CA LYON (1re ch. civ. B), 27 février 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7475
CA LYON (1re ch. civ. B), 27 février 2018 : RG n° 16/08746
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « En l'espèce, Mme Y. et M. X. avaient conclu subsidiairement à la condamnation de la Caisse d'Epargne à les relever de toute condamnation au profit de la société CEGC, en raison de la faute commise dans l'application de la déchéance du terme. En appel, la demande de condamnation directe de la banque à des dommages et intérêts tend aux mêmes fins, à savoir la réparation de ses préjudices. »
2/ « L'article 14 prévoit que le prêt est résilié de plein droit en cas de vente de l'immeuble financé au moyen du prêt. Cet article ne porte aucune atteinte au droit de propriété, les emprunteurs ayant d'ailleurs pu vendre le bien sans aucun obstacle. D'autre part, une banque qui a octroyé un prêt immobilier à des conditions spécifiques en raison de son objet, est bien fondée à exiger que ce prêt ne puisse être utilisé en cas de revente du bien immobilier au financement d'autres activités. C'est donc par des motifs exacts et pertinents, adoptés par la cour, que le premier juge a retenu que ni la banque ni la caution n'avaient commis de faute à l'occasion de la mise en œuvre de la déchéance du terme qui était contractuellement encourue en cas de revente du bien immobilier, quand bien même les emprunteurs auraient été à jour des échéances de leur prêt. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/08746. Décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT-ÉTIENNE (1re ch. civ.), Au fond, du 8 novembre 2016 : R.G. n° 13/00651
APPELANTS :
M. X.
né le [date] à [ville], Représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, Assisté de la SELARL LEXFACE, avocats au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Mme Y.
née le [date] à [ville], Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, Assistée de la SELARL LEXFACE, avocats au barreau de SAINT-ÉTIENNE
INTIMÉES :
La société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS (CEGC), SA
Entreprise régie par le Code des Assurances, représentée par le Président de son Conseil d'Administration domicilié. Représentée par la SCP GRAFMEYER BAUDRIER ALLEAUME JOUSSEMET, avocats au barreau de LYON
LA CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDECHE
Société Anonyme Coopérative à Directoire et Conseil d'Orientation et de Surveillance, représentée par ses dirigeants légaux en exercice, domiciliés de droit en cette qualité audit siège, Représentée par la SELARL BOST-AVRIL, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE
Date de clôture de l'instruction : 6 juillet 2017
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 janvier 2018
Date de mise à disposition : 27 février 2018
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Françoise CARRIER, président, - Florence PAPIN, conseiller, - Michel FICAGNA, conseiller, assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier.
A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les
[minute page 3] parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :
Selon acte sous seing privé du 19 mars 2007, Mme Y. et M. X. ont contracté auprès de la société Caisse d'Épargne Loire Drome Ardèche, un prêt d'un montant de 166.000 € pour financer la construction d'une maison d'habitation sur un terrain appartenant à M. X. à [ville U.].
Le Prêt a été garanti par le cautionnement de la société SACCEF devenue société Compagnie Européenne de Garanties et de Cautions (société CEGC).
Selon acte notarié du 20 février 2012, M. X. a revendu le bien immobilier moyennant le prix de 240.000 €.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 septembre 2012, la banque a notifié aux emprunteurs la déchéance du terme, invoquant l'application de l'article 14 du contrat édictant que le prêt sera résilié en cas de vente de l'immeuble objet du prêt.
Par courrier du 9 octobre 2012, la banque a adressé à la caution une demande de paiement des sommes restant dues par les emprunteurs.
La société CEGC a procédé au règlement de la somme de 138.115,60 €, et a exercé son recours contre les emprunteurs, lesquels ont refusé de s'acquitter invoquant en particulier l'irrégularité de la déchéance du terme prononcée par la banque.
Par acte du 26 février 2013 et du 12 juin 2015, la société CEGC a assigné Mme Y. et M. X. puis la société Caisse d'Épargne Loire-Drome-Ardèche, devant le tribunal de grande instance de Saint-Etienne aux fins de condamnation à lui payer la somme de 147.854,64 € arrêtée à la date du 29 décembre 2012, outre intérêts au taux contractuel.
Mme Y. et M. X. ont demandé au tribunal, à titre principal, de dire et juger que la société Compagnie Européenne de Garanties qui s'est acquittée de façon précipitée du payement a commis en poursuivant le recouvrement d'une créance contestée une faute qui lui a fait perdre son recours contre eux et de condamner la société CEGC à leur verser une somme de 5.000 en réparation de leur préjudice moral.
La société Caisse d'Épargne Loire Drome Ardèche a conclu à l'irrecevabilité des demandes formées contre elles.
Par jugement du 8 novembre 2016, le tribunal de grande instance de Saint-Etienne, a condamné les débiteurs à payer à la société CEGC la somme de 138.115,60 € outre intérêts au taux légal, à compter du 26 février 2013 et la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 6 décembre 2016, Mme Y. et M. X. ont relevé appel de ce jugement.
Ils demandent à la cour :
- [minute page 4] de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de la société CEGC à la somme de 138.115,60 €,
- de le réformer pour le surplus,
- de condamner in solidum la société Caisse d'Épargne Loire Drome Ardèche et la société CEGC à leur payer la somme de 45.873,74 € de dommages et intérêts, outre la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- d'ordonner la compensation entre les créances respectives.
Ils soutiennent :
- que leur demande de dommages et intérêts ne constitue pas une demande nouvelle en appel au sens de l'article 564 du code de procédure civile,
- que l'article 14 du contrat de prêt est une clause abusive en ce sens qu'elle porte atteinte au droit de propriété,
- que la société CEGC a payé sans s'interroger sur la légitimité de sa demande, après avoir validé le principe de la déchéance du terme sur la base de l'article 14 du contrat alors que cette clause était illicite et abusive.
La société CEGC appelante incidente sollicite l'octroi des sommes réclamées en première instance outre une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient :
- qu'elle exerce son recours personnel au titre du capital restant dû et son recours subrogatoire au titre de l'indemnité de résiliation de 7% et au titre des intérêts contractuels,
- que les stipulations de l'article 14 du contrat ne sont nullement illicites ni abusives.
La société Caisse d'Épargne Loire Drome Ardèche demande à la cour de :
- de déclarer irrecevables les demandes de dommages et intérêts formées à son encontre pour la première fois en cause d'appel,
- de confirmer le jugement déféré et sollicite une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient qu'elle a appris incidemment la vente de la maison, et qu'elle a régulièrement fait application de l'article 14 du contrat qui ne constitue pas ni une clause illicite, ni abusive.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la recevabilité des prétentions de Mme Y. et de M. X. à l'encontre de la société Caisse d'Épargne :
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
[minute page 5] Aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
En l'espèce, Mme Y. et M. X. avaient conclu subsidiairement à la condamnation de la Caisse d'Epargne à les relever de toute condamnation au profit de la société CEGC, en raison de la faute commise dans l'application de la déchéance du terme.
En appel, la demande de condamnation directe de la banque à des dommages et intérêts tend aux mêmes fins, à savoir la réparation de ses préjudices.
La demande n'est donc pas irrecevable.
Sur la validité de la clause de l'article 14 du contrat de prêt :
L'article 14 prévoit que le prêt est résilié de plein droit en cas de vente de l'immeuble financé au moyen du prêt.
Cet article ne porte aucune atteinte au droit de propriété, les emprunteurs ayant d'ailleurs pu vendre le bien sans aucun obstacle.
D'autre part, une banque qui a octroyé un prêt immobilier à des conditions spécifiques en raison de son objet, est bien fondée à exiger que ce prêt ne puisse être utilisé en cas de revente du bien immobilier au financement d'autres activités.
C'est donc par des motifs exacts et pertinents, adoptés par la cour, que le premier juge a retenu que ni la banque ni la caution n'avaient commis de faute à l'occasion de la mise en œuvre de la déchéance du terme qui était contractuellement encourue en cas de revente du bien immobilier, quand bien même les emprunteurs auraient été à jour des échéances de leur prêt.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef et les débiteurs seront déboutés de leurs prétentions.
Sur la créance :
C'est à juste titre que le premier juge a retenu que la caution subrogée n'est investie des droits du créancier que dans la mesure du paiement fait et qu'elle ne peut prétendre qu'aux intérêts produits au taux légal par la dette qu'il a acquittée à compter du paiement sauf clause contraire (inexistante en l'espèce) de l'acte de cautionnement.
En conséquence, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions sauf à fixer le point de départ des intérêts au 31 octobre 2012, date du paiement.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
la Cour,
- Déclare recevables les prétentions des appelants,
Sur le fond,
- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf à fixer le point de départ des intérêts au taux légal à la date du 31 octobre 2012,
y ajoutant,
- Condamne solidairement Mme Y. et M. X. à payer à la société CEGC la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la somme de 1.500 € à la société Caisse d'Épargne et de Prévoyance Loire-Drome Ardèche,
- Condamne solidairement Mme Y. et M. X. solidairement aux dépens d'appel, distraits au profit de la Scp Grafmeyer, Baudrier Alleaume Joussemet, et de Maître Olivier Bost, avocat, sur leur affirmation de droit.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
- 5853 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Consommateur tiers au contrat
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- 5853 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Consommateur tiers au contrat
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