TI CLERMONT-FERRAND, 31 janvier 1995
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 53
TI CLERMONT-FERRAND, 31 janvier 1995 : RG n° 94/912
(sur appel CA Riom (1re ch. 1re sect.), 28 novembre 1995 : RG n° 666/95 ; arrêt n° 991, et sur pourvoi Civ. 1re, 17 mars 1998 : pourvoi n° 96/11593, renvoi devant CA Bourges (1re ch.), 23 février 2000 : RG n° 199801206 ; arrêt n° 299)
Extrait : « Il résulte d'un arrêt de la Cour de Cassation du 6 janvier 1994, que la clause qui fait supporter au preneur dans un contrat de location de longue durée la totalité des risques de perte et de détérioration de la chose louée, même lorsque ceux-ci sont dus à un évènement imprévisible et irrésistible, constitutif de la force majeure et qu'aucune faute ne peut être imputée audit preneur, confère au bailleur un avantage excessif. Cette clause contractuelle est donc abusive. »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE CLERMONT-FERRAND
JUGEMENT DU 31 JANVIER 1995
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 94/912.
PRÉSIDENT : Madame Elizabeth SCHRAM
GREFFIER : Madame Patricia MONTORIER
DEMANDEUR :
SA CAVIA
dont le siège social est [adresse], agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège. Comparant par la SCP TEILLOT BLANC BARBIER CHAPUT DUMAS, Avocats au Barreau de CLERMONT-FERRAND.
DÉFENDEUR :
Monsieur X.
demeurant [adresse]. Comparant par la SCP VIGNANCOUR HOUIN DISCHAMP, Avocats au Barreau de CLERMONT-FERRAND.
DÉBATS : Le 13 décembre 1994, avec mise en délibéré pour le prononcé du [N.B. conforme à la minute]
JUGEMENT : Le 31 janvier 1995.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La SA CAVIA a conclu avec Monsieur X. un contrat de location avec promesse de vente le 20 décembre 1991.
La SA CAVIA a assigné le 16 juin 1994 Monsieur X. afin qu'il soit condamné à lui payer :
- la somme de 57.923,38 francs au principal avec intérêts contractuels postérieurs au 20 mai 1994, date d'arrêté du compte,
- la somme de 3.500 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Elle requiert la condamnation du défendeur aux dépens avec exécution provisoire du jugement.
[minute page 2] Monsieur X. répond que la SA CAVIA n'est absolument pas fondée dans ses demandes, car il a été victime du vol de son véhicule le 11 février 1993 à [ville] (Bouches du Rhône) selon déclaration versée aux débats.
Son véhicule a été estimé par le BCA le 24 mars 1993, sur la base des éléments fournis par l'intéressé, n'ayant pas été retrouvé, et la Compagnie d'Assurances de Monsieur X., après avoir longuement réclamé, pour permettre l'indemnisation, le duplicata de la carte grise du véhicule au bailleur, la Société SOVAC, a indemnisé celle-ci le 18 novembre 1993.
Or, la Cour de Cassation, dans un arrêt du 6 janvier 1994, a estimé que pour ce qui concerne les contrats de leasing « la clause qui fait supporter au preneur, dans un contrat de location de longue durée, la totalité des risques de perte ou de détérioration de la chose louée, même lorsque ceux-ci sont dus à un évènement imprévisible et irrésistible, constitutif de la force majeure, et qu'aucune faute ne peut être imputée audit preneur, confère au bailleur un avantage excessif ».
Dans ces conditions, la Société CAVIA n'est pas fondée à réclamer quelque somme que ce soit à Monsieur X., celui-ci ayant été victime d'un vol, et s'étant trouvé dans une situation de même nature.
En outre, et à titre infiniment subsidiaire, le Tribunal pourra constater que de manière totalement abusive la Société SOVAC réclame des loyers pour les mois de novembre et décembre 1993, alors qu'elle a été indemnisée le 18 novembre avant l'échéance de ce même mois.
