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5876 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Cour de cassation : contrôle des juges du fond

Nature : Synthèse
Titre : 5876 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Cour de cassation : contrôle des juges du fond
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5876 (15 août 2023)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION

DOMAINE D’APPLICATION - PERSONNES BÉNÉFICIAIRES DE LA PROTECTION

PROFESSIONNELS CONTRACTANT À L’OCCASION DE LEUR ACTIVITÉ

CRITÈRES - CLAUSES ABUSIVES - COUR DE CASSATION - CONTRÔLE DES JUGES DU FOND

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2023)

 

Présentation. Pour chaque critère permettant de déterminer le domaine d’application des textes protégeant le consommateur, spécialement quant au caractère professionnel du contrat, la question peut se poser de savoir si la Cour de cassation en contrôle l’application ou si elle se retranche derrière l’appréciation souveraine des juges du fond. Sur ce point, tous les critères ne semblent pas équivalents. Les critères des besoins de l’activité, de la conclusion entre sociétés commerciales, commerçants ou professionnels semblent généralement s’accompagner d’un maintien du contrôle. Le critère du rapport direct, au contraire, peut-être en ce qu’il peut impliquer une certaine appréciation propre à chaque cas d’espèce, a été parfois plus facilement abandonné à l’appréciation souveraine des juges du fond.

N.B. Il convient par ailleurs de souligner que le démarchage pourrait soulever une difficulté particulière, tenant au fait que le non respect du texte est sanctionné pénalement. L’abandon au pouvoir souverain des juges du fond de l’appréciation du rapport direct est une source d’imprécision des conditions mêmes de l’infraction (comme l’illustrent d’ailleurs certaines décisions). Malgré celà, les décisions recensées plus loin montrent que la Chambre criminelle n’a pas adopté de position différente de celle des chambres civiles.

A. CONTRÔLE INITIAL DES CRITÈRES

Présentation. Les premiers arrêts concernant le critère du rapport direct ou des besoins de l’activité manifeste l’exercice par la Cour de cassation de son pouvoir de contrôle. La solution est logique, dès lors qu’il est indispensable de préciser les contours d’un concept juridique nouveau dès qu’il apparaît.

Démarchage : besoins de l’activité. Dans le cadre du critère initial du critère des besoins de l’activité (loi du 22 décembre 1972), la Chambre criminelle a exercé son contrôle : Cass. crim. 15 juin 1983 : Cerclab n° 1908 - Cass. crim. 14 juin 1988 : pourvoi n° 87-90760 ; Bull. crim. n° 271 ; Cerclab n° 1907 ; JCP 1988. IV. 298 - Cass. crim., 4 décembre 1989 : pourvoi n° 89-81316 ; Cerclab n° 1905 ; Bull. crim. n° 461 ; D. 1990. somm. 360, obs. Roujou de Boubée - Cass. crim., 26 mai 1993 : pourvoi n° 92-85285 ; Bull. crim. n° 193 ; Cerclab n° 1903.

V. pourtant un arrêt isolé se retranchant derrière le pouvoir souverain des juges du fond : Cass. crim. 27 juin 1989 : pourvoi n° 89-80780 ; Bull. crim. n° 276 ; Cerclab n° 1906 ; Gaz. Pal. 16 janv. 1990.

Dans le même sens du contrôle pour la Chambre commerciale. Cass. com. 16 mai 2000 : pourvoi n° 96-20376 ; arrêt n° 1068 ; Cerclab n° 1924 (démarchage).

Démarchage : critère du rapport direct avec l’activité. Dans les premiers arrêts rendus par la première Chambre civile de la Cour de cassation pour l’application du critère du rapport direct, institué par la loi du 31 décembre 1989, la Cour a continué à exercer son contrôle : Cass. civ. 1re, 9 mai 1996 : pourvoi n° 94-13098 ; arrêt n° 886 ; Bull. civ. I, n° 197 ; Cerclab n° 2075 ; Contr. conc. consom. 1996, n° 117, obs. Raymond ; Defrénois 1996. 1375, obs. Aubert ; RJDA 1996 10/96, n° 1272, p. 908 (« à bon droit ») - Cass. civ. 1re, 2 juillet 1996 : pourvoi n° 94-15694 ; arrêt n° 1303 ; Cerclab n° 2073 ; Contr. conc. consom. 1996. n° 176, obs. Raymond (un contrat, conclu par un commerçant pour lui permettre d’exercer une activité commerciale, fût-elle complémentaire, relève de l’exclusion de l’art. L. 121-22-4°).

