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CA ROUEN (ch. proxim.), 12 janvier 2017

Nature : Décision
Titre : CA ROUEN (ch. proxim.), 12 janvier 2017
Pays : France
Juridiction : Rouen (CA), ch. proxim.
Demande : 15/05113
Date : 12/01/2017
Nature de la décision : Avant dire droit
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 29/10/2015
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6702

CA ROUEN (ch. proxim.), 12 janvier 2017 : RG n° 15/05113 

Publication : Jurica

 

Extrait : 1/ « Attendu que l'article 141-4 du code de la consommation permet au juge de soulever d'office toutes les dispositions du dit code dans les litiges nés de son application ; qu'il s'ensuit que le juge doit soulever d'office l'irrecevabilité des actions en paiement tirée de la forclusion et peut prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au motif pris de l'irrégularité de l'offre de prêt. »

2/ « Qu'il convient ainsi d'ordonner la réouverture des débats pour permettre à la société GE Money Bank de justifier de la date de déblocage des fonds, et de s'expliquer le cas échéant sur la nullité du contrat encourue au visa de l'article L. 311-14 (devenu L. 312-25) du code de la consommation précité ».

3/ « Qu'ainsi, la clause de réserve de propriété avec subrogation au profit du prêteur apparaît en contradiction avec cet avis ; Qu'il convient, en application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation qui prévoit que le juge « écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat », d'ordonner la réouverture des débats pour permettre aux parties de fournir toutes observations utiles sur la possibilité pour la société GE Money Bank de se prévaloir de la clause de réserve de propriété avec subrogation stipulée au contrat, au vu de l'avis du 28 novembre 2016 rappelées ci-avant ».

 

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ

ARRÊT DU 12 JANVIER 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/05113. DÉCISION DÉFÉRÉE : Jugement du TRIBUNAL D'INSTANCE D’EVREUX du 24 septembre 2015.

 

APPELANTE :

Société GE MONEY BANK

Représentée et assistée de Maître Céline B., avocat au barreau de ROUEN, substituée par Maître B., avocat au barreau de ROUEN

 

INTIMÉE :

Madame X.

N'ayant pas constitué avocat bien que régulièrement assigné par acte d'huissier en date du 5 janvier 2016

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 24 octobre 2016 sans opposition des avocats devant Madame DELAHAYE, Conseiller, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Madame BRYLINSKI, Président, Madame LABAYE, Conseiller, Madame DELAHAYE, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme NOEL DAZY, Greffier

DÉBATS : A l'audience publique du 24 octobre 2016, où l'affaire a été mise en délibéré au 12 janvier 2017

ARRÊT : Réputé contradictoire, Prononcé publiquement le 12 janvier 2017, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, Signé par Madame BRYLINSKI, Président et par Mme VERBEKE, Greffier présent à cette audience.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suivant une offre préalable du 9 novembre 2011 acceptée le même jour, la société GE Money Bank a consenti à Mme X. un prêt personnel d'un montant de 9.012 euros remboursable en 48 mensualités de 230.85 euros au taux d'intérêts nominal annuel de 8,99 %, affecté à l'achat d'un véhicule type Renault Mégane immatriculé le 28 octobre 2004.

Le 17 octobre 2013, le prêteur s'est prévalu de la déchéance du terme.

Par acte d'huissier du 16 février 2015, la société GE Money Bank a fait assigner Mme X. devant le tribunal d'instance d'Evreux aux fins de la voir notamment condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à payer les sommes restant dues au titre du prêt, lequel, par jugement du 24 septembre 2015, a déclaré son action en paiement recevable mais l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée aux dépens ;

Le tribunal a notamment relevé que la société GE Money Bank n'a pas produit l'historique de compte complet depuis l'origine du contrat malgré la demande expresse du tribunal, qui ne peut donc pas s'assurer du respect des délais de mise à disposition des fonds.

Par déclaration au greffe du 29 octobre 2015, la société GE Money Bank a formé appel de ce jugement ;

 

Par conclusions enregistrées au greffe le 24 décembre 2015 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel, la société appelante, soutenant que les pièces établissent que les fonds ont été débloqués le 22 novembre 2011, rappelant que Mme X. avait sollicité la livraison immédiate du véhicule réduisant le délai de rétractation à 3 jours, et qu'elle a ainsi respecté le délai de rétractation entre la date de signature et le déblocage des fonds, soutenant par ailleurs qu'elle est bien fondé à réclamer la restitution du véhicule dont elle est propriétaire, sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de :

Vu les articles 1134, 1153 du code civil,

Vu les articles L. 311-1 à L. 311-31 anciens du code de la consommation et les articles L. 311- 1 à L. 311-52 nouveaux du code de la consommation,

- condamner Mme X. à payer à la société GE Money Bank la somme de 8.333 euros au titre du solde débiteur du prêt,

- condamner Mme X. à lui restituer le véhicule de marque Renault type Megane II CC 1.9 DCI 120 Luxe Dynamique n° XX, dont elle est propriétaire, sous astreinte de 500 euros par jour,

- condamner la défenderesse au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner, en outre, en tous les dépens par application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

 

Mme X. qui s'est vu signifier par acte d'huissier du 5 janvier 2016 délivré à sa personne la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant n'a pas constitué avocat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Attendu que l'article 141-4 du code de la consommation permet au juge de soulever d'office toutes les dispositions du dit code dans les litiges nés de son application ; qu'il s'ensuit que le juge doit soulever d'office l'irrecevabilité des actions en paiement tirée de la forclusion et peut prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au motif pris de l'irrégularité de l'offre de prêt.

 

Sur la demande en paiement du solde du prêt personnel :

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article L. 311-14 devenu L. 312-25 du code de la consommation,

« Pendant un délai de sept jours à compter de l'acceptation du contrat par l'emprunteur, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l'emprunteur au prêteur.

Pendant ce même délai, l'emprunteur ne peut non plus faire, au titre de l'opération en cause, aucun dépôt au profit du prêteur ou pour le compte de celui-ci.

Si une autorisation du prélèvement sur son compte bancaire est signée par l'emprunteur, sa validité et sa prise d'effet sont subordonnées à celles du contrat de crédit. »

Que si les pièces produites établissent que Mme X. a sollicité la livraison immédiate du véhicule financé par le crédit, elles ne permettent toutefois pas à la cour de s'assurer de la date effective de déblocage des fonds au 22 novembre 2011 comme l'affirme l'appelante dans ses écritures, l'historique du compte ne comportant aucune mention sur ce point, et le listing de notes détaillées mentionnant seulement à la date du 22 novembre 2011 la « vérification fichage » ;

Qu'il convient ainsi d'ordonner la réouverture des débats pour permettre à la société GE Money Bank de justifier de la date de déblocage des fonds, et de s'expliquer le cas échéant sur la nullité du contrat encourue au visa de l'article L. 311-14 (devenu L. 312-25) du code de la consommation précité ;

Attendu par ailleurs que la société GE Money Bank sollicite la restitution du véhicule dont elle indique être propriétaire, se fondant même si elle ne le dit pas expressément dans ses écritures, sur la clause de réserve de propriété incluse au contrat du 9 novembre 2011 ;

Que cette clause intitulée « stipulation d'une clause de réserve de propriété avec subrogation au profit de GE Money Bank (prêteur) » prévoit notamment que « conformément à l'article 1250-1° du code civil, le prêteur qui a réglé le solde du prix de vente est subrogé dans tous les droits et actions du vendeur nés de la présente clause de réserve de propriété et ce, jusqu'au remboursement complet de sa créance. L'acheteur (emprunteur) reconnaît avoir été informé de la subrogation ainsi stipulée ; que cette dernière conditionne à titre essentiel et déterminant, le crédit accordé par le prêteur et qu'en conséquence, le prêteur est seul titulaire des droits et actions du vendeur » ;

« En cas de défaillance de sa part, l'acheteur (emprunteur) s'engage à restituer le bien à première demande du prêteur. Le prêteur sera valablement fondé à engager toutes les poursuites lui permettant de récupérer le véhicule et pourra le revendre aux enchères et affecter le prix de cette vente au règlement de sa créance totale, le surplus éventuel étant reversé à l'acheteur (emprunteur) » ;

Attendu toutefois que par un avis rendu le 28 novembre 2016 (n° 16011P), la cour de cassation a dit notamment que :

1°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, prévoyant la subrogation du prêteur dans la réserve de propriété du vendeur en application des dispositions de l'article 1250, 1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, ne prévoyant pas, en cas de revente par le prêteur du bien financé grevé d'une réserve de propriété, la possibilité pour l'emprunteur de présenter lui-même un acheteur faisant une offre.

Qu'ainsi, la clause de réserve de propriété avec subrogation au profit du prêteur apparaît en contradiction avec cet avis ;

Qu'il convient, en application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation qui prévoit que le juge « écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat », d'ordonner la réouverture des débats pour permettre aux parties de fournir toutes observations utiles sur la possibilité pour la société GE Money Bank de se prévaloir de la clause de réserve de propriété avec subrogation stipulée au contrat, au vu de l'avis du 28 novembre 2016 rappelées ci-avant ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Ordonne la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire à l'audience du jeudi 16 mars 2017 à 14 heures 15 ;

Enjoint à la société GE Money Bank de produire aux débats tout élément justifiant la date de déblocage des fonds ;

Dit qu'elle présentera le cas échéant toutes observations utiles sur la nullité du contrat encourue au visa de l'article L. 311-14 (devenu L. 312-25) du code de la consommation précité ;

Dit que les parties fourniront toutes observations utiles sur le caractère abusif de la clause de réserve de propriété avec subrogation au profit de la société GE Money Bank au vu de l'avis n°16011P rendu le 28 novembre 2016 par la cour de cassation ;

Réserve les dépens.

Le Greffier                Le Président