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TGI PARIS (9e ch. 3e sect.), 30 novembre 1998

Nature : Décision
Titre : TGI PARIS (9e ch. 3e sect.), 30 novembre 1998
Pays : France
Juridiction : TGI Paris. 9e ch. sect. 3
Demande : 98/15230
Date : 30/11/1998
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 21/08/1996
Décision antérieure : CA PARIS (5e ch. sect. A), 14 mars 2001
Numéro de la décision : 3
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 515

TGI PARIS (9e ch. 3e sect.), 30 novembre 1998 : RG n° 98/15230 ; jugement n° 3

(sur appel CA Paris (5e ch. A), 14 mars 2001 : RG n° 1999/01061 ; arrêt n° 110)

 

Extrait : « Attendu que les contrats en rapport direct avec l'activité professionnelle excluant l'application du code de la consommation sont ceux qui participent au processus économique de fabrication, distribution et commercialisation des produits ou services ; Qu'il est incontestable que l'activité d'une paroisse à savoir la délivrance des sacrements, la célébration des offices, l'instruction religieuse, échappe à cette définition ; Que le fait d'acquérir un copieur pour favoriser la mission religieuse demeure soumis au régime de la protection des consommateurs et relève donc des dispositions de la loi du 22 décembre 1972 et du code de la consommation ».

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS

NEUVIÈME CHAMBRE TROISIÈME SECTION

JUGEMENT DU 30 NOVEMBRE 1998

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 98/15230. Jugement n° 3. Assignation du 21 août 1996.

 

DEMANDERESSE :

SA ACTI BAIL

siège : [adresse], représentée par Maître Roger DIEBOLT, avocat, D 87 ;

 

DÉFENDEURS :

- Monsieur X.

demeurant : [adresse], représenté par Maître Bernadette VIU-GAUDIN, avocat, C 260 ;

- SOCIÉTÉ FAC-SIMILE

- SOCIÉTÉ BUREAUTIQUE FRANCILIENNE

siège : [adresse], représentée par Maître François LIREUX, avocat, C 495 ;

- SOCIÉTÉ TEC-INVEST

siège : [adresse], représentée par Maître Pierre LACOCUILHE, avocat, M 16 ;

 

[minute page 2] COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Magistrats ayant délibéré : Madame DELBES, Vice-Président, Madame LOMBARD-LATHELIER, Juge, Madame GUICHARD, Juge

GREFFIER : Madame MARMOL

DÉBATS : A l'audience publique du 20 octobre 1998.

JUGEMENT : Prononcé en audience publique. Contradictoire. Susceptible d'appel.

 

EXPOSÉ DU LITIGE            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Invoquant le contrat de location d'un photocopieur conclu entre la paroisse Y. et la société TECH INVEST et le non paiement des échéances, la société ACTI BAIL a assigné par acte en date du 21 août 1996, Monsieur X., aux fins de paiement :

- d'une indemnité de 33.450 francs HT outre intérêts au taux légal et TVA à compter du 11 novembre 1995,

- d'une somme de 22.300 francs HT outre TVA au titre des loyers impayés des 1er août et 1er novembre 1.995, avec intérêts au taux conventionnel de 0,05% par jour de retard à compter de l'échéance impayée,

- d'une somme de 211.850 francs HT outre TVA au titre des loyers à échoir après résiliation avec intérêts au taux conventionnel de 0,05% par jour de retard à compter du 3 novembre 1995, date de résiliation du contrat,

- [minute page 3] d'une somme de 23.415 francs HT outre TVA au titre de la pénalité due en réparation du préjudice subi, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance impayée,

avec capitalisation des intérêts, et outre le prononcé de l'exécution provisoire,

- d'une indemnité de 15.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

Par acte en date du 14 novembre 1996, Monsieur X. a appelé en garantie, en intervention forcée et en paiement d'une indemnité de 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la société FAC SIMILE.

Par acte en date du 9 décembre 1997, Monsieur X. a appelé la société TECH INVEST en garantie, déclaration de jugement commun et paiement d'une indemnité de 12.060 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les instances ont fait l'objet de jonctions.

 

Monsieur X.

expose que la société FAC SIMILE lui a vendu en leasing, le 29 octobre 1993, un copieur CANON 4080 dont le financement était assuré par la SOVAC et que cette machine, destinée à une exposition, a été reprise le 23 mai 1995, moyennant son remplacement par un CANON NP 5060 livré le 10 juillet 1995 et le versement d'un acompte de 4.000 francs, sans que les conditions du nouveau contrat, rempli en blanc, ne soient clairement définies et alors que les loyers du CANON 4080 étaient toujours prélevés sur son compte.

Il énonce que le 30 août 1995, il a été informé par la société ACTI BAIL d'un prélèvement sur son compte pour un montant de 10.745,46 francs auquel il a fait opposition le 11 septembre tout en adressant un courrier à FAC SIMILE le 20 septembre.

