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CA PARIS (25e ch. sect. A), 23 septembre 2005

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (25e ch. sect. A), 23 septembre 2005
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 25e ch. sect. A
Demande : 04/06998
Date : 23/09/2005
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : TI PALAISEAU, 20 janvier 2004
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 789

CA PARIS (25e ch. sect. A), 23 septembre 2005 : RG n° 04/06998

Publication : Juris-Data n° 282525

 

Extraits : 1/ « Considérant qu'en l'espèce, les bons de commande passés par les époux X. auprès de la SA VGC DISTRIBUTION prévoient le règlement de la totalité du prix, déduction faite des acomptes versés d'un montant total de 5.560 euros, au jour de la livraison des objets mobiliers vendus ; que le prix total de 14.790 euros ne comprend cependant pas le seul prix de vente des équipements mais, pour plus de 40 %, le coût des travaux d'installation ;

Que de telles modalités de paiement, dont les époux X. n'ont pu mesurer l'exacte incidence lors de la conclusion des contrats qu'ils ont signés avec un marchand d'éléments de cuisine et de salle de bains, créent un déséquilibre significatif à leur détriment dans la mesure où elles les contraignent à exécuter la totalité de leurs obligations alors même que leur cocontractant, en charge des travaux d'installation pour le prix en l'espèce important d'environ 6.000 euros, n'a pas commencé ceux-ci ; qu'elles sont de nature à les priver d'une garantie à l'achèvement des travaux ou à la levée des réserves ;

Considérant que le premier juge a estimé à bon droit qu'il s'agissait d'une clause abusive dans la mesure où l'importance des versements sollicités ne correspond pas à l'exécution successive des prestations prévues au contrat et qu'elle devait être réputée non écrite ».

2/ « Considérant que la livraison n'ayant pas été effectuée et la SA VGC DISTRIBUTION ne s'étant acquittée d'aucune de ses obligations, le jugement déféré a exactement prononcé la résolution des contrats et remis les parties en l'état en condamnant l'appelante à restituer les acomptes versés au titre des bons de commande et de l'avenant relatif aux travaux de peinture ».

 

COUR D’APPEL DE PARIS

VINGT CINQUIÈME CHAMBRE SECTION A

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 04/06998. Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 janvier 2004 - Tribunal d'Instance de PALAISEAU - RG n° 200300765.

 

APPELANTE :

SA VGC DISTRIBUTION exerçant sous l'enseigne VOGICA

prise en la personne de ses représentants légaux, [adresse], représentée par Maître Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour, ayant Maître POSOKHOW-DEPECKER avocat au barreau de Versailles

 

INTIMÉS :

- Monsieur X.

[adresse]

- Madame Y. épouse X.

[adresse], représentés par Maître Lionel MELUN, avoué à la Cour, assistés de Maître ALTMANN Karine, toque B673

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 juin 2005 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame BLUM magistrat chargé du rapport. [minute page 2] Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jean Paul BETCH, président, Madame Martine PROVOST-LOPIN, conseillère, Madame Odile BLUM, conseillère.

Greffière, lors des débats : Madame Marie Claude GOUGE.

Arrêt : - contradictoire - prononcé publiquement par Monsieur BETCH Président - signé par Monsieur BETCH Président et par Madame GOUGE greffière présente lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La SA VGC DISTRIBUTION a interjeté appel d'un jugement rendu le 20 janvier 2004 par le tribunal d'instance de Palaiseau qui a :

- dit que la clause prévoyant le versement du solde du prix de vente à la livraison est une clause abusive et que cette clause est en conséquence réputée non écrite ;

- constaté que la livraison n'est pas intervenue dans le délai prévu et que cette inexécution est imputable à la société VGC DISTRIBUTION ;

- prononcé la résolution judiciaire des contrats de livraison et d'installation de sanitaires, cuisine et salle de bains équipées, conclus entre les parties ;

- condamné la société VGC DISTRIBUTION à restituer à Monsieur X. et à Madame Y. épouse X. la somme de 5.740 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2003 ;

- ordonné la capitalisation des intérêts dus depuis au moins une année entière ;

- débouté Monsieur et Madame X. de leur demande de dommages et intérêts ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- condamné la société VGC DISTRIBUTION à payer à Monsieur et Madame  X. la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Cette décision a été rendue dans un litige opposant les parties à la suite des commandes successivement passées par les époux X., les 25 janvier et 28 mars 2003, auprès de la SA VGC DISTRIBUTION à l'enseigne VOGICA, pour la fourniture et l'installation d'une cuisine équipée ainsi que de sanitaires moyennant un prix total, travaux compris, de 14.790 euros puis de leur refus de régler le solde de la totalité du prix au jour prévu pour la livraison des meubles qui, pour cette raison, n'est pas intervenue.

[minute page 3] Au soutien de son recours et par ses conclusions du 25 juin 2004, la SA VGC DISTRIBUTION fait valoir que le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant à toutes les circonstances qui entourent la conclusion du contrat et que prévaut l'acceptation libre et en toute connaissance de cause de cette clause par le consommateur qui ne saurait utiliser son caractère prétendument abusif pour revenir sur un engagement librement consenti ; que les époux X. qui ont eu connaissance à plusieurs reprises des modalités de paiement et ont réitéré à trois reprises leur acceptation, ont soulevé de mauvaise foi, le jour de la livraison, le caractère prétendument abusif de la clause ; qu'au surplus, la clause réputée abusive n'entraîne qu'une nullité partielle, le contrat demeurant applicable en toutes ses autres dispositions ; que la résolution de l'intégralité du contrat a été prononcée à tort et qu'il n'a jamais été démontré que l'exécution des conventions était impossible.

Concluant à l'infirmation du jugement, elle demande en conséquence à la Cour, au visa de l'article 1184 du Code civil, d'ordonner l'exécution forcée des contrats de vente et de condamner solidairement Monsieur et Madame X., outre au paiement de la somme de 1.500 euros pour frais irrépétibles, à :

- lui verser la somme de 9.230 euros représentant le solde du prix de vente,

- fixer un rendez-vous au livreur dans les huit jours de la signification de la décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai,

- fixer un rendez-vous avec elle pour assurer la pose de la cuisine dans les huit jours du passage du livreur, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai.

Par leurs dernières conclusions du 20 septembre 2004 auxquelles il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé, Monsieur X. et Madame Y., son épouse, objectent que la clause obligeant le non professionnel à exécuter son obligation alors que le professionnel n'aurait pas exécuté les siennes est une clause abusive ; qu'eu égard à la nature de la clause, elle remet en cause l'équilibre contractuel du contrat et justifie sa résolution judiciaire ; que ne bénéficiant toujours pas de l'ensemble cuisine, salle de bains et toilettes qui devait être livré au plus tard le 30 avril 2003, ils subissent un préjudice important.

Ils sollicitent la confirmation du jugement à l'exception des dommages et intérêts et la condamnation de la SA VGC DISTRIBUTION à leur payer 4.000 euros à titre de dommages et intérêts ainsi que 5.311 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

CELA EXPOSÉ :

Considérant que par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les parties contractantes ;

Que le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat ;

Que les clauses abusives sont réputées non écrites ;

[minute page 4] Considérant qu'en l'espèce, les bons de commande passés par les époux X. auprès de la SA VGC DISTRIBUTION prévoient le règlement de la totalité du prix, déduction faite des acomptes versés d'un montant total de 5.560 euros, au jour de la livraison des objets mobiliers vendus ; que le prix total de 14.790 euros ne comprend cependant pas le seul prix de vente des équipements mais, pour plus de 40 %, le coût des travaux d'installation ;

Que de telles modalités de paiement, dont les époux X. n'ont pu mesurer l'exacte incidence lors de la conclusion des contrats qu'ils ont signés avec un marchand d'éléments de cuisine et de salle de bains, créent un déséquilibre significatif à leur détriment dans la mesure où elles les contraignent à exécuter la totalité de leurs obligations alors même que leur cocontractant, en charge des travaux d'installation pour le prix en l'espèce important d'environ 6.000 euros, n'a pas commencé ceux-ci ; qu'elles sont de nature à les priver d'une garantie à l'achèvement des travaux ou à la levée des réserves ;

Considérant que le premier juge a estimé à bon droit qu'il s'agissait d'une clause abusive dans la mesure où l'importance des versements sollicités ne correspond pas à l'exécution successive des prestations prévues au contrat et qu'elle devait être réputée non écrite ;

Considérant que c'est vainement que la SA VGC DISTRIBUTION se prévaut de l'absence de protestation des époux X. avant le jour de la livraison ;

Qu'il ressort de sa propre correspondance que les époux X. refusant légitimement de régler la totalité du prix à la seule livraison des meubles et avant tout début d'exécution des travaux, ont proposé un règlement partiel ;

Que la SA VGC. DISTRIBUTION n'est dès lors pas fondée à invoquer leur prétendue mauvaise foi ;

Considérant que la livraison n'ayant pas été effectuée et la SA VGC DISTRIBUTION ne s'étant acquittée d'aucune de ses obligations, le jugement déféré a exactement prononcé la résolution des contrats et remis les parties en l'état en condamnant l'appelante à restituer les acomptes versés au titre des bons de commande et de l'avenant relatif aux travaux de peinture ;

Considérant que le procès verbal de constat d’huissier en date du 30 mars 2004, produit par les époux X. à l'appui de leur demande de dommages et intérêts, ne fait que montrer l'absence à cette date de travaux de rénovation dans leur appartement et n'est pas à lui seul de nature à établir la réalité du préjudice qu'ils allèguent et qui serait directement imputable à la S.A. VGC DISTRIBUTION ;

Considérant, pour ces motifs et ceux des premiers juges que la Cour fait siens, que l'intégralité de l'argumentation développée par les parties devient inopérante et qu'il convient de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

[minute page 5] Considérant que l'équité qui a dicté l'attribution aux époux X. d'une somme de 500 euros pour les frais hors dépens exposés en première instance, conduit à leur allouer en cause d'appel une somme supplémentaire de 2.000 euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la demande de la SA VGC DISTRIBUTION à ce titre étant rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Y ajoutant

Condamne la SA VGC DISTRIBUTION à payer à Monsieur et Madame X. la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Rejette toutes demandes autres ou contraires aux motifs ;

Condamne la SA VGC DISTRIBUTION au paiement des dépens d'appel avec admission de l'avoué concerné au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.