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CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. B), 22 juin 2017

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. B), 22 juin 2017
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 8e ch. B
Demande : 14/17618
Décision : 2017/179
Date : 22/06/2017
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 15/09/2014
Numéro de la décision : 179
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6943

CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. B), 22 juin 2017 : RG n° 14/17618 ; arrêt n° 2017/179 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Cependant, ainsi que le fait valoir à juste titre l'appelante, les dispositions du code de la consommation relatives à la reconduction des contrats sont applicables, aux termes mêmes de l'article L. 136-1 précité dans sa rédaction applicable à l'espèce, exclusivement aux consommateurs et aux non professionnels. De la même manière, l'article L. 132-1 du code de la consommation alors en vigueur relatif aux clauses abusives précisait concerner les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs.

Or, la SAS LBMA Home Market Corner, qui a contracté avec la SASU Visiplus le 17 septembre 2012 dans le cadre de son activité professionnelle, ne peut se prévaloir d'une telle qualité. Elle n'est dès lors pas fondée à invoquer les textes suscités du code de la consommation, certes d'ordre public, mais qui ne concernent pas les contrats conclus entre sociétés commerciales. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

HUITIÈME CHAMBRE B

ARRÊT DU 22 JUIN 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/17618. Arrêt n° 2017/179. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 21 juillet 2014 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2013F00252.

 

APPELANTE :

SASU VISIPLUS

prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis [adresse], représentée par Maître Agnès E.-C. de la SCP E.-L.-A. & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

 

INTIMÉE :

SOCIETE LBMA - HOME MARKET CORNER

Prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis [adresse], représentée par Maître Sébastien B. de la SCP B. S.-T. J., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 avril 2017 en audience publique devant la Cour composée de : Madame Valérie GERARD, Président de chambre, Mme Françoise DEMORY-PETEL, Conseiller, magistrat rapporteur, Madame Anne DUBOIS, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 juin 2017

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 juin 2017, Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte sous seing privé du 17 septembre 2012, la société Visiplus et la SAS LMBA ont conclu, pour une durée de 12 mois, un contrat de gestion référencement publicitaire pour le site internet de cette dernière.

À l'issue de la première année, la société Visiplus a adressé à la SAS LBMA une facture n° 240913 du 24 septembre 2013 d'un montant de 3.576,04 euros TTC au titre du contrat souscrit et reconduit tacitement, tel que prévu aux conditions générales de vente.

La SAS LBMA n'a pas réglé cette facture.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 25 septembre 2013, elle a demandé la résiliation du contrat à l'échéance du 23 septembre 2013.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 octobre 2013, la société Visiplus a mis en demeure la SAS LBMA de régler la facture au titre de la reconduction annuelle du contrat.

Puis, par acte du 7 novembre 2013, la société Visiplus a fait assigner la SAS LBMA devant le tribunal de commerce de Grasse aux fins de voir dire que le contrat a été résilié le 19 octobre 2013 par l'effet de la mise en demeure du 10 octobre 2013, et condamner la société LBMA au paiement de la somme de 3.576,04 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en application de l'article 12.2 des conditions générales de vente.

Par jugement du 21 juillet 2014, le tribunal de commerce de Grasse a :

- débouté la SAS LBMA Home Market Corner de toutes ses demandes,

- dit que le contrat, signé le 17 septembre 2012 entre les parties, est résilié depuis le 19 octobre 2013,

- condamné la SAS LBMA Home Market Corner à payer à la SASU Visiplus la somme de 1.788,02 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2013,

- débouté la SASU Visiplus de sa demande de dommages-intérêts, jugée ni fondée, ni justifiée,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la décision,

- condamné la SAS LBMA Home Market Corner aux entiers dépens,

- condamné la SAS LBMA Home Market Corner à payer à la SASU Visiplus la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

Suivant déclaration du 15 septembre 2014, la SASU Visiplus a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions notifiées et déposées le 20 mars 2015, auxquelles il convient le cas échéant de se reporter par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, l'appelante demande à la cour de :

- recevoir son appel et le dire bien fondé,

- débouter la société LBMA de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- débouté la société LBMA de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société LBMA,

- dit que le contrat a été résilié à la date du 19 octobre 2013 par l'effet de la mise en demeure du 10 octobre 2013 (en application des conditions générales de vente article 12.2),

en revanche,

- réformer le jugement dont appel quant au quantum de la condamnation,

statuant à nouveau,

- condamner la société LBMA au paiement de la somme de 3.576,04 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 octobre 2013, en application de l'article 12.2 des conditions générales de vente,

- condamner la société LBMA au paiement de la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- la condamner au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP E. L. A. & Associés.

 

Par conclusions notifiées et déposées le 6 février 2015, auxquelles il y a également lieu de se référer, la société LBMA Home Market Corner demande à la cour de :

- la dire recevable et bien fondée en son appel incident à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Grasse du 21 juillet 2014,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes, en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Visiplus la somme de 1.788,02 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2013 et en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

statuant à nouveau,

à titre principal :

- faire notamment application des dispositions des articles L. 132-1, L. 136-1 et L. 136-2 du code de la consommation et des articles 1134 et 1135 du code civil,

- débouter la société Visiplus de l'intégralité de ses demandes,

- dire que la société Visiplus procède par pratiques et man'uvres déloyales et abusives,

- condamner la société Visiplus à lui payer la somme de 3.500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée et également en réparation du préjudice subi par suite de pratiques déloyales et abusives,

à titre subsidiaire :

- pour le cas où il serait considéré que la clause de reconduction tacite du contrat litigieux est valide, faire alors application des dispositions des articles 1152, 1226 et 1231 du code civil,

- dire que la clause pénale dont se prévaut la société Visiplus est manifestement abusive puisqu'elle aboutirait à permettre à la société Visiplus de percevoir au titre de ladite clause pénale l'équivalent d'une année de prestation, qu'en réalité elle n'exécutera jamais et ce alors que, à le supposer reconduit le 18 septembre 2013, le contrat litigieux a été dénoncé dès le 25 septembre 2013 et a en toute hypothèse été résilié à effet du 19 octobre 2013,

- dire en conséquence dans l'exercice de son pouvoir de révision que la cour réduira la clause pénale à 1/12ème de la clause réclamée et ramènera l'indemnité à un montant de 298 euros,

- débouter la société Visiplus du surplus de ses demandes,

en toute hypothèse :

- débouter la société Visiplus de ses prétentions à allocation de la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts ainsi que toutes ses prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Visiplus,

- condamner la société Visiplus à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Visiplus aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Me Sébastien B., membre de la SCP d'avocats B.-S.-T. & J.

 

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 mars 2017.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur l'application des dispositions du code de la consommation :

La SASU Visiplus se prévaut de l'article 10.2 des conditions générales de vente signées le 17 septembre 2012 par la SAS LBMA aux termes duquel : « A son échéance, le présent contrat liant la société Visiplus au client sera renouvelable d'année en année par tacite reconduction pour la même durée, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties 3 mois avant la date anniversaire du contrat par lettre recommandée avec accusé de réception uniquement. »

La société LBMA Home Market Corner expose que la société Visiplus omet de signaler et ce, de manière délibérée et avec malice, que les bons de commande qu'elle fait signer nouant une relation contractuelle seraient constitutifs d'un contrat renouvelable par tacite reconduction, qu'une telle manière de procéder est manifestement une violation des dispositions des articles L. 136-1 et L. 136-2 du code de la consommation qui exigent du professionnel prestataire de services qu'il informe son cocontractant dans des formes précises de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec une clause de reconduction tacite, que c'est donc à la faveur de ce procédé commercial déloyal que l'appelante croit pouvoir soutenir qu'elle serait tenue au paiement des sommes réclamées.

L'intimée ajoute que de telles stipulations sont également constitutives de clauses abusives car elles créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et ce, ainsi qu'il est prévu notamment à l'article L. 132-1 du code de la consommation.

Cependant, ainsi que le fait valoir à juste titre l'appelante, les dispositions du code de la consommation relatives à la reconduction des contrats sont applicables, aux termes mêmes de l'article L. 136-1 précité dans sa rédaction applicable à l'espèce, exclusivement aux consommateurs et aux non professionnels.

De la même manière, l'article L. 132-1 du code de la consommation alors en vigueur relatif aux clauses abusives précisait concerner les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs.

