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6006 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Interprétation en faveur du consommateur (L. 212-1, al. 2, C. consom.) - Présentation

Nature : Synthèse
Titre : 6006 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Interprétation en faveur du consommateur (L. 212-1, al. 2, C. consom.) - Présentation
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6006 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION

NOTION DE CLAUSE ABUSIVE - RÉDACTION ET INTERPRÉTATION DES CLAUSES

INTERPRÉTATION EN FAVEUR DU CONSOMMATEUR (ART. L. 211-1 C. CONSOM. AL. 2 - ANCIEN ART. L. 133-2 C. CONSOM. AL. 2)

PRÉSENTATION GÉNÉRALE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Principe : interprétation en faveur du consommateur des clauses douteuses. Selon l’ancien art. L. 133-2 C. consom., al. 2, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels « s’interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel ». Depuis l’ordonnance du 14 mars 2016, c’est désormais l’art. L. 211-1 C. consom. que pose cette règle « Elles s'interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur. Les dispositions du présent alinéa ne sont toutefois pas applicables aux procédures engagées sur le fondement de l'article L. 621-8 ».

A. CADRE GÉNÉRAL DU TEXTE

Domaine du texte. L’ancien art. L. 133-2 C. consom., alinéa 2, n’est pas applicable aux procédures engagées par des associations de consommateurs sur le fondement de l’ancien art. L. 421-6 C. consom [L. 621-7 et 8 nouveaux]. § V. cependant ne respectant pas cette limitation : TGI Bobigny (7e ch.), 17 septembre 2002 : RG n° 01/03107 ; Cerclab n° 497 (transport aérien ; à la supposer contractuelle, la « notice aux passagers » ne saurait être interprétée comme dégageant la compagnie aérienne de ses obligations contractuelles et doit au contraire être lue comme exprimant l’obligation conformément aux dispositions légales, pour le transporteur d’indemniser son cocontractant en cas de préjudice subi du fait d’une surréservation et de lui faire connaître ses droits à cet égard, ce qui exclut son caractère abusif), sur appel CA Paris (25e ch. B), 8 avril 2005 : RG n° 02/19385 ; Cerclab n° 1335 ; Juris-Data n° 2005-277192 ; Lamyline (absence de caractère abusif apparemment plutôt fondé sur la conformité de la clause au règlement européen).

Comp. pour l’alinéa 1er, sur l’exigence d’une rédaction claire et compréhensible, qui est applicable dans le cadre de l’ancien art. L. 421-6 C. consom. [L. 621-7 et 8 nouveaux] : TGI Paris (1/4 social), 15 mai 2012 : RG n° 10/03470 ; jugement n° 12 ; site CCA ; Cerclab n° 4026 (absence de preuve d’une absence de clarté de la clause au sens de l’ancien art. L. 133-2 C. consom.), confirmé par CA Paris (pôle 2 ch. 2), 6 décembre 2013 : RG n° 12/12305 ; Cerclab n° 4652 (clause respectant les anciens art. L. 132-1 C. consom. et L. 133-2 C. consom.).

Contrôle de la Cour de cassation. En droit commun, l’interprétation du contrat relève de l’appréciation souveraine des juges du fond, sauf si ces derniers ont dénaturé une clause claire. Dans le cadre de l’ancien art. L. 133-2 C. consom., devenu l’art. L. 211-1 C. consom., la Cour de cassation accepte en revanche le principe de son contrôle. Néanmoins, il semble qu’au vu des décisions recensées, la Cour, lors de l’exercice de ce contrôle, condamne les interprétations qui ne sont pas les plus favorables au consommateur, sans nécessairement préciser la teneur exacte de celle qui serait la plus favorable au consommateur.

