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CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 23 septembre 2015

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 23 septembre 2015
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 4
Demande : 12/22096
Date : 23/09/2015
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 6/12/2012
Décision antérieure : CASS. COM., 8 juin 2017
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5398

CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 23 septembre 2015 : RG n° 12/22096

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « mais considérant que selon l'article 6-8 du contrat, « La quote-part des ristournes remboursées au franchisé sera déterminée au prorata des achats effectués par le franchisé auprès de chacun des fournisseurs. Le franchisé s'engage à communiquer au franchiseur au plus tard dans le mois suivant l'expiration de l'année calendaire au titre de laquelle les ristournes sont dues, le montant des achats hors taxes effectués par lui au cours de ladite année auprès des fournisseurs référencés. Bricorama procédera au remboursement par chèque de la quote-part de ristournes revenant au franchisé au titre de l'année précédente dans les conditions suivantes : 50 % au plus tard le 30 avril, 25 % au plus tard le 30 juin et 25 % au plus tard le 30 septembre... » ; que le calcul des ristournes n'a pas été déterminé contractuellement ; que s’il n'est pas contestable que le franchiseur est le mandataire du distributeur dans la négociation avec les fournisseurs et qu'il doit rendre compte de sa mission, il ne peut lui être fait obligation de révéler la teneur des négociations qu'il a menées avec les fournisseurs qui relève du secret des affaires alors qu'une telle obligation nuirait nécessairement au réseau ; qu'il lui incombe de faire connaître l'issue des négociations ; qu'il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de communication de pièces de la société Ploneour Loisirs ».

2/ « que les parties ne contestent pas que ce texte peut être invoqué au regard des circonstances du litige, que la clause précisée par l'article 13 vise à restreindre l'exercice de l'ancienne activité de celui qui s'y oblige, lui interdisant de participer à un groupement ou à un réseau concurrent du réseau Bricorama, qu'il s'agit d'une clause de non-réaffiliation, que pour être licite, cette clause doit être limitée et proportionnée aux regard des intérêts légitimes du franchiseur au regard de l'objectif poursuivi c'est-à-dire de protection de son savoir-faire et de maintien de l'identité du réseau,

qu'en l'espèce, […], que toutefois, si la clause est d'une durée limitée à un an, rien dans le contrat, notamment dans l'article 13 et l'article 1, ne permet de savoir quelle est son étendue géographique, le « territoire concédé » visé par l'article13.2, s'il s'agit de la zone de chalandise, n'étant pas défini, qu'il s'ensuit qu'un des éléments essentiels à la validité de la clause de non-réaffiliation fait défaut, lui donnant un caractère imprécis ; que la protection du franchiseur contre les risques concurrentiels liés à l'activité nouvelle de son ancien franchisé ne peut légitimer une telle clause,

qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur le point de savoir si l'obligation de respecter la clause peut constituer pour le franchisé une obligation créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au sens de l'article L. 442-6-1-2° du Code de commerce applicable aux situations en cours,

qu'en l'espèce, la clause est nulle et que le jugement sera confirmé ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D'APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 4

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/22096. Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 septembre 2012 - Tribunal de Commerce de PARIS - 15e ch. - R.G. n° 2010042915.

 

APPELANTE :

SARL PLONEOUR LOISIRS

immatriculée au RCS de QUIMPER sous le n° XXX, ayant son siège [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ; Représentée par Maître Benoît HENRY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148, ayant pour avocat plaidant : Maître Alain COROLLER-BEQUET, avocat au barreau de QUIMPER

 

INTIMÉE :

SAS BRICORAMA FRANCE

ayant son siège [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ; Représentée par Maître Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151, ayant pour avocat plaidant : Maître Marc BENSIMHON de la SCP BENSIMHON Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0410

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 24 juin 2015, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre, rédacteur, Madame Irène LUC, Conseillère, Madame Claudette NICOLETIS, Conseillère, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Françoise COCCHIELLO dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Madame Violaine PERRET

ARRÊT : contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Françoise COCCHIELLO, présidente et par Madame Violaine PERRET, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

Le 5 décembre 2003, la société à responsabilité limitée Ploneour Loisirs, dirigée par M. X., a conclu avec la société par actions simplifiée Bricorama France un contrat de franchise pour 1'exploitation d'un magasin « Bricorama » à [ville P.]. Conclu pour une durée de trois ans, ce contrat, qui a pris effet à la date de l'ouverture du magasin, arrivait à échéance le 21 mars 2010. Le même jour, étaient également signées une convention d'enseigne et une convention de location de logiciel. La société Ploneour Loisirs s'approvisionnait en marchandises auprès des fournisseurs référencés par Bricorama et auprès de Bricorama France.

