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CA VERSAILLES (16e ch.), 24 septembre 2015

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (16e ch.), 24 septembre 2015
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 16e ch.
Demande : 14/03950
Date : 24/09/2015
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 23/05/2014
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2015-021913
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5400

CA VERSAILLES (16e ch.), 24 septembre 2015 : RG n° 14/03950

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2015-021913

 

Extrait : « Considérant que, par des motifs pertinents adoptés, le premier juge a exactement apprécié que l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise avait la qualité de professionnel, que le caractère abusif des clauses du contrat n'était pas utilement invoqué et qu'il convenait de retenir une modération de la clause pénale ;

Que pour sa part, la cour ajoute que l'organisation syndicale n'a pu contacter qu'en qualité de professionnel contrairement à ce que soutient l'intimée ; qu'il n'y a pas de contradiction entre l'article 5 de son statut qui dispose que « l'Union a pour objet l'étude et la défense des intérêts économiques, professionnels, sociaux et familiaux communs aux adhérents » et sa qualité de professionnel ; qu'il existe un rapport direct entre l'activité professionnelle de l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise et les contrats litigieux qui visent à la location de photocopieurs dans l'intérêt de la diffusion des informations, la communication avec les personnes avec lesquelles l'Union est en relation, notamment les adhérents ; que juger ainsi n'apparaît nullement contradictoire avec le principe rappelé par l'intimée selon lequel la notion distincte de non professionnel n'exclut pas les personnes morales de la protection contre les clauses abusives ; qu'en outre, la décision de la Cour de cassation du 15 mars 2005 qui rappelle ce principe, et qui est visée par l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise, indique que le contrat litigieux de location de matériel informatique n'avait pu être conclu par le syndicat qu'en qualité de professionnel ;

Qu'en l'espèce, les dispositions des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation ne sauraient trouver application ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

SEIZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/03950. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 4 avril 2014 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE (3e ch.) : R.G. n° 10/04333.

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTE :

SAS GRENKE LOCATION

au capital de XX euros inscrite au RCS de STRASBOURG sous le n° B 428 YYY agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité. n° SIRET : 428 ZZZ. Siège social [adresse] ; Représentant : Maître Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - n° du dossier 22835 - Représentant : Maître Philippe GRAMLING, Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG

 

INTIMÉE :

UNION DÉPARTEMENTALE CFTC DU VAL D'OISE

Représentant : Maître Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 14000258 ; Représentant : Maître Bruno DE PREMARE de la SELARL PREMARE ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1176 -

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 juin 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président, Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller, Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Catherine CHARPENTIER,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 29 janvier 2008, l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise et la société Grenke Location ont conclu un contrat relatif à la location longue durée d'un photocopieur « Ricoh Afïcio 2022 » et de ses accessoires. Ce contrat porte le numéro 058-1XXX85. Il prévoit le paiement de 21 loyers trimestriels d'un montant de 1.490 euros.

Le 8 avril 2009, les mêmes parties font signé un contrat de location concernant un autre photocopieur « Ricoh aficio 2238C » et ses accessoires. Ce contrat porte le numéro 100-0YYY08. Il prévoit le paiement d'une somme de 1.491 euros par trimestre par le locataire. La durée du contrat est de 21 trimestres.

La société Centre de la Bureautique a livré les deux photocopieurs à l'Union départementale CFTC du Val d'Oise.

L'Union départementale CFTC du Val D'Oise a été placée sous tutelle de la CFTC par décisions du 11 janvier 2010 du bureau confédéral et des 17 et 18 février 2010 du conseil confédéral.

L'Union Départementale CFTC du Val d'Oise s'est trouvée confrontée à des difficultés financières qui l'ont empêchée de régler les sommes dues et ont entraîné la résiliation des contrats par la société Grenke par courriers des 19 janvier 2010 et 18 juin 2010.

Par acte d'huissier du 31 mai 2010, la société Grenke Location a fait assigner l'Union Départementale CFTC du Val D'Oise. Par acte d'huissier du 27 mars 2012, la société Grenke Location a fait assigner la CFTC.

Les affaires ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 31 mai 2012.

