5791 - Code de la consommation - Régime de la protection – Commission des clauses abusives - Procédure d’avis
- 5790 - Code de la consommation - Régime de la protection – Commission des clauses abusives - Missions et composition
- 5999 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Avis de la Commission des clauses abusives
- 5996 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Recommandations de la Commission des clauses abusives - Absence de caractère normatif
- 6179 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Cadre général - Normes - Avis de la CEPC
- 5737 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Modalités - Remplacement ou modification
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5791 (21 novembre 2020)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - RÉGIME
INTERVENTION DE LA COMMISSION DES CLAUSES ABUSIVES
PROCÉDURE D’AVIS
Présentation. La possibilité de saisir la Commission des clauses abusives pour avis a été créée par le décret n° 93-314 du 10 mars 1993, ultérieurement codifié à l’art. R. 132-6 C. consom. (Décret n° 97-298 du 27 mars 1997 créant la partie réglementaire du Code de la consommation), puis transféré à l’actuel art. R. 534-4 C. consom. par le décret n° 2010-1221 du 18 octobre 2010. Le décret du 29 juin 2016 a à nouveau déplacé le texte au nouvel art. R. 822-21 C. consom.
Selon l’alinéa premier de l’art. R. 822-21 C. consom., conforme au texte d’origine, « la commission peut être saisie pour avis lorsque, à l'occasion d'une instance, le caractère abusif d'une clause contractuelle est soulevé ».
A. SAISINE DE LA COMMISSION
Principe. Selon l’art. R. 822-21 C. consom., anciennement l’art. R. 534-4 C. consom., al 2, conforme au texte d’origine (sous réserve du texte cité), « Le juge compétent demande à la commission, par décision non susceptible de recours, son avis sur le caractère abusif de cette clause tel que défini à l'article L. 212-1. L'avis ne lie pas le juge ».
Juge compétent. Est irrecevable la demande de saisine pour avis de la Commission des clauses abusives formulée devant le conseiller de la mise en état, en application des art. 771 CPC, en ce qu'elle exige un examen au fond et ne constitue pas une mesure d'instruction tendant à voir ordonner sur un fait, ni une vérification personnelle du juge, ni une comparution personnelle des parties, ni la recherche d'une preuve testimoniale par voie d'attestation ou d'enquête, ni une mesure confiée à un technicien. CA Angers (ord. JME), 16 juin 2011 : site CCA ; Cerclab n° 4016.
Liberté du juge. La saisine de la Commission pour avis peut être demandée par l’une des parties, en pratique le consommateur, mais, en tout état de cause, le juge est seul à même de décider si la demande d’avis doit être formulée ou non, sa décision étant sur ce point discrétionnaire. Pour des décisions des juges du fond estimant que la demande d’avis n’est pas nécessaire, V. par exemple : CA Orléans (ch. civ. sect. 2), 21 mars 1995 : RG n° 93/001213 ; arrêt n° 437 ; Cerclab n° 2971 (inutilité de saisir la Commission compte tenu du caractère manifestement abusif des clauses examinées) - TGI Grasse (1re ch. civ. sect. A), 22 mai 2000 : RG n° 96/08664 ; jugt n° 00/759 ; Cerclab n° 366 (la clause ne sera pas qualifiée d'abusive, sans que le recours à l'avis de la commission apparaisse nécessaire), sur appel CA Aix-en-Provence (1re ch. D), 25 septembre 2003 : RG n° 00/14211 ; arrêt n° 263 ; Cerclab n° 744 ; Juris-Data n° 2003-229343 (question non examinée) - CA Angers (ch. com.), 11 septembre 2008 : RG n° 07/01283 ; Cerclab n° 2627 ; Juris-Data n° 2008-376163 (convention de compte bancaire ; clause de frais bancaires et clause pénale de 10 % en cas de recouvrement contentieux ; clauses non abusives et refus de saisine pour avis), confirmant TGI Angers (1re ch.), 23 avril 2007 : RG n° 05/03785 ; Cerclab n° 4129 (idem) - CA Grenoble (1re ch. civ.), 29 mars 2010 : RG n° 08/02044 ; arrêt n° 263 ; site CCA ; Cerclab n° 4159 (la saisine de Commission des clauses abusives pour avis n’est qu’une faculté ; refus) - CA Lyon (1re ch. civ. B), 19 mars 2013 : RG n° 12/03053 ; Cerclab n° 4340 ; Juris-Data n° 2013-005616 (« la cour étant compétente pour statuer sur le caractère abusif d'une clause contractuelle et en l'absence de circonstances particulières pouvant le justifier, il n'y a pas lieu de saisir la commission des clauses abusives » ; clause jugée non abusive) - CA Poitiers (1re ch. civ.), 10 novembre 2020 : RG n° 19/00270 ; arrêt n° 481 ; Cerclab n° 8641 (location d’emplacement de mobile home ; refus de saisir la Commission, l’arrêt écartant le caractère abusif de toutes les clauses examinées), sur appel de TGI La Rochelle, 2 octobre 2018 : Dnd.