Par courrier recommandé du 15 septembre 2009, la société Ploneour Loisirs a signifié à la société Bricorama France sa décision de ne pas renouveler le contrat de franchise après le terme du 21 mars 2010.

La société Bricorama France s'est adressée à la société Ploneour Loisirs pour obtenir le paiement de factures impayées depuis le deuxième trimestre jusqu'au 31 décembre 2009 pour la somme de 199.131,64 euros au titre de redevances de franchise, de loyers de mise à disposition d'enseigne et de livraisons de marchandises. À cette somme se sont ajoutées plusieurs factures de prestations et de marchandises pour la période du 1er janvier au 31 mars 2010 pour la somme de 19.896,36 euros.

S'est ensuite ajoutée une facture de 2.765,07 euros, pour la régularisation de la publicité de l'année 2010. La société Ploneour Loisirs n'a donné aucune suite aux nombreuses relances de la société Bricorama France.

La société Bricorama France a, par courrier recommandé du 9 mars 2010, pris acte du non renouvellement du contrat de franchise et l'a mise en demeure de lui régler l'ensemble des sommes dues à ce jour.

Par acte en date du 18 juin 2010 qui annule et remplace celui du 15 juin 2010, signifié par voie d'huissier à personne habilitée, la société Bricorama France a assigné la société Ploneour Loisirs devant le tribunal de commerce.

Par jugement rendu le 28 septembre 2012, le tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la société Ploneour Loisirs à payer à la société Bricorama France la somme de 80.007,13 euros avec intérêt légal à compter du prononcé de la présente décision ;

- condamné la société Ploneour Loisirs à payer à la société Bricorama France la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement sans constitution de garantie ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société Ploneour Loisirs aux entiers dépens.

Vu l'appel interjeté par la société Ploneour Loisirs le 6 décembre 2012,

Vu l'ordonnance de clôture du 9 juin 2015,

 

Vu les conclusions de la société Ploneour Loisirs en date du 9 juin 2015, par lesquelles cette société demande à la cour de rejeter des débats les conclusions signifiées le 8 juin 2015 et les nouvelles pièces numérotées 46 à 50 par la société Bricorama.

Vu les dernières conclusions signifiées le 1er juin 2015 par la société Ploneour Loisirs, dans lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire et juger que la créance de la société Bricorama France doit être provisoirement ramenée à la somme hors taxe de 180.358,89 euros ;

- dire et juger, sous les réserves qui suivent, que la société Bricorama France est débitrice à l'égard de la société Ploneour Loisirs des sommes suivantes :

- des RFA pour 139.157,97 euros,

- la retenue de garantie de 5 % pour 23.465,31 euros,

- 59.528,90 euros au titre des Bricobonus,

- sous toute réserve des dommages et intérêts qui pourront être réclamés pour le stock que la société Ploneour Loisirs ne pourra vendre.

- constater la compensation des dettes et créances réciproques ;

- condamner la société Bricorama France à payer à la société Ploneour Loisirs la somme provisionnelle de 39.812,98 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2010, date des conclusions de première instance de la société Ploneour Loisirs.

- enjoindre à la société Bricorama France de communiquer les justificatifs, sur la période courant du 30 avril 2007 jusqu'au mois de septembre 2010 :

- des différentes catégories de remises et rémunérations de toute sorte qu'elle a négociées avec ses fournisseurs, les justificatifs des sommes effectivement versées par les fournisseurs avec les modalités de calcul de celles-ci,

- des modalités de répartition de celles-ci entre les franchisés,

- de leur reversement intégral conformément aux clauses du contrat.