Pour l’application d’une même solution par la Chambre criminelle. Cass. crim. 23 mars 1999 : pourvoi n° 98-83156 ; arrêt n° 987 ; Cerclab n° 1901 (décision laconique, mais ayant semble-t-il exercé un contrôle « léger »).

Clauses abusives : rapport direct avec l’activité. Dès le revirement du 24 janvier 1995, la première Chambre civile de la Cour de cassation a exercé son contrôle : Cass. civ. 1re, 24 janvier 1995 : pourvoi n° 92-18227 ; arrêt n° 186 ; Bull. civ. I, n° 54 ; Cerclab n° 2083 ; D. 1995. 327, note Paisant ; D. 1995. somm. 239, obs. Delebecque ; ibid. 310, obs. Pizzio ; JCP 1995. I. 3893, n° 28, obs. Viney ; Contrats conc. consom. 1995, n° 84, note Leveneur - Cass. civ. 1re, 3 janvier 1996 : pourvoi n° 93-19322 ; arrêt n° 6 ; Bull. civ. I, n° 9 ; Cerclab n° 2079 ; D. 1996. 228, note Paisant ; JCP 1996. II. 22654, note Leveneur ; ibid. I. 3929, n° 1 s., obs. Labarthe ; RTD civ. 1996. 609, obs. Mestre ; Contrat conc. consom. 1996. Chron. 4, par Leveneur ; Defrénois 1996. 766, obs. D. Mazeaud - Cass. civ. 1re, 30 janvier 1996 : pourvoi n° 93-18684 ; Bull. civ. I, n° 55 ; arrêt n° 213 ; Cerclab n° 2078 ; D. 1996. 228, note Paisant ; JCP 1996. II. 22654, note Leveneur ; ibid. I. 3929, n° 1 s., obs. Labarthe ; RTD civ. 1996. 609, obs. Mestre ; Contrat conc. consom. 1996. Chron. 4, par Leveneur ; Defrénois 1996. 766, obs. D. Mazeaud - Cass. civ. 1re, 10 juillet 1996 : pourvoi n° 94-16843 ; arrêt n° 1444 ; Cerclab n° 2072 ; Bull. civ. I, n° 318 ; Contrats conc. consom. 1996, n° 157, obs. Raymond - Cass. civ. 1re, 5 novembre 1996 : pourvoi n° 94-18667 ; arrêt n° 1782 ; Bull. civ. I, n° 377 ; Cerclab n° 2070 ; D. affaires 1997. 20 ; Contrats conc. consom. 1997, n° 23, obs. Leveneur ; ibid., n° 12, obs. Raymond - Cass. civ. 1re, 17 novembre 1998 : pourvoi n° 96-17341 ; arrêt n° 1740 ; Bull. civ. I, n° 322 ; Cerclab n° 2056 ; D. Affaires 1999. 372 ; Contrats conc. consom. 1999, n° 21, note L. Leveneur (N.B. la référence au rapport direct n’est présente que dans le sommaire du Bulletin précédent l’arrêt qui se contente d’évoquer une fausse application de l’ancien art. L. 132-1 ; cassation d’un arrêt accordant la protection à un contrat d’achat d’un tracto-pelle par un entrepreneur de travaux publics). § V. aussi : relevé d’office ou reprise de la solution proposée par la défense par la Cour de cassation du fait qu’un contrat est professionnel, alors que le moyen attaquait le refus de juger la clause abusive : Cass. civ. 1re, 23 février 1999 : pourvoi n° 96-21744 ; arrêt n° 370 ; Bull. civ. I, n° 59 ; Cerclab n° 2052 (arrêt mentionnant « ainsi que le soutient la défense »).

V. aussi moins nets, s’apparentant peut-être à un contrôle « léger » : la cour d’appel, qui a constaté, par motifs propres et adoptés, que l’emprunt avait été souscrit par la société pour les besoins de sa trésorerie, a, par ces motifs, légalement justifié sa décision d’écarter l’application à la cause de la législation relative aux clauses abusives Cass. civ. 1re, 18 février 1997 : pourvoi n° 95-12962 ; arrêt n° 333 ; Cerclab n° 2068 - Cass. civ. 1re, 23 février 1999 : pourvoi n° 96-21744 ; arrêt n° 370 ; Bull. civ. I, n° 59 ; Cerclab n° 2052 (« la cour d’appel n’avait pas à procéder à cette recherche, ainsi que le soutient la défense, dès lors que l’[ancien] art. L. 132-1 C. consom. ne s’applique pas aux contrats de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l’activité professionnelle exercée par le cocontractant »).

