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CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. A), 9 décembre 2014

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. A), 9 décembre 2014
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 1re ch. A
Demande : 14/00011
Date : 9/12/2014
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Décision antérieure : CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. A), 27 janvier 2011
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4980

CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. A), 9 décembre 2014 : RG n° 14/00011

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que le débat en appel consiste pour l'appelant à combattre la force obligatoire de ce contrat au visa de l'article L. 132-1 du code de la consommation, et l'article R. 132-2 du même code ;

Attendu que le comité d'entreprise est une personne morale qui participe à la gestion de toutes les activités sociales et culturelles établies dans l'entreprise, prioritairement au bénéfice des salariés et de leurs familles, ces activités tendant à l'amélioration des conditions de bien-être, ou ayant pour objet l'utilisation des loisirs et l'organisation sportive ; Attendu que les articles L. 2327 tiret 18 et 19 du code du travail, et L. 2323-83 du même code, permettent donc de ranger l'organisation d'une croisière au bénéfice des salariés, dans les meilleures conditions de confort et de prix, au titre de l'objet social et culturel spécifique du comité d'entreprise, sans que cela ne permette de le qualifier de professionnel de l'organisation des voyages, argumentation soutenue par l'appelant mais qui est sans emport dans le présent débat juridique ;

Attendu qu'en effet, le comité d'entreprise est une personne morale qui ne saurait se prévaloir, conformément la jurisprudence de la cour de justice des communautés européennes, des dispositions du code de la consommation relative aux clauses abusives, et ce d'autant qu'en l'espèce la cour retient que le contrat litigieux est en rapport direct avec l'objet et les prérogatives du comité d'entreprise tels que définis par le code du travail ;

Attendu que la disposition précitée du code de la consommation qui constitue le premier fondement de l'appel n'est donc pas applicable au comité d'entreprise Steria ».

 

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

PREMIÈRE CHAMBRE A

ARRÊT DU 9 DÉCEMBRE 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/00011. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 28 novembre 2013 : R.G. n° 11/02015.

 

APPELANTE :

Le Comité d'Entreprise STERIA

pris en la personne de son représentant statutaire en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis [adresse], représentée par Maître Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Maître Emery CROISE, avocat au barreau de GRASSE

 

INTIMÉE :

SA VACANCES HELIADES

Société Anonyme au capital de XX686.720,00 euros, inscrite au RCS d'Aix en Provence sous le n° B 317 YY, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social, [adresse], représentée par Maître Martine DESOMBRE de la SCP DESOMBRE M & J, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Maître Axel ENGELSEN, avocat au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 27 octobre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.TORREGROSA, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Monsieur Georges TORREGROSA, Président, Monsieur Olivier BRUE, Conseiller, Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 9 décembre 2014

ARRÊT : Contradictoire ; Prononcé par mise à disposition au greffe le 9 décembre 2014 ; Signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Les faits, la procédure et les prétentions :

En juillet 2008, le comité d'entreprise de l'établissement Steria Sophia-Antipolis a contacté la société vacances Héliades afin d'organiser une croisière au profit des salariés d'entreprise. Le 4 mars 2009, un accord de « réservation groupes » portant sur une croisière en Méditerranée du 27 juin 2009 au 4 juillet 2009, pour un nombre minimum de 20 cabines et 40 passagers, a été conclu entre le comité entreprise et la société vacances Héliades pour un coût total de 54.700 euros, avec chèque d'acompte de 5.670 euros.

Le 3 avril 2009, le comité d'entreprise a informé la société vacances Héliades de l'annulation de la croisière faute d'avoir pu réunir le nombre de participants.

Par acte d'huissier en date du 22 décembre 2011, la société vacances Héliades a assigné le comité d'entreprise devant le tribunal de Grande instance de grasse pour obtenir, sur le fondement du contrat de réservation, sa condamnation à lui payer une somme de 42.293,50 euros.

Par jugement contradictoire en date 28 novembre 2013, le tribunal de grande instance de grasse a fait droit à cette demande au principal, avec intérêts au taux légal depuis l'acte introductif d'instance, outre 3.000 euros au titre des frais inéquitablement exposés.

Le tribunal a jugé que le comité entreprise ne peut se prévaloir de la qualité de profane non professionnel, et que les dispositions du code de la consommation n'étaient pas par conséquent applicables au présent litige.

