CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 21 mai 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5271
CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 21 mai 2015 : RG n° 13/07533
Publication : Jurica
Extrait : « Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, les dispositions de ce code relatives à la protection des consommateurs contre les clauses abusives ont vocation à s'appliquer dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs. Ces règles protectrices ne sont pas applicables aux contrats ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation artisanale.
M. X. qui exploite un fonds de commerce de réparation automobile, a souscrit un contrat de location financière traduisant un choix de gestion de la part du preneur pour financer du matériel de télésurveillance qu'il estime nécessaire à son exploitation. Il importe peu de savoir si le locataire disposait de compétences particulières dans le domaine de la télésurveillance dès lors que le contrat avait pour objet de protéger son fonds de commerce et ce seul lien suffit à exclure l'application des dispositions du code de la consommation. M. X. ne peut dès lors, pour échapper au paiement, invoquer le caractère abusif des clauses relatives à la durée déterminée irrévocable du contrat et à l'indemnité perçue en cas de résiliation qu'il a librement acceptées et sont donc parfaitement valables. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9
ARRÊT DU 21 MAI 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/07533. Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 janvier 2013 - Tribunal d'Instance de BOBIGNY - R.G. n° 11-11-001186.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville] ; Représenté par Maître Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K 488 ; Assisté à l'audience de Maître Chantal-Rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, substituant Maître Bruno MARCUS, avocat au barreau de BOBIGNY
INTIMÉE :
PARFIP FRANCE
immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n° 337 XXX représentée par son Président ; Représentée par Maître Sébastien PINARD, avocat au barreau de PARIS, toque : G0029 ; Assistée à l'audience de Maître Sébastien PINARD, avocat au barreau de PARIS substituant Maître Nathalie SAGNES-JIMENEZ, avocat au barreau de l'AIN
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 mars 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Président de chambre, et Madame Françoise JEANJAQUET, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Président de chambre, Madame Patricia GRASSO, Conseillère, Madame Françoise JEANJAQUET, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Catherine MAGOT
ARRÊT : CONTRADICTOIRE, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Mme Patricia GRASSO, conseillère pour Monsieur Jean-Pierre GIMONET, président empêché et par Madame Catherine MAGOT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X., qui exploitait un fonds de commerce de garage automobile, a conclu le 9 janvier 2007 un contrat d'abonnement de télésurveillance de son garage avec la société PROTEL et a signé le même jour, un contrat distinct de location de matériel avec la société PARFIP pour une durée de 60 mois moyennant un loyer mensuel de 135 euros HT.
Ayant cédé son fonds de commerce à la SARL GARAGE DES PAVILLONS le 18 juillet 2007, il a cessé de payer les loyers relatifs à ce contrat.
La société PARFIP a obtenu auprès du tribunal d'instance de Bobigny par ordonnance du 21 juillet 2011, qu'il soit fait injonction à Monsieur X. de lui payer les sommes dues au titre du contrat de location.
M. X. a formé opposition à l'ordonnance et par jugement du 22 janvier 2013, le tribunal d'instance après avoir déclaré recevable son opposition et dit que le présent jugement se substituera à l'ordonnance portant injonction de payer, a condamné Monsieur X. à payer à la société PARFIP FRANCE la somme de 6.619,86 euros au titre des loyers échus, la somme de 662,15 euros au titre des pénalités de retard, la somme de 2.098,98 euros au titre de l'indemnité de résiliation et la somme de 209,98 euros au titre de la clause pénale, avec intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2010 date de la mise en demeure et la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné la restitution du matériel loué au siège social de la société PARFIP FRANCE dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant 40 jours, laissé les dépens à la charge de Monsieur X., dit n'y avoir lieu à exécution provisoire et rejeté les autres demandes.
Par déclaration du 15 avril 2013, Monsieur X. a relevé appel de la décision.
Selon ses conclusions du 27 juin 2013, l'appelant sollicite l'infirmation du jugement et demande que la société PARFIP FRANCE soit déboutée de l'intégralité de ses demandes ; subsidiairement, il demande que les clauses du contrat de location de matériel de télésurveillance conclu le 9 janvier 2007 qui fixent à 60 mois la durée initiale et irrévocable du contrat et mettent à la charge du locataire une indemnité de résiliation et une pénalité contractuelle pour toute rupture anticipée du contrat (article 6 du contrat) soient déclarées abusives et donc réputées non écrites, que soit constaté que le contrat de location de matériel de télésurveillance conclu le 9 janvier 2007 est résilié depuis le 17 juillet 2007 et en conséquence, que la société PARFIP FRANCE soit déboutée de ses demandes ; très subsidiairement, il demande que soit constaté que le contrat de location est résilié depuis le 31 octobre 2007 et que Monsieur X. ne saurait être condamné au-delà des loyers échus entre les mois d'août à octobre 2007 inclus soit la somme de 484,38 euros, et que la société PARFIP FRANCE soit déboutée de ses autres demandes plus amples et contraires ; il sollicite la condamnation de la société PARFIP FRANCE aux entiers dépens.
Il fait valoir qu'il n'est redevable d'aucune somme et obligation contractuelle de restitution à l'égard de la société PARFIP FRANCE, le contrat litigieux ayant été repris par le GARAGE DES PAVILLONS à la suite de la cession de son fonds de commerce, lequel a régularisé un nouveau contrat de télésurveillance avec la société PROTEL de sorte qu'il s'est opéré une novation au sens de l'article 1271 du code civil entre le contrat souscrit par M. X. et le nouveau contrat souscrit par le GARAGE DES PAVILLONS emportant extinction de sa dette.
