CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 6 juillet 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7631
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 6 juillet 2018 : RG n° 16/14923
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Considérant encore qu’invoquant l’interdépendance des contrats d’un ensemble conventionnel comprenant une location financière, la société FEELING DANCE prétend tout à la fois que le bon de commande du matériel du 31 octobre 2012 serait nul et qu’il n’y a pas eu de maintenance, entraînant dans l’un et l’autre cas, la caducité du contrat de location ;
Mais considérant qu’il n’est pas contesté que le bon de commande a été passé avec la société COMPAGNIE FRANCAISE DE L’INNOVATION et qu’à défaut d’avoir été attraite dans la cause par la personne y ayant intérêt en raison des moyens de défense qu’elle soulève, la prétendue nullité du bon de commande ne peut pas être examinée et que ni le mandat du 31 octobre 2012, ni les conditions générale de location entérinées le 16 novembre suivant par la société LOCAM en signant le document, ne stipulent l’existence d’un contrat de maintenance, de sorte qu’à défaut, il n’existe pas d’interdépendance entre un engagement de maintenance d’un matériel et sa location ».
2/ « Considérant aussi que la société FEELING soutient que la clause d’indemnité de résiliation égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu’à la fin initialement prévue de la location, augmentée d’une pénalité, est nulle en application de l’article L. 132-1 du code de la consommation, en ce que cette clause crée un déséquilibre significatif entre les engagements des parties ;
Mais considérant qu’il n’est pas contesté que le matériel litigieux a été affecté aux locaux de la société FEELING DANCE, de sorte que sa location était destinée à l’exercice professionnel de celle-ci et que le code de la consommation n’est pas applicable ;
Que, par ailleurs, la société FEELING DANCE n’est pas recevable à demander subsidiairement à la cour d’examiner cette même demande au regard de l’article L. 442-6 du code de commerce, la juridiction saisie en première instance n’étant pas compétente pour connaître d’une telle demande, dès lors qu’elle ne figure pas au rang des juridictions visées au tableau de l’annexe 4-2-1, de l’article D 442-3 du code de commerce, étant également surabondamment observé que le bailleur financier ayant à l’origine payé le prix du matériel sur la foi du procès-verbal de réception sans réserve signé par la société FEELING DANCE, le montant du loyer a été fixé entre les parties en fonction de l’amortissement sur la durée du bail du capital investi, majoré des intérêts pendant la même période et de la marge commerciale de l’opérateur financier, de sorte que la résiliation de la location avant le terme initialement prévu, cause un préjudice au bailleur financier qui n’est plus en mesure d’amortir la totalité de l’opération dans les conditions initialement prévues par les parties, et que l’indemnité contractuelle de résiliation égale à la somme des loyers restant à courir n’apparaît pas de nature à déséquilibrer significativement les engagements des parties ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE11
ARRÊT DU 6 JUILLET 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/14923 (8 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 mai 2016 - Tribunal d’Instance de PANTIN – R.G. n° 15-000386.
APPELANTE :
SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
prise en la personne de ses représentants légaux, N° SIRET : XXX (Saint-Etienne), assistée de Maître Guillaume M. de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.B. & M., avocat plaidant du barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430
INTIMÉE :
SARL FEELING DANCE
prise en la personne de ses représentants légaux, N° SIRET : YYY (Bobigny), assistée de Maître Véronique P., avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : E1293
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 mai 2018, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Gérard PICQUE, magistrat honoraire en charge de fonctions juridictionnelles. Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Michèle LIS SCHAAL, présidente de la chambre, Madame Françoise BEL, présidente de chambre, Monsieur Gérard PICQUE, magistrat honoraire en charge de fonctions juridictionnelles.
Greffier, lors des débats : Madame Saoussen HAKIRI.
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, - signé par Madame Michèle LIS SCHAAL, présidente et par Madame Saoussen HAKIRI, Greffière présent lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 31 octobre 2012, la sarl FEELING DANCE a donné mandat à la société VIATELEASE pour conclure avec tout établissement financier une location longue durée concernant une caméra et un enregistreur. Le 16 novembre 2012, la SAS LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS -LOCAM- a loué ce matériel à la société FEELING DANCE sur une durée de 63 mois (21 trimestres), moyennant un loyer trimestriel de 297 euros HT, hors assurance.