Le comité d'entreprise Steria, pris en la personne de son représentant statutaire en exercice, a relevé appel le 2 janvier 2014. Il sera fait application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'intimée s'est désistée d'un incident relatif à la régularité et à la recevabilité de l'appel, sur production d'un procès-verbal de réunion extraordinaire de l'assemblée générale du comité d'entreprise en date du 18 décembre 2013.

L'appelant a conclu le 25 juillet 2014 au visa des articles L. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation, ainsi que les articles R. 211-4 et L. 211-17 du code du tourisme.

L'appel est recevable et le jugement sera réformé, la cour prononçant un débouté global. Le comité d'entreprise est une personne morale dépourvue d'activité lucrative, et il peut au sens du code de la consommation se prévaloir de la qualité de non professionnel.

Le code de la consommation est applicable, et l’application du contrat de réservation est de nature à créer au détriment du comité d'entreprise un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; la clause numéro six du contrat de réservation est abusive au sens des dispositions des articles L. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation.

La société vacances Héliades a manqué à son obligation de conseil et a méconnu les articles R. 211-4 et R. 211-5 du code du tourisme, ainsi que l'article L. 211-17 du code du tourisme ; une somme de 8.000 euros est réclamée en réparation du préjudice subi du fait du comportement abusif et déloyal de la société intimée, outre 8.000 euros au titre des frais inéquitablement exposés.

La société vacances Héliades, intimée, a conclu le 28 mai 2014 et demande à la cour de juger que l'appel est irrecevable, faute pour le comité d'établissement d'avoir désigné un représentant légal.

À titre subsidiaire, le jugement sera confirmé, la cour y ajoutant s'agissant des intérêts au taux légal qui seront capitalisés à compter du 24 décembre 2009 ou alternativement à compter du 26 avril 2010.

Une somme de 40.100 euros est réclamée au titre des frais inéquitablement exposés.

L'ordonnance de clôture est en date du 14 octobre 2014.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu que le débat sur la recevabilité de l'appel n'a plus d'objet, cet incident ayant donné lieu à la saisine du conseiller de la mise en état seul compétent qui a donné acte à l'intimé de son désistement d'incident ;

Attendu que le contrat constitue la loi des parties, et la référence obligée de la cour dans un débat compliqué à loisir par des rappels factuels, au demeurant diversement interprétés, des négociations antérieures à ce contrat, ou même postérieures s'agissant de la tentative alléguée de report du voyage à une autre période ;

Attendu que le débat en appel consiste pour l'appelant à combattre la force obligatoire de ce contrat au visa de l'article L. 132-1 du code de la consommation, et l'article R. 132-2 du même code ;

Attendu que le comité d'entreprise est une personne morale qui participe à la gestion de toutes les activités sociales et culturelles établies dans l'entreprise, prioritairement au bénéfice des salariés et de leurs familles, ces activités tendant à l'amélioration des conditions de bien-être, ou ayant pour objet l'utilisation des loisirs et l'organisation sportive ;

Attendu que les articles L. 2327-18 et 19 du code du travail, et L. 2323-83 du même code, permettent donc de ranger l'organisation d'une croisière au bénéfice des salariés, dans les meilleures conditions de confort et de prix, au titre de l'objet social et culturel spécifique du comité d'entreprise, sans que cela ne permette de le qualifier de professionnel de l'organisation des voyages, argumentation soutenue par l'appelant mais qui est sans emport dans le présent débat juridique ;

Attendu qu'en effet, le comité d'entreprise est une personne morale qui ne saurait se prévaloir, conformément la jurisprudence de la cour de justice des communautés européennes, des dispositions du code de la consommation relative aux clauses abusives, et ce d'autant qu'en l'espèce la cour retient que le contrat litigieux est en rapport direct avec l'objet et les prérogatives du comité d'entreprise tels que définis par le code du travail ;

Attendu que la disposition précitée du code de la consommation qui constitue le premier fondement de l'appel n'est donc pas applicable au comité d'entreprise Steria ;

Attendu qu'en toute hypothèse, et référence faite à l'article R. 211-10 du code du tourisme qui prévoit en cas d'annulation par le vendeur du voyage le remboursement immédiat des sommes versées et une indemnité au moins égale à la pénalité à supporter par l'acheteur si l'annulation était intervenue de son fait, la cour ne discerne pas en quoi la clause numéro six concernant les frais d'annulation totale aurait un caractère abusif, parce que de nature à introduire un déséquilibre dans les droits et obligations respectifs des parties ;

Attendu que le second fondement de l'appel est celui du code du tourisme dans ses articles L. 211-17 alinéa premier, R. 211-4 et R. 211-5 ;

Mais attendu que la lecture exhaustive du contrat de réservation permet d'établir que « les conditions d'annulation de nature contractuelle » ont bien été prévues à l'article six et à l'article sept ; attendu que l'information concernant « la souscription facultative d'un contrat d'assurance couvrant les conséquences de certains cas d'annulation » se trouve en annexe deux, où il est indiqué que les prix comprennent les assurances Europ assistance « ci-joint », sachant que seuls les événements comportant un aléa (accident, maladie, deuil) peuvent être logiquement couverts, et non pas ceux résultant de l'incapacité du souscripteur à réunir le nombre de personnes prévues ; attendu que « la taille minimale maximale du groupe permettant la réalisation du voyage ou du séjour ainsi que, si la réalisation du voyages ou du séjour est subordonnée un nombre minimal de participants, la date limite d'information du consommateur en cas d'annulation du voyage ou du séjour, cette date ne pouvant être fixée à moins de 21 jours avant le départ » est prévue à l'article sept et à l'annexe deux, à la rubrique attribution prix garantis ;

Attendu que de façon plus générale, la lecture du contrat de réservation, et de son projet envoyé préalablement, ce qui n'est pas contesté, a permis au comité d'avoir toutes les informations sur les prix, les dates et les autres éléments constitutifs des prestations fournies (article R. 211-4 du code du tourisme), ce qui ne permet pas de se donner suite à l'argumentation pour le moins audacieuse de l'appelant page 31 :

« si Héliades avait clairement notifié au comité les conditions d'annulation auxquelles il s'exposait s'il ne fournissait pas un nombre suffisant de participants, ledit comité soit n'aurait jamais accepté de souscrire l'accord de réservations, soit aurait souscrit, s'il en avait été informé, ce qui n'en a pas été le cas, une assurance couvrant les conséquences de l'annulation de la croisière... » ;

Attendu que référence faite au libellé précis et complet de l'ensemble du contrat de réservation, et sans même avoir à examiner les capacités personnelles et professionnelles du représentant du comité, cette argumentation revient nécessairement à admettre que l'on a signé sans lire le contrat, argument qui n'est pas opposable à l'autre cocontractant, fût-ce au visa du code de la consommation non applicable, ou du code du tourisme dont rien ne démontre qu'il n'a pas été respecté, en toute hypothèse s'agissant des conséquences financières de l'annulation aujourd'hui litigieuses ;

Attendu que toute autre argumentation revient à admettre que l'obligation de conseil et d'information alléguée doit suppléer les conséquences d'un risque d'annulation par l'acquéreur, dont précisément les contours ont été expressément définis dans le contrat ;

qu'ainsi le comité se prévaut d'une obligation dont l'irrespect, non démontré, n'a pu avoir aucune incidence sur les conséquences financières de l'annulation intervenue aujourd'hui litigieuses ;

Attendu que la cour ayant épuisé l'argumentation de l'appelant, c'est donc une confirmation qui s'impose sur le principal de la condamnation, avec intérêts au taux légal depuis la mise en demeure en date du 24 décembre 2009 (pièce sept : attente de paiement faute de quoi assignation sans autre rappel), et capitalisation pour les intérêts dus depuis au moins un an à compter de la première demande justifiée au dossier, à savoir les conclusions du 27 mai 2014 ;

Attendu que la cour n'a à se prononcer que sur le montant des frais inéquitablement exposés par l'intimé, et que ce dernier estime égaux quasiment au montant du principal litigieux ;

Attendu que sans avoir à se prononcer sur le montant de ces honoraires, la cour estime qu'en appel, une somme de 3.500 euros est de nature à remplir l'intimé de ses droits, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, qui retient le critère d'équité ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR statuant contradictoirement :

Déclare l'appel infondé ;

Déboute le comité d'entreprise Stéria de toutes ses demandes ;

Confirme l'intégralité des dispositions du jugement de premier ressort, sauf à fixer le point de départ des intérêts légaux à la date de la mise en demeure du 24 décembre 2009, et le point de départ du calcul de la capitalisation des intérêts dus depuis au moins un an à la date des conclusions du 27 mai 2014 ;

Condamne l'appelant aux entiers dépens, qui seront recouvrés au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile, outre le paiement à l'intimé d'une somme de 3.500 euros au titre des frais inéquitablement exposés en cause d'appel.

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT