CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (25e ch. B), 30 mars 2007

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (25e ch. B), 30 mars 2007
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 25e ch. sect. B
Demande : 05/17563
Date : 29/03/2007
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : T. COM. EVRY (3e ch.), 1er juin 2005
Numéro de la décision : 116
Imprimer ce document

 

CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 772

CA PARIS (25e ch. B), 30 mars 2007 : RG n° 05/17563 ; arrêt n° 116

Publication : Juris-Data n° 331707

 

Extrait : « Considérant, cependant, que la société garage de X. soutient que constitueraient des clauses abusives les articles 10 et 11 du contrat de location, aux termes desquels la durée du contrat ne peut être inférieure à trois ans et celui-ci se renouvelle automatiquement pour une durée égale, sauf dénonciation six mois à l'avance, dans les cas où le client romprait le contrat en dehors des conditions prévues ou ne respecterait pas l'un quelconque des engagements qu'il a souscrits, notamment non paiement des factures ou entrave volontaire au fonctionnement du service de location, le contrat étant, dans ce dernier cas, résilié à ses torts et griefs ; Qu'elle fait valoir qu'il s'agit d'un contrat d'adhésion, que la société Alice était en mesure d'imposer à ses cocontractants petits commerçants du fait de sa position économique, dont l'économie ne se justifie pas, la clause pénale précitée, qualifiée de « monstrueuse », devant être réputée non écrite en application de l'article 1135 du code civil ;

Mais considérant que les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatives à la protection des consommateurs contre les clauses abusives ne s'appliquent pas aux contrats conclus entre professionnels, ce qui est le cas en l'espèce, la fourniture et l'entretien des combinaisons de travail de son personnel étant à l'évidence en relation directe avec l'activité de la société garage de X. ;

Que la société garage de X. ne fournit aucune démonstration des circonstances de fait qui l'auraient conduite à se voir imposer les clauses critiquées, ni des raisons pour lesquelles ces clauses seraient contraires à l'économie du contrat ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

VINGT CINQUIÈME CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 30 MARS 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/17563. Arrêt n° 116. Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er juin 2005 -Tribunal de Commerce d'EVRY - (3e ch.).

 

APPELANTE :

SARL ALICE exerçant sous l'enseigne SDEZ

agissant en la personne de son gérant [adresse], représentée par la SCP FANET - SERRA - GHIDINI, avoués à la Cour, assistée de Maître HASCOET, avocat au barreau d'ESSONNE

 

INTIMÉE :

SARL GARAGE DE X.

prise en la personne de son gérant [adresse], représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL, avoués à la Cour, assistée de Maître JOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D 754

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 février 2007, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame DELMAS-GOYON, conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur JACOMET, président ; Monsieur LAURENT-ATTHALIN, conseiller ; Madame DELMAS-GOYON, conseiller.

[minute page 2] Greffière, lors des débats : Madame MARTEYN.

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile. - signé par Monsieur Fabrice JACOMET, président et par Mme Marie-José MARTEYN, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 28 juin 1998, la société Alice a conclu avec la société garage de X. un contrat de location de vêtements de travail par lequel elle mettait à sa disposition 17 combinaisons et 2 sacs à linge et en assurait l'entretien, moyennant un coût mensuel forfaitaire de 579,91 francs, ce contrat étant conclu pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction à défaut de préavis donné six mois avant l'expiration du terme ; il s'est renouvelé au mois de juillet 2001 ;

La société garage de X. s'étant opposée à l'exécution du contrat au début de l'année 2002, la société Alice l'a mise en demeure de respecter ses obligations contractuelles par lettres des 22 février et 10 avril 2002, puis a constaté la rupture du contrat à ses torts exclusifs le 18 juin 2002, avec application des conditions de résiliation prévues dans les conditions générales de location ;

C'est dans ces conditions que la société Alice a assigné la société garage de X. devant le tribunal de commerce d'Evry qui, par jugement du 1er juin 2005, l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée payer à celle-ci la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Au soutien de sa décision, le tribunal a essentiellement retenu que,

- la société Alice, à qui il appartient de rapporter la preuve des faits nécessaires au succès de sa prétention, ne justifie pas par des bons de prise en charge, bons de livraison ou de mise à disposition de linge, ou tout autre élément de preuve, avoir exécuté ses obligations contractuelles, en sorte que l'inexécution contractuelle lui est imputable,

- la société garage de X. était donc en droit de ne plus respecter ses obligations de paiement, en sorte qu'il n'y a pas lieu de faire application de la clause pénale conventionnelle ;

Vu les conclusions déposées le 11 juillet 2006 par la société Alice, appelante, aux termes desquelles elle demande à la cour, infirmant ce jugement, de condamner la société garage de X. à lui payer les sommes de 4.994,54 €, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2002, 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

[minute page 3] Elle fait essentiellement valoir que la société garage de X. était pleinement informée de l'évolution du stock de vêtements mis à sa disposition par des bordereaux de mouvements de stock accompagnés d'avenants prenant les mouvements en compte pour modifier le forfait ;