 

Vu l'appel interjeté le 23 mai 2014 par la SAS GRENKE LOCATION à l'encontre du jugement contradictoire rendu le 4 avril 2014 par lequel le tribunal de grande instance de PONTOISE a :

- Condamné l'UD CFTC du Val D'Oise à payer à la société Grenke Location les sommes de :

- 7.286,26 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2010 au titre du premier contrat n° 058-1XXX85,

- 7.541,07 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2010 au titre du second contrat n° 100-0YYY08 ;

- 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamné l'UD CFTC à restituer à la société Grenke le photocopieur, objet du premier contrat n° 058-1XXX85 ;

- Dit n'y avoir lieu à prévoir une astreinte ;

- Mis hors de cause la CFTC ;

- Ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

- Rejeté toute autre demande ;

- Condamné l'UD CFTC aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

 

Vu les dernières conclusions signifiées le 2 juin 2015 par lesquelles la SAS GRENKE LOCATION, appelante, demande à la cour de :

- La dire et juger recevable en son appel ;

En conséquence ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a réduit les indemnités de résiliation aux sommes de 3.000 euros et 1.500 euros ;

Statuant à nouveau ;

- Condamner l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise à lui payer la somme de 23.656,39 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2010 au titre du premier contrat n° 058-1XXX85 ;

- Condamner l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise à lui payer la somme de 31.388,07 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2010 au titre du second contrat n° 100-208 ;

- Confirmer le jugement pour le surplus ;

En tout état de cause ;

- Condamner l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise à lui payer une indemnité de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile avec intérêts légal en sus ;

- Condamner l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise aux entiers dépens de la procédure, y compris ceux de première instance, ceux d'appel étant distraits avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées le 18 mai 2015 par lesquelles l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise, intimée, demande à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris et l'infirmer en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité des articles 12 et 13 des contrats de location n° 58-12985 et 100-0YYY08, en raison de leur caractère abusif ;

Statuant à nouveau ;

À titre principal ;

- Débouter la société GRENKE LOCATION de l'ensemble de ses demandes,

- Juger abusives les clauses invoquées par GRENKE LOCATION relatives aux demandes d'indemnités de résiliation, soit les articles 12 et 13 et en conséquence les annuler ;

À titre subsidiaire ;

- Juger manifestement excessif le montant de l'indemnisation sollicitée ;

- Réduire le montant de l'indemnisation de résiliation à 0 euros outre les loyers en retard ;

- Limiter les sommes dues à la société GRENKE LOCATION aux loyers échus impayés soit 4.286,26 euros pour le 1er contrat et 6.041,07 pour le second contrat ;

En toutes hypothèses ;

- Condamner la société GRENKE LOCATION à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société GRENKE LOCATION aux entiers dépens d'appel.

Vu l'ordonnance de clôture du 16 juin 2015 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant qu'au soutien de ses demandes, la société GRENKE LOCATION expose que c'est à bon droit que les premiers juges ont condamné l'Union Départementale CFTC du Val d'OISE à lui régler les loyers échus avant résiliation, soit les sommes de 4.286,26 euros pour le contrat 058-1XXX85 et de 6.401,07 euros pour le contrat 100-208, mais conteste la réduction de l'indemnité de résiliation correspondant à la somme des loyers à échoir ;

Qu'elle expose qu'elle a réglé au fournisseur ses factures de 28.790,11 euros et de 27.561,82 euros ainsi qu'elle en justifie, que l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise n'a réglé que six loyers trimestriels sur les 21 que comportait le premier contrat et un seul loyer trimestriel sur les 21 que comportait également le second contrat, qu'elle a mis en demeure l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise de régler les échéances impayées, que les difficultés financières alléguées par la débitrice sont sans incidence sur son obligation, de même que la circonstance selon laquelle la créancière peut récupérer son matériel, étant observé que seule une machine a été restituée ;

Que la société GRENKE LOCATION fait valoir que l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise est un professionnel, qu'au surplus, les clauses contractuelles ne sont pas abusives, et qu'il n'existe aucun déséquilibre entre les droits et obligations des parties ;

Considérant que l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise expose que les contrats comportent des clauses abusives s'agissant de contrats de longue durée (21 trimestres) et d'une indemnité égale à tous les loyers à échoir majorée de 10 % ainsi que, le cas échéant, les loyers échus impayés et des intérêts de retard ; qu'elle invoque le montant disproportionné de l'indemnité qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ;