- enjoindre également à la société Bricorama France de justifier, sur la même période :

- l'intégration des Bricobonus dans les remises de 'n d'année

- en précisant comment ces Bricobonus ont été calculés par le franchisé et en particulier pour la société Ploneour Loisirs,

- en précisant les modalités de calcul du reversement de ces Bricobonus aux franchisés et particulièrement à la société Ploneour Loisirs,

- en justifiant le reversement effectif de ces Bricobonus aux franchisés et particulièrement à la société Ploneour Loisirs.

- dire que la société Bricorama France y sera contrainte par une astreinte de 500,00 euros par jour de retard passé un délai d'un mois à compter du jour où le jugement qui sera prononcé lui aura été notifié.

- annuler la clause de non-concurrence et/ou de non réaffiliation telle qu'elle sera qualifiée par la cour et qui constitue l'article 13 du contrat, conformément aux principes généraux du droit, en jugeant qu'elle est dépourvue de cause faute de savoir-faire, qu'elle n'est pas nécessaire et qu'elle n'est pas conforme aux dispositions de l'article 5.3.D du Règlement de la Communauté Européenne du 20 avril 2010.

- débouter en conséquence la société Bricorama France de sa demande de paiement de l'indemnité conventionnelle pour non-respect de la clause de non concurrence,

Subsidiairement,

- supprimer cette indemnité,

Plus subsidiairement,

- dire et juger, qu'en demandant le paiement de l'indemnité de 457.357,00 euros, la société Bricorama France engage sa responsabilité, conformément à l'article L. 442-6 du Code de commerce et des principes généraux du droit,

- en réparation du préjudice, la condamner à payer une somme identique à l'indemnité dont elle demande le paiement,

- condamner la société Bricorama France à 20.000,00 euros sur la base de l'article 700 du CPC,

- condamner la société Bricorama France aux dépens de première instance et d'appel.

 

Vu les conclusions du 17 juin 2015 par lesquelles la société Bricorama demande à la cour de débouter la société Ploneour Loisirs de sa demande de rejet des pièces et conclusions,

Vu les dernières conclusions signifiées le 8 juin 2015 par la Société Bricorama France, dans lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire et juger recevables et fondées les demandes de la Société Bricorama France,

En conséquence,

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 28 septembre 2012 en ce qu'il a condamné la Société Ploneour Loisirs au paiement des factures impayées.

- Ramener le quantum de la somme retenue par le Tribunal à la somme de 78.487,95 euros en principal, outre les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010, avec anatocisme à compter du 18 juin 2010, date de délivrance de l'assignation à l'encontre de la Société Ploneour Loisirs.

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 28 septembre 2012 en ce qu'il a débouté la Société Bricorama France de sa demande de condamnation de la Société Ploneour Loisirs :

- Au paiement de la somme de 457.357 euros en principal, outre les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010 avec anatocisme, au titre du non-respect de son obligation de non concurrence ;

- Au paiement de la somme de 80.000 euros en principal, outre les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010 avec anatocisme, au titre du préjudice d'image ;

- Au paiement de la somme de 20.000 euros en principal, outre les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010 avec anatocisme, au titre de l'utilisation des signes distinctifs BRICORAMA postérieurement à l'expiration du contrat de franchise ;

- À restituer les enseignes sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification à intervenir.

Et statuant à nouveau :

- condamner la Société Ploneour Loisirs à verser à la Société Bricorama France la somme de 457.357 euros en principal, outre les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010 avec anatocisme à compter de l'assignation délivrée à l'encontre de la Société Ploneour Loisirs, le 18 juin 2010, au titre du non-respect de son obligation de non concurrence ;

- condamner la Société Ploneour Loisirs à verser à la Société Bricorama France la somme de 80.000 euros en principal, outre les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010 avec anatocisme à compter de l'assignation délivrée à l'encontre de la Société Ploneour Loisirs, le 18 juin 2010, au titre du préjudice d'image ;

- condamner la Société Ploneour Loisirs à verser à la Société Bricorama France la somme de 20.000 euros en principal, outre les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010 avec anatocisme à compter de l'assignation délivrée à l'encontre de la Société Ploneour Loisirs, le 18 juin 2010, au titre de l'utilisation des signes distinctifs « Bricorama » postérieurement à l'expiration du contrat de franchise.