Il rappelle qu'une ordonnance de référé en date du 11 juin 1996 a prononcé la résiliation du contrat avec reprise du CANON 5060. Monsieur X. invoque les manœuvres dolosives de FAC SIMILE qui a prétexté une exposition pour lui faire souscrire un nouveau contrat qu'il estime frappé de nullité en application des dispositions des articles L. 121-23 à 26 du code de la consommation.

Il soutient que certaines mentions obligatoires ne figuraient pas dans l'acte du 23 mai 1995 et notamment la cession du matériel au profit d'ACTI BAIL, objet du contrat du 30 août 1995.

[minute page 4] De même, ce second contrat est frappé de nullité conformément aux dispositions de l'article L. 311-21 du même code. Monsieur X. fait valoir que les contrats litigieux ont été conclus par la Paroisse Y., entité juridique inexistante, et soulève l'irrecevabilité des demandes dans les conditions de l'article 32 du nouveau code de procédure civile.

Il soutient que ceux-ci lui sont inopposables, que les demandes sont irrecevables au sens de l'article 117 du nouveau code de procédure civile.

Il s'oppose aux prétentions de la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE qui lui réclame la somme de 115.918,46 francs.

Il s'oppose aux demandes de la société ACTIBAIL et sollicite, reconventionnellement, à l'encontre de la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE et de la société ACTIBAIL, outre le remboursement de l'acompte de 4.000 francs, le paiement d'une somme de 50.000 francs à titre de dommages-intérêts et d'une indemnité de 30.150 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

La société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE

conteste les manœuvres frauduleuses reprochées par son contradicteur.

Elle expose que celui-ci restait devoir à la SOVAC, en exécution du contrat du 29 octobre 1993, une somme de 115.918,46 francs qu'elle a elle-même réglée à cet organisme.

Elle soutient que le prélèvement effectué à tort sur le compte de Monsieur X., pour un montant de 6.742,07 francs a été remboursé par la SOVAC.

Selon elle, la loi de 1972 ne peut s'appliquer à ce contrat, en l'absence de démarchage de Monsieur X.

La société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE s'oppose aux demandes reconventionnelles de son contradicteur et sollicite subsidiairement, au cas de constatation par 1e Tribunal de la nullité du contrat, la remise en l'état antérieur et la restitution de la somme versée à la SOVAC.

 

La société TECH INVEST

fait valoir qu'aucune demande est formée à son encontre dans le cadre de l'appel en garantie du 9 décembre 1997, elle s'oppose aux demandes de dommages-intérêts et de remboursement des frais irrépétibles de Monsieur X.

[minute page 5] Elle sollicite le paiement, par ce dernier, d'une somme de 10.000 francs à titre de dommages-intérêts et d'une indemnité de 5.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

La société ACTI BAIL

maintient l'intégralité de ses prétentions à l'égard de Monsieur X., elle soutient que celui-ci ne démontre ni une manœuvre frauduleuse au sens des articles 1109 et 1116 du code civil ni l'application aux contrats litigieux de la loi du 22 décembre 1972, s'agissant d'un copieur destiné aux besoins de la Paroisse, ni celle des articles susvisés du code de la consommation, Monsieur X. ne pouvant être assimilé à un simple consommateur.

La société ACTI BAIL expose qu'elle a la qualité de tiers au contrat conclu le 23 mai 1995 entre la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE et Monsieur X., client régulier de cette société, que le contrat de crédit bail, parfaitement régulier, doit recevoir application dans toutes ses dispositions financières.

Contrairement aux arguments de Monsieur X., elle soutient que le contrat a été conclu lors de l'échange des signatures et que celui-ci s'est engagé personnellement au sens de l'article 1322 du code civil ; elle fait valoir que son contradicteur a commis une faute en n'acquittant pas les échéances dues, elle s'oppose à l'ensemble de ses prétentions reconventionnelles.

Enfin, elle précise que l'irrecevabilité devait être invoquée in limine litis, conformément à l'article 74 du nouveau code de procédure civile, que Monsieur X. est visé à titre personnel dans l'acte introductif d'instance, qu'il a constitué avocat et qu'il a été en mesure de faire valoir ses droits.

 

Bien que régulièrement assignée, la société FAC SIMILE n'a pas constitué avocat.

 

MOTIFS (justification de la décision)    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Attendu que si, dans l'ancien droit, une paroisse était une circonscription dans laquelle un curé dirigeait le spirituel, c'est aujourd'hui une communauté chrétienne, subdivision d'un diocèse dont un curé, un pasteur ont la charge, dépourvue de toute personnalité juridique ;

[minute page 6] Attendu qu'aux termes de l'article 32 du nouveau code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise contre une personne dépourvue du droit d'agir,

Que si ce moyen n'a pas été développé avant toute défense au fond par Monsieur X., dans les conditions de l'article 74 du même code, cet argument a néanmoins été utilement invoqué au cours des débats et fait l'objet d'un débat contradictoire,

Qu'il convient, conformément à l'article 117 du même code, dont les dispositions sont d'ordre public, de constater la nullité de l'assignation délivrée à l'encontre de la paroisse Y., personne morale inexistante et de déclarer la société ACTI BAIL irrecevable en ses demandes la visant.

