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5776 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs -

Nature : Synthèse
Titre : 5776 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs -
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5776 (3 octobre 2022)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - RÉGIME

ACTION D’UNE ASSOCIATION DE CONSOMMATEURS - EFFETS DE L’ACTION

SUPPRESSION DES CLAUSES – CONTRATS IDENTIQUES CONCLUS AVEC DES CONSOMMATEURS

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Évolution des textes. La loi du 17 mars 2014 avait souhaité mettre fin à la jurisprudence contestée de la Cour de cassation privant le juge de la possibilité de contrôler les conditions générales lorsque le professionnel avait modifié la clause ou son modèle en cours d’instance (Cerclab n° 5767). A cette occasion, elle a étendu les effets de la décision déclarant abusive ou illicite certaines clauses du « type de contrat », en autorisant l’association à demander également au juge de réputer non écrite ces mêmes clauses dans les contrats identiques effectivement conclus avec des consommateurs, tout en obligeant le professionnel à informer ceux-ci. La rédaction du texte a évolué.

* Loi du 17 mars 2014. L’alinéa 3 de l’ancien art. L. 421-6 C. consom., ajouté par la loi du 17 mars 2014, disposait : « Les associations et les organismes mentionnés au premier alinéa peuvent également demander au juge de déclarer que cette clause est réputée non écrite dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs, y compris les contrats qui ne sont plus proposés, et de lui ordonner d'en informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés. »

* Loi du 6 août 2015. L’alinéa 3 de l’ancien art. L. 421-6 C. consom., modifié par la loi du 6 août 2015, disposait : « Les associations et les organismes mentionnés au premier alinéa peuvent également demander au juge de déclarer que cette clause est réputée non écrite dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs et de lui ordonner d'en informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés. »

* Ordonnance du 14 mars 2016. Enfin, l’ordonnance du 14 mars 2016 a déplacé le texte à l’art. L. 621-8 C. consom., alinéa premier, qui dispose : « Les associations et les organismes mentionnés à l'article L. 621-7 peuvent également demander au juge de déclarer que cette clause est réputée non écrite dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs, et de lui ordonner d'en informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés. » La rédaction est similaire à celle résultant de la loi du 6 août 2015, sous réserve de la modification du renvoi (L. 621-7 et non premier alinéa, puisque l’ordonnance a coupé en deux l’ancien art. L. 421-6 C. consom.).

Droit antérieur à la loi du 17 mars 2014. La Cour de cassation a finalement aligné rétroactivement le régime antérieur sur les textes nouveaux : il résulte de l'art. L. 421-6 C. consom., dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, alors applicable, interprété à la lumière de l'art. 6 § 1 de la directive 93/13/CEE, lu en combinaison avec l'art. 7, § 1 et 2, de cette directive, ainsi que de la jurisprudence de la CJUE (arrêt du 26 avril 2012, C-472/10), que les clauses des conditions générales d'un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel qui sont déclarées abusives, à la suite de l'action prévue par l'article L. 421-6, ne lient ni les consommateurs qui sont parties à la procédure ni ceux qui ont conclu avec ce professionnel un contrat auquel s'appliquent les mêmes conditions générales. Cass. civ. 1re, 15 juin 2022 : pourvoi n° 18-16968 ; arrêt n° 479 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 9698 (points n° 8 et 9 ; recevabilité des demandes de l’association concernant des clauses figurant dans des contrats proposés à l'heure actuelle et également dans des contrats proposés dans le passé mais concernant encore des consommateurs), rejetant, avec une justification différente, le pourvoi contre CA Lyon (8e ch.), 24 avril 2018 : RG n° 16/05995 ; Cerclab n° 7543 ; Juris-Data n° 2018-006912 (résumé ci-dessous).

