient la déchéance du droit aux intérêts et des dommages et intérêts équivalant au montant de son engagement.
Il résulte de l'article L. 313-22 du Code Monétaire et Financier que le créancier est tenu d'informer la caution de l'évolution du montant de la créance garantie annuellement, à la date d'anniversaire du contrat sous peine de déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités.
La Banque de la Réunion ne justifie pas avoir respecté cette obligation. En effet, il ressort des pièces versées aux débats que le courrier d'information du 27 juillet 2009 a été envoyé au [...] alors que Monsieur X. demeure au [...], comme mentionné dans les actes de caution. La banque n'ignorait pas cette adresse puisqu'elle a fait délivrer l'assignation en métropole.
Le non-respect de cette obligation est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts.
Monsieur X. ne démontre pas que la banque a commis une faute dolosive qui seule, pourrait justifier l'octroi de dommages et intérêts en sus de la déchéance du droit aux intérêts. Il ne peut soutenir que la négligence de la banque lui a fait perdre une chance de pouvoir immédiatement se substituer à la société défaillante et faciliter le redressement de la société L.G.D.S. alors même qu'il était partie prenante dans cette société.
En effet, bien que n'étant pas associé majoritaire, il détenait 49 % des parts sociales, chacun des deux autres associés détenant moins de parts. De plus, il est mentionné dans le projet de plan de sauvegarde que le passif chirographaire de la société correspond pour moitié aux comptes courants d'associés, celui de Monsieur X. représentant 89.521,36 euros. Il a nécessairement déclaré sa créance, ce qui démontre sa parfaite connaissance de la situation de la société.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris qui a, comme le relève Monsieur X., tenu compte de la déchéance des intérêts et l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts.
2°) Sur la clause n° 8 des actes de cautionnement :
Monsieur X. soutient que cette clause qui stipule : « la caution entend par ailleurs s'attacher personnellement au suivi des opérations réalisées par le débiteur principal. Elle dispense à cet effet la banque de lui notifier toute mesure d'information non requise par la loi et notamment de lui signifier tous avis de non-paiement, de prorogation ou autre événement affectant la situation du débiteur principal ou de toute autre caution de l'engagement de celle-ci », est abusive car elle « crée un véritable déséquilibre dans le cadre des engagements triangulaires entre le créancier, le débiteur et la caution ».
Cependant, et comme évoqué ci-dessus, Monsieur X. s'est impliqué dans cette société, vu son compte courant associé. Il était parfaitement informé de la situation financière de la société puisqu'il a été en mesure de déclarer sa créance. En conséquence, comme l'a relevé le premier juge, cette clause ne recèle pas d'avantage particulièrement excessif en faveur de la banque.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris qui, pour le surplus, a parfaitement liquidé les créances de la banque en tenant compte de la déchéance des intérêts contractuels, ce point n'étant pas contesté.
Monsieur X., qui succombe, sera condamné aux dépens. Il devra verser à la banque, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1.500 euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne Monsieur L. S. X. à verser à la SA BANQUE DE LA RÉUNION la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Monsieur L. S. X. aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, Conseiller, et par Mme Manuela DEFFOIS, greffière en chef à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE EN CHEF LE PRÉSIDENT
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