Modes de saisine. Admission de l’envoi par télécopie de la clause litigieuse. CCA (avis), 16 mai 2002 : avis n° 02-01 ; Boccrf ; Cerclab n° 3373. § Mais la Commission n’est pas mise en mesure de formuler un avis si la télécopie envoyée n’est pas lisible. CCA (avis), 16 mai 2002 : avis n° 02-01 ; Boccrf ; Cerclab n° 3373. § Rappr. la position des juges du fond dans une situation identique : absence d’examen du caractère abusif d’une clause illisible dans l’exemplaire produit par le professionnel, lacune qui n’a pas été comblée par le consommateur qui n’a pas fourni son exemplaire. CA Lyon (6e ch.), 29 mars 2012 : RG n° 11/00231 ; Cerclab n° 3874, sur appel de TI Lyon, 8 novembre 2010 : RG n° 11-09-002423 ; Dnd.
Preuve du contrat. Admission par la Commission de captures d’écrans numériques établis par un huissier et contenant les conditions générales, à cette date, du contrat proposé par cette société. CCA (avis), 18 mai 2017 : avis n° 17-01 ; Cerclab n° 7152 (application de la la législation en vigueur à la date du constat).
Effets de la saisine. Selon l’art. R. 822-11 al. 3 C. consom., anciennement l’art. R. 534-4 C. consom., al 3, conforme au texte d’origine, « La commission fait connaître son avis dans un délai maximum de trois mois à compter de sa saisine ». § Selon l’alinéa 4 du même texte, conforme aux textes précédents, « il est sursis à toute décision sur le fond de l'affaire jusqu'à réception de l'avis de la commission ou, à défaut, jusqu'à l'expiration du délai de trois mois susmentionné. Toutefois, les mesures urgentes ou conservatoires nécessaires peuvent être prises ».
B. AVIS DE LA COMMISSION
Vérification préalable et d’office de sa compétence. Saisie dans le cadre d’une procédure d’avis, la Commission des clauses abusives a toujours vérifié que la demande entrait dans son domaine de compétence, notamment quant au caractère professionnel du contrat. V. en ce sens : CCA (avis), 18 avril 1994 : avis n° 94-01 ; Cerclab n° 3359 (non lieu à avis pour la clause litigieuse contenue dans un contrat conclu entre deux professionnels en vue de répondre à des besoins professionnels) - CCA (avis), 20 mai 1994 : avis n° 94-02 ; Boccrf, 30 mai 1995 ; Cerclab n° 3360 (idem) - CCA (avis), 24 octobre 1996 : avis n° 94-01 ; Boccrf, 15 mai 1997 ; Cerclab n° 3361 (idem). § Comp. : impossibilité pour la Commission, faute d’éléments, de vérifier si une association gérant un théâtre est ou non un consommateur vis-à-vis d’un contrat de location de camion. CCA, 17 novembre 1995 : avis n° 95-03, suivi de TI Rouen, 19 novembre 1996 : RG n° 11-96-2158 ; Cerclab n° 969 (protection jugée applicable mais clause jugée non abusive).
Nouveauté de la question. Dans un premier temps, la Commission a estimé qu’il n’y avait pas lieu à avis, dès lors qu’elle s’était déjà prononcée sur le caractère abusif des clauses visées dans une recommandation. CCA (avis), 16 mai 2002 : avis n° 02-01 ; Boccrf ; Cerclab n° 3373.
Il semble cependant que la Commission des clauses abusives ait abandonné cette position dans un avis ultérieur. V. par exemple : CCA (avis), 25 janvier 2007 : avis n° 07-01 ; Cerclab n° 3381 (déménagement ; avis rendu, alors que les deux clauses avaient déjà fait l’objet d’une recommandation, motivé différemment). § N.B. Cette seconde solution semble préférable dès lors que les recommandations condamnent des clauses types, alors que l’avis intervient dans une espèce particulière, ce qui implique à la fois que des arguments puissent être invoqués pour écarter le caratère abusif admis dans la recommandation (contrainte particulière, compensation par une autre clause, option, etc.) ou, inversement, que des circonstances propres à l’espèce justifient le caractère abusif d’une clause qui n’avait pas été stigmatisée par la Commission (notamment pour des raisons tenant à sa présentation).
Contenu de l’avis. * Examen des clauses abusives et non illicites. Pour une interprétation stricte limitant l’intervention aux clauses abusives et non aux clauses illicites : en application des dispositions de l’art. L. 822-4 C. consom, la Commission a pour mission exclusive de rechercher si « des contrats proposés par les professionnels à leurs contractants consommateurs ou non professionnels (...) contiennent des clauses qui pourraient présenter un caractère abusif » et, ainsi, elle ne saurait s'intéresser au caractère illicite de telles stipulations, à moins que cette illicéité dégénère en un abus. CCA (avis), 18 mai 2017 : avis n° 17-01 ; Cerclab n° 7152.