De même, ces loyers correspondant pour partie à l'amortissement du véhicule et pour partie aux intérêts financiers supportés par la Société SOVAC, alors même qu'il a été tenu compte de cet amortissement dans le règlement final qui a été délivré, la valeur du véhicule ayant été évaluée par expert au moment du sinistre en février 1993, ceux-ci ne sont absolument pas dus.
Enfin le Tribunal observera que le cumul des indemnités réclamées sur loyers impayés de 8 % et d'intérêts au taux légal de 8,40% s'élève à 16,40%, ce qui est nettement supérieur au taux d'usure autorisé.
[minute page 3] Monsieur X. conclut donc au débouté de la demande et à la condamnation de la SA CAVIA à lui payer la somme de 3.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile outre aux dépens.
La SA CAVIA répond que le Tribunal sera amené à constater que le contrat souscrit est un contrat de location avec option d'achat.
Aux termes du contrat faisant la loi des parties, il était notamment prévu ; « le locataire a la garde du véhicule, il supporte donc la totalité des risques courus par le véhicule, les tiers et le bailleur ».
« article 4-b) en cas de sinistre total ou de vol, le bailleur encaisse le prix de vente de son épave et les indemnités de sinistre. A défaut, ou sur insuffisance, le locataire indemnise lui-même le bailleur à concurrence de la valeur vénale du véhicule avant sinistre.
La location étant résiliée de plein droit, le locataire verse en outre une indemnité égale à la différence entre les sommes ainsi perçues et le montant des sommes visées à l'article 2 alinéa 3 ».
La SA CAVIA demande donc que l'argumentation de Monsieur X. soit rejetée et qu'il soit débouté de sa demande.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est établi que le véhicule BMW Type 525 TDS immatriculé […] donné en location vente par la SA CAVIA à Monsieur X. a été volé le 11 février 1993 à [ville] (13).
La SA CAVIA oppose la clause contractuelle suivante : « le locataire a la garde du véhicule, il supporte donc la totalité des risques courus par le véhicule, les tiers et le bailleur ».
« article 4-b) en cas de sinistre total ou de vol, le bailleur encaisse le prix ce vente de son épave et les indemnités de sinistre. A défaut, ou sur insuffisance, le locataire indemnise lui-même le bailleur à concurrence de la valeur vénale du véhicule avant sinistre.
La location étant résiliée de plein droit, le locataire verse en outre une indemnité égale à la différence entre les sommes ainsi perçues et le [minute page 4] montant des sommes visées à l'article 2 alinéa 3 ».
Il résulte d'un arrêt de la Cour de Cassation du 6 janvier 1994, que la clause qui fait supporter au preneur dans un contrat de location de longue durée la totalité des risques de perte et de détérioration de la chose louée, même lorsque ceux-ci sont dus à un évènement imprévisible et irrésistible, constitutif de la force majeure et qu'aucune faute ne peut être imputée audit preneur, confère au bailleur un avantage excessif. Cette clause contractuelle est donc abusive.
En l'espèce, la perte de la voiture BMW par Monsieur X. est due à un vol qui est un évènement imprévisible et irrésistible constitutif de la force majeure. En application de l'article 1148 du Code Civil, il doit être exonéré de tout règlement envers la SA CAVIA qui doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes envers Monsieur X.
Il y a lieu de condamner la SA CAVIA à payer à Monsieur X. la somme de 1.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile outre aux dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort.
Vu l’arrêt de la Cour de Cassation du 6 janvier 1994.
Déboute la SA CAVIA de l'ensemble de ses demandes envers Monsieur X.
Condamne la SA CAVIA à payer à Monsieur X. la somme de MILLE FRANCS (1.000 francs) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamne la SA CAVIA aux dépens.
- 6119 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Clauses sur les causes d’exonération et la force majeure
- 6279 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Locations financières - Location avec option d’achat (LOA) (2) - Résiliation et Fin du contrat
- 6285 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Location de meuble (bail mobilier) - Location de voiture (3) - Responsabilité du consommateur (locataire)
- 6288 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Location de meuble (bail mobilier) - Location de voiture (6) - Durée et fin du contrat