Qu'aucune réclamation ne lui est parvenue, alors que les conditions générales de location précisent que pour être recevable, toute réclamation doit être adressée dans un délai de deux jours, l'inexécution par elle de ses obligations contractuelles, invoquée devant le tribunal, n'étant pas démontrée,

Vu les conclusions déposées le 3 avril 2006 par la société garage de X., intimée, par lesquelles elle demande à la cour de,

- déclarer abusives les clauses des articles 10 et 11 des conditions générales de location de la société Alice et la débouter de ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris,

à titre subsidiaire,

- constatant que la société Alice ne justifie pas avoir exécuté son obligation de mise à sa disposition permanente de combinaisons, dire qu'elle était en droit de ne plus assurer ses propres obligations,

- constatant que la société Alice a d'office réduit ses prétentions du chef de l'indemnité de rupture à la somme de 750 € et qu'elle ne justifie d'aucun préjudice du fait de la rupture, dire n'y avoir lieu à une quelconque indemnité de rupture,

en tout état de cause, condamner la société Alice à lui verser une indemnité de 1.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant que pour un exposé complet des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère aux énonciations du jugement déféré et aux écritures ci-dessus visées ;

Considérant que la société Alice verse aux débats des bordereaux de mouvements de stocks accompagnés d'avenants modifiant le montant du forfait hebdomadaire à payer, qui permettaient à la société garage de X. de suivre les livraisons qui lui étaient faites et la facturation correspondante, et qui sont de nature à justifier que des combinaisons propres pour son personnel ont bien été mises à sa disposition ;

Qu'en outre, les conditions générales de location acceptées par la société garage de X. prévoyaient à l'article 2, qui décrit le fonctionnement du service, que pour être recevable, toute réclamation doit être adressée dans un délai de deux jours ;

Qu'il n'est pas justifié, ni même allégué, par la société garage de X. qu'elle ait jamais dénoncé auprès de la société Alice l'absence de ramassage des combinaisons sales ou de livraison des combinaisons propres, alors qu'elle a payé les factures correspondant au service rendu jusqu'au début de l'année 2002 ;

[minute page 4] Considérant, en conséquence, qu'il est suffisamment justifié par la société Alice de l'exécution de ses obligations contractuelles ;

Que l'initiative prise par la société garage de X. de résilier unilatéralement le contrat en dehors des cas de résiliation contractuellement définis, ce qu'elle ne conteste pas, était susceptible d'entraîner l'application des dispositions de l'article 11 des conditions générales de location ;

Considérant, cependant, que la société garage de X. soutient que constitueraient des clauses abusives les articles 10 et 11 du contrat de location, aux termes desquels la durée du contrat ne peut être inférieure à trois ans et celui-ci se renouvelle automatiquement pour une durée égale, sauf dénonciation six mois à l'avance, dans les cas où le client romprait le contrat en dehors des conditions prévues ou ne respecterait pas l'un quelconque des engagements qu'il a souscrits, notamment non paiement des factures ou entrave volontaire au fonctionnement du service de location, le contrat étant, dans ce dernier cas, résilié à ses torts et griefs ;

Qu'elle fait valoir qu'il s'agit d'un contrat d'adhésion, que la société Alice était en mesure d'imposer à ses cocontractants petits commerçants du fait de sa position économique, dont l'économie ne se justifie pas, la clause pénale précitée, qualifiée de « monstrueuse », devant être réputée non écrite en application de l'article 1135 du code civil ;

Mais considérant que les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatives à la protection des consommateurs contre les clauses abusives ne s'appliquent pas aux contrats conclus entre professionnels, ce qui est le cas en l'espèce, la fourniture et l'entretien des combinaisons de travail de son personnel étant à l'évidence en relation directe avec l'activité de la société garage de X. ;

Que la société garage de X. ne fournit aucune démonstration des circonstances de fait qui l'auraient conduite à se voir imposer les clauses critiquées, ni des raisons pour lesquelles ces clauses seraient contraires à l'économie du contrat ;

Que les dispositions de l'article 11 des conditions générales de location sont applicables en l'espèce ;

Qu'il n'est pas non plus démontré que la clause pénale telle qu'acceptée par la société garage de X. en signant le contrat serait manifestement excessive et qu'il conviendrait de la modérer ;

Qu'enfin, la société garage de X. ne saurait se prévaloir de la proposition qui lui a été faite par la société Alice d'une indemnité de résiliation d'un montant inférieur lors de sa tentative d'aboutir à un accord transactionnel, à laquelle elle n'a pas souhaité donner suite ;

Considérant qu'il s'ensuit que la société garage de X. doit être condamnée à payer à la société Alice la somme de 4.994,54 €, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2002, date de la mise en demeure de payer, la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée étant rejetée en l'absence de préjudice établi ;

Considérant, par ailleurs, qu'en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, il convient de condamner la société garage de X. à payer à la société Alice une indemnité de 2.500 € pour les frais exposés par elle, tant en première Instance qu'en appel ;

[minute page 5] Que la société garage de X. sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société garage de X. à payer à la société Alice la somme de 4.994,54 €, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2002, ainsi que 2.500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne la société garage de X. aux entiers dépens de première instance et d'appel, et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE                     LE PRÉSIDENT