Il fait valoir que bien que professionnel, il peut se prévaloir des dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives dès lors que le contrat litigieux est sans rapport direct avec son activité professionnelle de garagiste.
Selon ses conclusions du 20 août 2013, la société PARFIP demande la confirmation du jugement rendu le 22 janvier 2013, et y ajoutant, demande la condamnation de M. X. à restituer les matériels loués à son siège social aux frais exclusifs du défendeur, sous astreinte de 100euros par jour à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et la liquidation de l'astreinte ordonnée dans le jugement déféré, la condamnation de l'appelant à lui verser la somme de 2.000 euros de ce chef, à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Elle fait valoir que la cession du fonds de commerce de M. X. lui est inopposable, le cessionnaire n'ayant pas souhaité poursuivre le contrat litigieux ; que M. X. a contracté pour les besoins de son activité professionnelle, il ne peut donc pas revendiquer le bénéfice des dispositions protectrices des consommateurs en matière de clauses abusives ; qu'en toute hypothèse, la clause imposant une durée irrévocable du contrat ne constitue pas une clause abusive, la durée du contrat et la faculté de résiliation devant être appréciées au regard du mode de financement du matériel et qu'en cas de résiliation pour défaut de paiement des loyers, l'indemnité de résiliation n'est pas abusive en ce qu'elle est destinée à compenser le préjudice financier résultant de l'impossibilité pour le bailleur de poursuivre le contrat.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Sur la résiliation du contrat de location du 9 janvier 2007 :
L'acte de cession du fonds de commerce signé le 18 juillet 2007 entre M. X. et la SARL GARAGE DES PAVILLONS versé aux débats ne stipule pas la reprise par le cessionnaire de contrat de location du matériel de surveillance souscrit par M. X. avec la société PARFIP, reprise qui en toute hypothèse aurait supposé l'autorisation préalable et écrite du bailleur en application de l'article 8 des conditions générales du contrat de location.
Le même article 8 stipule d'ailleurs expressément qu'en cas de cession ou de nantissement de son fonds de commerce, le locataire devra veiller à ce que le matériel ne soit pas compris dans cette cession.
En outre, l'article 6 des conditions générales prévoit la résiliation automatique et de plein droit du contrat en cas de cessation, suspension de l'activité du locataire quelqu’en soient les causes.
C'est bien dans ce sens que l'entendait M. X. qui produit un courrier recommandé datée du 31 octobre 2007 adressé à la société PARFIP par lequel il confirme avoir vendu son fonds de commerce et demande la résiliation de son contrat.
M. X. ne peut en conséquence se prévaloir de la signature par le nouveau propriétaire du fonds de commerce, le GARAGE DES PAVILLONS, d'un nouveau contrat de télésurveillance portant sur des prestations et un prix différents, avec la même société PROTEL prestataire de la télésurveillance, peu important qu'une partie du matériel installé avant la cession ait été laissé sur place afin d'être utilisé dans le cadre du nouveau contrat de télésurveillance, la société PARFIP, en raison de la résiliation du contrat initial, ayant la libre disposition des biens loués dont elle se trouve être propriétaire.
Il s'ensuit que M. X. ne peut sérieusement soutenir que le GARAGE DES PAVILLONS a entendu se substituer à lui dans l'exécution des obligations qu'il avait contractées vis à vis de PARFIP et que les conditions de la novation sont réunies en l'absence de toute volonté expresse des parties et notamment d'une acceptation de substitution du débiteur par la société PARFIP.
Sur les sommes dues par M. X. au titre du contrat de location :
Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, les dispositions de ce code relatives à la protection des consommateurs contre les clauses abusives ont vocation à s'appliquer dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs.
Ces règles protectrices ne sont pas applicables aux contrats ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation artisanale.
M. X. qui exploite un fonds de commerce de réparation automobile, a souscrit un contrat de location financière traduisant un choix de gestion de la part du preneur pour financer du matériel de télésurveillance qu'il estime nécessaire à son exploitation.
Il importe peu de savoir si le locataire disposait de compétences particulières dans le domaine de la télésurveillance dès lors que le contrat avait pour objet de protéger son fonds de commerce et ce seul lien suffit à exclure l'application des dispositions du code de la consommation.
M. X. ne peut dès lors, pour échapper au paiement, invoquer le caractère abusif des clauses relatives à la durée déterminée irrévocable du contrat et à l'indemnité perçue en cas de résiliation qu'il a librement acceptées et sont donc parfaitement valables.
La société PARFIP est donc bien fondée à réclamer les sommes dues en cas de résiliation anticipée telles que prévues au contrat et les montants des condamnations retenus par le jugement entrepris sur la base du décompte produit par la société PARFIP n'est pas contesté.
La société PARFIP a obtenu la condamnation de M. X. à restituer le matériel sous astreinte et il n'y a pas lieu de modifier le montant de cette astreinte qui apparaît proportionné aux enjeux financiers en cause.
En conséquence le jugement entrepris sera confirmé dans toutes ses dispositions.
Il n'appartient pas à la cour de liquider l'astreinte prononcée par le jugement qui lui est déféré par la voie de l'appel et la société PARFIP sera déboutée de sa demande de ce chef.
Eu égard à la situation économique respective des parties, l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 en cause d'appel.
M. X., partie succombante, sera condamné aux dépens de l'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement du tribunal d'instance de Bobigny en date du 22 janvier 2013 dans toutes ses dispositions ;
Rejette la demande de liquidation de l'astreinte de la société PARFIP ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. X. aux dépens de l'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5885 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence
- 5905 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Protection et sécurisation de l’activité
- 5910 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Intensité du lien avec l’activité - Contrat nécessaire
- 5953 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation générale
- 5954 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par activité
- 5955 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par cour d’appel