Pour des illustrations d’arrêts de la Cour de cassation cassant des décisions des juges du fond ne retenant pas l’interprétation la plus favorable au consommateur, par des motifs elliptiques n’explicitant pas directement quelle était cette interprétation, V. par exemple : Cass. civ. 1re, 21 janvier 2003 : RG n° 00-13342 et 00-19001 ; Bull. civ. I, n° 19 ; Cerclab n° 2027 ; Dr. et patr. mai 2003, p. 112, obs. Chauvel (« il résulte des énonciations mêmes de l’arrêt attaqué qui a débouté [l’assuré] de sa demande, que la clause définissant le risque invalidité était bien ambiguë de sorte qu’elle devait être interprétée dans le sens le plus favorable à [l’assuré] ; Qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé » l’ancien art. L. 133-2 C. consom. alinéa 2), cassation de CA Toulouse (2e ch. civ., 1re sect.), 26 janvier 2000 : Dnd - Cass. civ. 1re, 22 mai 2008 : pourvoi n° 05-21822 ; Bull. civ. I, n° 145 ; Cerclab n° 2822 (« d’où il suit qu’en donnant à ladite clause un sens qui n’était pas le sens le plus favorable à [l’assuré], la cour d’appel a violé, par refus d’application », l’ancien art. L. 133-2 C. consom.), cassant CA Nîmes (1re ch. B), 18 octobre 2005 : RG n° 03/02433 ; arrêt n° 517 ; Cerclab n° 1053 - Cass. civ. 2e, 1er juin 2011 : pourvois n° 09-72552 et n° 10-10843 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 3439 (absence de précision par la Cour de cassation de l’interprétation plus favorable que celle de la cour d’appel), cassant partiellement CA Metz (1re ch.), 21 octobre 2009 : RG n° 06/02377 ; arrêt n° 09/00582 ; Cerclab n° 3642.

Pour des décisions plus explicites : Civ. 2e, 13 juillet 2006 : pourvoi n° 05-18104 ; Bull. civ. II, n° 214 ; Dnd (« qu’en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse était ambiguë et qu’elle devait être interprétée dans le sens le plus favorable à l’assuré, ce qui excluait l’application du délai de douze mois à l’invalidité, la cour d’appel a violé le texte susvisé ») - Cass. civ. 1re, 20 décembre 2012 : pourvoi n° 11-27225 ; Cerclab n° 4593 (arrêt attaqué retenant que la garantie incapacité de travail cessait lors de la consolidation pour laisser la place à la garantie invalidité, au motif qu’une telle solution était conforme à la nature d’une garantie temporaire, alors que cette cessation n’était pas contractuellement prévue), cassant CA Montpellier (1re ch. sect. B), 1er février 2011 : RG n° 10/01577 ; Cerclab n° 2947, sur appel de TGI Montpellier, 15 décembre 2009 : RG n° 08/03618 ; Cerclab n° 3836, et sur renvoi CA Aix-en-Provence (3e ch. B), 28 novembre 2013 : RG n° 13/02065 ; arrêt n° 2013/546 ; Cerclab n° 4592 (arrêt adoptant l’interprétation de la Cour de cassation) - Cass. civ. 2e, 3 juillet 2014 : pourvoi n° 13-22418 ; Cerclab n° 4869 (rejet du pourvoi, la cour approuvant l’interprétation retenue par la cour d’appel retenant, dans un groupe de deux contrats formant un ensemble contractuel, la clause la plus favorable contenue dans le second), rejetant le pourvoi contre CA Chambéry, 19 mars 2013 : Dnd.

Comp. admettant qu’une cour d’appel a souverainement interprété les clauses ambiguës du contrat d’assurance en retenant que l’exigence de barreaux pour les ouvertures valait aussi, malgré l’absence de précisions, pour le premier étage. Cass. civ. 2e, 15 décembre 2011 : pourvoi n° 10-26677 ; Cerclab n° 3523 (motivation rendant inopérantes les conclusions de l’assuré, la cour de cassation ne répondant pas au moyen tiré des anciens art. 1162 et L. 132-1 C. consom.), rejet du pourvoi contre CA Agen, 19 janvier 2010 : Dnd. § N.B. Cette solution ne contredit pas, semble-t-il, les décisions précitées, dès lors qu’en l’espèce le contrat portait sur le bail d’un local commercial, contrat de nature professionnelle qui excluait l’application de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. : ne restait plus dès lors applicable que l’ancien art. 1162, dans le cadre du droit commun, texte dont il est acquis qu’il ne peut servir de fondement à un pourvoi en cassation.

