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5808 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (7) - Ord. n° 2016-301 du 14 mars 2016

Nature : Synthèse
Titre : 5808 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (7) - Ord. n° 2016-301 du 14 mars 2016
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5808 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION

PRÉSENTATION GÉNÉRALE - ÉVOLUTION DE LA PROTECTION

SEPTIÈME ÉTAPE : ORDONNANCE N° 2016-301 DU 14 MARS 2016

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

 Présentation. Le Parlement a autorisé le Gouvernement à procéder par ordonnance à la refonte du code de la consommation (art. 161 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014). En effet, selon le « Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation » (JORF n°0064 du 16 mars 2016, texte n° 28 ; NOR: EINC1602822P), l'architecture du Code de la consommation était devenue inadaptée et peu accessible pour ses utilisateurs, du fait des nombreuses réformes intervenues dans le domaine du droit de la consommation et de l'important mouvement de transposition de normes communautaires depuis sa création.

Le rapport indique que la refonte s’est effectuée pour « l’essentiel » à droit constant, sous plusieurs réserves : modifications rendues nécessaires par le respect de la hiérarchie des normes (ex. règles procédurales) et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, nécessité d’harmoniser l'état du droit (ex. : introduction de la directive en matière immobilière), remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification ; abroger les dispositions, codifiées ou non, devenues sans objet. Si globalement l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 a effectivement recodifié le Code de la consommation à droit constant, elle a toutefois apporté une multitude de retouches dont certaines sont importances

Principes de la restructuration. L’ordonnance réaménage le plan du code et retient des clés de répartition plus rationnelles entre les différents livres afin de clarifier l'ordonnancement des textes, de faciliter ainsi l'accès du droit aux usagers de ce code, consommateurs et entreprises, et de permettre une adaptation plus facile aux évolutions futures. Dans cette logique, le nouveau code a regroupé ensemble les sanctions pénales, civiles et administratives d’un passage donné. Dans le domaine des contrats, il distingue désormais la phase de l'offre précontractuelle et celle de la conclusion du contrat, ainsi que les dispositions générales et les dispositions sectorielles. Enfin, les dispositions procédurales ont été déplacées dans la partie règlementaire du code.

Conséquences : renumérotation raisonnée. La conséquence la plus immédiate est une renumérotation de l’ensemble du Code, parfois complexe et qui ne va pas faciliter, au moins dans un premier temps, la tâche des praticiens, d’autant que certains articles ont été éclatés en plusieurs, parfois éloignés (sanction). Le crédit à la consommation est particulièrement concerné, puisqu’il avait déjà fait l’objet d’une réforme en 2010 et que la table de concordance ne renvoie qu’à la version antérieure.

Pour les clauses abusives, la réforme a un impact très concret. L’ancien art. L. 132-1 C. consom., utilisé depuis plus de 20 ans, est non seulement déplacé, mais également découpé en plusieurs articles : L. 212-1 C. consom. (notion de clause abusive), L. 212-2 (extension aux non professionnels) et L. 212-3 (caractère d’ordre public), alors que les sanctions sont reportées aux art. L. 241-1 et 2 C. consom. De même, pour la partie règlementaire, le décret n° 2016-884 du 29 juin 2016 a déplacé les anciens art. R. 132-1 et R. 132-2 C. consom. aux art. R. 212-1, R. 212-2, et R. 212-5 C. consom. pour l’extension aux non-professionnels. L’ancien art. R. 132-2-1 C. consom. est lui réparti dans les nouveaux art. R. 212-3 et 4 C. consom.

Le relevé d’office est quant à lui transféré dans la partie règlementaire du Code (R. 632-1 nouveau), ce qui peut sembler conforme à la nature des règles de procédure civile.

Enfin, sans que la liste soit limitative, l’action en cessation de l’ancien art. L. 421-6 est reportée aux nouveaux art. L. 621-7 et 8 C. consom.

Remplacement de l’article préliminaire par un article liminaire. L’article préliminaire créé par la loi du 17 mars 2014 définissait pour la première fois le consommateur. Selon le rapport, ce texte nécessitait des compléments et des clarifications, notamment pour corriger l’omission antérieure des activités agricoles de la liste des activités professionnelles (adjonction de l’activité agricole, pouvant s’apparenter à un texte interprétatif, V. Cerclab n° 5813 et n° 5821) et pour ajouter une définition du non-professionnel et du professionnel, cette dernière ayant été demandée par la Commission européenne à la suite de la transposition en droit national de la directive 2011/83/UE du 25 octobre 2011 sans cette définition.

L’article préliminaire est donc remplacé par un article liminaire qui dispose : « Pour l'application du présent code, on entend par : - consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ; - non-professionnel : toute personne morale qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ; - professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel. » La disposition nouvelle limite donc la qualité de non professionnel aux personnes morales sans activité professionnelle ou ayant une activité n’entrant pas dans celles visées par le texte (sur la modification de ce texte et le visa de toute activité professionnelle par la loi n° 2017-203 du 21 février 2017, V. Cerclab n° 6941). Elle entraîne aussi en principe l’exclusion de la protection des professionnels contractant à l’occasion de leur activité, sauf à interpréter a contrario l’alinéa 1er (sur cette modification et l’interprétation du texte, V. Cerclab n° 5864).

Intégration ou référence à des textes extérieurs. Selon le rapport, dans un souci de clarification, le périmètre du code a été redéfini par la mention de dispositions relevant de la protection du consommateur qui figuraient dans d'autres codes, sans les reproduire (ex : assurances, banques, éducation, voyage à forfait, soins médicaux, hébergement de personnes âgées, pompes funèbres). Il faut noter que certains textes non codifiés ont été intégrés (ex. : courtage matrimonial). § N.B. Cette modification peut interroger sur l’éventuelle portée de la faculté de relever d’office qui est limitée au code de la consommation (V. Cerclab n° 5716).

Action des associations. Selon le rapport, l'action en suppression d'une clause illicite, interdite ou abusive dans un contrat de consommation (nouvel article L. 524-1 ; N.B. le texte vise en réalité l’action de l’administration) fait l'objet d'une clarification rédactionnelle afin de préciser qu'elle vise également les contrats en cours d'exécution et de lever, ainsi, toute ambiguïté sur sa portée curative, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne et voulue par le législateur et non seulement préventive. § Sur la portée réelle de la clarification, V. Cerclab n° 5763 et n° 5776.

Pouvoirs d’enquête. La loi d'habilitation a autorisé le gouvernement à aller plus loin qu’une recodification à droit constant en matière de pouvoirs d'enquête des agents de contrôle, en lui permettant de regrouper, harmoniser et unifier les dispositions relatives aux pouvoirs d'enquête en vue de créer un régime unique de pouvoirs propres au code de la consommation ainsi qu'à procéder à l'harmonisation et aux adaptations nécessaires des autres codes renvoyant à ces dispositions. Selon le rapport, cette simplification des textes constitue un facteur de sécurité juridique pour les entreprises. Elle est réalisée par le nouveau livre V qui, « par une réécriture substantielle des dispositions », simplifie et harmonise les dispositions antérieures.

Application dans le temps. Il faut noter que l’ordonnance qui va restreindre le champ d’application de la protection contre les clauses abusives pour certains contrats professionnels, est applicable aux contrats conclus après le premier juillet 2016, alors qu’une des solutions de substitution, le nouvel art. 1171 C. civ. introduisant la sanction des clauses abusives en droit commun, ne l’a été qu’à compter du premier octobre. Autrement dit, les contrats conclus entre le 1er juillet et le 31 septembre seront traités de manière moins favorable que ceux conclus avant ou après…