- condamner la Société Ploneour Loisirs à verser à la Société Bricorama France la somme de 20.000 euros correspondant à la valeur des enseignes non restituées.

- condamner la Société Ploneour Loisirs à verser à la Société Bricorama France la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur la demande de rejet des conclusions et des pièces de la société Bricorama :

considérant que la société Ploneour Loisirs explique que la société Bricorama n'a pas respecté le principe du contradictoire en communiquant conclusions et pièces la veille de l'ordonnance de clôture ; que la société Bricorama remarque que la société Ploneour Loisirs n'a jamais demandé le report de l'ordonnance de clôture et qu'elle a permis l'identification, dans ses dernières conclusions, du seul élément modifiant les précédentes conclusions,

considérant que la société Ploneour Loisirs n'expose pas, dans ses conclusions tendant au rejet des pièces et conclusions de la société Bricorama, en quoi les dernières pièces et conclusions de la société intimée ont désorganisé sa défense,

considérant que sa demande sera rejetée,

 

Sur les demandes financières des parties formées en exécution du contrat :

Factures de Bricorama :

considérant que la société Bricorama soutient que la société Ploneour Loisirs a résilié son contrat de franchise, arrivé à terme le 21 mars 2010, en laissant impayées de nombreuses factures réclamées à plusieurs reprises par son franchiseur, que les factures impayées, versées au soutien des présentes conclusions, laissent apparaître que la Société Bricorama France est titulaire d'une créance d'un montant de 221.793,07 euros,

considérant que la société Ploneour Loisirs fait valoir que la société Bricorama a majoré unilatéralement le montant des redevances de 1,72 à 2,36 % à compter du 31 janvier 2010 (Trop perçu : 2.651, 55 euros HT),

 

Remises de fin d'année :

considérant que la société Ploneour Loisirs soutient que la Société Bricorama France s'est engagée (article 6-8 du contrat) à reverser les ristournes de fin d'année (RFA) au franchisé selon un certain échéancier au fur et à mesure de leur exigibilité, qu'elle explique que la Société Bricorama France a reconnu qu'elle devait ces RFA et qu'en refusant de les déduire, la Société Bricorama France démontre son manque de loyauté, qu'elle ne donne pas les modalités de calcul de ces remises qui ne correspondent pas au chiffre d'affaires déclaré, varient selon les franchisés, que la société Ploneour Loisirs expose qu'en refusant de communiquer ses pièces en invoquant le secret des affaires, elle ne rend pas compte, ainsi que doit le faire tout mandataire, de sa mission,

considérant que la société Bricorama explique que, lorsque la Société Ploneour Loisirs a résilié son contrat de franchise, arrivé à terme le 21 mars 2010, les RFA de l'année 2009 n'étaient pas encore liquides, que le premier versement de RFA intervenant au mois d'avril/mai de l'année n+1, la Société Ploneour Loisirs ne pouvait avoir perçu les RFA 2009 et 2010 lorsqu'elle a résilié le contrat de franchise, en mars 2010 ; qu'aujourd'hui, l'ensemble des RFA dues à la Société Ploneour Loisirs ont été portées au crédit de son compte, conformément au calendrier prévu à l'article 6-8 du contrat de franchise ; que répliquant aux prétentions de la société Ploneour Loisirs, elle indique qu'à l'intérieur d'un assortiment référencé, tous les produits ne sont pas « remisables », c'est-à-dire que les fournisseurs n'accordent pas des RFA sur l'ensemble de l'assortiment référencé, et que les remises sont plus conséquentes en présence de produits à marque de distributeur,