Le 7 janvier 2014, indiquant s’être aperçue, à l’occasion d’un cambriolage, du caractère fictif du matériel qui n’enregistrait rien, outre le défaut de maintenance, la société FEELING DANCE a :
- le 7 janvier 2014, demandé à la société LOCAM le remboursement des cinq premiers trimestres déjà payé et l’annulation des prélèvements à venir,
- le 24 octobre 2014, notifié à la société COMPAGNIE FRANCAISE DE L’INNOVATION la nullité du contrat comme étant dépourvu de cause.
Ayant vainement mis en demeure la société FEELING DANCE le 10 octobre 2014, de lui payer la somme de 1.256,60 euros au titre des trois loyers impayés des 30 mars, 30 juin et 30 septembre 2014, augmentés des intérêts et pénalités, en visant la clause contractuelle résolutoire à défaut de paiement dans les huit jours, la société LOCAM l’a attraite devant le tribunal d’instance de Pantin le 3 avril 2015, aux fins de l’entendre condamner à lui payer la somme globale de 6.522,36 euros augmentés des intérêts à compter du 10 octobre 2014, au taux de la Banque centrale européenne (BCE) majoré de 10 points, visé à l’article L 441-6 du code de commerce, et anatocisme, la restitution du matériel sous astreinte et l’indemnisation de ses frais irrépétibles.
S’y opposant, la société FEELING DANCE a demandé la nullité du contrat de location du 16 novembre 2012, a sollicité le remboursement de la somme de 1.847 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2014 et anatocisme outre la condamnation de la société LOCAM de reprendre le matériel à ses frais dans les deux mois et l’indemnisation de ses frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire du 23 mai 2016 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal a prononcé l’annulation du contrat de location du 16 novembre 2012 en rejetant les demandes de la société LOCAM et en la condamnant à rembourser à la société FEELING DANCE la somme requise majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement et leur capitalisation annuelle dans les conditions de l’article 1154 du code civil, à reprendre les matériels à ses frais dans les deux mois de la signification du jugement et à verser la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Vu l’appel interjeté le 7 juillet 2016, par la société LOCAM et ses dernières écritures télé-transmises le 22 mars 2018, réclamant la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles et poursuivant l’infirmation du jugement en renouvelant les demandes antérieurement formulées en première instance ;
Vu les dernières conclusions télé-transmises le 13 avril 2018, par la société FEELING DANCE intimée, réclamant la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles et poursuivant la confirmation du jugement tout en demandant d’y ajouter « à toutes fins utiles » :
- à titre principal, de dire que les clauses des conditions générales de vente invoquées par la société LOCAM sont nulles comme étant illisibles, que la clause de contrôle par le locataire du fonctionnement et des exigences d’hygiène et sécurité est nulle comme étant abusive et de débouter le bailleur de ses demandes de paiement des échéances impayées et de la clause pénale de 10 %,
- subsidiairement, de débouter la société LOCAM de ses demandes de paiement dès lors qu’elle n’en précise pas les moyens de fait et de droit,
- plus subsidiairement, de dire que les demandes de paiement de la société LOCAM des sommes de 4.817,15 euros et de 481,77 euros sont fondées sur des « clauses nulles et abusives » ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Considérant à titre liminaire qu’après levée de l’audience de plaidoirie du mercredi 30 mai 2018 :
Maître P., avocate de la société FEELING DANCE (intimée) a adressé à la cour par RPVA (11H53) un message prétendant répondre à des questions concernant le procès-verbal de réception,
Maître Guillaume M., avocat de la société LOCAM (appelante) a adressé à la cour par RPVA (17H33) un message en réponse s’étonnant du courrier de sa consœur et soulevant son irrecevabilité ;
Qu’il convient de rappeler que les notes en délibéré ne sont très exceptionnellement recevables que si elles ont été autorisées par la juridiction au moment des plaidoiries, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce, étant surabondamment observé que l’autorisation d’adresser une note en délibéré n’avait, au demeurant pas été formulée ;
Qu’en conséquence les messages précités seront écartés des débats ;
Que par ailleurs, la société FEELING DANCE demande à titre principal, de dire que les clauses des conditions générales de vente invoquées par la société LOCAM sont nulles comme étant illisibles et en déduit, au visa de l’article 56 du code de procédure civile, que la société LOCAM n’aurait pas précisé l’exposé de ses moyens en fait et en droit ;
Mais considérant que si la copie (réduite) du mandat donné le 31 octobre 2012 à la société VIATELEASE transmise par la société LOCAM à la société FEELING DANCE au titre de la communication des pièces, est difficilement lisible, il convient d’observer que lors des débats à l’audience de la cour, la société LOCAM a produit son exemplaire original parfaitement lisible et que ce document indiquant avoir été établi en 4 exemplaires, la société FEELING DANCE les ayant signés, a été en mesure de se reporter à l’un des exemplaires originaux normalement en sa possession pour prendre connaissance de ses clauses, indépendamment de la mauvaise photocopie initialement produite aux débats par l’appelante, de sorte qu’il n’y a pas lieu de donner suite à la demande de la société FEELING DANCE de déclarer nulles les clauses des conditions générales invoquées par l’appelante en raison de leur caractère prétendument illisible et d’observer que la société LOCAM, demanderesse initiale a suffisamment précisé l’objet de ses demandes avec un exposé des moyens en fait et en droit ;
Sur le fond :
Considérant que le 31 octobre 2012, la société FEELING DANCE a donné mandat à la société VIATELEASE à l’effet de conclure avec tout établissement financier un contrat de location longue durée du matériel désigné aux conditions particulières du document, soit « 1 caméra » et « 1 enregistreur » ;
Qu’il n’est pas contesté que ce même jour, la société COMPAGNIE FRANCAISE DE L’INNOVATION (CFI), prise en sa qualité de fournisseur, et la société FEELING DANCE en qualité de (futur) locataire, ont signé un procès-verbal de réception aux termes duquel la locataire déclare notamment avoir pris livraison d’une caméra et d’un enregistreur et les reconnaître conformes à ceux visés au mandat avec la société VIATELEASE, en précisant en avoir contrôler le fonctionnement et les accepter sans restriction ni réserve ;
Qu’il ressort du constat dressé trois années plus tard, le 6 novembre 2015 par l’huissier de justice requis par la société FEELING DANCE, qu’au jour de l’intervention de l’officier ministériel, seule une caméra de vidéo-surveillance était présente dans les locaux ;
Que cependant, nonobstant la caractère authentique du procès-verbal des constatations qui a été dressé, celui-ci décrivant seulement la situation au jour de la venue de l’huissier de justice, n’est pas susceptible de modifier utilement les constatations faites sous seing privés par le fournisseur et la société FEELING DANCE trois années plus tôt, étant observé que, requérante aux opérations de constat de l’huissier de justice, la société FEELING DANCE ne fait aucune observation ni ne donne de précision en ce qui concerne l’enregistreur dont elle a pourtant attesté la réception avec la caméra lors du procès-verbal précité de réception du 31 octobre 2012, et au sujet duquel l’huissier de justice ne fait aucune mention ;
Que pour prétendre que l’enregistreur n’aurait pas existé, en contradiction flagrante avec ce qu’elle avait reconnu aux termes du procès-verbal de réception, la société FEELING DANCE fait valoir que le 6 novembre 2015, l’huissier de justice a constaté qu’un unique câble électrique ressort de la caméra et qu’aucun trou permettant le passage d’un autre câble n’existe sur le socle de celle-ci, pour en déduire que la caméra présentée le 6 novembre 2015 à l’huissier de justice ne pouvait pas être reliée à un enregistreur en affirmant que « le câble d’alimentation électrique ne peut pas enregistrer d’images » [conclusions intimée page 8], tandis que la société LOCAM affirme pour sa part que « sur ce type de matériel, le câble de sortie est unique et sert tant pour l’alimentation que pour le transfert d’images » [conclusions appelante page 14] ;
Que l’intimée estime aussi que le procès-verbal de réception est de pure adhésion au sens de l’article 1110 du code civil en raison des clauses types pré-rédigées par la société CFI et dont la valeur probante est limitée par l’article 1190 du même code, de sorte qu’il ne peut pas, selon elle, faire échec à la preuve par constat d’huissier qui a constaté l’inexistence d’un autre trou permettant le passage d’un autre câble que le câble électrique et qu’il n’existe aucune antenne sur la caméra permettant la diffusion en wifi des images ;
Que la société FEELING DANCE en déduit que la centrale de sécurité ne pouvait pas fonctionner dès lors « qu’il est matériellement impossible que la caméra soit reliée à un enregistreur puisqu’il n’y a aucune sortie » le permettant, ce dont la société FEELING DANCE ne pouvait pas s’en rendre compte lors de la livraison puisqu’il fallait démonter une goulotte pour s’en apercevoir ;
Mais considérant que les articles 1110 et 1190 du code civil, visés par la société FEELING DANCE, issus de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ne sont applicables qu’aux contrats signés à partir du 1er octobre 2016, et qu’il convient d’observer, outre que l’huissier de justice n’a pas compétence pour tirer toute conclusion technique de ses constatations matérielles, qu’en présence des contestations élevées par la société LOCAM sur la pertinence des constatations du 6 novembre 2015, que la société FEELING DANCE ne rapporte pas la démonstration, qui lui incombe, que la caméra de vidéo-surveillance présentée ce jour-là à l’huissier de justice, est la même que celle objet du procès-verbal précité de réception du 31 octobre 2012 aux termes duquel le fournisseur et la locataire ont certifié la livraison de deux appareils (caméra et enregistreur) conforme à ce qui avait été commandé ;
Que pour soutenir que les contrats des 31 octobre et 16 novembre 2012 sont dépourvus de cause, au sens des articles 1126 et 1131 (anciens) du code civil, la société FEELING DANCE prétend que le matériel les concernant est fictif ;
Mais considérant que le document versé aux débats a été signé :
- le 31 octobre 2012, par la société FEELING DANCE en donnant mandat à la société VIATELEASE de conclure un contrat de location d’une caméra et d’un enregistreur (visés aux conditions particulières) d’une durée de 63 mois moyennant 21 loyers trimestriels d’un montant de 297 euros HT chacun (hors assurance) aux conditions générales de location VIATELEASE visées dans ledit document,
- le 16 novembre 2012, par la société LOCAM acceptant ainsi de devenir le bailleur selon les conditions de location visées au mandat de recherche, après avoir reçu la veille 15 novembre 2012 la facture du matériel concerné (centrale sécurité) d’un prix 4.927,01 euros HT, et dont il n’est pas contesté qu’il a été payé par le bailleur ;
Que le bail financier a ainsi été directement souscrit entre la société LOCAM (loueur) et la société FEELING DANCE (locataire), cette dernière ayant attesté, en signant sans réserve le procès-verbal de réception du 31 octobre 2012, avoir reçu livraison de la caméra et de l’enregistreur, conformément à ce qui était prévu, en en ayant vérifié le bon fonctionnement ;
Que ne rapportant nullement la preuve, qui lui incombe, que le matériel livré le 31 octobre 2012 était fictif, alors qu’elle l’a réceptionné sans réserve en certifiant sa conformité à la commande, la société FEELING DANCE est dès lors mal fondée à prétendre que le contrat de location serait nul pour défaut d’objet et de cause, étant au surplus observé que la mise en marche après livraison d’une caméra et de son enregistreur pour vérifier qu’ils fonctionnent effectivement et sont conformes à la commande, relève d’une manipulation normale opérable par le client ayant procédé à la location de ce type de matériel, sans nécessité d’une assistance particulière ;
Considérant encore qu’invoquant l’interdépendance des contrats d’un ensemble conventionnel comprenant une location financière, la société FEELING DANCE prétend tout à la fois que le bon de commande du matériel du 31 octobre 2012 serait nul et qu’il n’y a pas eu de maintenance, entraînant dans l’un et l’autre cas, la caducité du contrat de location ;
Mais considérant qu’il n’est pas contesté que le bon de commande a été passé avec la société COMPAGNIE FRANCAISE DE L’INNOVATION et qu’à défaut d’avoir été attraite dans la cause par la personne y ayant intérêt en raison des moyens de défense qu’elle soulève, la prétendue nullité du bon de commande ne peut pas être examinée et que ni le mandat du 31 octobre 2012, ni les conditions générale de location entérinées le 16 novembre suivant par la société LOCAM en signant le document, ne stipulent l’existence d’un contrat de maintenance, de sorte qu’à défaut, il n’existe pas d’interdépendance entre un engagement de maintenance d’un matériel et sa location ;