Charge de la preuve. Il appartient au consommateur de rapporter la preuve que les conditions de l’ancien art. L. 133-2 [L. 211-1] C. consom. sont remplies. CA Nancy (1re ch. civ.), 8 novembre 2004 : RG n° 01/00824 ; arrêt n° 2056 ; Cerclab n° 1556 (arrêt ne précisant pas les conditions auxquelles il était fait allusion), sur appel de TGI Nancy (2e ch.), 1er mars 2001 : RG n° 98/03756 ; jugement n° 202/01 ; Cerclab n° 1453 (problème non abordé).

Procédure : relevé d’office. Possibilité de relever d’office le non-respect de l’ancien art. L. 133-2 alinéa 2 [L. 211-1] par la Cour de cassation, V. pour une illustration. Cass. civ. 1re, 22 mai 2008 : pourvoi n° 05-21822 ; Bull. civ. I, n° 145 ; Cerclab n° 2822 (« sur le moyen relevé d’office, après avis donné aux avocats : Vu l’art. L. 133-2 du code de la consommation »).

B. CONDITIONS D’APPLICATION

Conditions relatives aux parties. L’ancien article L. 133-2 C. consom., devenu l’art. L. 211-1 C. consom., n’est applicable qu’aux contrats conclus entre un professionnel, d’une part, et un consommateur ou non-professionnel, d’autre part. Le texte dispose donc d’un domaine d’application similaire à celui de la protection contre les clauses abusives, incluant les personnes morales et les non professionnels, tels qu’ils sont désormais définis par l’article liminaire du Code. § Sur tous ces points, V. les notices décrivant le domaine d’application de la protection contre les clauses abusives.

Existence d’un doute sur l’interprétation : appréciation in concreto. Pour l’application de l’ancien art. L. 133-2 [L. 211-1] C. consom., il ne s’agit pas de savoir si la clause est en soi claire ou si son interprétation est nécessaire, mais si, pour le consommateur ou le non-professionnel, la lecture de la clause laissait place à une interprétation qui rend son erreur éventuelle de compréhension excusable et non fautive. CA Pau (1re ch. civ.), 9 février 2004 : RG n° 02/001705 ; Jurinet ; Cerclab n° 650. § V. aussi CA Bordeaux (1re ch. sect. B), 12 février 2008 : RG n° 06/02337 et n° 06/5949 ; Cerclab n° 1229 ; Juris-Data n° 2008-362302 (crédit renouvelable ; emprunteurs ne justifiant pas avoir, à un moment quelconque antérieur à la procédure, douté du sens et de la portée de la clause litigieuse).

Inapplicabilité du texte aux clauses claires. L’ancien art. L. 133-2, al. 2 [L. 211-1 al. 2], n’a pas lieu d’être appliqué lorsque la clause est claire et dépourvue d’ambiguïté. § V. aussi le nouvel art. 1192 C. civ. (« On ne peut interpréter les clauses claires et précises à peine de dénaturation »). § V. pour la Cour de cassation : la clause d’un contrat d’assurance garantissant l’incapacité temporaire totale de travail, qui prévoit que les indemnités journalières sont versées au cours de la période pendant laquelle l’état de santé de l’assuré ne lui permet, temporairement, d’effectuer aucune activité professionnelle et qui précise que les indemnités journalières lui sont versées jusqu’à la date à laquelle il peut reprendre une activité professionnelle, est rédigée de façon claire et compréhensible, sans laisser place au doute, et ne peut être interprétée en application de l’ancien art. L. 133-2 C. consom. Cass. civ. 1re, 13 décembre 2012 : pourvoi n° 11-27631 ; arrêt n° 1437 ; Cerclab n° 4072 (contrat d’assurance prévoyance santé garantissant, notamment, le versement d’indemnités journalières en cas d’incapacité temporaire totale de travail), cassant sur ce point CA Paris (pôle 2 ch. 5), 20 septembre 2011 : RG n° 08/11690 ; Cerclab n° 7367, sur appel de TGI Paris, 6 mai 2008 : RG n° 06/07514 ; Dnd.