Application dans le temps. V. pour la loi du 17 mars 2014 : en application du principe civiliste de non-rétroactivité de la loi nouvelle, le dernier alinéa de l'ancien art. L. 421-6 C. consom., ajouté par la loi du 17 mars 2014, n'est pas applicable aux contrats conclus par le professionnel avant l'entrée en vigueur de cette loi. CA Paris (pôle 5, ch. 4), 3 décembre 2014 : RG n° 12/15519 ; Cerclab n° 4987 ; Juris-Data n° 2014-029879, sur appel de TGI Paris, 19 juin 2012 : RG n° 09/16180 ; Dnd. § L’alinéa 3, ajouté à l’art. L. 426-1 par la loi du 17 mars 2014, éclairée par les débats législatifs a notamment pour objectif de permettre aux associations d’étendre erga omnes l’effet de l'action en suppression d’une clause illicite ou abusive en demandant au juge que la clause supprimée soit réputée non écrite « dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs » alors qu’auparavant elles devaient introduire autant d'actions qu'il existait de contrats comprenant une même clause abusive et de permettre aux associations de demander au juge la condamnation du professionnel à informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés du caractère illicite ou abusif de la clause ; ces mesures ne sont pas une loi de procédure immédiatement applicable dès lors qu’elles permettent l'extension des mesures susceptibles d'être prises à l'encontre du professionnel.  CA Paris (pôle 5 ch. 6), 9 février 2018 : RG n° 16/03064 ; Cerclab n° 7433 (dispositions non applicables à une instance introduite le 30 décembre 2013 ; solution inverse pour les contrats modifiés mais toujours en cours). § V. aussi : l'introduction par la loi du 14 mars 2014 du dernier alinéa a conféré aux associations de consommateurs un nouveau droit d'agir en étendant leurs actions à des contrats qui ne seraient plus proposés ; dès lors même s'il s'agit d'une loi de procédure, la loi du 17 mars 2014 contient des règles de fond qui ne peuvent être immédiatement appliquées aux procédures en cours dès lors qu'elles sont de nature à modifier le périmètre du litige. Est en conséquence irrecevable la demande de l’association qui vise une version des conditions générales qui n’était plus en vigueur au jour de l'assignation, celle-ci n’étant pas fondée à solliciter le bénéfice d'un droit qu'elle n'avait pas lorsqu'elle a introduit la procédure. CA Grenoble (1re ch. civ.), 30 janvier 2018 : RG n° 15/02814 ; Cerclab n° 7420, confirmant TGI Grenoble (4e ch.), 27 avril 2015 : RG n° 12/04079 ; site CCA ; Cerclab n° 6998.

Comp. les décisions rendues sur la possibilité de continuer l’action après une modification du type de contrat en cours d’instance, admettant pour certaines le caractère interprétatif des lois de 2014 et 2015 en ce qu’elles modifient l’ancien art. L. 421-6, Cerclab n° 5767.

En sens contraire : il ressort des dispositions combinées des art. L. 421-2 C. consom. et de l'art. L. 421-6 CCH dans leurs versions applicables aux faits de l'espèce, que les associations de consommateurs habilitées peuvent demander au juge que des clauses soient réputées non écrites dans tous les contrats identiques conclus par le défendeur avec des consommateurs, y compris les contrats qui ne sont plus proposés, et de lui ordonner d'en informer les consommateurs concernés par tous moyens appropriés à ses frais. CA Lyon (8e ch.), 24 avril 2018 : RG n° 16/05995 ; Cerclab n° 7543 ; Juris-Data n° 2018-006912 (construction de maison individuelle ; assignation du 11 mars 2013). § La Cour de cassation a rejeté le pourvoi, avec une justification différente, en estimant que cette solution était déjà imposée par le droit de l’Union européenne (V. ci-dessus).

Conditions : « demande » de l’association. Les trois versions précitées précisent toutes que les associations « peuvent également demander au juge » de réputer les clauses non écrites dans les contrats identiques. Il semble en résulter plusieurs conséquences.

* Effet subordonné. Tout d’abord, le terme « également » ne fait pas de la demande au titre de l’ancien art. L. 421-6 C. consom., alinéa 3, ou du nouvel art. L. 621-7 C. consom., alinéa 2, une action autonome. Le terme doit en effet être rapproché de l’exigence de contrats « identiques », qui ne peut renvoyer qu’à ceux concernés par l’alinéa 2 ou 1 selon les versions.