Que la société FEELING soutient aussi que les contrats du 31 octobre 2012 et du 16 novembre 2012 seraient nuls pour défaut de cause en raison de la fictivité alléguée du matériel livré ;
Mais considérant que la prétendue fictivité du matériel livré le 31 octobre 2012 n’a pas été démontrée, outre que la cause du mandat résidait uniquement dans la recherche d’un bailleur financier aux conditions de location fixées dans le mandat et que pour la société FEELING DANCE, la cause de la location souscrite réside dans la livraison du matériel qu’elle a reconnu en signant sans réserve le procès-verbal de réception du 31 octobre 2012 ;
Considérant aussi que la société FEELING soutient que la clause d’indemnité de résiliation égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu’à la fin initialement prévue de la location, augmentée d’une pénalité, est nulle en application de l’article L. 132-1 du code de la consommation, en ce que cette clause crée un déséquilibre significatif entre les engagements des parties ;
Mais considérant qu’il n’est pas contesté que le matériel litigieux a été affecté aux locaux de la société FEELING DANCE, de sorte que sa location était destinée à l’exercice professionnel de celle-ci et que le code de la consommation n’est pas applicable ;
Que, par ailleurs, la société FEELING DANCE n’est pas recevable à demander subsidiairement à la cour d’examiner cette même demande au regard de l’article L. 442-6 du code de commerce, la juridiction saisie en première instance n’étant pas compétente pour connaître d’une telle demande, dès lors qu’elle ne figure pas au rang des juridictions visées au tableau de l’annexe 4-2-1, de l’article D 442-3 du code de commerce, étant également surabondamment observé que le bailleur financier ayant à l’origine payé le prix du matériel sur la foi du procès-verbal de réception sans réserve signé par la société FEELING DANCE, le montant du loyer a été fixé entre les parties en fonction de l’amortissement sur la durée du bail du capital investi, majoré des intérêts pendant la même période et de la marge commerciale de l’opérateur financier, de sorte que la résiliation de la location avant le terme initialement prévu, cause un préjudice au bailleur financier qui n’est plus en mesure d’amortir la totalité de l’opération dans les conditions initialement prévues par les parties, et que l’indemnité contractuelle de résiliation égale à la somme des loyers restant à courir n’apparaît pas de nature à déséquilibrer significativement les engagements des parties ;
Considérant que les conditions générales de la location ne prévoient pas de clause pénale s’ajoutant aux intérêts de retard appliqués sur les loyers arriérés et que celle prévue à l’article 12-3 pour s’ajouter au montant de l’indemnité de résiliation est d’un taux de 6 % et non de 10 % comme figurant sur le décompte de la mise en demeure du 10 octobre 2014 ;
Que, par ailleurs, l’article 12-3 des conditions générales de location stipule « une indemnité égale à la somme des loyers restant à courir jusqu’au terme du contrat, taxes en sus » et qu’il s’en déduit :
- d’une part, que le calcul se fait à partir du montant HT des loyers (hors assurance),
- d’autre part, que, s’agissant d’une indemnité, la société LOCAM n’a pas justifié qu’elle était assujettie à la TVA ni à des « taxes en sus »,
- de sorte que le montant de l’indemnité de résiliation est égal à la somme des loyers HT restant à courir ;
Que la société FEELING DANCE s’oppose aussi au paiement de la clause pénale contractuelle ;
Mais considérant que l’intimée ne justifie pas de sa nullité et qu’il n’y a pas lieu d’en minorer le montant, dès lors que celui-ci, après la correction visée ci-dessus, n’apparaît pas manifestement excessif au sens de l’article 1152 (ancien) du code civil, mais qu’il conviendra, en revanche, d’en tenir compte pour apprécier l’équité dans l’indemnisation requise des frais irrépétibles ;
Qu’en application des clauses du contrat de location, la société FEELING DANCE est redevable des sommes suivantes en principal :
- 3 loyers impayés (30 mars, 30 juin et 30 septembre 2014) d’un montant de 370,59 euros TTC chacun (assurance comprise), soit la somme totale de 1111,77 euros,
- l’indemnité de résiliation égale à la somme des 13 loyers HT (et hors assurance) restant à courir du 30 décembre 2014 au 30 décembre 2017, soit la somme de 3.861 euros (297 x 13),
- clause pénale sur l’indemnité de résiliation (3.861 x 6 %), soit la somme de 231,66 euros,