mais considérant que selon l'article 6-8 du contrat, « La quote-part des ristournes remboursées au franchisé sera déterminée au prorata des achats effectués par le franchisé auprès de chacun des fournisseurs. Le franchisé s'engage à communiquer au franchiseur au plus tard dans le mois suivant l'expiration de l'année calendaire au titre de laquelle les ristournes sont dues, le montant des achats hors taxes effectués par lui au cours de ladite année auprès des fournisseurs référencés. Bricorama procédera au remboursement par chèque de la quote-part de ristournes revenant au franchisé au titre de l'année précédente dans les conditions suivantes : 50 % au plus tard le 30 avril, 25 % au plus tard le 30 juin et 25 % au plus tard le 30 septembre... » ; que le calcul des ristournes n'a pas été déterminé contractuellement ; que s’il n'est pas contestable que le franchiseur est le mandataire du distributeur dans la négociation avec les fournisseurs et qu'il doit rendre compte de sa mission, il ne peut lui être fait obligation de révéler la teneur des négociations qu'il a menées avec les fournisseurs qui relève du secret des affaires alors qu'une telle obligation nuirait nécessairement au réseau ; qu'il lui incombe de faire connaître l'issue des négociations ; qu'il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de communication de pièces de la société Ploneour Loisirs,

 

Retenue de 5% :

considérant que la société Ploneour Loisirs soutient qu'en violation des termes du contrat, la Société Bricorama France a décidé, unilatéralement, de constituer une retenue forfaitaire de 5 % sur le montant des ristournes qu'elle doit reverser depuis 2003 ;

considérant que la société Bricorama soutient que la gestion des RFA est une fonction capitale qui engage des sommes très importantes et qui occupe du personnel à temps complet toute l'année, raison pour laquelle, la Société Bricorama France a fait voter en 2007 lors d'un séminaire, à l'unanimité des franchisés, une retenue forfaitaire de 5 %, que depuis ce vote, une clause est insérée dans le contrat de franchise signé entre la Société Bricorama France et ses franchisés, qui indique : « Le franchiseur s'engage à verser au franchisé la totalité des remises de fin d'année facturées par ses soins auprès des fournisseurs référencés, à l'exception d'une retenue forfaitaire de 5% des sommes, destinée à compenser les défaillances des fournisseurs », qu'ainsi, cette retenue forfaitaire de 5 % n'a jamais été imposée unilatéralement par la Société Bricorama France,

considérant toutefois que, comme l'a pertinemment retenu le tribunal de commerce, la retenue de 5 % opérée depuis 2007 n'a jamais été contestée par la société Ploneour Loisirs, et qu'il peut être retenu que cette pratique concrétise la volonté des parties sur ce point,

 

Les Bricobonus :

considérant que la société Ploneour Loisirs explique que les Bricobonus font partie des relations contractuelles, que de manière unilatérale, la société Bricorama France a décidé de supprimer leur remboursement, qu'elle est convenue de son obligation ; qu’en décidant d'intégrer les Bricobonus dans les RFA qui reviennent aux franchisés, la société Bricorama France s'est nécessairement engagée à les rembourser, qu'en outre, la société Bricorama France a justifié économiquement sa décision en affirmant que le taux de RFA annuel aurait été augmenté ; que toutefois, les RFA et les Bricobonus ont des objets différents ainsi ils ne peuvent juridiquement et économiquement être confondus ; qu'enfin, dès lors que la société Bricorama France prétend avoir intégré la contrevaleur des Bricobonus dans les remises, elle doit justifier et leur montant et leur reversement,

considérant que la société Bricorama expose que le système de remboursement des bons d'achat pratiqué n'a jamais eu valeur contractuelle de sorte que rien ne s'opposait à son arrêt qu'elle a décidé en 2008 et qu'au demeurant, le programme de fidélisation Bricobonus n'a entraîné aucune perte financière pour les franchisés,

mais considérant selon les pièces versées aux débats que la pratique des Bricobonus a été mise en place il y a plusieurs années, tout du moins depuis 2004 ; que la société Bricorama a pratiqué des avoirs « Régularisation Bricobonus » en 2004, 2005, 2006 et 2007 pour chacun des magasins Bricorama ; que la société Bricorama a fait savoir par courrier du 15 janvier 2008 que ces remises seraient désormais mutualisées sur l'ensemble des magasins et reversées avec les RFA au prorata des achats référencés, en expliquant qu’« il n’y avait plus de raison de gérer ces bons individuellement puisque l'ensemble du parc est adhérent au programme » ; que s'il est vrai que la convention de « mise en place du Bricobonus » signée le 5 mars 2007 qui précisait les obligations du franchiseur et du franchisé, et tout particulièrement la participation financière annuelle du franchisé au programme (3.000 euros), ne mettait à la charge du franchiseur aucune obligation financière, il apparaît que les franchisés avaient nécessairement accepté la pratique des avoirs, leur adhésion à la fidélisation Bricobonus reposant nécessairement sur une telle prise en charge, incontestablement plus satisfaisante qu'un reversement avec les RFA ; que la société Bricorama a rompu la pratique instaurée par la commune volonté des parties,