* Relevé d’office ? Ensuite, les différentes versions du texte ne semblent pas faire de l’extension des effets de la condamnation du type de contrat aux contrats conclus une conséquence automatique de la mise en œuvre de l’alinéa 2 (ancien L. 421-6 C. consom.) ou 1 (L. 621-8 C. consom.) : il faut que l’association le demande, ce qui risque sans doute d’être systématique.

La jurisprudence devra déterminer si le juge peut, voire doit, utiliser en la matière sa faculté de relevé d’office. La solution semble douteuse, le relevé d’office semblant ici se heurter à la nécessité de respecter l’objet du litige (art. 4 CPC). Si le juge doit relever d’office le caractère abusif d’une clause ayant un impact sur l’issue du litige (R. 632-1 C. civ.), c’est dans le cadre de ce qui est demandé par les parties, alors qu’en l’espèce, une telle intervention aboutirait à ajouter une demande.

Rappr. : si le juge peut toujours, conformément aux anciens art. L. 132-1 [L. 212-1 nouveau] et L. 141-4 C. consom. [R. 632-1 nouveau], écarter d'office l'application d'une clause jugée abusive dans un litige opposant un professionnel à un consommateur, il n'a en revanche pas le pouvoir juridictionnel de se saisir d'office d'une action collective aux fins de voir déclarer non écrites les clauses illicites ou abusives figurant dans les contrats identiques déjà conclus entre un même professionnel et des consommateurs, alors qu'il n'en a pas été saisi par une association de consommateur agréée ou par l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation en application des anciens articles L. 421-6 alinéa 3 et L. 141-1-X C. consom. CA Rennes (2e ch.), 20 novembre 2015 : RG n° 15/04510 ; arrêt n° 585 ; Cerclab n° 5428 (conséquence : méconnaissance par le juge de l’objet du litige et irrecevalité en appel de la demande similaire de l’association qui est nouvelle), sur appel de TGI Rennes, 18 mai 2015 : Dnd.

Comp. pour les litiges futurs : le succès d'une action collective en suppression d'une clause abusive ou illicite exercée préventivement sur le fondement de l'ancien art. L. 421-6, al. 2, C. consom. impose au juge d'écarter d'office l'application de la clause en vertu de l'ancien art. L. 141-4 du même code dans tout litige futur opposant le professionnel concerné à un consommateur relativement à un contrat identique déjà conclu. CA Rennes (2e ch.), 20 novembre 2015 : RG n° 15/04510 ; arrêt n° 585 ; Cerclab n° 5428, infirmant TGI Rennes, 18 mai 2015 : Dnd.

* Absence d’obligation du juge. L’alinéa 3 se contente d’autoriser la demande d’une telle déclaration, sans obliger le juge à y faire droit. Cette solution est inévitable dès lors que l’appréciation du caractère abusif se fait in abstracto dans l’action des associations et in concreto dans le contrat du consommateur. Il appartiendra au juge de déterminer si le déséquilibre créé par la clause se rencontre nécessairement dans tous les contrats (ex. une clause « noire ») ou s’il peut être compensé le cas échéant par l’appréciation de la situation individuelle du consommateur. Dans ce dernier cas, le juge devrait refuser la déclaration générale sollicitée.

Conditions : « contrats identiques ». Les trois versions subordonnent toutes aussi l’extension des effets à la condition que les contrats soient « identiques ».

La formulation est maladroite : au sens strict, des contrats effectivement conclus ne sont jamais identiques, puisque les parties sont différentes (N.B. entre parties identiques, la date ne sera pas la même ou l’objet de la prestation diffèrera, comme dans le cas de l’achat le même jour de plusieurs biens identiques). Ensuite, les contrats peuvent aussi différer par leurs conditions particulières : modèle, prix, date de livraison, option, extension de garantie, etc. Il serait absurde d’exiger une identité aussi poussée et ces textes doivent être compris comme visant les contrats contenant la même version des conditions générales, « type de contrat » ayant fait l’objet d’une condamnation au titre de l’ancien art. L. 421-6 C. consom., alinéa 2, ou de l’alinéa 1er de l’art. L. 621-8 C. consom.).

Dans cette acception, les textes précités soulèvent un problème lorsque c’est une clause précise qui a été invalidée : la condition d’identité sera-t-elle remplie pour tous les contrats qui la contiennent ou, solution sans doute plus conforme à l’enchaînement des alinéas, uniquement dans ceux correspondant au type de contrat attaqué sur le fondement des alinéas 2 ou 1.

En tout état de cause, la mesure ne peut produire d’effet qu’à condition de pouvoir identifier la version du contrat concernée. Sur le plan pratique, cette solution risque de soulever des difficultés de mise en œuvre, lorsque le contrat ne contient pas cette précision. La situation peut aussi se rencontrer pour des conditions générales figurant par exemple sur des factures ou des bons de commande. Dans les deux cas, il sera sans doute possible d’identifier la clause, mais pas le contenu global du contrat qui n’est jamais reproduit par les juridictions.

Rappr. dans le cadre de l’action de l’administration : le texte de l'art. L. 524-1 (anciennement L. 141-1 VIII) C. consom. vise « tout type de contrat » et les versions successives, même entièrement refondues dans leur forme, ne changent pas le fond, ni la nature des services objet du contrat, de sorte que les contrats avec les consommateurs, issues de l'application des conditions générales successives sont bien identiques au sens de ce texte. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 12 octobre 2018 : RG n° 16/08227 ; Cerclab n° 8160 (internet).

Conditions : contrats en cours d’exécution (loi du 17 mars 2014). V. par exemple dans le cadre de la loi du 17 mars 2014 : le dernier alinéa de l'art. L. 421-6 C. consom., ajouté par la loi du 17 mars 2014, n'a vocation à s'appliquer qu'aux clauses qui, bien que contenues dans un contrat qui n'est plus proposé, continuent à recevoir application. CA Paris (pôle 5, ch. 4), 3 décembre 2014 : RG n° 12/15519 ; Cerclab n° 4987 ; Juris-Data n° 2014-029879 (les premiers juges ont justement retenu que, l'action de l'association est sans objet en tant qu'elle porte sur un contrat qui n'est plus proposé aux consommateurs et n'était plus appliqué lors de l'introduction de l'instance devant le tribunal, de nouvelles clauses s'étant substituées aux clauses contestées), sur appel de TGI Paris, 19 juin 2012 : RG n° 09/16180 ; Dnd.

Sur la suppression dans les contrats en cours : il résulte de l'ancien art. L. 421-6 C. consom., dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, alors applicable, interprété à la lumière de l'art. 6 § 1 de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993, lu en combinaison avec l'art. 7 § 1 et 2 de cette directive, ainsi que de la jurisprudence de la CJUE, que les clauses des conditions générales d'un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel qui sont déclarées abusives, à la suite de l'action prévue par l'art. L. 421-6, ne lient ni les consommateurs qui sont parties à la procédure, ni ceux qui ont conclu avec ce professionnel un contrat auquel s'appliquent les mêmes conditions générales. CA Paris (pôle 2 ch. 2), 9 novembre 2017 : RG n° 15/11004 ; Cerclab n° 7135, confirmant TGI Paris, 17 février 2015 : RG n° 13/03390 ; Dnd. § Si, en conséquence, les demandes de l’association relatives aux clauses des conditions générales qui ne sont plus applicables depuis le 15 mai 2014, devraient être déclarées recevables dès lors que des contrats soumis à ces conditions générales et susceptibles, en conséquence, de comporter des clauses abusives, pouvaient avoir été conclus avant cette date avec des consommateurs, en l'espèce, la substitution des clauses anciennes par de nouvelles clauses notifiées à l'ensemble des clients concernés à compter du 15 mai 2014 ne laisse subsister aucun contrat susceptible de contenir ces clauses, de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré la demande concernant les anciennes clauses irrecevable pour être sans objet. Même arrêt.

Charge de la preuve. Il appartient au professionnel de rapporter la preuve l’ancien contrat ne s'applique plus à aucun consommateur. CA Chambéry (2e ch.), 21 janvier 2016 : RG n° 14/02943 ; Cerclab n° 5507 (maison de retraite ; preuve non rapportée), sur renvoi de Cass. civ. 1re, 1er octobre 2014 : pourvoi n° 13-21801 ; arrêt n° 1095 ; Cerclab n° 4877.

Effets de l’extension. * Conformité de l’extension aux principes généraux. La possibilité d’extension offerte par ces textes constitue une dérogation à l’autorité relative de la chose jugée, puisque les effets de la décision jouent erga omnes. Dans une perspective inverse, le consommateur voit son contrat modifié, alors qu’il n’a pas été partie à la procédure (comp. art. 14 CPC : « nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée »). § Pour une référence à ce texte, V. déjà sous l’empire du droit antérieur : le juge qui tranche le litige opposant une association agréée de défense des consommateurs à un professionnel ne statue pas dans une procédure opposant ce professionnel à un contractant individualisé, quand bien même celui ci pourra se prévaloir de la déclaration de nullité prononcée ; est dépourvu de pertinence l’argument du professionnel soutenant que l'action d’une association agréée de défense des consommateurs tendant à voir ordonner la suppression de clauses abusives viole le principe fondamental énoncé à l’art. 14 CPC, suivant lequel nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée. CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989 (autres arg. évoqués par l’arrêt à titre surabondant : 1/ l’art. 14 CPC, de valeur réglementaire, est nécessairement primé par les dispositions de valeur législative constituées par les anciens art. L. 421-1 et L. 421-6 C. consom., qui confèrent à l'association qualité à agir en suppression des clauses ; 2/ le droit à ne pas être jugé sans avoir été appelé ne pourrait résulter que du droit au procès équitable, posé par l'article 6 § 1 Conv. EDH, mais le droit des associations agréées de faire prononcer la nullité des clauses abusives ne méconnaît nullement ce principe de valeur supra-légale, puisqu'il ne fait pas obstacle au droit de toute partie à un procès distinct, dans le cadre de son pouvoir dispositif, de se prévaloir ou non de l'annulation prononcée, et aussi de soulever le caractère abusif de clauses dont la suppression n'aurait pas été ordonnée).

V. aussi, sous l’empire du droit antérieur, sous l’angle de la prohibition des arrêts de règlement : le juge qui ordonne la suppression de la clause déclarée abusive ne statue pas par voie de disposition générale et réglementaire, mais se borne à tirer les conséquences légales de ses constatations dans le litige précis opposant une association agréée de consommateurs et un professionnel, de sorte qu'il ne rend en aucune manière un arrêt de règlement au sens de l’art. 5 C. civ. CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989 (autre arg. : l'interdiction de l'arrêt de règlement étant de niveau législatif, le législateur a pu parfaitement y déroger dans l’ancien art. L. 132-1 C. consom.), confirmant TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 6 novembre 2007 : RG n° 05/09745 ; jugt n° 7 ; Cerclab n° 4162 (le prononcé du caractère inopposable des clauses abusives ne conduit pas le tribunal à statuer par voie générale et à donner une solution pour l'avenir, mais à constater un fait juridique passé à l'occasion d'une cause qui lui est soumise).

V. encore : le juge qui statue sur la demande d'une association agréée de consommateurs tendant à voir prononcer la sanction légale de la suppression des clauses abusives ne tranche pas dans un litige opposant un consommateur déterminé au professionnel avec qui il a contracté, de sorte que l'invocation du principe de l'effet relatif des décisions de justice est dépourvue de pertinence. CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989 (banque soutenant qu'une déclaration d'inopposabilité des clauses qui seraient jugées abusives porterait atteinte au principe de la relativité des jugements), confirmant TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 6 novembre 2007 : RG n° 05/09745 ; jugt n° 7 ; Cerclab n° 4162 (l’ancien art. L. 132-1 C. consom. prévoit expressément que « les clauses abusives sont réputées non écrites », c’est-à-dire irrémédiablement placées hors du champ contractuel, ce qui a pour effet inéluctable de ne pouvoir être opposées aux cocontractants ; autre arg. : le juge ne fait que constater un fait juridique passé).

* Mise en œuvre. En pratique, le consommateur produira la décision du juge si la clause lui est opposée, même si, en théorie, la clause est déjà réputée ne plus faire partie du contrat dès la décision du juge. La solution suppose toutefois que la clause soit identique, ainsi que le contrat (preuve facilitée lorsque les versions des conditions sont numérotées) et que les conditions particulières n’aient pas modifié l’équilibre contractuel.

Rappr. pour le contrôle de l’identité des clauses, dans un système d’inscription des clauses illicites sur une liste nationale : l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus en combinaison avec les articles 1er et 2 de la directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, ainsi qu’à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que l’utilisation de clauses de conditions générales, dont le contenu est équivalent à celui de clauses jugées illicites par une décision juridictionnelle définitive et inscrites dans un registre national des clauses de conditions générales jugées illicites, soit considérée, à l’égard d’un professionnel qui n’a pas été partie à la procédure ayant conduit à l’inscription de ces clauses dans ledit registre, comme un comportement illicite, à condition, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, que ce professionnel bénéficie d’un droit de recours effectif tant contre la décision admettant l’équivalence des clauses comparées portant sur la question de savoir si, compte tenu de l’ensemble des circonstances pertinentes propres à chaque cas, ces clauses sont matériellement identiques, eu égard notamment aux effets produits au détriment des consommateurs, que contre la décision fixant, le cas échéant, le montant de l’amende infligée. CJUE (5e ch.), 21 décembre 2016, Biuro podróży « Partner » sp. z o.o. sp.k. w Dąbrowie Górniczej/ Prezes Urzędu Ochrony Konkurencji i Konsumentów : Aff. C‑119/15 ; Cerclab n° 6983.

* Limites. Au surplus, la solution ne peut être sans limite. Il semble exclu que la sanction de la clause abusive puisse être appliquée au-delà du délai de prescription de droit commun, à compter de la conclusion du contrat. De plus, il sera également impossible de remettre en cause des contrats ayant déjà fait l’objet d’une décision de justice définitive n’ayant pas retenu le caractère abusif de la clause.

Date d’effet. La clause sera réputée non écrite à une date qui peut soulever des hésitations. La mesure ne nécessite pas de signification aux consommateurs concernés qui ne sont pas partie. Pendant la durée de l’exercice des voies de recours, la question de l’opportunité de son exécution provisoire peut aussi se poser.

Illustrations d’effets spécifiques. V. pour une clause jugée illicite, imposant la remise d’un chèque au profit de l’assureur dommage-ouvrages, avant la fin du délai de rétractation, en violation de l’art. L. 271-2 CCH, un arrêt condamnant les constructeurs à retourner aux clients concernés les chèques qu'ils détiennent et qui sont libellés à l'ordre de l'assurance dommages-ouvrage. CA Lyon (8e ch.), 24 avril 2018 : RG n° 16/05995 ; Cerclab n° 7543 ; Juris-Data n° 2018-006912.

Suppression dans les contrats identiques : illustrations. V. par exemple : CA Chambéry (2e ch.), 21 janvier 2016 : RG n° 14/02943 ; Cerclab n° 5507 (maison de retraite ; « il doit être jugé que ces clauses sont réputées non écrites dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs »), sur renvoi de Cass. civ. 1re, 1er octobre 2014 : pourvoi n° 13-21801 ; arrêt n° 1095 ; Cerclab n° 4877 - CA Grenoble (1re ch. civ.), 21 juin 2016 : RG n° 13/01940 ; Cerclab n° 5680 (assurance de groupe pour des téléphones mobiles ; V. résumé ci-dessous), sur appel de TGI Grenoble, 8 avril 2013 : RG n° 10/03470 ; Dnd - CA Versailles (3e ch.), 17 janvier 2019 : RG n° 16/03662 ; Cerclab n° 8166 (contrats d’assurance et d’assistance contre les fuites d’eau ; « ordonne leur suppression des contrats proposés et dit qu’elles seront réputées non écrites dans les contrats en cours ») - TGI Paris, 12 février 2019 : RG n° 14/07224 ; Cerclab n° 8252 ; Juris-Data n° 2019-003111 (réseau social ; clause illicites ou abusives réputées non écrites y compris dans les offres de contrat qui ne sont plus proposées).

V. déjà sous l’empire du droit antérieur à la loi du 17 mars 2014, alors que le fondement d’une telle solution était pour le moins incertain : condamnation du professionnel, sous astreinte, à supprimer les clauses dans les contrats en cours. CA Nîmes (1re ch. civ. A), 4 avril 2013 : RG n° 11/02646 ; Cerclab n° 4395 (1.000 euros par jour de retard, passé un délai de deux mois après la signification de l’arrêt). § N.B. Le même arrêt utilise par ailleurs une formule un peu différente en obligeant, sous la même sanction, le professionnel à « informer tous ses clients, en cours de contrat, des modifications apportées à leur contrat du fait de la déclaration du caractère abusif des clauses susvisées », solution sans doute juridiquement plus rigoureuse.

Information des consommateurs. Condamnation du professionnel à informer les consommateurs éventuellement encore concernés par l’ancien contrat, dans chacun de ses établissements. CA Chambéry (2e ch.), 21 janvier 2016 : RG n° 14/02943 ; Cerclab n° 5507 (maison de retraite ; preuve non rapportée que l’ancien contrat ne s’applique plus), sur renvoi de Cass. civ. 1re, 1er octobre 2014 : pourvoi n° 13-21801 ; arrêt n° 1095 ; Cerclab n° 4877. § Dans la mesure où la version antérieure était abusive et que des contrats sont susceptibles d'être encore en cours, l’association est bien fondée à en demander la suppression dans les contrats en cours d'exécution avec information par le professionnel à ses frais par tous moyens aux consommateurs. CA Lyon (8e ch.), 24 avril 2018 : RG n° 16/05995 ; Cerclab n° 7543 ; Juris-Data n° 2018-006912 (construction de maison individuelle ; visa de l’art. L. 621-2 C. consom. ; solution admise pour les clauses n° 6, 17, 22 et 26, y compris lorsque la clause avait été modifiée dans une version plus récente ; sur les modalités de l’information, l’arrêt vise une lettre recommandée pour la clause n° 6 dans ses motifs, mais se contente de mentionner tout moyen approprié dans son dispositif), confirmant TGI Lyon, 22 juin 2016 : RG n° 13/03958 ; Dnd. § V. aussi : CA Grenoble (1re ch. civ.), 21 juin 2016 : RG n° 13/01940 ; Cerclab n° 5680 (assurance de groupe pour des téléphones mobiles ; « Enjoint à la société […] d'informer ses clients ayant souscrit un contrat d'assurance soumis aux clauses déclarées abusives ou illicites, encore en application à ce jour, que ces clauses sont réputées non écrites »), sur appel de TGI Grenoble, 8 avril 2013 : RG n° 10/03470 ; Dnd.

Pour des refus : CA Paris (pôle 4 ch. 6), 11 mars 2016 : RG n° 15/01832 ; Cerclab n° 5562 ; Juris-Data n° 2016-005111 (contrat de construction de maison individuelle avec plan ; dans la mesure où les enquêtes produites aux débats ont révélé des clients dans l'ensemble satisfaits des prestations, sans démontrer l'existence de surcoûts effectifs, lesquels restent donc éventuels, il n'y a pas lieu de condamner le constructeur à informer tous ses clients des cinq dernières années ; l’efficacité de l’association peut parfaitement être garantie par la simple exécution de la décision et la possibilité de s'en prévaloir pour des contrats aux clauses similaires), sur appel de TGI Paris, 18 novembre 2014 : RG n° 13/14352 ; Dnd.