- de sorte que la société FEELING DANCE demeure redevable de la somme globale de 5.204,43 euros (1111,77 + 3.861 + 231,66) en principal ;
Considérant que la société LOCAM requiert les intérêts au taux de la Banque centrale européenne (BCE) majoré de 10 points, visé à l’article L 441-6 du code de commerce, à compter du 10 octobre 2014, soit à dater de la mise en demeure de payer versée au dossier [pièce n° 6 de l’appelante], et qu’il s’en déduit que, ce faisant, elle a renoncé à l’application des intérêts de retard à compter de chaque échéance de loyer, mais que les dispositions de l’article précité L 441-6 du code de commerce étant supplétives, il convient d’appliquer le taux contractuel de 3 fois le taux légal, stipulé à l’article 4 des conditions générales de location, étant en outre observé que ladite mise en demeure ne porte que sur la somme globale de 1.256,60 euros, les autres sommes n’étant visées qu’à titre indicatif dans l’hypothèse où la mise en demeure resterait infructueuse ;
Que dès lors, la somme globale de 5.204,43 en principal, doit être majorée des intérêts au taux de 3 fois le taux légal à compter :
- du 10 octobre 2014, sur un montant de 1.256,60 euros,
- du 3 avril 2015 (date de l’assignation valant mise en demeure) sur le solde d’un montant de 3.947,83 euros (5.204,43 ‘1.256,60) ;
Que l’anatocisme des intérêts sera appliqué à compter du 3 avril 2015, date à laquelle elle a été judiciairement demandée dans l’acte introductif d’instance ;
Considérant aussi qu’il résulte des stipulations de l’article 16 des conditions générales de la location, que la restitution du matériel est à la charge et aux frais du locataire, mais qu’il n’y a pas lieu de l’assortir de l’astreinte sollicitée par le bailleur, ladite restitution ayant une valeur très symbolique compte tenu de l’ancienneté du matériel concerné et de sa rapide obsolescence ;
Que succombant en appel, la société FEELING DANCE ne peut pas prospérer dans sa demande d’indemnisation de ses frais irrépétibles et, compte tenu de la situation économique de l’intimée, telle qu’elle résulte des éléments disponibles dans le dossier et de l’application d’une clause pénale majorant le montant de l’indemnité de résiliation, il apparaît équitable de laisser à la charge définitive de la société LOCAM, les frais irrépétibles qu’elle a exposés depuis le début de l’instance ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
ÉCARTE des débats les notes en délibéré du 30 mai 2018,
INFIRME le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
DÉBOUTE la sarl FEELING DANCE de ses demandes de nullité des contrats, de remboursement des loyers antérieurement payés, de reprise du matériel à la charge et aux frais du bailleur et d’indemnisation de ses frais irrépétibles,
CONDAMNE la sarl FEELING DANCE à payer à la SAS LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS -LOCAM-, les sommes de :
- 1.256,60 euros, augmentés des intérêts à compter du 10 octobre 2014, au taux de trois fois le taux légal,
- 3.947,83 euros, augmentés des intérêts à compter du 3 avril 2015, au taux de 3 fois le taux légal,
ORDONNE la capitalisation annuelle des intérêts à partir du 3 avril 2015, dans les conditions prévues par l’article 1154 (ancien) du code civil,
CONDAMNE également la sarl FEELING DANCE à restituer sous un mois à compter de la signification du présent arrêt, à la SAS LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS, le matériel décrit dans le procès-verbal de réception du 31 octobre 2012, dans les conditions stipulées à l’article 16 des conditions générales de location,
DÉBOUTE la SAS LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS de ses demandes d’astreinte et d’indemnisation de ses frais irrépétibles,
CONDAMNE la sarl FEELING DANCE aux dépens de première instance et d’appel,
ADMET la selarl « Avocats E. B. & M. -ABM DROIT & CONSEIL- », avocat, au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le président
- 5907 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Exécution du contrat - Lieu et période d’exécution
- 5953 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation générale
- 5954 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par activité
- 5955 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par cour d’appel
- 6212 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Locations financières sans option d’achat
- 6392 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit postérieur aux arrêts de Chambre mixte