Clauses abusives : besoins de l’activité. V. après le 24 janvier 1995 : Cass. civ. 1re, 21 février 1995 : pourvoi n° 93-14041 ; arrêt n° 355 ; Cerclab n° 2081 ; JCP 1995. II. 22502, note Paisant ; Contrats conc. consom. 1995, n° 84, note Leveneur (exclusion de la protection pour la location d’un véhicule par un commerçant pour les besoins de l’entreprise auprès de son loueur habituel).

B. ÉVOLUTION VERS UNE APPRÉCIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND

Présentation. À partir du moment où la méthode que doit adopter le juge et les grandes lignes de la matière sont fixées, il est fréquent que la Cour de cassation décide de laisser une question qu’elle a initialement contrôlée à l’appréciation souveraine des juges du fond.

N.B. Le procédé n’est pas critiquable en lui-même, mais il doit être apprécié en fonction de l’influence effective des questions de fait sur la solution et, surtout, le retranchement ne doit être opéré qu’à partir du moment où la Cour a suffisamment « quadrillé » la matière. Compte tenu des nombreuses divisions ayant opposé les juges du fond, qui se concentrent sur quelques contrats que la Cour n’avait pas eu l’occasion d’examiner directement, il est permis de penser qu’en la matière, ce retranchement s’est effectué de façon prématurée.

Démarchage : critère du rapport direct. La Cour de cassation a ensuite évolué dans le sens d’un abandon de l’appréciation du critère du rapport direct au pouvoir souverain des juges du fond. Cette évolution a d’abord été le fait de la première Chambre civile de la Cour de cassation en matière de démarchage à domicile. Cass. civ. 1re, 17 juillet 1996 : pourvoi n° 94-14662 ; arrêt n° 1526 ; Cerclab n° 2071 ; Bull. civ. I, n° 331 ; JCP 1996. II. 22747, note Paisant ; Defrénois 1997. 346, obs. Aubert (arrêt attaqué admettant la protection pour la location d’un photocopieur pour un loueur de vidéos ayant pourtant appliqué le critère de la compétence) - Cass. civ. 1re, 18 mars 1997 : pourvoi n° 94-20956 ; arrêt n° 552 ; Cerclab n° 2067 ; RJDA 1997/6, n° 850 (arrêt attaqué excluant la protection ; journal lumineux pour un agent d’assurance) - Cass. civ. 1re, 29 mai 1997 : pourvoi n° 95-18924 ; arrêt n° 1022 ; Cerclab n° 2066 (arrêt brévissime art. 604 NCPC ; arrêt attaqué ayant exclu la protection pour un matériel de santé acheté par une infirmière, en appliquant le critère du rapport direct combiné avec celui de la compétence) - Cass. civ. 1re, 1er, décembre 1998 : pourvoi n° 96-13924 ; arrêt n° 1854 ; Bull. civ. I, n° 339 ; Cerclab n° 2055 ; D. 2000. somm. 39, note Pizzio (arrêt attaqué ayant accordé la protection à l’acquisition d’un logiciel de comptabilité pour un kinésithérapeute) - Cass. civ. 1re, 1er février 2000 : pourvoi n° 97-22157 ; arrêt n° 188 ; Cerclab n° 2046 ; RJDA 2000/5, n° 609 (démarchage ; arrêt attaqué ayant exclu l’application de la protection à un contrat de location de photocopieurs pour une épicierie-dépôt de journaux et papeterie) - Cass. civ. 1re, 10 juillet 2001 : pourvoi n° 99-12512 ; arrêt n° 1270 ; Bull. civ. I, n° 209 ; Cerclab n° 2040 ; D. 2001. 2828, obs. Rondey ; ibid. somm. 932, obs. Tournafond ; JCP 2002. I. 148, n° 1, obs. Sauphanor-Brouillaud ; RTD civ. 2001. 873, obs. Mestre et Fages (arrêt attaqué ayant exclu l’application de la protection à un chômeur ayant commandé un matériel d’impression en vue de sa future activité professionnelle ; arrêt de cassation mentionnant néanmoins quelques précisions en notant que la cour d’appel avait « souverainement estimé que cette acquisition avait un rapport direct avec l’activité professionnelle, même future, de l’acheteur, dont elle n’avait pas à vérifier les compétences professionnelles qu’il avait lui-même déclarées » et contaté la technicité et le coût du matériel) - Cass. civ. 1re, 13 mai 2003 : pourvoi n° 00-20146 ; arrêt n° 620 ; Bull. civ. I, n° 115 ; Cerclab n° 2024 (moyen non publié ; appréciation souveraine ; arrêt attaqué excluant la protection pour un contrat d’acquisition d’un système d’alarme par l’exploitant d’un camping) - Cass. civ. 1re, 8 juillet 2003 : pourvoi n° 01-11640 ; arrêt n° 941 ; Cerclab n° 3222 (appréciation souveraine : la cour qui retient souverainement l’absence de rapport direct en déduit exactement l’applicabilité de la protection ; arrêt attaqué appliquant la protection à la location d’un photocopieur conclue par un prêtre, peu important qu’elle ait été réalisée pour les besoins de la paroisse) - Cass. civ. 1re, 8 juillet 2003 : pourvoi n° 02-10518 ; arrêt n° 928 ; Cerclab n° 2022 (appréciation souveraine ; arrêt attaqué excluant la protection pour un contrat de télésurveillance d’un restaurant) - Cass. civ. 1re, 18 novembre 2003 : pourvoi n° 01-11935 ; arrêt n° 1521 ; Cerclab n° 2016 (appréciation souveraine ; arrêt attaqué appliquant la protection au contrat d’installation d’un publiphone dans une boulangerie) - Cass. civ. 1re, 6 janvier 2004 : pourvoi n° 01-16251 ; arrêt n° 23 ; Cerclab n° 2013 (arrêt ambigu semblant approuver le critère - « exactement » - sans nécessairement contrôler son application : « après avoir exactement relevé que le contrat de location n'était pas soumis aux art. L. 121-23 à L. 121-28 du Code de la consommation car présentant un lien direct avec l'activité professionnelle du locataire »).

V. pourtant pour un arrêt isolé, pendant la même période, ayant exercé un contrôle : Cass. civ. 1re, 26 novembre 2002 : pourvoi n° 00-17610 ; arrêt n° 1702 ; Cerclab n° 2028 ; Bull. civ. I, n° 290 ; Contrats conc. consom. 2003. n° 80, note Raymond (démarchage ; cassation pour violation de la loi et affirmation directe que les contrats visant à la promotion de l’activité professionnelle ont un rapport direct avec celle-ci).

V. dans le même sens, pour des décisions de la Chambre commerciale faisant référence à l’appréciation souveraine par les juges du fond du rapport direct. Cass. com. 27 novembre 2001 : pourvoi n° 99-13469 ; arrêt n° 1935 ; Cerclab n° 1920 (démarchage ; arrêt attaqué excluant la protection pour l’acquisition d’un matériel de torréfaction par des épiciers).

V. dans le même sens, pour des décisions de la Chambre criminelle (sur la critique, V. ci-dessus) : Cass. crim., 29 juin 1999 : pourvoi n° 98-81174 ; arrêt n° 3147 ; Bull. crim. n° 159 ; Cerclab n° 1900 ; JCP 2000. I. 235, n° 7, obs. Robert ; Dr. Pénal 2000. Comm. n° 6, obs. Robert ; RTD com. 2000. 200, obs. Bouloc (appréciation souveraine des juges du fond ; arrêt attaqué ayant exclu la protection pour la vente d’annuaires publicitaires) - Cass. crim., 9 novembre 1999 : pourvoi n° 98-85446 ; arrêt n° 6976 ; Cerclab n° 1898 ; RJDA 2/00, n° 219 (appréciation souveraine des juges du fond ; arrêt attaqué ayant appliqué la protection à un contrat de télésurveillance par application du critère du rapport direct combiné avec celui de la compétence) - Cass. crim. 5 mai 2009 : pourvoi n° 08-87452 ; Cerclab n° 2865 (appréciation souveraine, sans même mentionner le critère du rapport direct), rejetant le pourvoi contre CA Toulouse (3e ch.), 15 octobre 2008 : RG n° 07/00822 ; arrêt n° 08/935 ; Legifrance ; Cerclab n° 1339; Lamyline (bâtiment d’habitation avec un sous-sol à usage agricole finalement non construit).

Clauses abusives : rapport direct. Dans le domaine des clauses abusives, les solutions sont moins nettes car plusieurs Chambres de la Cour de cassation ont semblé en désaccord sur cette question.

* Première Chambre civile. Alors qu’en matière de démarchage, la première Chambre civile s’est désengagée dès 1996, l’exercice de son contrôle a continué jusqu’en 1999 pour les clauses abusives (V. plus haut). Il faut attendre 2002 pour que cette formation abandonne cette position pour les clauses abusives : Cass. civ. 1re, 22 mai 2002 : pourvoi n° 99-16574 ; arrêt n° 717 ; Bull. civ. I, n° 143 ; Cerclab n° 2032 (appréciation souveraine ; arrêt attaqué ayant exlu la protection pour un contrat d’achat d’un bateau destiné à la location professionnelle ; arrêt de cassation mentionnant néanmoins quelques précisions en notant que la cour d’appel n’avait pas à vérifier les compétences que le client avait lui-même déclarées en se présentant comme loueur professionnel de bateau) - Cass. civ. 1re, 27 septembre 2005 : pourvoi n° 02-13935 ; Bull. civ. I, n° 347 p. 287 ; Cerclab n° 2798 ; D. 2006. 238, note Picod ; D. 2005. AJ. 2670, obs. Delpech ; JCP 2006. I. 123, n° 1 s., obs. Sauphanor-Brouillaud ; Gaz. Pal. 2005. 4097, concl. Sainte-Rose ; Defrénois 2005, art. 38301, p. 2003 ; obs. Savaux ; Defrénois 2006. 332, note S. piedelièvre ; Contr. conc. consom. 2005, n° 215, note Raymond ; Contr. conc. consom. 2006, n° 2, note Leveneur (appréciation souveraine ; arrêt attaqué excluant la protection pour un emprunt destiné à financer la construction d’un nouveau siège social).

* Deuxième Chambre civile. La deuxième Chambre civile a été confrontée à cette question lorsqu’elle a repris à la première Chambre civile le contentieux relatif au contrat d’assurance. Le premier arrêt a semble-t-il conservé le contrôle du rapport direct, puisque la cassation est fondée sur une violation de la loi. Cass. civ. 2e, 18 mars 2004 : pourvoi n° 03-10327 ; arrêt n° 446 ; Bull. civ. II, n° 136 ; Cerclab n° 1978.

Par la suite, la deuxième Chambre civile s’est également retranchée derrière l’appréciation souveraine des juges du fond : Cass. civ. 2e, 19 février 2009 : pourvoi n° 08-15727 ; Cerclab n° 2857 (la cour d’appel, après avoir constaté qu’il n’était pas discuté par les parties que les contrats d’assurances étaient accessoires à des prêts professionnels, a souverainement estimé qu’ils avaient un rapport direct avec l’activité professionnelle du demandeur et comme tels ne relevaient pas de la législation sur les clauses abusives).

* Chambre commerciale. En revanche, la Chambre commerciale a maintenu son contrôle, en cassant pour violation de la loi, et non pour manque de base légale, des arrêts sous le visa de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. Cass. com., 1er juin 1999 : pourvois n° 96-20962 et n° 96-21138 ; arrêt n° 1137 ; Cerclab n° 1929 (cassation pour violation de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. ; exclusion de la protection pour la location d’un matériel de radiologie par un radiologue). § … Ou en rejetant les pourvois avec l’expression « à bon droit ». Cass. com., 14 mars 2000 : pourvoi n° 97-16299 ; arrêt n° 673 ; Cerclab n° 1926 ; RJDA 2000/5, n° 608 (exclusion de la protection pour un contrat conclu par un expert comptable et concernant un logiciel de comptabilité) - Cass. com. 13 mars 2001 : pourvoi n° 98-21912 ; arrêt n° 519 ; Cerclab n° 1923 (art. 35 de la loi du 10 janvier 1978 ; crédit bail de fourgonnette conclu pour les besoin de l’activité).

V. aussi, en dehors du rapport direct : Cass. com. 23 novembre 1999 : pourvoi n° 96-21869 ; arrêt n° 1867 ; Bull. civ. IV, n° 210 ; Cerclab n° 1928 ; JCP 2000. II. 10326, note Chazal ; JCP E 2000, p. 463, note Neau-Leduc ; Contrats conc. consom. 2000, n° 40, note Leveneur ; ibid., n° 69, note Raymond ; Defrénois 2000. 245, obs. D. Mazeaud ; RJDA 2/00, n° 218 (contrôle « léger » ; contrat conclu entre deux commerçants dans le cadre de relations habituelles d’affaires ; décret du 24 mars 1978)

Certaines décisions sont moins nettes. V. pour une décision se contentant principalement de repousser le moyen pour défaut de réponses à conclusion en reprenant les constatations des juges du fond : dans ses conclusions, la société s’est bornée à soutenir que les clauses limitatives de garantie, conclues entre un non-professionnel et un professionnel, sont systématiquement déclarées nulles ou, en tout état de cause, inopposables ; ayant relevé que la vente conclue entre les parties avait un rapport direct avec l’activité professionnelle exercée par l’acquéreur, ce dont il résultait que ce contrat avait été conclu entre deux professionnels, la cour d’appel n’était pas tenue de répondre aux conclusions précitées que cette constatation rendait inopérantes. Cass. com., 1er octobre 2002 : pourvoi n° 00-16005 ; arrêt n° 1508 ; Cerclab n° 2562.

Juges du fond. Paradoxalement, alors que la décision de contrôler ou non relève de la Cour de cassation, certaines décisions des juges du fond consultées affirment cette appréciation souveraine. V. par exemple : CA Paris (pôle 5 ch. 10), 15 février 2021 : RG n° 19/14694 ; Cerclab n° 8797 (« il est constant que l'appréciation du rapport direct entre le contrat conclu et l'activité exercée par une personne morale relève du pouvoir souverain des juges du fond »), sur appel de TGI Bobigny, 14 mai 2019 : RG n° 18/13253 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 10), 18 janvier 2021 : RG n° 19/11921 ; Cerclab n° 8759 (l'appréciation du rapport direct entre le contrat conclu et l'activité exercée par la personne morale relève du pouvoir souverain des juges du fond), sur appel de TGI Bobigny, 30 avril 2019 : RG n° 16/0687 ; Dnd, pourvoi rejeté par Cass. com., 28 septembre 2022 : pourvoi n° 21-12501 ; arrêt n° 548 ; Cerclab n° 9828 (en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu en déduire que, peu important le caractère lucratif ou non de son activité, l'association avait la qualité de professionnelle, exclusive de l'application de l'art. R. 132-2 C. consom., dans sa version en vigueur à l'époque des faits ; N.B. l’arrêt n’évoque pas cette appréciation souveraine) - CA Reims (ch. civ. 1re sect.), 20 février 2018 : RG n° 16/03136 ; Cerclab n° 7438 ; Juris-Data n° 2018-002189 (avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 mars 2014, l'appréciation du rapport direct était soumise à l'appréciation du juge du fond), sur appel de TGI Charleville-Mézières, 9 novembre 2016 : Dnd - CA Bastia (ch. civ.), 5 février 2014 : RG n° 12/01012 ; Cerclab n° 4680 (démarchage), sur appel de TGI Ajaccio, 22 novembre 2012 : RG n° 10/01269 ; Dnd - CA Lyon (6e ch. civ.), 20 septembre 2007 : RG n° 06/02463 ; Cerclab n° 1659 ; Juris-Data n° 2007-342946 (démarchage), reprenant la position de TI Villefranche-sur-Saône, 14 février 2006 : RG n° 2005/676 ; jugt n° 06/106 ; Cerclab n° 448 - CA Colmar (3e ch. A), 1er septembre 2003 : RG n° 00/02665 ; Cerclab n° 1411 ; Juris-Data n° 2003-228519 (démarchage) - TI Annecy, 6 septembre 1999 : RG n° 11-96-001331 et n° 11-98-00264 ; Cerclab n° 2610 (application de la même règle pour l’appréciation du rapport direct dans le cadre du crédit à la consommation), sur appel CA Chambéry (2e ch.), 24 septembre 2002 : RG n° 99-02747 ; arrêt n° 1885 ; Cerclab n° 587 ; Juris-Data n° 2002-199714 ; Contr. conc. consom. 2003. n° 80, note Raymond (problème non abordé) - T. com. Chambéry, 27 février 1998 : RG n° 96-897 et n° 97-181 ; Cerclab n° 615 ; RJDA 1998/10, n° 1162 (démarchage).

C. LIMITES DE L’APPRÉCIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND

Présentation. Pouvoir souverain ne veut pas dire pouvoir discrétionnaire. Si les juges du fond peuvent apprécier souverainement l’existence ou non d’un rapport direct du contrat avec l’activité professionnelle, cette capacité suppose qu’ils s’inscrivent dans le cadre fixé par la Cour de cassation et qu’ils motivent suffisamment leur décision. Celle-ci a notamment dû censurer les arrêts ou jugements qui, soit directement, soit sous couvert du critère du rapport direct, raisonnaient sur la compétence du consommateur, critère que la Cour a condamné.