Attendu cependant que les demandes ont été également formées à l'encontre de Monsieur X.,

Que les contrats litigieux et les nombreux courriers échangés avec la société FAC SIMILE, ACTI BAIL sont tous revêtus de la signature du curé et du tampon de la paroisse Y.,

Que la société ACTI BAIL est donc recevable pour ce qui concerne les demandes à l'encontre de Monsieur X.

Attendu que les contrats en rapport direct avec l'activité professionnelle excluant l'application du code de la consommation sont ceux qui participent au processus économique de fabrication, distribution et commercialisation des produits ou services ;

Qu'il est incontestable que l'activité d'une paroisse à savoir la délivrance des sacrements, la célébration des offices, l'instruction religieuse, échappe à cette définition ;

Que le fait d'acquérir un copieur pour favoriser la mission religieuse demeure soumis au régime de la protection des consommateurs et relève donc des dispositions de la loi du 22 décembre 1972 et du code de la consommation ;

Attendu qu'aux termes de l'article L. 311-2 du code de la consommation, la location-vente, la location avec option d'achat ainsi que les ventes ou prestations de services dont le paiement est échelonné, sont assimilées à des opérations de crédit,

[minute page 7] Que le fait de pratiquer le démarchage sur le lieu de travail d'une personne physique, même à sa demande, afin de lui proposer la location vente ou la vente avec option d'achat d'un bien, soumet les contrats conclus au formalisme des textes susvisés,

Que la faculté de renonciation prévue par l'article L. 121-25 du même code, à peine de nullité du contrat, ne figure pas dans l'acte de location-vente du 23 mai 1995 conclu entre Monsieur X. et monsieur Z., préposé de FAC SIMILE, intitulé imparfaitement contrat de vente et location d'un photocopieur NP 5060 mais dont les caractéristiques sont celles d'un contrat de location-vente,

Que dans ces conditions, il convient, conformément aux dispositions de l'article L. 121-23 du même code de prononcer la nullité de ce contrat,

Qu'aux termes de l'article L. 311-21 du même code, le contrat de crédit, à savoir le contrat de financement en date du 30 août 1995, est annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu, est lui même judiciairement annulé,

Qu'il convient de prononcer la nullité du contrat du 30 août 1995 ;

Attendu que l'annulation des contrats des 23 mai et 30 août 1995 prive la société ACTI BAIL de tous droits à l'encontre de Monsieur X.,

Que cette société sera déboutée de l'ensemble de ses prétentions ;

Attendu que Monsieur X. ne justifie pas du préjudice invoqué à l'appui de sa demande de dommages-intérêts,

Qu'il sera débouté sur ce point ;

Attendu que si la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE, cessionnaire de la société TECHINVEST, justifie du paiement à la SOVAC de la somme de 115.918,46 francs correspondant aux échéances relatives à la location d'un photocopieur CANON 4080, référence 1050 232 708 8, Monsieur X. n'a contracté aucun engagement à l'égard de ces deux sociétés ; le paiement des échéances dues au titre d'un contrat antérieur ne pouvant s'analyser que comme un geste commercial auquel rien ne l'obligeait et dont elle doit assumer seule les conséquences financières au regard des nouveaux contrats frappés de nullité pour les motifs sus-exposés,

[minute page 8] Qu'il appartenait à la société TECH INVEST de veiller à la validité des contrats souscrits,

Que la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE, cessionnaire des dits contrats, sera déboutée de l'ensemble de ses prétentions ;

Attendu que la nature de la demande justifie le prononcé de l’exécution provisoire ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X. les frais non compris dans les dépens qu'il a pu exposer,

Que les sociétés FAC SIMILE, TECH INVEST, ACTIBAIL et BUREAUTIQUE FRANCILIENNE seront condamnées à lui payer une indemnité de 15.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

Constate la nullité de l'assignation à l'égard de la Paroisse Y. ;

Déclare la société ACTI BAIL recevable à l'encontre de Monsieur X. ;

Prononce la nullité des contrats en date des 23 mai et 30 août 1995 ;

Déboute la société ACTI BAIL de l'ensemble de ses prétentions ;

Déboute Monsieur X. de sa demande de dommages-intérêts ;

Déboute la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE de ses demandes ;

Ordonne l'exécution provisoire ;

[minute page 9] Condamne la société ACTIBAIL, la société FAC SIMILE, TECH INVEST et la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE à payer à Monsieur X. une indemnité de 15.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la société ACTIBAIL, la société FAC SIMILE, TECH INVEST et la société BUREAUTIQUE FRANCILIENNE aux dépens qui seront recouvrés directement par Maître VIU-GAUDIN, Avocat, dans les conditions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris, le 30 novembre 1998

Le Greffier,                                                      Le Président,