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CASS. CIV. 1re, 10 avril 2019

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 10 avril 2019
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 17-20722
Décision : 19-357
Date : 10/04/2019
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:C100357
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. B), 4 mai 2017
Numéro de la décision : 357
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8003

CASS. CIV. 1re, 10 avril 2019 : pourvoi n° 17-20722 ; arrêt n° 357

Publication : Legifrance

 

Extraits : 1/ « Mais attendu que l’arrêt énonce exactement qu’une clause d’indexation fondée sur une monnaie étrangère est valide, à condition, notamment, d’être en relation directe avec l’activité de l’un des cocontractants ; qu’il constate que la clause d’indexation litigieuse est en relation directe avec l’activité de banquier de la société Jyske Bank A/S ; que la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que la clause litigieuse, fût-elle afférente à une opération purement interne, était licite ; que le moyen n’est pas fondé. »

2/ « Attendu que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que le juge national est tenu d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu’il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l’applique pas, sauf si le consommateur s’y oppose (CJCE, arrêt du 4 juin 2009, Pannon, C-243/08) ».

3/ « Attendu que l’arrêt valide la clause d’indexation, en retenant qu’elle est en relation directe avec l’activité de la banque ; Qu’en se déterminant ainsi, alors qu’il résultait des éléments de fait et de droit débattus devant elle que, selon le contrat litigieux, toute dépréciation de l’euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence de majorer le coût du prêt, sans qu’aucun plafond ne soit fixé, de sorte qu’il lui incombait, à supposer que la clause de monnaie étrangère ne définisse pas l’objet principal du contrat ou, dans le cas contraire, qu’elle ne soit pas rédigée de façon claire et compréhensible, de rechercher d’office si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur l’emprunteur, et si, en conséquence, ladite clause n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 10 AVRIL 2019

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 17-20722. Arrêt n° 357.

DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X.

DÉFENDEUR à la cassation : Société Jyske Bank A/S

Mme Batut (président), président. SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, suivant offre acceptée le 7 janvier 2008, la société Jyske Bank A/S (la banque) a consenti à M. X. (l’emprunteur) un prêt multi-devises de 1.500.000 euros ou « l’équivalent, à la date de tirage du prêt, dans l’une des principales devises européennes, dollars américains ou yens japonais » ; que le prêt a été tiré pour un montant de 2.389.500 francs suisses ; que, le 9 août 2011, la banque a procédé à la conversion du prêt en euros ; qu’invoquant l’irrégularité d’une telle conversion et le manquement de la banque à ses obligations d’information et de mise en garde, l’emprunteur l’a assignée en annulation de la conversion, en déchéance du droit aux intérêts pour l’avenir et en paiement de dommages-intérêts ;

 

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que l’emprunteur fait grief à l’arrêt de dire que l’obligation de remboursement du prêt a été souscrite en francs suisses, que les échéances du prêt doivent être calculées et remboursées dans cette devise et de le condamner à payer à la banque une certaine somme au titre du prêt, alors, selon le moyen, qu’une clause d’indexation sur une monnaie étrangère n’est valable que lorsqu’elle est en relation directe avec l’objet du contrat ou avec l’activité de l’une des parties ; que ne présente pas de lien avec l’activité de l’une des parties la clause, contenue dans un prêt consenti par une banque pour financer le remboursement de dettes contractées en France, par un emprunteur français, domicilié en France, indexant le montant du remboursement du prêt consenti à une monnaie étrangère ; qu’en l’espèce, la clause d’indexation sur le franc suisse était contenue dans un prêt consenti par la banque, à l’emprunteur français et domicilié en France, et destiné à rembourser un précédent emprunt et à purger une hypothèque pour un bien situé en France ; qu’en retenant, pour considérer cette clause comme licite, que le prêteur avait la qualité de banquier, tandis que cette circonstance n’était pas de nature, compte tenu du caractère purement interne du prêt, à caractériser un lien direct entre la clause et l’activité de la banque, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé l’article L. 112-2 du code monétaire et financier ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu que l’arrêt énonce exactement qu’une clause d’indexation fondée sur une monnaie étrangère est valide, à condition, notamment, d’être en relation directe avec l’activité de l’un des cocontractants ; qu’il constate que la clause d’indexation litigieuse est en relation directe avec l’activité de banquier de la société Jyske Bank A/S ; que la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que la clause litigieuse, fût-elle afférente à une opération purement interne, était licite ; que le moyen n’est pas fondé ;

 

Sur le second moyen :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que l’emprunteur fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts pour manquement de la banque à ses obligations d’information et de mise en garde, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu’en l’espèce, l’emprunteur, pour établir que la banque lui avait fait souscrire un emprunt de 1.500.000 euros tandis que ses besoins étaient de 510.000 euros, avait produit un récapitulatif établi le 7 janvier 2008 des sommes qu’il devait rembourser avec le prêt souscrit auprès de la banque qui mentionnait la somme totale de 510 766 euros correspondant à ses besoins et la preuve du versement de la somme de 903.981,87 euros qui avait été affectée sur des placements destinés à garantir l’emprunt ; que la cour d’appel, en affirmant que l’emprunteur ne produisait aucune pièce démontrant que la banque l’aurait de quelque manière que ce soit incité ou forcé à emprunter plus que ce qu’il souhaitait, tandis que ces documents établissaient qu’il n’avait besoin que d’un prêt d’un montant de 510.000 euros et non de 1.500.000 euros, la cour d’appel a dénaturé, par omission, les documents ainsi produits, en violation du principe susvisé et de l’article 4 du code de procédure civile ;

2°/ qu’un établissement bancaire prêteur de deniers est tenu d’une obligation de mise en garde à l’égard de l’emprunteur non averti à raison de ses capacités financières et des risques de l’endettement né de l’octroi du prêt ; que, pour exclure l’existence d’un manquement de la banque, la cour d’appel a retenu que l’emprunteur percevait un salaire annuel de 9.191 euros mensuels avec un revenu net de 5.145 euros après impôt, qu’il disposait aussi d’une maison et de dividendes versés par sa société, de sorte que l’emprunteur n’avait « pas contracté un endettement excessif par rapport à ses capacités financières » ; qu’en statuant ainsi, sans prendre en compte, comme demandé, pour apprécier l’existence d’un manquement, le risque engendré par la clause de monnaie étrangère qui indexait le prêt sur le taux de change franc suisse/euro, les mensualités étant susceptibles d’augmenter considérablement au cours du prêt souscrit sur une durée de trente-cinq années, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu 1231-1 du même code ;

3°/ qu’un établissement bancaire prêteur de deniers est tenu d’une obligation de mise en garde à l’égard de son client sur les risques encourus lors d’opérations spéculatives ; que le prêt de la banque, qui, au moyen de la clause de monnaie étrangère indexait le capital à rembourser sur l’évolution des taux de change franc suisse/ euros, exposait l’emprunteur à un risque considérable, qui s’est réalisé, d’augmentation très importante du capital (+52 %) à rembourser et corrélativement des intérêts calculés sur ce capital ; que la cour d’appel, pour estimer que la banque avait satisfait à ses obligations, a considéré « qu’un prêt libellé en devise n’était pas un produit spéculatif » qui ne « constituait pas un projet sortant du commun » ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher si la circonstance que l’emprunteur qui avait souscrit en 2007 un prêt d’un montant de 1.500.000 euros se voyait désormais réclamer par la banque un capital de 2.288.135,59 euros sur lequel les intérêts étaient calculés, correspondant à une augmentation de 52 % depuis la date de souscription, était de nature à établir le caractère particulièrement dangereux et spéculatif du prêt, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu 1231-1 du même code ;

4°/ qu’en toute hypothèse, lorsque le prêt consenti revêt une nature complexe et est de nature à créer un risque particulier pour l’emprunteur, le banquier prêteur, tenu d’informer l’emprunteur, ne peut se contenter de présenter à l’emprunteur le fonctionnement du prêt, mais doit attirer son attention sur les risques particuliers que lui fait encourir le prêt envisagé ; qu’en l’espèce, en se fondant, pour écarter la responsabilité de la banque pour manquement à son obligation d’information sur la déclaration de compréhension signée le 9 octobre 2007 et sur le document du 26 octobre 2007 qui informaient que souscrire un prêt en devise étrangère pouvait être un risque important, tandis que ces documents décrivaient en termes neutres les conséquences que pouvaient avoir la souscription d’un tel prêt et ne permettaient pas à l’emprunteur d’apprécier concrètement le risque financier auquel il s’exposait, comme celui de devoir rembourser 52 % de capital en plus avec des intérêts calculés sur cette somme ; qu’il résultait de ces constatations que ces documents n’informaient pas précisément l’attention de l’emprunteur sur le risque, qui s’est réalisé peu de temps après la souscription du prêt, d’augmentation du capital lié à l’évolution du taux de change, de sorte que la cour d’appel, en jugeant que la banque avait correctement rempli son devoir d’information, a violé l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu 1231-1 du même code ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu que l’arrêt relève que l’emprunteur disposait, au jour de la souscription du prêt, d’un revenu mensuel de 5.145 euros après paiement de l’impôt, était propriétaire de sa résidence principale d’une valeur nette de 1.283.100 euros et avait perçu des dividendes à hauteur de 100.000 euros au titre de la période courant du 17 novembre 2005 au 31 décembre 2006, ce dont il déduit l’absence d’un risque d’endettement excessif ; qu’il constate qu’au regard d’une « déclaration de compréhension » signée le 9 octobre 2017 et d’une lettre qui lui a été adressée par la banque le 26 octobre suivant, l’emprunteur a été clairement informé du mode de fonctionnement du prêt et des risques inhérents à la dépréciation de l’euro par rapport au franc suisse, dont le prêteur ne pouvait imaginer l’ampleur à compter de l’année 2010 ; que, par ces constatations et appréciations, la cour d’appel a, sans encourir le grief de dénaturation ni avoir à procéder à des recherches que l’évaluation du risque d’endettement excessif au jour de la conclusion du contrat et l’absence de caractère spéculatif de l’opération rendaient inutiles, légalement justifié sa décision de ce chef ;

 

Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article L. 132-1, devenu L. 212-1 du code de la consommation ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que le juge national est tenu d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu’il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l’applique pas, sauf si le consommateur s’y oppose (CJCE, arrêt du 4 juin 2009, Pannon, C-243/08) ;

Attendu qu’aux termes du texte susvisé, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que l’appréciation du caractère abusif de ces clauses ne concerne pas celles qui portent sur l’objet principal du contrat, pour autant qu’elles soient rédigées de façon claire et compréhensible ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que l’arrêt valide la clause d’indexation, en retenant qu’elle est en relation directe avec l’activité de la banque ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu’en se déterminant ainsi, alors qu’il résultait des éléments de fait et de droit débattus devant elle que, selon le contrat litigieux, toute dépréciation de l’euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence de majorer le coût du prêt, sans qu’aucun plafond ne soit fixé, de sorte qu’il lui incombait, à supposer que la clause de monnaie étrangère ne définisse pas l’objet principal du contrat ou, dans le cas contraire, qu’elle ne soit pas rédigée de façon claire et compréhensible, de rechercher d’office si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur l’emprunteur, et si, en conséquence, ladite clause n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il dit que l’obligation de remboursement du prêt litigieux a été souscrite en francs suisses, dit que les échéances doivent être calculées et remboursées en francs suisses conformément aux stipulations de l’offre et du contrat de prêt, et condamne M. X. à payer à la société Jyske Bank A/S la somme, arrêtée au 13 janvier 2017, de 225.618,58 francs suisses au titre des intérêts impayés du prêt ou sa contre-valeur en euros, l’arrêt rendu le 4 mai 2017, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon ;

Condamne la société Jyske Bank A/S aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X. la somme de 3.000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille dix-neuf.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyens produits par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour M. X.

 

PREMIER MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l’arrêt d’AVOIR dit que l’obligation de remboursement du prêt de 1.500..000 € contracté par M. X. avait été souscrite en devises CHF (francs suisses), soit en nominal un capital de 2.389.500 CHF, d’AVOIR jugé que les échéances d’intérêts, puis celles en capital devaient être calculées et remboursées en CHF conformément aux stipulations de l’offre et du contrat de prêt, d’AVOIR condamné M. X. à payer à la Jyske Bank la somme arrêtée au 13 janvier 2017 de 225.618,85 CHF outre des intérêts impayés du prêt ou sa contre-valeur en euros au jour du présent arrêt sauf à parfaire ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l’obligation de remboursement M. X. soutient que son engagement a été souscrit en euros et que c’est sur la base de cette souscription que ses obligations de remboursement et d’intérêts devaient fixer, indépendamment du tirage de la somme prêtée, conformément à l’article 1895 du code civil selon lequel l’obligation qui résulte d’un prêt en argent n’est toujours que de la somme numérique énoncée au contrat ; qu’il ajoute qu’en application de l’article L. 111-1 du code monétaire et financier complété par l’arrêté du 3/12/1987 relatif à l’information du consommateur sur les prix, la monnaie du contrat doit être exprimée en euros de sorte qu’un prêt en francs suisses aurait été en tout état de cause illicite ; qu’il souligne à cet égard que l’offre de Jyske Bank est exclusivement en euros, ainsi que le nominal, les intérêts, le tableau d’amortissement, les garanties du prêt, de manière logique s’agissant d’un prêt à un consommateur français, sans lien personnel ou professionnel avec la Suisse et qui, lors du questionnaire préalable, avait précisé que l’euro était sa monnaie de référence ; qu’il précise que la référence à d’autres devises ne concerne que le tirage qui n’a aucune influence sur l’étendue de l’obligation souscrite, sauf à vouloir faire du prêt un contrat réel ; qu’il considère enfin que le franc suisse n’était pas une devise principale, mais une monnaie refuge en période de crise, ni européenne, les seules monnaies européennes étant, outre l’euro, la livre sterling et la couronne suédoise ; qu’il en déduit que le premier juge qui s’est livré à une interprétation du contrat de prêt, inutile, erronée et contraire à l’article 1162 du code civil imposant en cas de doute une interprétation dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non professionnel, aurait dû dire que son engagement était fixé à 1.500.000 € en nominal et que l’échéancier et les modalités de remboursement du prêt étaient établis en euros ; que sur la validité de la clause de monnaie étrangère, la stipulation d’une obligation en monnaie étrangère est licite dès lors qu’elle est prévue, non comme instrument de paiement, mais comme unité de compte ; que cette clause de monnaie étrangère est valide si elle est insérée dans un contrat international, et valide, mais à la condition notamment d’être en relation directe avec l’activité de l’un des cocontractants, si elle est insérée dans un contrat de droit interne ; qu’à cet égard, l’intimée ayant la qualité de banquier, la clause est en relation directe avec son activité de sorte que sa validité doit être retenue indépendamment du point de savoir si le contrat est international ou non ; que sur le choix du franc suisse, dès la déclaration de compréhension du 10/10/2007, antérieure à la signature du contrat de prêt, M. X. a « demandé à ce que l’emprunt soit inscrit en CHF et, ensuite, converti et versé en EUR », et par courrier du 26/10/2007, la Jyske Bank lui a confirmé son approbation sur le principe de sa demande de prêt et l’option ainsi choisie ; que de la sorte, l’offre du 13/12/2007, reprise par le contrat notarié, précise que : le prêt est de 1.500.000 E ou l’équivalent, à la date de tirage du prêt, dans l’une des principales devises européennes, dollars américains ou yens japonais, il s’agit d’un prêt multi devises, initialement en euros, l’emprunteur a la faculté de choisir d’effectuer un tirage en monnaie étrangère ; que cette clause permettant d’opter pour l’une de ces devises justifie que le choix de la monnaie de compte ne figure ni dans l’offre de prêt ni dans l’acte authentique ; que dès lors, le choix d’une monnaie de compte différente de la devise initiale mentionnée au contrat n’est que l’exercice d’une faculté prévue dès l’origine par le contrat et ce n’est par conséquent pas la remise des fonds qui fait naître les droits et obligations des parties, mais bien la signature du contrat de prêt ; que l’exercice de l’option ouverte par le contrat et le choix subséquent de la devise CHF ne constituent donc pas un acte d’exécution postérieur à la rencontre des volontés, mais l’exercice d’une prérogative contractuelle qui engage l’emprunteur ; que le moyen de l’appelant selon lequel le tribunal a fait du prêt un contrat réel en définissant ses obligations en fonction des conditions du tirage, est donc inopérant ; qu’il en résulte, sans besoin d’une interprétation du contrat, que M. X. qui a opté pour des francs suisses, a utilisé ceux-ci comme monnaie de compte puisque le prêt a été tiré en francs suisses, que les intérêts ont été calculés en francs suisses et que le capital restant dû était exprimé en francs suisses ; que par ailleurs, lors des échanges précontractuels entre les parties puis lors de la signature de l’acte authentique et enfin lors du tirage du prêt, l’emprunteur n’a pas discuté le fait que le franc suisse, qu’il a spécifiquement choisi, est l’une des principales devises européennes ; qu’il n’a pas non plus émis la moindre contestation ni la moindre objection en recevant la lettre de libération du prêt du 7/04/2008 mentionnant « montant en principal : CHF 2.389.500,00 » ; qu’au demeurant, l’ensemble des documents financiers et économiques produits par les deux parties et notamment l’article sur les volumes d’échanges sur le Forex, confirment que le CHF constitue bien « l’une des principales devises européennes » qui ne se limitent pas à celles des Etats membres de l’Union Européenne ; que c’est donc à bon droit que le premier juge a considéré que le franc suisse est une devise importante en Europe ; que d’autre part, la Jyske Bank souligne à juste titre qu’il importe peu qu’après le tirage en CHF, elle ait effectué une opération de change pour permettre à son client de bénéficier d’euros sur son compte de dépôt ouvert dans ses livres ou dans ceux d’autres établissements bancaires ; qu’en effet, cette opération ne modifiait pas la monnaie de compte du prêt qui restait le franc suisse tant qu’aucune conversion n’intervenait, et elle respectait la lettre d’instruction de M. X. du 8/04/2008 souhaitant affecter 200.000 € sur un compte ouvert à la Banque populaire Côte d’Azur Sanary, 197.000 sur un compte ouvert au CIC Lyonnaise de Banque Toulon Opéra et le solde sur son compte Jyske Bank ; que sur l’illicéité de la clause d’indexation, M. X. excipe enfin de l’illicéité de cette clause d’indexation aux motifs qu’elle est imprécise et ne respecte pas les prescriptions de l’article L 132-1 du code de la consommation imposant que le mode de variation du prix y soit explicitement décrit ; qu’il vise à tort l’article L. 132-1 qui concerne les clauses abusives ; qu’en outre, il opère une confusion entre d’une part, le choix de la monnaie de compte qui fait varier la contre-valeur en euros du nominal du prêt en fonction de l’évolution du taux de change entre la devise de base de l’emprunteur et la monnaie de compte du prêt et, d’autre part, le taux d’intérêt variable du prêt ; que le contrat décrit avec précision la composition du taux d’intérêt en indiquant qu’à un taux fixe de 1,5% s’ajoute un taux variable égal au Jyske Bank founding rate, défini conventionnellement comme étant le taux de refinancement permettant à la banque d’obtenir un montant identique au prêt, dans la monnaie du prêt, pour la durée du prêt, sur les marchés interbancaires deux jours ouvrables avant le premier jour au cours duquel courent les intérêts ; qu’il précise en outre la périodicité trimestrielle des remboursements et ajoute que compte tenu de la formule de détermination du taux, le taux sera révisé à l’issue du chacune des périodes en fonction du taux Jyske Bank funding rate applicable à la date du terme de la période concernée ; qu’il mentionne enfin à titre indicatif, le taux applicable à la date de l’offre ainsi que le taux effectif global ; que le grief tiré du caractère imprécis de la clause de monnaie étrangère doit donc être écarté ; que l’ensemble de ces éléments conduit à confirmer le premier juge qui a, à bon droit, dit que l’obligation de remboursement du prêt de 1.500.000 € a été souscrite en francs suisses soit en nominal pour un capital de 2.389.500 CHF ; que la banque verse aux débats les lettres de roll-over adressées trimestriellement à M. X. et mentionnant le montant de chaque échéance trimestrielle ainsi que la lettre de mise en demeure du 10/05/2012 envoyée à l’emprunteur après la décision unilatérale de ce dernier de suspendre les intérêts dus au titre du contrat de prêt ; que M. X. sera par conséquent condamné à payer la somme, arrêtée au 13/01/2017, de 225.618,58 CHF au titre des intérêts impayés du prêt ou sa contre-valeur en euros au jour du présent arrêt, sauf à parfaire.

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Y... X. a signé le 9 octobre 2007 un document intitulé « le keyplan mortgage application » dans lequel il décrit sa situation, et « une déclaration de compréhension » dans laquelle il atteste avoir examiné les conditions de l’emprunt avec la société JYSKE BANK A/S ; qu’il est précisé dans ce deuxième document qu’il préfère souscrire l’emprunt en CHF et ensuite qu’il soit converti et versé en EUR, que la société JYSKE BANK AIS lui a fait part du risque de change lié au choix d’emprunter dans une autre devise que la devise de base, qu’il comprend que tout renforcement de la devise d’emprunt par rapport à la devise de base peut résulter en une augmentation du coût de remboursement de l’emprunt et que le fait d’emprunter dans une devise étrangère peut être considéré comme étant à « haut risque », qu’il est informé que le taux d’intérêt est variable et qu’il peut augmenter ou baisser, que toute augmentation du taux d’intérêt aura comme résultat une augmentation des charges de remboursement ; que l’offre du 13 décembre 2007 précise qu’il s’agit d’un prêt de EUE 1.500.000 (un million cinq cent mille euros) ou l’équivalent à la date de tirage du prêt dans l’une des principales devises européennes, dollars américains ou yens japonnais aux caractéristiques suivantes : taux variable : égal au Jysque Bank Funding Rate + 1,50 % points (soit pour indication à la date de l’offre un total de 6,51 %), qu’elle précise également notamment : Devise : multidevises, initialement en euros, Périodicité de remboursement : trimestriel, Nombre d’échéances : 140 (40 en remboursement d’intérêts seulement et 100 en remboursement d’intérêts et de capital), Montant des échéances : en principal Euros 15.000 (ou son équivalent dans une autre devise) + montant des intérêts ; que l’offre de prêt, qui a été acceptée par Y. X., mentionne en 11 Variation des taux de change « pour le cas où en fonction des variations des taux de change l’endettement en cours viendrait à dépasser le montant de 1.180.000 Livres Sterling (la limite de facilité Sterling), la banque serait autorisée à son entière discrétion à prendre tout ou partie des mesures suivantes : convertir l’endettement en cours en Sterling, au taux de change de la banque en vigueur au jour de là conversion ;..) » : qu’il a été remis à Y. X. le même jour une simulation de remboursement hypothécaire pour un prêt de 1.500.000 € réalisée à titre purement indicatif ; que l’acte de prêt notarié, reprenant exactement les caractéristiques de l’offre, a été passé le 9 avril 2008 ; que concomitamment, à la demande de M. X., le prêt a été tiré en francs suisses et a été inscrit sur son compte pour un montant de 2.389.500 CHF correspondant à la contre-valeur en francs suisses, à la date du tirage du prêt, de 1.500.000 €, que les fonds lui ont ensuite été remis en euros conformément à sa demande comme cela résulte de sa lettre d’instruction du 8 avril 2008 ; que 900.000 ont été investis pour son compte par la société Jyske Bank en valeurs mobilières dans une de ses filiales ; que sur le choix de la monnaie et le tirage du prêt en francs suisses qu’il convient de distinguer les notions de monnaie de paiement et de monnaie de compte ; qu’en France la monnaie de paiement est l’euro en application des articles L. 112-5 et suivants du Code monétaire et financier ; que la monnaie de compte est un instrument de mesure ; que d’une manière générale la dette est fixée en unités de monnaie de compte, mais peut être réglée dans une autre monnaie qui sera la monnaie de paiement ; que cette distinction s’applique en matière de prêt ; qu’en l’espèce l’offre de prêt, reprise par le contrat de prêt, précise que le prêt est d’un montant en euros, ou l’équivalent à la date de tirage du prêt dans l’une des principales devises européennes, dollars américains ou yens japonnais, qu’il s’agit d’un prêt multidevises, initialement en euros et que l’emprunteur a la faculté de choisir d’effectuer un tirage en monnaie étrangère, ce que M. X. a fait ; qu’il est dès lors acquis que ce dernier a utilisé le franc suisse comme monnaie de compte, qu’en effet le montant du prêt a été tiré en francs suisses, les intérêts étaient calculés en francs suisses et le capital restant dû était exprimé en francs suisses, et ce très certainement parce qu’à ce moment-là il était plus intéressant de rembourser les intérêts en francs suisses à un taux avantageux ; qu’il est sans incidence sur la qualification de la monnaie de compte que M. X. ait reçu en définitive, après conversion, des euros ; que la question se pose de savoir s’il était permis à la société Jyske Bank de proposer à X. et de recourir pour le prêt en cause, comme pour de nombreux autres prêts, à une monnaie de compte étrangère, savoir le franc suisse ; que lorsque le contrat est interne, ce qui est le cas en l’espèce, la référence à une monnaie étrangère est assimilée à une clause d’indexation, clause qui est licite lorsque l’indice choisi est en relation directe avec l’objet de la convention ou avec l’activité de l’une des parties ; qu’il est de jurisprudence confirmée que lorsque le prêteur est une banque, la référence à une monnaie de compte étrangère est considérée comme une clause d’indexation licite ; qu’il en résulte que le prêt consenti par la société Jyske bank, que ce soit un contrat international ou interne, pouvait licitement utiliser le franc suisse comme monnaie de compte, étant observé que le franc suisse, s’il n’est pas une devise de l’Union européenne, n’en reste pas moins une devise importante en Europe comme en atteste le nombre important de transactions qui l’utilisent ; qu’il faut tirer comme conséquence du choix du tirage en francs suisses opéré par M. X. que le prêt n’a pas été souscrit en euros, mais en francs suisses, et ce d’autant plus que tant l’offre que le contrat de prêt précisent que le prêt est accordé pour un montant en euros ou l’équivalent à la date de tirage du prêt dans l’une des principales devises européennes ; que M. X. a choisi un équivalent, le franc suisse, qui s’impose en conséquence comme la monnaie de compte, donc comme la devise de souscription du prêt ; qu’en synthèse il sera donc jugé que le prêt souscrit le 9 avril 2008, suite à l’offre du 13 décembre 2007 que Y. X. a régulièrement acceptée, l’a été en francs suisses ; que par voie de conséquence, il n’y aura pas lieu de condamner la Jyske Bank à rembourser les échéances d’intérêts que M. X. a versées, en exécution du contrat, au taux convenu, régulièrement calculés en francs suisses.

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QU’une clause d’indexation sur une monnaie étrangère n’est valable que lorsqu’elle est en relation directe avec l’objet du contrat ou avec l’activité de l’une des parties ; que ne présente pas de lien avec l’activité de l’une des parties la clause, contenue dans un prêt consenti par une banque pour financer le remboursement de dettes contractées en France, par un emprunteur français, domicilié en France, indexant le montant du remboursement du prêt consenti à une monnaie étrangère ; qu’en l’espèce, la clause d’indexation sur le franc suisse était contenue dans un prêt consenti par la Jyske Bank, à M. X. français et domicilié en France, et destiné à rembourser un précédent emprunt et à purger une hypothèque pour un bien situé en France ; qu’en retenant, pour considérer cette clause comme licite, que le prêteur avait la qualité de banquier, tandis que cette circonstance n’était pas de nature, compte tenu du caractère purement interne du prêt, à caractériser un lien direct entre la clause et l’activité de la banque, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé l’article L. 112-2 du code monétaire et financier ;

2°) ALORS QUE le juge est tenu d’examiner, au besoin d’office, le caractère abusif d’une clause contractuelle dès lors qu’il dispose des éléments de fait et de droit pour le faire qui révèlent un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ; qu’en l’espèce, la clause de monnaie étrangère de l’offre de prêt pouvait avoir pour effet d’augmenter le montant du prêt sans qu’aucun plafond n’ait été fixé et faisait peser sur M. X., exclusivement, le risque induit par la variation des changes ; que la cour d’appel s’est bornée à retenir la licéité de cette clause (arrêt, p. 6 § 4) en s’abstenant de rechercher si celle-ci créait au détriment de M. X., emprunteur non averti, un déséquilibre significatif et revêtait ainsi un caractère abusif, car elle permettait de rendre incertain le montant du prêt à rembourser qui pouvait varier à la hausse sans qu’aucune limite ne soit fixée, bouleversant l’économie de ce contrat pour M. X., puisque ce dernier, à la différence de la banque prêteuse, ne disposait pas de créances ou de dettes dans d’autres devises étrangères susceptibles d’amortir les variations de cours ni d’aucun autre moyen de se prémunir du risque de change, contrairement à la Jyske bank ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a méconnu son office, et a violé l’article L. 212-1 du code de la consommation, ensemble l’article 6, paragraphe 1 et la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993, relative aux clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs.

 

SECOND MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR infirmé le jugement qui avait dit que la Jyske Bank avait engagé sa responsabilité civile au titre de manquements à ses devoirs d’information et de mise en garde et qui l’avait condamnée à payer à M. X. la somme de 150.000 euros de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance qu’il avait subie et d’AVOIR ainsi rejeté la demande de M. X. de condamnation de la Jyske Bank à lui verser des dommages-intérêts à ce titre ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QU’en vertu du principe de non-immixtion, le banquier dispensateur de crédit n’a pas de devoir de conseil envers son client et sa responsabilité de ce chef ne peut donc être engagée que dans les cas où il a joué un rôle actif dans l’élaboration du projet et fourni un conseil inadapté à la situation de son client ; qu’en matière d’opérations spéculatives, il est également tenu d’un devoir de mise en garde sur le risque particulier afférent à l’opération ; qu’hormis ces cas, l’établissement bancaire qui consent un crédit est seulement tenu envers un emprunteur non averti d’une obligation de mise en garde au regard de ses capacités financières et du risque de l’endettement né de l’octroi du crédit ; qu’en l’espèce, il n’est pas discuté que M. X., entrepreneur, non spécialiste des marchés financiers, n’était pas un emprunteur averti ; que M. X. reproche à l’intimée d’avoir manqué à son devoir de conseil en l’ayant conduit à souscrire un emprunt de 1.500.000 € inapproprié au regard des besoins qu’il avait exprimés à hauteur de 510.000 euros seulement et de sa situation financière puisque son revenu net mensuel était de 2.700 euros déduction faite de toutes ses charges et ne lui permettait pas de rembourser 5.000 euro par mois ; qu’il sera liminairement constaté qu’il ne fournit aucune pièce démontrant que la Jyske Bank l’aurait de quelque manière que ce soit incité ou forcé à emprunter plus que ce qu’il souhaitait ; que d’autre part, la pratique des prêts in fine adossés à des produits financiers permettant à l’emprunteur d’espérer rembourser une partie des intérêts du prêt avec les revenus de l’investissement, est d’usage courant et ne constitue pas un projet sortant du commun dans lequel le banquier joue un rôle actif spécifique ; que l’intimée se retranche par conséquent valablement derrière le principe de non-immixtion du banquier dans les affaires de son client ; que par ailleurs, un prêt libellé en devises n ‘est pas un produit spéculatif mettant à la charge du banquier une obligation particulière de mise en garde ; qu’il ressort d’autre part, du document intitulé « Keyplan Mortgage Application » qu’il a rempli, que l’appelant percevait un salaire annuel de 98.300 euros soit 8.191 euros par mois et que l’ensemble de ses charges de la vie courante était de 4.272 euros mensuels comprenant le remboursement de deux emprunts immobiliers de 1.629 euros et 811 euros ; que toutefois, le prêt souscrit auprès de la Jyske Bank devait lui permettre d’obtenir des liquidités et de rembourser ces deux crédits de sorte que M. X. n’ayant pas à intégrer dans ses charges les remboursements mensuels de 1.629 euros et 811 euros, ses revenus nets après impôts s’élevaient à 5.145 € par mois ; que l’emprunteur était également propriétaire de sa maison d’habitation évaluée à 1.500.000 euros, mais d’une valeur nette de 1.283.100 euros compte tenu du capital restant du de 80.911 euros sur l’emprunt immobilier et de 135.989 euros sur le crédit de financement de travaux ; que de plus, même s’il n’en a pas fait état dans sa demande de prêt, force est de constater qu’il a transmis à l’intimée la liasse fiscale de la société Synergie pour la période du 17/11/2005 au 31/12/2006 faisant apparaître la perception de dividendes de 100.000 euros correspondant au résultat net après impôts de sa société ; qu’ainsi, sans prendre en compte les produits escomptés de l’investissement projeté, il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’appelant n’a pas contracté un endettement excessif par rapport à ses capacités financières imposant à la Jyske Bank de le mettre en garde ; que par ailleurs, à supposer qu’il pouvait ignorer qu’un emprunt libellé dans une monnaie étrangère était nécessairement soumis aux fluctuations des taux de change, l’appelant prétend à tort que la banque ne l’a pas suffisamment averti sur le risque de change ; qu’il a en effet été destinataire d’une déclaration de compréhension qu’il a signée le 9/10/2007, qui mentionne en son point n° 4 « nous avons discuté dans quelle devise je préfère faire l’emprunt et j’ai demandé que l’emprunt soit souscrit en CHF et ensuite, converti et versé en EUR, Jyske Bank m’a fait part du risque de change lié au choix de l’emprunteur dans une autre devise que mon choix de base ; je déclare comprendre que tout renforcement de la devise de l’emprunt par rapport à ma devise de base peut résulter en une augmentation du coût du remboursement de l’emprunt et que le fait d’emprunter dans une devise étrangère peut être considéré comme étant un « haut risque » ; qu’en outre, le 26/10/2007 l’intimée lui a envoyé un courrier comportant une section « important Notes » aux termes duquel (...) Si vous envisagez de souscrire votre prêt dans une devise autre que celle dans laquelle vos revenus/biens, vous devez prendre en considération le fait que les taux de change sont sujets aux fluctuations du marché. Tout affaiblissement de votre devise de base/revenu par rapport à la devise choisie pour le prêt se traduirait par une augmentation effective du coût de vos échéances de remboursement. Souscrire un prêt en devise étrangère peut en conséquence être considéré comme un risque important » ; que ces documents, bien que préimprimés, sont clairs sur le mécanisme de fonctionnement d’un prêt multi-devises et les risques inhérents à l’affaiblissement de la devise de base de l’emprunteur par rapport à la monnaie de compte du prêt ; que les assertions de M. X. selon lesquelles l’intimée lui aurait vendu l’emprunt en des termes élogieux et répétés, ce qui était de nature à amoindrir dans son esprit l’effet des quelques phrases sur le risque de change, ne sont corroborées par aucune pièce ; que M. X. invoque enfin la situation macroéconomique en pleine dégradation et la crise des subprimes à l’automne 2007 dont la Jyske Bank devait être consciente au motif que les milieux financiers avaient reçu des dizaines d’alertes ne pouvant concerner qu’une problématique très particulière aux États Unis et à un marché immobilier local ; que toutefois, la Jyske Bank répond à raison qu’elle n’était pas en mesure d’anticiper le décrochage de l’euro par rapport au franc suisse qui participe d’une modification fondamentale de la conjoncture économique, étant souligné au regard des divers documents financiers et économiques versés au dossier que la hausse constatée à compter de 2010 est sans commune mesure avec les fluctuations à la hausse et à la baisse observées entre le début des années 2000 et janvier 2009 ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu’en l’espèce, M. X., pour établir que la Jyske Bank lui avait fait souscrire un emprunt de 1.500.000 euros tandis que ses besoins étaient de 510.000 euros, avait produit un récapitulatif établi le 7 janvier 2008 des sommes qu’il devait rembourser avec le prêt souscrit auprès de la Jyske Bank qui mentionnait la somme totale de 510.766 euros correspondant à ses besoins (pièce n° 5) et la preuve du versement de la somme de 903.981,87 euros qui avait été affectée sur des placements destinés à garantir l’emprunt (pièce n° 18) ; que la cour d’appel, en affirmant que M. X. ne produisait aucune pièce démontrant que la Jyske Bank l’aurait de quelque manière que ce soit incité ou forcé à emprunter plus que ce qu’il souhaitait (arrêt, p. 9 § 11), tandis que ces documents établissaient qu’il n’avait besoin que d’un prêt d’un montant de 510.000 euros et non de 1.500.000 euros, la cour d’appel a dénaturé, par omission, les documents ainsi produits, en violation du principe susvisé et de l’article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU’un établissement bancaire prêteur de deniers est tenu d’une obligation de mise en garde à l’égard de l’emprunteur non averti à raison de ses capacités financières et des risques de l’endettement né de l’octroi du prêt ; que pour exclure l’existence d’un manquement de la Jyske Bank, la cour d’appel a retenu que M. X. percevait un salaire annuel de 9.191 euros mensuels avec un revenu net de 5.145 euros après impôt, qu’il disposait aussi d’une maison et de dividendes versés par sa société, de sorte que M. X. n’avait « pas contracté un endettement excessif par rapport à ses capacités financières » (arrêt, p. 8 § 4) ; qu’en statuant ainsi, sans prendre en compte, comme demandé (ccl § n° 49), pour apprécier l’existence d’un manquement, le risque engendré par la clause de monnaie étrangère qui indexait le prêt sur le taux de change franc suisse/euro, les mensualités étant susceptibles d’augmenter considérablement au cours du prêt souscrit sur une durée de 35 années, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu 1231-1 du même code ;

3°) ALORS QU’un établissement bancaire prêteur de deniers est tenu d’une obligation de mise en garde à l’égard de son client sur les risques encourus lors d’opérations spéculatives ; que le prêt de la Jyske Bank, qui, au moyen de la clause de monnaie étrangère indexait le capital à rembourser sur l’évolution des taux de change franc suisse/ euros, exposait M. X. à un risque considérable, qui s’est réalisé, d’augmentation très importante du capital (+52%) à rembourser et corrélativement des intérêts calculés sur ce capital ; que la cour d’appel, pour estimer que la Jyske Bank avait satisfait à ses obligations, a considéré « qu’un prêt libellé en devise n’était pas un produit spéculatif » qui ne « constituait pas un projet sortant du commun » ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher si la circonstance que M. X. qui avait souscrit en 2007 un prêt d’un montant de 1.500.000 euros se voyait désormais réclamer par la Jyske bank un capital de 2.288.135,59 euros sur lequel les intérêts étaient calculés, correspondant à une augmentation de 52 % depuis la date de souscription, était de nature à établir le caractère particulièrement dangereux et spéculatif du prêt, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu 1231-1 du même code ;

4°) ALORS QUE, en toute hypothèse, lorsque le prêt consenti revêt une nature complexe et est de nature à créer un risque particulier pour l’emprunteur, le banquier prêteur, tenu d’informer l’emprunteur, ne peut se contenter de présenter à l’emprunteur le fonctionnement du prêt, mais doit attirer son attention sur les risques particuliers que lui fait encourir le prêt envisagé ; qu’en l’espèce, en se fondant, pour écarter la responsabilité de la société Jyske Bank pour manquement à son obligation d’information sur la déclaration de compréhension signée le 9 octobre 2007 et sur le document du 26 octobre 2007 qui informaient que souscrire un prêt en devise étrangère pouvait être un risque important, tandis que ces documents décrivaient en termes neutres les conséquences que pouvaient avoir la souscription d’un tel prêt et ne permettaient pas à M. X. d’apprécier concrètement le risque financier auquel il s’exposait, comme celui de devoir rembourser 52 % de capital en plus avec des intérêts calculés sur cette somme ; qu’il résultait de ces constatations que ces documents n’informaient pas précisément l’attention de M. X. sur le risque, qui s’est réalisé peu de temps après la souscription du prêt, d’augmentation du capital lié à l’évolution du taux de change, de sorte que la cour d’appel, en jugeant que la Jyske Bank avait correctement rempli son devoir d’information, a violé l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu 1231-1 du même code.