* Clauses abusives. Pour des illustrations, en matière de clauses abusives, de cassations de décisions insuffisamment motivées : Cass. civ. 1re, 4 décembre 2001 : pourvoi n° 99-14707 ; arrêt n° 1897 ; Cerclab n° 2038 (cassation pour défaut de base légale, la décision attaquée n’ayant pas recherché le rapport direct mais s’étant contentée de considérer que l’acheteur, un Gaec, était incompétent), cassant CA Nîmes (1re ch. B), 23 février 1999 : RG n° 97/1987 ; arrêt n° 117 - Cass. civ. 1re, 5 mars 2002 : pourvoi n° 00-18202 ; arrêt n° 434 ; Bull. civ. I, n° 78 ; Cerclab n° 2035 ; JCP 2002. II. 10123, note Paisant (cassation pour manque de base légale de la décision ayant procédé par affirmation, en se référant au critère de la compétence, et n’ayant pas recherché le rapport direct), cassant CA Pau (1re ch.), 10 mai 2000 : RG n° 98-001847 ; arrêt n° 2010-00 ; Cerclab n° 639 ; Juris-Data n° 113322.

* Démarchage. Pour des illustrations, en matière de démarchage, de cassations de décisions insuffisamment motivées : cassation pour manque de base légale, la cour d’appel n’ayant pas recherché l’existence du rapport direct en appliquant le critère de la compétence. Cass. civ. 1re, 29 juin 2004 : pourvoi n° 01-16759 ; arrêt n° 1110 ; Cerclab n° 2008 (lecteur de chèque pour un fleuriste), cassant CA Chambéry (ch. civ.), 26 septembre 2001 : RG n° 1998/00234 ; arrêt n° 1986 ; Cerclab n° 585 ; Juris-Data n° 173689 ; JCP 2002. IV. 2645 (rapport direct et compétence) - Cass. civ. 1re, 19 juin 2013 : pourvoi n° 11-27698 ; Cerclab n° 4512 (démarchage ; rapport direct et besoins de l’activité ; location d’un terminal de paiement électronique et une offre de prestations monétiques par un coiffeur), cassant T. com. Valenciennes, 15 novembre 2011 : Dnd (critère de la compétence).

D. INCERTITUDE SUR LE MAINTIEN DE L’ABSENCE DE CONTRÔLE

Retour du contrôle. Certains arrêts plus récents entretiennent le doute et semblent indiquer que la Cour exerce à nouveau son contrôle.

* Clauses abusives. V. par exemple, pour la première Chambre civile en matière de clauses abusives : Cass. civ. 1re, 22 novembre 2007 : pourvoi n° 06-14333 ; arrêt n° 1350 ; Cerclab n° 2817 (cassation pour violation de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. du jugement faisant application du texte au contrat, conclu entre un centre de gestion agréé, et une commerçante, pour les besoins de l'activité professionnelle de celle-ci) - Cass. civ. 1re, 5 juin 2008 : pourvoi n° 07-15094 ; Cerclab n° 2824 (« après avoir relevé que le matériel pris en location était destiné à la création d’un site web marchand pour lequel elle avait parallèlement souscrit un contrat commercial de participation, la cour d’appel a justement déduit que le contrat de location destiné à développer l’activité commerciale avait un rapport direct avec son activité » ; N.B. la rédaction de l’arrêt montre qu’en l’espèce la Cour ne s’est pas retranchée derrière l’appréciation souveraine des juges du fond, pour deux raisons : d’une part, le rappel de la décision attaquée se limite à des constatations de fait et la conséquence juridique qui est explicitement approuvée - « justement déduit » - est l’existence du rapport direct, solution à comparer avec celle de certains arrêts rappelant que la cour d’appel a constaté l’existence d’un rapport direct et qu’elle en a justement déduit l’exclusion de la protection consumériste ; ensuite, le rappel de la finalité du contrat, développer l’activité commerciale, figure dans la prise de position en droit de la Cour de cassation et non dans le rappel des motifs de l’arrêt d’appel)

Ensuite, la Cour exerce son contrôle sur le critère secondaire de la conclusion entre sociétés commerciales, qui, il est vrai, ne nécessite aucune appréciation factuelle originale. Cass. civ. 1re, 11 décembre 2008 : pourvoi n° 07-18128 ; Cerclab n° 2832 ; Contr. conc. consom. 2009, comm. n° 69, note Leveneur (moyen relevé d’office ; cassation pour violation de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. qui ne s’applique pas aux contrats de fournitures de biens ou de services conclus entre sociétés commerciales) - Cass. com., 3 décembre 2013 : pourvoi n° 12-26416 ; Cerclab n° 4618 (arrêt de rejet, mais semblant aussi exercer son contrôle).