Que l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise ajoute qu'elle n'est pas un professionnel, qu'elle a pour objet l'étude et la défense des intérêts économiques, professionnels, sociaux et familiaux communs aux adhérents et qu'ainsi elle a agi, en contractant avec la société GRENKE LOCATION, en dehors de toute activité commerciale ou industrielle, artisanale ou libérale, et en dehors de sa sphère habituelle de compétence ;

Qu'elle invoque le caractère abusif de la clause qui a pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat alors que seul le bailleur peut résilier le contrat de manière unilatérale ; qu'à titre subsidiaire, elle invoque le montant manifestement excessif de l'indemnité réclamée en application de la clause pénale ; qu'elle indique enfin qu'au moins un des deux copieurs a été restitué, le 22 février 2011 et que le second demeure soumis à l'obligation de restitution ;

[*]

Considérant que, par des motifs pertinents adoptés, le premier juge a exactement apprécié que l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise avait la qualité de professionnel, que le caractère abusif des clauses du contrat n'était pas utilement invoqué et qu'il convenait de retenir une modération de la clause pénale ;

Que pour sa part, la cour ajoute que l'organisation syndicale n'a pu contacter qu'en qualité de professionnel contrairement à ce que soutient l'intimée ; qu'il n'y a pas de contradiction entre l'article 5 de son statut qui dispose que « l'Union a pour objet l'étude et la défense des intérêts économiques, professionnels, sociaux et familiaux communs aux adhérents » et sa qualité de professionnel ; qu'il existe un rapport direct entre l'activité professionnelle de l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise et les contrats litigieux qui visent à la location de photocopieurs dans l'intérêt de la diffusion des informations, la communication avec les personnes avec lesquelles l'Union est en relation, notamment les adhérents ; que juger ainsi n'apparaît nullement contradictoire avec le principe rappelé par l'intimée selon lequel la notion distincte de non professionnel n'exclut pas les personnes morales de la protection contre les clauses abusives ; qu'en outre, la décision de la Cour de cassation du 15 mars 2005 qui rappelle ce principe, et qui est visée par l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise, indique que le contrat litigieux de location de matériel informatique n'avait pu être conclu par le syndicat qu'en qualité de professionnel ;

Qu'en l'espèce, les dispositions des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation ne sauraient trouver application ;

Qu'en ce qui concerne les sommes dues par l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise, il convient de rappeler, ce qui n'est pas contesté, que le montant des loyers échus impayés s'élève à 4.286,26 euros s'agissant du contrat n° 058-1XXX85 et à 6.041,07 euros s'agissant du contrat n° 100-0YYY08 ;

Considérant que le locataire a été destinataire d'une lettre de résiliation et mis en demeure de restituer le matériel, et que la société GRENKE LOCATION subit un préjudice qui justifie l'application de la clause pénale librement acceptée en son principe par les parties ;

Que toutefois, les indemnités réclamées au titre de la clause pénale qui s'élèvent aux sommes respectives de 19.370,13 euros et de 25.347 euros, apparaissent manifestement excessives ainsi que l'a exactement apprécié le premier juge, eu égard notamment à la possibilité de relouer qui appartient au bailleur, à la récupération fut-ce partielle des matériels, et à la durée du contrat ainsi qu'à l'économie des rapports contractuels ;

Que, si les indemnités réclamées apparaissent manifestement excessives, il sera néanmoins fait une meilleur appréciation des faits de la cause, et notamment du prix d'acquisition du matériel loué, du nombre de loyers effectivement acquittés, de la date de la résiliation anticipée par rapport à l'équilibre financier du contrat, en évaluant la réparation du préjudice effectivement subi du fait de la résiliation anticipée du contrat à la somme de 5.000 euros s'agissant du contrat n° 058-1XXX85 et à la somme de 2.500 euros s'agissant du contrat n° 100-0YYY08 ; que le jugement qui est déféré à la cour sera ainsi réformé en ce sens ;

Qu'il convient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise à verser à la société GRENKE LOCATION la somme de 2.500 euros au titre de ses frais irrépétibles de procédure de première instance et d'appel, et aux dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme partiellement le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Condamne l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise à verser à la société Grenke Location les sommes de :

- 9.286,26 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2010 au titre du premier contrat n° 058-1XXX85,

- 8.541,07 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2010 au titre du second contrat n° 100-0YYY08 ;

- 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette le surplus des demandes,

Condamne l'Union Départementale CFTC du Val d'Oise aux entiers dépens de l'instance, qui pourront être directement recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,                Le président,