considérant que dès lors que la part des Bricobonus reversée dans les RFA revenant aux Bricobonus n'est pas précisée par la société Bricorama, la demande en paiement de la somme de 59.526 euros correspondant au montant des Bricobonus pour les années 2008, 2009 et 2010 sera accueillie ;

 

Sur les obligations devant être respectées en fin de contrat :

Sur l’usage frauduleux de la marque « Bricorama » :

considérant que la société Bricorama expose que malgré la rupture du contrat de franchise, la société Ploneour Loisirs a continué à identifier son activité en usant de signes distinctifs dont la société Bricorama France est propriétaire, qu'il s'agit d'une utilisation frauduleuse du signe distinctif BRICORAMA dès lors que la société Ploneour Loisirs a résilié son contrat de franchise, caractérisant des agissements parasitaires portant atteinte au maintien de l'identité commune et à la réputation du réseau Bricorama et révélant l'intention de nuire et la mauvaise foi de la société Ploneour Loisirs,

considérant que la société Ploneour Loisirs affirme que la société Bricorama qui avait la maîtrise des annonces qui paraissent dans les pages jaunes, devait les faire supprimer, ce qu'elle ne l'a pas fait de sorte qu'elle ne peut lui reprocher de faire un usage illégitime de sa marque ; qu'elle estime justifier par un constat d'huissier qu'elle a cessé de faire usage de l'enseigne ou de tout signe distinctif de la société Bricorama France à compter du 23 mars 2010, qu'elle soutient que la société Bricorama ne justifie pas le préjudice qu'elle dit subir,

mais considérant que les pièces versées aux débats, les extraits de « pages jaunes » ne permettent pas, en raison de leur imprécision quant à leur date de constater que la société Ploneour Loisirs a bien commis les infractions qui lui sont reprochées ; que par ailleurs, la société Ploneour Loisirs justifie par la production d'un constat d'huissier que, dès le 23 mars 2010, les enseignes étaient déposées,

considérant qu'il y a lieu de rejeter la demande de la société Bricorama sur ce point,

 

Sur l'atteinte à l'image :

considérant que la société Bricorama expose que l'affiliation à un réseau concurrent cause un préjudice supplémentaire d'atteinte à son image alors que sur ce marché où la concurrence est particulièrement forte, la perte d'un point de vente porte directement atteinte et de façon durable à l'image du franchiseur ; que la société Ploneour Loisirs rappelle que la société Bricorama fait état d'une atteinte qui résulterait du fait « d'avoir perdu un point de vente » alors qu'elle n'a jamais rompu unilatéralement le contrat, puisque le contrat arrivait à son terme et qu'elle n'a commis aucune faute,

mais considérant que la société Ploneour Loisirs a, comme le lui permettaient les termes du contrat, fait savoir qu'elle n'entendait pas poursuivre le contrat à son échéance, qu'elle n'a par ailleurs pas commis de faute après la fin des relations contractuelles, qu'il ne peut lui être reproché d'avoir causé un préjudice à la société Bricorama, que celle-ci sera déboutée de sa demande,

 

Sur la violation de la clause de non-concurrence :