* Démarchage. V. par exemple, pour la première Chambre civile en matière de démarchage : Cass. civ. 1re, 26 novembre 2014 : pourvoi n° 13-22060 ; Cerclab n° 4946 (reprise du contrôle ; cassation pour un manque de base légale de l’arrêt refusant la protection pour un contrat de protection informatique aux motifs que le matériel et les prestations acquis par l’intéressé se rapportent à l’exercice de sa profession, alors que de tels motifs sont impropres à caractériser l’existence d’un rapport direct), cassant CA Paris (pôle 5 ch. 11), 9 novembre 2012 : RG n° 11/02387 ; Cerclab n° 4058, sur appel de TGI Paris (5e ch. sect. 2), 9 décembre 2010 : RG n° 08/11450 ; Dnd. § V. plus récemment semblant appliquer un « contrôle léger » (« a pu ») : l’arrêt qui relève que la commande d’un matériel de photocopie a été réalisée par dans les locaux de la clinique vétérinaire, pour les besoins de l’activité de celle-ci, que le vétérinaire a apposé le cachet de la clinique sur les actes contractuels et qu’il a réceptionné le matériel sur son lieu de travail, a pu déduire, par ces seuls motifs, que la commande du matériel de photocopie financée par la souscription de deux contrats de crédit-bail avait un rapport direct avec l’activité professionnelle de sorte que les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage n’étaient pas applicables. Cass. civ. 1re, 19 juin 2019 : pourvoi n° 17-31259 ; arrêt n° 598 ; Cerclab n° 8007, rejetant le pourvoi contre CA Aix-en-Provence (8e ch. C), 21 septembre 2017 : RG n° 14/20808 ; arrêt n° 2017/403 ; Cerclab n° 7063.

* Ancien art. L. 136-1 C. consom. [L. 215-1 s.] De même, il faut constater que, dans le cadre de l’ancien art. L. 136-1 C. consom., où la Cour a étendu le rapport direct, celle-ci a exercé son contrôle : cassation du jugement accordant le bénéfice de ce texte à un agriculteur au motif qu’il avait la qualité de consommteur, alors qu’il résultait de ses constatations le contrat litigieux avait pour objet la comptabilité et la gestion de son entreprise. Cass. civ. 1re, 2 juillet 2014 : pourvoi n° 13-16312 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 4865, cassant Jur. proxim. Cherbourg, 29 novembre 2012 : Dnd.

Et la solution vaut aussi, pour le critère de la conclusion entre sociétés commerciales qui a également été étendu à l’ancien art. L. 136-1 C. consom. Cass. com., 6 septembre 2011 : pourvoi n° 10-21583 ; Bull. civ. IV n° 127 ; Cerclab n° 3332 - Cass. com., 6 septembre 2011 : pourvoi n° 10-21584 ; Cerclab n° 3333. 

Persistance de l’appréciation souveraine. * Démarchage. Pour une décision récente continuant de se retrancher derrière l’appréciation souveraine : Cass. civ. 1re, 1er octobre 2014 : pourvoi n° 13-20024 ; Cerclab n° 4876, rejetant le pourvoi contre Jur. proxim. Sables-d’Olonne, 12 octobre 2012 : Dnd.

* Contrats conclus hors établissement ou à distance (L. 121-16-1-III anc. – L. 221-3). Pour une décision de la Cour de cassation semblant considérer – sans doute prématurément – que l’inclusion de l’objet du contrat dans le champ de l’activité principale relève de l’appréciation souveraine des juges du fond : ayant souverainement estimé que la communication commerciale et la publicité via un site Internet n’entraient pas dans le champ de l’activité principale de la cliente, architecte, la cour d’appel n’a pu qu’en déduire que celle-ci bénéficiait du droit de rétractation prévu par l’anc. art. L. 121-21 C. consom., conformément à l’ancien art. L. 121-16-1, III, devenu L. 221-3 C. consom. Cass. civ. 1re, 12 septembre 2018 : pourvoi n° 17-17319 ; arrêt n° 1084 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 7862, rejetant le pourvoi contre CA Douai (ch. 1 sect. 1), 23 mars 2017 : RG n° 16/00837 ; arrêt n° 194/2017 ; Cerclab n° 6802. § Dans le même sens : par Cass. civ. 1re, 27 novembre 2019 : pourvoi n° 18-22525 ; arrêt n° 988 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 8246, rejetant le pourvoi contre TI Périgueux, 9 juillet 2018 : Dnd (un contrat d’insertion publicitaire n’entre pas dans le champ de l’activité principale d’une entreprise de production et de fourniture de bois de chauffage). § N.B. Cette solution semble tout à fait prématurée, compte tenu des incertitudes sur l’interprétation du nouveau critère (Cerclab n° 5889).