* Illustrations explicites. V. par exemple, pour les juges du fond, se référant explicitement au texte et écartant une interprétation en faveur du consommateur dès lors que la clause était claire : CA Bordeaux (5e ch.), 10 janvier 2006 : RG n° 04/02401 ; Cerclab n° 1033 ; Juris-Data n° 2006-298517 (« faute d’ambiguïté il n’y a donc pas lieu de recourir aux dispositions des art. 1162 C. civ. ancien [1190 nouveau] ou L. 133-2 C. consom. [ancien] ») - CA Grenoble (2e ch. civ.), 2 octobre 2007 : RG n° 05/01605 ; Legifrance ; Cerclab n° 3136 (assurance-crédit ; « la Cour constate que cette clause, parfaitement accessible à la compréhension de [l’assuré] alors âgé de 46 ans et occupant des fonctions de cadre commercial en entreprise, est dépourvue de toute ambiguïté »), sur appel de TGI Bourgoin-Jallieu, 17 février 2005 : RG 03/00584 ; Dnd - CA Bordeaux (1re ch. sect. B), 12 février 2008 : RG n° 06/02337 et n° 06/5949 ; Cerclab n° 1229 ; Juris-Data n° 2008-362302 (crédit renouvelable ; clause autorisant la révision sans préavis du montant maximal par le prêteur, en hausse ou en baisse, ne soulevant aucune difficulté d’interprétation) - CA Colmar (2e ch. civ. sect. B), 5 mars 2010 : RG n° 08/01037 ; arrêt n° 191/2010 ; Cerclab n° 2412 (dès lors qu’il n’y a nulle ambiguïté dans les clauses du contrat, qui s’appliquent sans contradiction à des sujets distincts, le principe d’interprétation posé par l’ancien art. L. 133-2 C. consom. est sans objet en l’espèce) - CA Riom (1re ch. civ.), 10 février 2011 : RG n° 09/02821 ; Cerclab n° 2607 (dispositions rédigées de façon claire et compréhensible ne constituant pas une clause abusive), sur appel de TGI Riom, 19 novembre 2009 : RG n° 06/00807 ; jugt n° 230 ; Cerclab n° 3833 (clause jugée abusive) - CA Dijon (1re ch. civ.), 9 juin 2015 : RG n° 13/01829 ; Cerclab n° 5239 ; Juris-Data n° 2015-013858 (domaine d’application non discuté ; SCI souscrivant une police d'assurance pour le hangar constituant le siège social de la société ; clause claire et compréhensible, limitant la garantie à une assurance responsabilité), sur appel de TGI Dijon, 10 septembre 2013 : RG n° 12/02368 ; Dnd - CA Grenoble (2e ch. civ.), 13 juin 2017 : RG n° 16/00662 ; Cerclab n° 6915 ; Juris-Data n° 2017-016051 (assurance décès, invalidité permanente et absolue et incapacité totale de travail pour un prêt immobilier ; la définition contractuelle de l'incapacité totale de travail, dénuée d'équivoque, n'ayant pas à être interprétée, l'ancien art. L. 133-2 al. 2 C. consom. ne trouve pas à s'appliquer), sur appel de TGI Grenoble, 25 janvier 2016 : RG n° 12/02426 ; Dnd - CA Limoges (ch. civ.), 29 juin 2017 : RG n° 16/00888 ; Cerclab n° 6953 (assurance-crédit ; une clause définissant l'incapacité totale de travail rédigée de façon claire, précise et dénuée de toute ambiguïté, ne peut donner lieu, sous peine de dénaturation, à aucune interprétation, fût-ce au regard des dispositions de l’ancien art. L. 133-2, al. 2 [212-1] C. consom.), sur appel de TGI Tulle, 13 juin 2016 : Dnd.

* Illustrations implicites. V. dans le même sens, implicitement, sans référence aux textes, estimant qu’il n’y a pas lieu d’interpréter une clause claire : CA Colmar (3e ch. A), 4 avril 2005 : RG n° 03/01619 ; arrêt n° 05/0288 ; Cerclab n° 1405 (contrat d’enseignement ; la clause stipulant « en aucun cas les frais d’inscription ne sont remboursés » s’applique à l’évidence aussi à l’hypothèse de l’annulation par l’étudiant dans le délai de conventionnel de rétractation de huit jours), confirmant l’interprétation de TI Strasbourg 21 janvier 2003 : RG n° 11-01-002730 ; Cerclab n° 154 - CA Toulouse (2e ch. 2e sect.), 21 février 2006 : RG n° 05/00973 ; arrêt n° 61 ; Cerclab n° 818 ; Juris-Data n° 2006-295985 (assurance prévoyance garantissant le versement d’une indemnité journalière en cas d’obligation « de cesser temporairement toute activité du fait d’une maladie ou d’un accident » ; terme « activité » jugé clair, sans nécessité d’interprétation, la cour précisant quand même qu’employé sans autre précision, le terme a nécessairement un sens large, ainsi que le soutient la compagnie, et ne peut être limité à l’activité professionnelle), infirmant TI Albi, 10 janvier 2005 : RG n° 11-04-000190 ; jugt n° 9/2005 ; Cerclab n° 16 (jugement estimant que, pour une incapacité temporaire, il ne pouvait s’agir que de l’activité normale, pour la raison simple que le contrat de travail n’était pas expiré) - CA Douai (3e ch.), 11 juin 2009 : RG n° 08/03394 ; Cerclab n° 2421 (assurance incapacité de travail ; contrat conclu en 2001 ; est rédigée en termes clairs, précis et dépourvus d’ambiguïté la clause prévoyant que la garantie ne peut être mise en œuvre que dans l’hypothèse d’une hospitalisation supérieure à quinze jours continus, et non, comme le prétend l’assuré, dans le cas d’un désordre susceptible de justifier une telle hospitalisation) - CA Paris (pôle 5 ch. 6), 14 mars 2013 : RG n° 11/05758 ; Cerclab n° 4327 ; Juris-Data n° 2013-004740 (contrat d’assurance-vie à durée viagère avec ouverture d’un compte à terme bloqué pour six mois ; « ce qui est clair ne s’interprète pas » ; application stricte de la clause prévoyant que « les seront calculés sur la base de 4,20 % » avec un renvoi en marge à une mention manuscrite, régulièrement paraphée, précisant « mensuels », pour considérer que la stipulation fixe un taux de 4,20 % par mois et écarter l’interprétation ultérieure de la banque précisant dans un courrier que la clause ne concerne que la date des versements), sur appel de TGI Paris, 28 janvier 2011 : RG n° 10/00861 ; Dnd.

* Illustrations antérieures à la loi du 1er février 1995. Une solution similaire pouvait déjà se rencontrer avant l’apparition de l’ancien art. L. 133-2 [211-1 nouveau] C. consom., dans le cadre des textes du Code civil, notamment pour l’ancien art. 1162 C. civ. [1190 nouveau] exigeant aussi l’existence d’un doute avant une interprétation en faveur du débiteur. V. par exemple : TGI Paris (5e ch. 1re sect.), 14 juin 1994 : RG n° 15752/93 ; Cerclab n° 1355 (clause claire, non susceptible d’interprétation, obligeant à fermer les volets la nuit, que l’occupant soit là ou pas), confirmé par CA Paris (7e ch.), 18 septembre 1996 : RG n° 94/23958 ; Cerclab n° 1273, pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 1er février 2000 : pourvoi n° 97-16707 ; arrêt n°185 ; Cerclab n° 2047 (problème non abordé).

Influence de l’interprétation retenue par le professionnel. Les décisions recensées illustrent parfois l’importance que peut revêtir, sous des formes diverses, l’interprétation de la clause retenue par le professionnel.

* Interprétation du professionnel dans le sens favorable au consommateur. L’interprétation d’une clause ambiguë par le professionnel dans le sens favorable au consommateur, conformément à l’ancien art. L. 133-2 [L. 211-1] C. consom., est prise en compte par les juges, dès lors qu’elle est véritablement établie. V. par exemple : CA Douai (3e ch.), 15 février 2007 : RG n° 06/01187 ; arrêt n° 0125/07 ; Legifrance ; site CCA ; Cerclab n° 1671 (la clause qui exige « l’impossibilité définitive pour l’adhérent de se livrer à toute occupation et/ou à toute activité rémunérée ou lui donnant gain ou profit » est certes ambigüe puisque la conjonction « ou » introduit une alternative et qu’au contraire le terme « et » impose un cumul, mais en l’espèce, l’assureur accepte l’interprétation la plus favorable à l’assuré en n’exigeant pas, lorsque la seconde condition est remplie, qu’il soit également inapte à toute autre occupation), pourvoi rejeté par Cass. civ. 2e, 2 avril 2009 : pourvoi n° 07-14900 ; Cerclab n° 2859 (la cour d’appel, après avoir relevé l’ambiguïté de la clause litigieuse, a exactement décidé que l’interprétation faite par l’assureur était la plus favorable à l’assuré).

Cette solution est en revanche écartée lorsque la prétendue interprétation du professionnel est contredite par d’autres clauses du contrat. V. par exemple : CA Grenoble (1re ch. civ.), 23 novembre 1999 : RG n° 97/04461 ; arrêt n° 747 ; site CCA ; Cerclab n° 3112 (cuisine intégrée ; est abusive la clause stipulant que les réclamations et réserves doivent être présentées lors de l’enlèvement ou de la livraison, l’interprétation non restrictive et favorable au consommateur qui serait pratiquée par le professionnel étant démentie par une autre clause du contrat) - TGI Grenoble (6e ch.), 27 novembre 2003 : RG n° 2002/03140 ; jugt n° 319 ; site CCA ; Cerclab n° 3175 (location saisonnière ; agence prétendant qu’en cas de retard pour motif légitime, il n’est pas procédé à la relocation, le jugement estimant que ces explications sont directement contraires à la lettre du contrat : clause abusive).

L’interprétation du professionnel est également exclue lorsqu’elle équivaut à une renonciation du professionnel à l’application de la clause litigieuse ou à son interprétation contestée, en vertu d’une pratique dont la réalité n’est pas suffisamment avérée. V. par exemple : CA Caen (1re ch. sect. civ. et com.), 13 mars 2008 : RG n° 07/00729 ; Legifrance ; Cerclab n° 2896; Juris-Data n° 2008-364675 (interprétation d’une clause par le professionnel dans la procédure d’appel contredite par ses courriers antérieurs, montrant comment il a pratiqué la clause, pratique retenue contre lui), pourvoi rejeté par Cass. civ. 3e, 10 juin 2009 : pourvoi n° 08-13797 ; Bull. civ. III, n° 140 ; Cerclab n° 2861 ; D. 2009. AJ 1685, obs. Delpech ; JCP 2009, n° 28, p. 22 ; Contr. conc. consom. 2009, n° 259, obs. Raymond ; RJDA 2009, n° 784 ; Defrénois 2009. 2340, obs. Savaux ; RDC 2009. 1435, obs. Fenouillet (problème non examiné) - CA Paris (1re ch. B), 2 octobre 1998 : RG n° 1997/01533 ; Cerclab n° 1099 ; D. affaires 1998, p. 1851, obs. V.A.-R. ; RJDA 1998/12, n° 1424 (une clause d’un contrat de séjour linguistique autorisant le professionnel à modifier le lieu de séjour qui stipule que, si le prix est inférieur, la différence est remboursée, n’implique pas nécessairement le fait que, si le prix est supérieur, le consommateur ne doive pas verser le supplément de prix, l’absence d’exigence de ce supplément résultant d’une interprétation du contrat par le professionnel qui invoque une pratique dont la preuve n’est pas rapportée ; interprétation du professionnel en tout état de cause insuffisante pour valider la clause).

* Référence à des normes professionnelles. V. par exemple : analyse justement les règles applicables le jugement qui interprète le contrat, notamment les dispositions prévoyant la restitution du véhicule dans « un état standard » et en « bon état de marche et d’entretien », au visa de l’ancien art. 1315 C. civ. [1353 nouveau] et par référence aux conditions générales de location de longue durée élaborées par le Syndicat national des loueurs de voiture longue durée, qui codifient les usages en la matière et tiennent compte des observations et recommandations de la Commission des clauses abusives. CA Versailles (1re ch. sect. 2), 17 décembre 2013 : RG n° 12/07275 ; Cerclab n° 4641 ; Juris-Data n° 2013-030419 (location avec option d’achat d’un véhicule ; application de la définition de l’état standard permettant de facturer les éraflures sur la carrosserie de plus de 3 cms qui ne peuvent être éliminées par un polissage et celles de moins de 3 cms si leur nombre est supérieur à deux par élément de carrosserie ; même solution pour des jantes qui ne correspondent pas à celles fournies lors de la livraison), sur appel de TI Courbevoie, 7 août 2012 : RG n° 11-12-000328 ; Dnd.