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CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 13 décembre 2018

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 13 décembre 2018
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 1re ch.
Demande : 16/06428
Date : 13/12/2018
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 25/10/2016
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7844

CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 13 décembre 2018 : RG n° 16/06428 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Il résulte de l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls, que le contrat soit à durée indéterminée ou non.

Pour s'opposer au principe même de résiliation, la société invoque les stipulations de l'article 5.3 alinéa 2 des conditions générales d'abonnement de télésurveillance et de location de matériel, selon lesquelles « si le bien est atteint de vices rédhibitoires ou cachés ou en cas de détérioration ou de fonctionnement défectueux, de mauvais rendement ou dommage quelconque causé par ce bien, le locataire renonce à tout recours contre le loueur, que ce soit pour obtenir des dommages-intérêts, la résiliation ou la résolution du contrat et ne pourra différer au prétexte de cette contestation de sa part aucun règlement de loyer (…) En contrepartie de cette renonciation (...) le loueur lui transmet la totalité des recours contre le constructeur ou le fournisseur. » Mais ce moyen est inopérant, dès lors que M. B., qui avait souscrit à l'option « Maintenance » reprochait essentiellement à la société DAT Security de ne pas intervenir chez lui pour remédier au dysfonctionnement de certains éléments du système de télésurveillance, ce qui constituait un manquement aux articles 3 et 11.1 des conditions particulières du contrat de télésurveillance, selon lequel « dans le cas où l'abonné a souscrit à l'option maintenance, le prestataire s'engage à assurer pendant toute la durée du contrat la maintenance du seul matériel qu'il aura fourni et installé (…) Les interventions de maintenance sont effectuées sur demande de l'abonné, en cas d'anomalie de fonctionnement ».

La société se fonde en second lieu sur l'article 5.4 des mêmes conditions, selon lesquelles « tant qu'il n'y a pas résolution judiciaire du contrat de vente, le locataire est tenu de respecter les conditions de la location et notamment de payer les loyers aux échéances prévues. » Elle invoque également l'article 14 des mêmes conditions particulières, selon lesquelles le contrat prend fin à l'issue d'une période irrévocable et indivisible de 36 ou 48 mois d'après les conditions choisies (48 mois en l'espèce). Il convient en outre de relever que le professionnel dispose pour sa part, selon les stipulations de l'article 10-1 a) des conditions générales du contrat d'abonnement, « d'une faculté de résiliation de plein droit, sans aucune formalité, en cas de non-paiement ne serait-ce que partiel à sa date d'exigibilité d'une seule échéance du loyer et de l'abonnement et/ou de maintenance ou de prestations, comme en cas d'inexécution de l'une quelconque des conditions du présent contrat, le locataire étant constitué en demeure par le seul effet du contrat. » Dès lors qu'elle se termine par une mise en demeure du locataire, il est évident que la clause est stipulée au seul bénéfice du loueur. En outre, par application de l'article 10-1 b) des mêmes conditions, le contrat pouvait être résilié de plein droit, sans aucune formalité, « à la convenance du loueur nonobstant l'exécution de toutes ses obligations contractuelles, en cas de diminution des garanties et sûreté, liquidation amiable ou judiciaire, redressement judiciaire, déconfiture, décès du client, cessation d'activité partielle ou totale, cession amiable ou forcée du fonds de commerce, aliénation du bien, changement de forme sociale ».

En application des dispositions de l'article L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au 29 janvier 2015 (devenus article L. 212-1 et R. 212-1), ces clauses 5.4 et 14, insérées dans un contrat d'adhésion entre professionnel et consommateur, et qui n'envisagent aucune possibilité de rupture anticipée du contrat alors que le professionnel se réserve une faculté de réalisation du contrat notamment « à sa convenance » même en l'absence de manquement de son co-contractant à ses engagements doivent être regardées de manière irréfragable comme abusives et non-écrites, en ce qu'elles portent une atteinte grave à l'équilibre du contrat, en privant le consommateur d'une possibilité de résiliation unilatérale du contrat avant saisine du juge, en dépit du manquement du professionnel à une obligation de fourniture de services à savoir en l'espèce la maintenance des matériels. »

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2018