Considérant que la société Ploneour Loisirs rappelle principalement que l'article 13-2 du contrat de franchise n'interdit pas simplement à la société Ploneour Loisirs de s'affilier à un réseau concurrent mais également de créer toute activité ou groupement qui serait susceptible de concurrencer la société Bricorama France ; que compte tenu de l'étendue de cette interdiction, il ne fait aucun doute que l'article 13 énonce une interdiction de non-concurrence, qu'elle souligne que la distinction que fait la Société Bricorama France est dépourvue de portée, les clauses de non affiliation étant soumises aux mêmes obligations que les clauses de non-concurrence, qu'elle ajoute que ces clauses ne sont admises qu'à la condition, d'une part, qu'il existe un réel savoir-faire, qu'elles soient nécessaires à la protection de ce savoir, et d'autre part qu'elles soient proportionnées, que si l'une et l'autre de ces conditions ne sont pas réunies, la nullité de l'interdiction doit être prononcée pour défaut de cause et non pour vice de consentement ; que la Société Bricorama France n'a pas de savoir-faire et n'en justifie pas, de sorte que la clause qui a pour objet de protéger le savoir-faire est sans objet ; que la société Ploneour Loisirs ajoute que l'étendue de la clause qui ne porte pas sur le magasin mais sur le territoire concédé justifie également son annulation en raison de sa généralité ; que cette clause conduit en définitive à donner à Bricorama un avantage anti-concurrentiel,

que subsidiairement, elle soutient que l'indemnité conventionnelle doit être réduite ou même supprimée par la cour qui en a le pouvoir lorsque celle-ci est manifestement disproportionnée, représentant 20 % du chiffre d'affaires et huit fois le résultat d'exploitation,

que plus subsidiairement, elle considère que les dispositions de la loi du 4 août 2008 et plus précisément l'article L. 442-6 du code de commerce sont applicables à l'indemnité réclamée qui crée un déséquilibre significatif, tout d'abord en raison de son caractère unilatéral et non bilatéral et d'autre part, en raison de ce que l'indemnité convenue a, par son montant, un caractère dissuasif et répressif non justifié et non proportionné,

considérant que la société Bricorama soutient que la société Ploneour Loisirs s'est affiliée au réseau concurrent Weldom dans les jours qui ont suivi la fin du contrat de franchise, soit dans la période d'interdiction stipulée dans la clause de non-concurrence, que la clause est valide en ce qu'elle respecte l'ensemble des conditions posées par les textes, qu'elle est limitée quant au genre d'activité concernée, limitée dans le temps et dans l'espace et proportionnée à l'intérêt légitime qu'elle protège, que la société Bricorama rappelle qu'elle a un véritable savoir-faire, lequel est « substantiel », s'agissant de méthodes éprouvées de gestion financière, de gestion de stocks, d'implantation, de lancement, d'agencement, d'animation de points de vente, qu'elle ajoute que la loi du 4 août 2008 est inopposable,

mais considérant que l'article 13 « Non-Concurrence » du contrat de franchise précise en son point 13.2 : « En cas de rupture du contrat pour quelque cause que ce soit, à l'exception d'une résiliation anticipée aux torts du franchiseur, le franchisé ( lui-même, son dirigeant de droit ou de fait et/ou son conjoint éventuel) s'interdit de créer, participer ou s'intéresser par lui-même ou par personne interposée, à tout groupement ou réseau de quelque type que ce soit qui serait concurrent du réseau Bricorama. Cette interdiction s'appliquera, à compter de la date de la résiliation du contrat pour une durée d'un an et sera limitée au territoire concédé.... », et en son point 13.3 : « En cas de non-respect de l'une ou de l'autre de ces obligations, le franchisé s'engage à payer au franchiseur, à titre de clause pénale, une somme de 457.357 euros sans préjudice de tous les autres droits et recours du franchiseur. »,

que les parties ne contestent pas que ce texte peut être invoqué au regard des circonstances du litige,

que la clause précisée par l'article 13 vise à restreindre l'exercice de l'ancienne activité de celui qui s'y oblige, lui interdisant de participer à un groupement ou à un réseau concurrent du réseau Bricorama, qu'il s'agit d'une clause de non-réaffiliation,

que pour être licite, cette clause doit être limitée et proportionnée aux regard des intérêts légitimes du franchiseur au regard de l'objectif poursuivi c'est-à-dire de protection de son savoir-faire et de maintien de l'identité du réseau,

qu'en l'espèce, la clause protège le savoir-faire du franchiseur, qui justifie de son caractère secret, substantiel et identifié, que la société Bricorama a des méthodes de gestion financière, de stocks, de marketing, d'implantation, de lancement d'agencement et d'animation de ses points de vente qui ne sont pas généralement accessibles, que ces éléments résultent de son expérience et ont été utiles à la société Ploneour Loisirs qui ne les aurait pas découverts sans recherches personnelles, et à cet égard, la société franchisée a de façon manifeste apprécié le savoir-faire de Bricorama pour avoir par l'intermédiaire de son gérant, Monsieur X. qui dirige la société Brico-Relecq dans la commune de [ville L.], signé avec Bricorama sur huit années plusieurs autres contrats de franchise,

que toutefois, si la clause est d'une durée limitée à un an, rien dans le contrat, notamment dans l'article 13 et l'article 1, ne permet de savoir quelle est son étendue géographique, le « territoire concédé » visé par l'article13.2, s'il s'agit de la zone de chalandise, n'étant pas défini,

qu'il s'ensuit qu'un des éléments essentiels à la validité de la clause de non-réaffiliation fait défaut, lui donnant un caractère imprécis ; que la protection du franchiseur contre les risques concurrentiels liés à l'activité nouvelle de son ancien franchisé ne peut légitimer une telle clause,

qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur le point de savoir si l'obligation de respecter la clause peut constituer pour le franchisé une obligation créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au sens de l'article L. 442-6-1-2° du Code de commerce applicable aux situations en cours,

qu'en l'espèce, la clause est nulle et que le jugement sera confirmé,

 

Sur la restitution des enseignes :

considérant que la société Bricorama demande la restitution des enseignes dont il apparaît, selon le procès-verbal que produit la société Ploneour Loisirs aux débats qu'elles étaient déposées le 23 mars 2010, que conformément aux dispositions contractuelles, la restitution des enseignes doit avoir lieu à la fin du contrat mais que la demande en restitution que forme la société Bricorama reste imprécise quant à la description et au nombre des objets à restituer, que la société Bricorama sera déboutée de sa demande,

 

Sur les comptes :

considérant que la société Ploneour Loisirs se dit elle créancière de la somme de 222.152,18 euros, et qu'après compensation réciproque, la société Bricorama France est débitrice de la somme de 220.171,87 euros - 180.358,89 euros = 39.812,01 euros,

considérant que la société Bricorama soutient détenir une créance à l'encontre de la Société Ploneour Loisirs, d'un montant de 221.793,07 euros correspondant aux factures restées impayées, que les RFA ont été payées à la société Ploneour Loisirs, par compensation avec les sommes dont elle est redevable envers la société Bricorama France et que le décompte final versé au débat fait ressortir un solde en sa faveur d'un montant de 78.487,95 euros,

mais considérant que la société Bricorama produit un décompte établi en mai 2015 qui fait état des sommes qui lui sont dues au titre des redevances des loyers pour la location d'enseigne, des régularisations pour les prestations publicitaires et informatique que la société Ploneour Loisirs ne conteste pas et de ce qu'elle doit à la société Ploneour Loisirs au titre d'avoirs, des redevances de fins d'année, qu'il reste un solde en faveur de Bricorama de 78.487,95 euros ; que la société Bricorama doit à la société Ploneour Loisirs la somme de 59.526 euros au titre des Bricobonus,

considérant que la société Ploneour est redevable de la somme de 18.961,95 euros avec intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010,

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

dit n’y avoir lieu d'écarter des débats les conclusions et les nouvelles pièces numérotées de 46 à 50 par la société Bricorama signifiées le 8 juin 2015,

infirme le jugement déféré sur le montant des sommes dues par la société Ploneour Loisirs,

statuant à nouveau,

condamne la société Ploneour Loisirs à payer à la société Bricorama à la somme de 18.961,95 euros outre les intérêts de retard à compter du 9 mars 2010 avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

confirme le jugement pour le surplus,

dit n'y avoir lieu à indemnité pour frais irrépétibles,

fait masse des dépens et condamne la société Bricorama et la société Ploneour Loisirs à en supporter la moitié chacune.

LA GREFFIÈRE                  LA PRÉSIDENTE

V. PERRET                           F. COCCHIELLO