Or, la SAS LBMA Home Market Corner, qui a contracté avec la SASU Visiplus le 17 septembre 2012 dans le cadre de son activité professionnelle, ne peut se prévaloir d'une telle qualité.

Elle n'est dès lors pas fondée à invoquer les textes suscités du code de la consommation, certes d'ordre public, mais qui ne concernent pas les contrats conclus entre sociétés commerciales.

 

Sur les pratiques déloyales et manœuvres dolosives :

La société LBMA Home Market Corner fait ensuite valoir que, indépendamment des dispositions du code de la consommation, cette manière de procéder est constitutive non seulement d'une pratique déloyale, mais également d'une manœuvre dolosive qu'il convient de sanctionner, qu'en effet, selon les dispositions des articles 1134 et 1135 du code civil, les conventions doivent être exécutées de bonne foi, que cependant il n'a jamais été dans son intention de souscrire quelque contrat d'abonnement reconductible par tacite reconduction et en conséquence, son consentement a été obtenu par surprise par suite de pratiques et manœuvres déloyales imputables à la société Visiplus.

Mais, l'intimée ne produit pas le moindre élément de nature à démontrer les pratiques et man'uvres qu'elle impute ainsi à son cocontractant, alors que la clause qu'elle conteste figure de manière tout à fait apparente dans les conditions générales de vente qu'elle a, après avoir apposé la mention « lu et approuvé », signées le 17 septembre 2012, de même que le bon de commande où elle déclarait en avoir pris connaissance et y souscrire.

La demande de dommages et intérêts présentée par la société LBMA Home Market Corner ne peut qu'être rejetée.

 

Sur la clause pénale :

Au soutien de son appel, la SASU Visiplus invoque les dispositions de l'article 12.2 des conditions générales de vente signées le 17 septembre 2012 par la SAS LBMA aux termes duquel : « le non-paiement d'une échéance quelconque sous 8 jours après envoi d'une première mise en demeure, par lettre recommandée avec accusé de réception, de payer entraînera automatiquement la résiliation du contrat et l'exigibilité de la totalité du solde restant dû. »

L'intimée fait valoir que l'indemnité réclamée est constitutive d'une clause pénale manifestement excessive soumise comme telle au pouvoir de révision judiciaire que la cour tient notamment des articles 1152 et 1231 du code civil, qu'en effet, la mise en œuvre de cette clause aboutit à permettre à la société Visiplus de percevoir l'équivalent d'une année de prestation qu'en réalité elle n'exécutera pas, et ce alors que le contrat litigieux qui aurait été reconduit le 18 septembre 2013 a été dénoncé dès le 25 septembre 2013 et en toute hypothèse a été résilié à effet du 19 octobre 2013.

La SASU Visiplus, qui ne conteste pas le caractère de clause pénale des dispositions dont elle se prévaut, sollicite à ce titre la somme de 3.576,04 euros correspondant au montant de la prestation annuelle à venir en cas de reconduction du contrat.

Or, ainsi qu'elle l'a elle-même sollicité, le contrat a été résilié à la date du 19 octobre 2013, soit un mois après l'expiration du contrat initial, et, compte tenu de la demande de non reconduction formulée par son cocontractant le 25 septembre 2013, elle n'a été amenée à effectuer aucune prestation dans le cadre de cette reconduction.

Dans ces conditions, le montant de la clause apparaît manifestement excessif et, en application des textes susvisés applicables en l'espèce, la cour estime devoir le réduire à la somme de 298 euros.

 

Sur les autres demandes :

Les demandes de dommages et intérêts pour procédure ou résistance abusive ne peuvent, au regard de la présente décision, qu'être rejetées.

Par ailleurs, il n'y a pas lieu en cause d'appel à condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de la SAS LBMA au titre de la clause pénale,

L'infirme de ce chef, et statuant à nouveau,

Condamne la SAS LBMA Home Market Corner à payer à la SASU Visiplus la somme de 298 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2013,

Rejette toutes autres demandes,

Dit que les dépens d'appel seront supportés à hauteur de la moitié par chacune des parties,

Accorde aux avocats en la cause le droit de recouvrement direct de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT