CA ORLÉANS (ch. civ. sect. 1), 5 décembre 1996
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 703
CA ORLEANS (ch. civ. sect. 1), 5 décembre 1996 : RG n° 95/000899 ; arrêt n° 1687
(arrêt rectifié par CA Orléans (ch. civ. sect. 1), 23 janvier 1997)
Publication : Juris-Data n° 047503
Extrait : « Qu'en outre, il est de jurisprudence constante qu'un professionnel a droit à la même protection qu'un particulier pour toute offre à lui faite sortant du cadre spécifique de son activité ; Attendu que tel est bien le cas de l'espèce, qu'en effet, comme le font à juste titre observer les époux X., le fait d'exploiter un café-bar-restaurant n'a pas pour effet de les rendre compétents en matière de vente de fonds de commerce et de leur permettre d'apprécier la spécificité du contrat proposé ; qu'au surplus, la prestation de vente en cause n'avait pas un rapport direct avec les activités de restauration exercées par les intimés ».
COUR D’APPEL D’ORLÉANS
CHAMBRE CIVILE SECTION 1
ARRÊT DU 5 DÉCEMBRE 1996
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.R. n° 95000899. Arrêt n° 1687. Décision de la Cour : confirmation. Décision première instance : TRIBUNAL DE COMMERCE ORLEANS EN DATE DU 21/09/1994.
PARTIES EN CAUSE :
La SARL SDHR IMMO
dont le siège social est [adresse] représentée par son Gérant domicilié en cette qualité audit siège. APPELANTE. REPRESENTÉ(E) PAR SCP LAVAL-LUEGER, Avoué(s). ASSISTÉ(E) DE MAITRE CROZE Philippe Avocat(s) au barreau de ORLEANS, D'UNE PART
- Monsieur X.
au [adresse]
- Madame X.
au [adresse]
INTIMÉS. REPRESENTÉS PAR SCP DUTHOIT-DESPLANQUES, Avoué(s). ASSISTÉS DE MAITRE LANGERON Chantal, Avocat(s) au d’ORLÉANS, D'AUTRE PART
[minute page 2]
DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 10 FÉVRIER1995
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 17 OCTOBRE1996
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats, du délibéré et du prononcé de l'arrêt : Madame LARDENNOIS, Président de Chambre, Madame MARTIN-PIGALLE, Conseiller, Monsieur PUECHMAILLE, Conseiller,
Greffier : Madame PALLU
DÉBATS : A l'audience publique du 31 octobre 1996, à laquelle ont été entendus les avocats des parties.
ARRÊT : Prononcé par Madame MARTIN-PIGALLE à l'audience publique le 5 décembre 1996.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] LA COUR,
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Statuant sur les appels principal et incident, respectivement régulièrement formés par la SARL SDHR IMMO et les époux X., contre un jugement rendu le 21 septembre 1994 par le Tribunal de Commerce d'ORLEANS qui a notamment prononcé la nullité du mandat du 15 juin 1993, dit que les époux X. pourraient recevoir l'intégralité du prix de vente de leur fonds de commerce et dit n'y avoir lieu à dommages-intérêts.
Les époux X. étaient propriétaires d'un fonds de commerce de bar, brasserie, plats du jour « Le Café de […] » situé [adresse], qu'ils souhaitaient vendre.
Le 15 juin 1993, Madame X. a signé un mandat de vente exclusif de son fonds de commerce avec la Société SDHR IMMO.
Finalement et sans le concours de la Société SDHR IMMO, le fonds susvisé a été vendu à Monsieur Y. par acte notarié du 28 octobre 1973.
C'est alors que la Société SDHR IMMO a fait assigner les époux X. devant le Tribunal de Commerce d'ORLEANS en paiement solidaire de la somme de 65.000 Francs, au titre de sa commission, outre les intérêts à compter de la mise en demeure du 31 janvier 1994 et ce après avoir formé opposition sur le prix de vente du fonds de commerce et fait pratiquer une saisie-conservatoire.
C'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement déféré.
La Société SDHR IMMO conclut à son infirmation.
Elle fait valoir que la loi du 22 décembre 1972 et corrélativement l'article L. 121-21 du Code de la Consommation, ne seraient pas applicables à l'espèce, dès lors que les époux X. seraient des professionnels du commerce et que la vente d'un fonds aurait un rapport direct avec l'activité qui y est exercée.
Elle soutient encore que les conditions d'application des articles 1109 et 1116 du Code Civil ne seraient pas réunies.
[minute page 4] Elle affirme notamment qu'il aurait appartenu aux époux X. de vérifier si la convention signée correspondait bien à leur attente, qu'en outre, ils n'auraient jamais usé de la faculté de dénonciation stipulée à la convention à l'issue de 3 mois, ce qui, selon elle, attesterait de la conformité du mandat à la commune intention des parties.
Elle développe que la signature d'un mandat exclusif de vente ensuite de celle de 4 autres précédents signés sans exclusivité ne suffirait pas à prouver les manœuvres dolosives où la simple réticence dolosive.
Excipant enfin de la validité formelle de la clause, aux termes de laquelle une commission serait due par le mandant en cas de non-respect des obligations énoncées, la Société SDHR IMMO conclut à la condamnation solidaire des époux X. à lui payer 65.000 Francs assortis des intérêts à compter du 31 janvier 1994 ; outre encore 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Les époux X. réfutent ces moyens et concluent à la confirmation du jugement entrepris, sauf à leur allouer 10.000 Francs, à titre de dommages-intérêts réparant le préjudice subi du fait que depuis de nombreux mois une partie du prix de vente se trouve bloquée.
Très subsidiairement, ils contestent le droit à commission de l'appelante qui n'aurait selon eux réalisé aucune diligence.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Attendu qu'il n'est pas contesté et qu'il résulte au surplus de l'examen du mandat litigieux que sa signature est intervenue à [ville], soit au domicile comme sur le lieu de travail de Madame X. ;
Qu'en outre, il est de jurisprudence constante qu'un professionnel a droit à la même protection qu'un particulier pour toute offre à lui faite sortant du cadre spécifique de son activité ;
Attendu que tel est bien le cas de l'espèce, qu'en effet, comme le font à juste titre observer les époux X., le fait d'exploiter un café-bar-restaurant n'a pas pour effet de les rendre compétents en matière de vente de fonds de commerce et de leur permettre d'apprécier la spécificité du contrat proposé ; qu'au surplus, la prestation de vente en cause n'avait pas un rapport direct avec les activités de restauration exercées par les intimés ;
[minute page 5] Attendu qu'ainsi, lors de la signature du mandat litigieux, Madame X. se trouvait dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur justifiant la protection instaurée par la loi sur le démarchage du 22 décembre 1972 ;
Attendu par ailleurs que la susdite loi étant applicable aux démarchages en vue de proposer la fourniture de services, rien ne s'oppose à ce qu'elle soit appliquée aux agents immobiliers, qu'ils viennent proposer leurs services ou même répondent à une demande d'un potentiel client et sollicitent alors d'eux la signature d'un mandat exclusif pour la vente de leur immeuble ;
Attendu qu'il découle de ces observations que contrairement à ce que soutient l'appelante, le mandat litigieux est soumis à l'application de l'article L. 121-21 du Code de la Consommation alors de surcroît que le démarchage dont s'agit ne fait pas l'objet d'une réglementation par un texte législatif particulier ;
Or attendu qu'il n'est pas contesté que le mandat en cause non seulement ne comprenait pas le formulaire détachable visé à l'article L. 121-24 du Code de la Consommation et destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation dans les conditions prévues à l'article L. 121-25 du même Code, mais encore ne contenait aucunement une clause spécifiant la faculté de renonciation à l'engagement souscrit ;
Attendu en conséquence que confirmant le jugement déféré, il y a lieu, en application de l'article L. 121-23 du Code de la Consommation de prononcer la nullité du mandat du 15 juin 1993 et de dire que les époux X. sont fondés à obtenir l'intégralité du prix de vente de leur fonds de commerce ;
Attendu que depuis bientôt deux ans et demi, les époux X., ensuite de la saisie-conservatoire indûment pratiquée le 6 avril 1994 par la Société appelante, ne peuvent disposer de la totalité du prix de vente du fonds et plus particulièrement de la somme d'environ 66.350 Francs, qu'ils subissent de ce fait un préjudice financier qu'il y a lieu d'indemniser, accueillant leur appel incident, par l'allocation de 10.000 Francs de dommages-intérêts ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des époux X. les frais non inclus dans les dépens ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
CONFIRME le jugement déféré,
[minute page 6] Y AJOUTANT,
CONDAMNE la Société SDHR IMMO à payer à Monsieur X. et Madame Z. son épouse, 10.000 Francs de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
CONDAMNE la même Société aux dépens d'appel,
ACCORDE à la SCP DUTHOIT-DESPLANQUES, Avoués, le droit prévu à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Et le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier
Vu l'arrêt en date du 23 JANVIER 1997,
Vu l'article 462 du Nouveau Code de Procédure Civile,
LA COUR,
DIT que le dispositif ci-après détaillé se substituera à celui précisé au dispositif de l'arrêt rendu par cette Cour le 5 décembre 1996 ;
« CONFIRME le jugement déféré ; Y AJOUTANT
CONDAMNE la société SDHR IMMO à payer à Monsieur X. et Madame Z. épouse X. 10.000 francs à titre de dommages-intérêts et 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE CONDAMNE aux dépens d'appel
ACCORDE à la SCP DUTHOIT-DESPLANQUES le droit prévu à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile »
DIT que la présente décision rectificative sera mentionnée sur la minute et les expéditions de l'arrêt du 5 décembre 1996 rendu par cette Cour ;
LAISSE les dépens de la présente procédure à la charge du Trésor Public.
- 5747 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Sort du contrat - Clause affectant l’existence du contrat
- 5870 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Activité globale ou spécifique
- 5885 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence
- 5957 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus à l’occasion de la cessation de l’activité