* Impossibilité de se prononcer sur les préjudices. La Commission ne saurait davantage donner un quelconque avis sur l'existence ou l'importance d'un préjudice subi par les consommateurs ou non-professionnels. CCA (avis), 18 mai 2017 : avis n° 17-01 ; Cerclab n° 7152.
* Impossibilité de se prononcer sur les modifications des clauses. En application de l’art. L. 822-4 C. consom., la commission ne saurait apporter une quelconque observation sur des ajouts ou modifications à apporter au contrat qui lui est soumis pour avis. CCA (avis), 18 mai 2017 : avis n° 17-01 ; Cerclab n° 7152. § N.B. Cette interdiction vaut aussi pour le juge (V. Cerclab n° 5737).
Composition de la commission : impartialité. L’art. R. 822-19 C. consom., anciennement l’art. R. 534-2 C. consom., pose des conditions permettant d’éviter tout conflit d’intérêts entre un membre de la commission et une des parties : « tout membre de la commission ne peut prendre part aux délibérations lorsqu'il a un intérêt personnel à l'affaire qui en est l'objet ou s'il représente ou a représenté moins de cinq ans avant la délibération une des parties intéressées ». § N.B. L’ancien art. R. 534-2 reprenait, avec quelques modifications, l’art. 2, al. 2, du décret n° 93-314 du 10 mars 1993, codifié à l’identique à l’art. R. 132-4 C. consom., lors de la création de la partie réglementaire du Code de la consommation (décret n° 97-298 du 27 mars 1997), qui disposait « tout membre de la commission ne peut délibérer dans une affaire lorsqu'il a un intérêt direct et personnel ou s'il représente ou a représenté une des parties intéressées ». § Sur les conséquences éventuelles sur la suite de la procédure, V. Cerclab n° 5790.
Procédure : respect de l’objet du litige. La saisine de la Commission des clauses abusives est déterminée par l'objet du litige tel que défini par les prétentions des parties. CCA (avis), 29 septembre 2005 : avis n° 05-05 ; Cerclab n° 3612.
Procédure : audition des parties (non). Selon l’art. R. 822-20 C. consom., reprenant l’ancien art. R. 534-3 C. consom. al. 4, reprenant déjà la règle posée par l’art. 3, al. 4, du décret n° 93-314 du 10 mars 1993, codifié temporairement à l’art. R. 132-5 C. consom., « les parties intéressées peuvent demander à être entendues avant le délibéré sauf lorsqu'est examinée une saisine judiciaire ». Le texte interdit donc l’audition des parties dans le cadre d’une procédure d’avis. § Pour une application : rejet de l’argument du professionnel reprochant à la Commission d’avoir refusé d’organiser un débat contradictoire, au visa de l’ancien art. R. 132-5 C. consom. CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 18 novembre 2004 : RG n° 03/07556 ; arrêt n° 560 ; Site CCA ; Cerclab n° 1709 (arrêt rappelant que la Commission n’est pas une juridiction, que son rôle est purement consultatif et que son avis ne lie pas le juge).
Procédure : limites de l’accès au dossier. V. à propos d’une clause préimprimée de reconnaissance de l’information donnée par un banquier : il importe peu que la Commission des clauses abusives n'ait pas eu connaissance des pièces du dossier dès lors que le document d'information précontractuelle n'est pas en cause et que par ailleurs, aucune autre pièce ne démontre l'accomplissement in concreto de l'obligation de conseil. TI Orléans, 17 janvier 2014 : RG n° 11-13-000264 ; Site CCA ; Cerclab n° 6994, après avis CCA (avis), 6 juin 2013 : avis n° 13-01 ; Cerclab n° 4997.
C. SUITES DE L’AVIS
Retour de l’avis : procédure. Pour une décision évoquant l’envoi de l’avis sollicité par courrier recommandé avec avis de réception, suivi de la notification de l’avis aux parties par le greffe du tribunal : TI Vanves, 28 décembre 2005 : RG n° 11-05-000354 ; jugt n° 1358/05 (ou 1350/05) ; Cerclab n° 3098 ; Cerclab n° 3098, après CCA (avis), 6 octobre 2005 : avis n° 05-05 ; Cerclab n° 3612.
Absence d’obligation pour le juge. Selon l’art. L. 822-21 C. consom., alinéa 2, anciennement l’art. R. 534-3 C. consom., al. 2, in fine, reprenant l’ancien art. R. 132-6 C. consom., « l'avis ne lie pas le juge ». § Pour un rappel de cette solution, V. par exemple : TGI Grenoble (4e ch. civ.), 30 juin 2003 : RG n° 2001/01435 ; jugt n° 162 ; Cerclab n° 3172, confirmé sur ce point par CA Grenoble (2e ch. civ.), 7 novembre 2005 : RG n° 03/03361 ; arrêt n° 646 ; Cerclab n° 3130 ; Juris-Data n° 2005-294521 - TGI Nanterre (6e ch.), 2 septembre 2003 : RG n° 01/02488 ; Cerclab n° 3949. § Pour des illutrations de l’influence réelle des avis, V. Cerclab n° 5999.