T. COM. DE FOIX ET DE L’ARIÈGE, 9 janvier 2006
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 491
T. COM. DE FOIX ET DE L’ARIEGE, 9 janvier 2006 : RG n° 2005/00123
(sur appel CA Toulouse (2e ch. sect. 1), 23 janvier 2008 : RG n° 06/02037 ; arrêt n° 40)
Extrait : « ATTENDU que la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a choisi en vertu de l'article 24 de ses propres Conditions Générales de placer expressément ses opérations de démarchage dans le cadre de l'article L. 121-23 du Code de la Consommation, se soumettant ainsi volontairement aux dispositions de l'article L. 121-21. ATTENDU en outre que l'article 24 des Conditions Générales cite l'ensemble des dispositions de l'article L. 121-23 et suivants du Code de la Consommation, de sorte que le cocontractant est bien fondé situer le contrat dans le cadre des textes cités. Que les Conditions Générales sont parties indissociables du Contrat entre les parties. ATTENDU que si la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE souhaitait que ses opérations se situent hors du champ du Code de la Consommation, comme elle le prétend aujourd'hui, elle devait se dispenser d'inclure l'article 24 dans ses conditions générales de vente, pour ne pas avoir à les renier plus tard. ATTENDU en conséquence, que le contrat en cause est soumis à peine de nullité aux conditions de l'article L. 121-23 du Code sus visé. Que la faculté de renonciation en particulier n'a pas été offerte à Monsieur X. ».
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL DE COMMERCE DE FOIX ET DE L’ARIÈGE
JUGEMENT DU 9 JANVIER 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 2005/00123.
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
LORS DU PRONONCÉ :
PRÉSIDENT : MONSIEUR DELPY
JUGES : MESSIEURS FOURNET, MUSSET
GREFFIER : MAÎTRE BASTIDE
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : MONSIEUR DELPY
JUGES : MESSIEURS FOURNET, DALLO
GREFFIER : MAÎTRE BASTIDE
DATE DES DÉBATS : 21 novembre 2005
PARTIES EN CAUSE :
DEMANDEUR :
SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE
[adresse], Ayant pour Avocat plaidant : SELARL LEXI - Maître Célia DUMAS - Avocat au Barreau de SAINT-ETIENNE ,Et pour Avocat postulant : SCP BABY - Avocat au Barreau de l'Ariège
DÉFENDEUR :
Monsieur X.
[adresse] [minute page 2] Ayant pour Avocat plaidant : Maître Guy DEDIEU - Avocat au Barreau de l'Ariège
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LES FAITS :
Monsieur X. a souscrit le 14 janvier 2003, auprès de la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE un contrat d'abonnement de télésurveillance pour une durée de 48 mois, moyennant le règlement mensuel de la somme de 86,90 Euros.
Le 26 février 2003 le matériel a été livré et installé par la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, ainsi qu'en atteste le procès verbal de réception et de bon fonctionnement dûment régularisé par le défendeur.
Le contrat a pris effet le lendemain.
A compter du mois de février 2003, Monsieur X. a cessé tout règlement.
Dans ces conditions la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a été contrainte de mettre en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 décembre 2003, Monsieur X., de régler dans les huit jours, la somme de 1.039,30 Euros correspondant aux loyers échus depuis le mois de février 2003.
Cette relance étant restée sans réponse, le contrat s'est trouvé résilié aux termes de l'article 22 du contrat susvisé « le présent contrat pourra être résilié par ADT, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception restée sans effet en cas de non paiement d'un loyer ».
PROCÉDURE :
C'est dans ces conditions que la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a par acte d'huissiers du 3 mars 2005, fait délivrer assignation à Monsieur X., Artisan-Commerçant, demeurant [adresse], d'avoir à comparaître le lundi 9 mai 2005 à 14 heures, par devant le Tribunal de Commerce de FOIX pour :
vu le contrat d'abonnement de télésurveillance,
vu les articles 1134 et suivants, et 1149 du Code Civil,
s'entendre :
- condamner à régler à la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE la somme principale de 4.988,64 Euros outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, frais et accessoires,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
- [minute page 3] condamner à payer à la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE une indemnité de 1.200 Euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC,
- condamner aux entiers dépens
MOYENS DES PARTIES :
LA DEMANDERESSE : SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE et pour elle SCP BABY
Maintient les termes de son assignation, et au titre des conclusions en réponse soutient :
L'article L. 132-1 du Code de la consommation dispose :
« Dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif ... »
Il n'est ni contestable ni au demeurant contesté par Monsieur X. que la convention souscrite l'a été dans le cadre de son activité professionnelle et non pas domestique.
Le matériel de télésurveillance étant destiné à assurer la protection de son fonds de commerce.
S'agissant d'un contrat de télésurveillance conclu par un commerçant pour les besoins de son activité professionnelle, les dispositions consuméristes n'ont pas vocation à s'appliquer.
La Cour de Cassation sanctionne avec constance l'extension abusive du champ d'application des clauses abusives (Cass. com. 23 novembre 1999 - Cass. civ. 17 novembre 1998 - Cass. civ. 5 novembre 1996).
Encore plus récemment, il ressort de l'arrêt rendu le 14 mars 2000 par la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation, que l'interdiction des clauses abusives ne s'applique pas aux contrats de fournitures de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le contractant (RJDA, 05/2000, n° 608).
En l'espèce et ainsi qu'il a été exposé, il n'est fait aucun doute sur la destination professionnelle du matériel de télésurveillance loué par Monsieur X. lequel ne peut donc prétendre à l'application de la réglementation des clauses abusives.
En tout état de cause, la seule lecture du contrat permets de mettre en exergue que Monsieur X. a été informé de façon suffisante sur la durée de son engagement.
Monsieur X. ne pourra ainsi qu'être condamné à régler les loyers échus et à échoir à la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de ADT TÉLÉSURVEILLANCE les frais non compris dans les dépens, qu'elle a dû engager pour assurer la défense de ses droits.
Elle est donc bien fondée à solliciter le paiement de la somme de 1200 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
[minute page 4] EN CONSÉQUENCE, ADT TÉLÉSURVEILLANCE DEMANDE AU TRIBUNAL,
Vu le contrat d'abonnement de télésurveillance,
Vu les articles 1134 et suivants, et 1149 du Code Civil,
- Condamner Monsieur X. à régler à la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE la somme principale de 4.988.64 € outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, frais et accessoires,
- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à venir,
- Condamner Monsieur X. à payer à la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE une indemnité de 1200 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile,
- Condamner Monsieur X. aux entiers dépens d'instance.
LE DÉFENDEUR : M. X. et pour lui Maître DEDIEU
La Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE fait délivrer assignation à Monsieur X. afin de l'entendre condamner au paiement de la somme de 4.988,64 Euros représentant le montant total des loyers qu'elle aurait dû percevoir en application d'une convention en date du 14 janvier 2003.
Attendu que Monsieur X. était démarché dans le courant du mois de janvier 2003 par un commercial de la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE.
Ce dernier lui vantait les mérites d'un système de protection pour son commerce récemment ouvert.
A ce stade il convient d'indiquer qu'il s'agissait d'une toute petite pizzeria exploitée sous l'enseigne « Pizza Y. » pour se permettre d'émettre un doute sur la pertinence de se pourvoir d'une telle installation.
En réalité, le préposé de la Société ADT indiquait à Monsieur X. qu'il s'agissait simplement de procéder à un essai sans aucune obligation pour lui et à un tarif des plus modique.
Il était établi un contrat se présentant sous la forme d'une feuille de format A3 intitulé « Conditions particulières » et faisant état des articles 25 à 30.
Les articles 1 à 24 représentent en réalité les conditions générales de la convention mais ne font pas l'objet d'une remise au client qui reconnaît simplement sous sa signature en « avoir pris connaissance intégrale préalablement à sa signature ».
L'on sait que la signature par l'adhérent d'un document où il reconnaît avoir été informé des conditions générales de la police (même avec la mention d'un « lu et approuvé ») est dénuée de toute efficacité, car il s'agit d'une clause de style (Cass. 1ère civ. 3 fév. 1993 : RGAT 1993, p. 312 ; Cass. 1ère Civ. 4 juil. 2000 : Juris-Data n°2000-002918).
[minute page 5] Dès lors pour que la convention signée ressorte une pleine et entière validité juridique il appartiendra à la Société ADT de démontrer qu'elle a affectivement remis l'ensemble des conditions générales à Monsieur X. en produisant ainsi un exemplaire paraphé desdites conditions.
La convention ne prévoyait aucune durée d'engagement si ce n'est là encore une mention préétablie sous l'article 28 faisant état de mensualité d'un montant de 103,93 Euros « soit 4.988,64 Euros pour la durée totale du contrat 48 mois... »
Il est évident là encore que Monsieur X. ne pouvait être convaincu d'avoir contracté un engagement pour une durée de 48 mois.
Il est précisé que mis à part cette mention aucune autre stipulation ne figure au contrat de façon à ce que ne soit pas mis l'accent sur une quelconque durée d'engagement puisqu'il est indiqué en réalité oralement au co-contractant qu'il peut y mettre un terme à tout moment.
Toutes les autres mentions durée d'engagement, impossibilité de résilier le contrat en cours d'exécution, faculté de rétractation... figurent dans les conditions générales qui ne sont pas remises avec le contrat comme il a été dit.
A cet égard les dispositions d'ordre public du code de la consommation n'ayant pas été respecté, le contrat sera derechef considéré comme nul.
Ainsi et au-delà de l'absence de remise des conditions générales il sera observé que la convention signée par Monsieur X. ne contient aucun bordereau de rétractation en contravention avec lesdites dispositions.
Le matériel faisait l'objet d'une installation le 26 février 2003.
Afin de n'éveiller aucun soupçon il n'était réclamé ni frais d'installation, ni dépôt de garantie. De fait Monsieur X. à compter du mois de mars se mettait à recevoir mensuellement une facture.
Dès le mois d'avril Monsieur X. manifestait son désaccord et sollicitait de la Société ADT qu'elle démonte le matériel.
Ainsi le 23 juin Monsieur X. était contraint d'adresser une LRAR indiquant comment il avait été trompé sur la portée de son engagement.
Il réitérait sa démarche le 25 août 2003 faisant état de ses multiples appels téléphoniques infructueux et mettait l'accent sur le fait que son commerce étant fermé il convenait de venir récupérer l'ensemble des éléments installés.
Sans s'exécuter ni apporter une quelconque réponse la société ADT va invariablement adresser mensuellement des factures.
[minute page 6] Il est utile de rappeler que la Société ADT n'a jamais ainsi fourni la moindre prestation à Monsieur X. et que, à supposer qu’il ait jamais fonctionné, le matériel fourni n'a jamais eu la moindre utilité.
Il semble que la Société ADT ait admis un temps les doléances de Monsieur X. puisqu'elle ne va faire délivrer assignation que le 3 mars 2005 alors que le concluant n'a comme il l'avait indiqué jamais honoré, et pour cause, la moindre facture.
La Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE sera dès lors déboutée de ses demandes.
En effet :
- Monsieur X. n'a jamais eu connaissance des dispositions générales du contrat,
- les conditions particulières sont nébuleuses sur l'engagement du cocontractant et notamment sur la durée et la portée de l'engagement,
- les dispositions du code de la consommation n'ont en toutes hypothèses pas été respectées.
EN CONSÉQUENCE, MONSIEUR X. DEMANDE AU TRIBUNAL,
Rejetant toutes conclusions comme injustes et en tous cas mal fondées
Débouter la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE de ses demandes
Condamner la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE à payer à Monsieur X. la somme de 1.500,00 Euros à titre de dommages et intérêts
Condamner la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE à payer à Monsieur X. la somme de 1.500,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Condamner la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE aux éventuels dépens
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS ET DÉCISIONS :
SUR LA VALIDITÉ DU CONTRAT SOUSCRIT ENTRE LES PARTIES LE 14 JANVIER 2003 :
ATTENDU que la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a choisi en vertu de l'article 24 de ses propres Conditions Générales de placer expressément ses opérations de démarchage dans le cadre de l'article L. 121-23 du Code de la Consommation, se soumettant ainsi volontairement aux dispositions de l'article L. 121-21.
ATTENDU en outre que l'article 24 des Conditions Générales cite l'ensemble des dispositions de l'article L. 121-23 et suivants du Code de la Consommation, de sorte que le cocontractant est bien fondé situer le contrat dans le cadre des textes cités.
Que les Conditions Générales sont parties indissociables du Contrat entre les parties.
[minute page 7] ATTENDU que si la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE souhaitait que ses opérations se situent hors du champ du Code de la Consommation, comme elle le prétend aujourd'hui, elle devait se dispenser d'inclure l'article 24 dans ses conditions générales de vente, pour ne pas avoir à les renier plus tard.
ATTENDU en conséquence, que le contrat en cause est soumis à peine de nullité aux conditions de l'article L. 121-23 du Code sus visé.
Que la faculté de renonciation en particulier n'a pas été offerte à Monsieur X.
ATTENDU au surplus que le Commercial d'ADT TÉLÉSURVEILLANCE aurait dû s'interroger sur la pertinence d'une telle installation pour une entreprise de cette taille.
Qu'il a manqué à son devoir de conseil.
Le Tribunal sur le fondement de l'article L. 121-23 du Code de la Consommation dira nul et de nul effet le Contrat souscrit le 14 janvier 2003 entre la SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE et Monsieur X., et en conséquence déboutera la SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE de toutes ses demandes.
SUR LA DEMANDE DE M. X. BASÉE SUR L'ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE :
ATTENDU que Monsieur X. a dû engager des frais irrépétibles qu'il ne serait pas équitable de laisser à sa charge,
Le Tribunal condamnera la SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE à payer à Monsieur X. la somme de 1.000 Euros.
SUR LES DÉPENS :
ATTENDU que les dépens doivent rester à la charge de la partie qui succombe.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal de Commerce de Foix et de l'Ariège, par jugement contradictoire et en premier ressort, vidant son délibéré,
DIT nul et de nul effet le Contrat souscrit le 14 Janvier 2003 entre la SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE et Monsieur X.,
DÉBOUTE la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE de toutes ses demandes comme non fondées,
CONDAMNE la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE à payer à Monsieur X., la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
CONDAMNE la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE aux entiers dépens.
[minute page 8] LIQUIDE les frais de Greffe à la somme de soixante quinze euros et dix neuf centimes dont TVA douze euros et trente deux centimes.
La minute du jugement est signée par Claude DELPY, Président, et par Maître BASTIDE, Greffier.
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