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CA TOULOUSE (2e ch. 2e sect.), 28 février 2002

Nature : Décision
Titre : CA TOULOUSE (2e ch. 2e sect.), 28 février 2002
Pays : France
Juridiction : Toulouse (CA), 2e ch. sect. 2
Demande : 2001/01806
Décision : 96/02
Date : 28/02/2002
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 19/03/2001
Décision antérieure : T. COM. TOULOUSE, 31 janvier 2001
Numéro de la décision : 96
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 826

CA TOULOUSE (2e ch. 2e sect.), 28 février 2002 : RG n° 2001/01806 ; arrêt n° 96/02

Publication : Juris-Data n° 176392

 

Extrait : « Attendu que les dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile sont exclues lorsque la prestation proposée a un rapport direct avec l'activité du professionnel sollicité ; qu'en l'espèce l'extension à une activité de boulangerie pâtisserie d'une activité de brochetterie, s'inscrit dans le développement de l'activité commerciale de M. X. et c'est à juste titre que le premier juge a écarté les dispositions sur le démarchage à domicile ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

DEUXIÈME CHAMBRE DEUXIÈME SECTION

ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2002

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 2001/01806. Arrêt n° 96/02.

Prononcé : A l'audience publique du VINGT HUIT FEVRI DEUX MILLE DEUX, par J. L. BRIGNOL, président, assisté de D. CAHOUE, greffier.

Composition de la cour lors des débats et du délibéré : Président : J.L. BRIGNOL

Conseillers : V. VERGNE D. GRIMAUD

Greffier lors des débats : D. CAHOUE

Débats : A l'audience publique du 22 janvier 2002. La date à laquelle l'arrêt serait rendu a été communiquée. Avant l'ouverture des débats, les parties ont été informées des noms des magistrats composant la cour.

Nature de l'arrêt : CONTRADICTOIRE

 

APPELANT (E/S) :

Monsieur X.

Boulangerie […] [adresse], Ayant pour avoué la SCP BOYER LESCAT MERLE, Ayant pour avocat Maître GOURBAL du barreau de Toulouse

 

INTIMÉ (E/S) :

SOCIETE CONCEPTICA

[adresse], Ayant pour avoué la SCP CANTALOUBE FERRIEU CERRI, Ayant pour avocat Maître BERL du barreau de Toulouse

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Monsieur X. a relevé appel le 19 mars 2001 du jugement rendu le 31 janvier 2001 par le tribunal de commerce de Toulouse qui l'a débouté de ses demandes et qui l'a condamné à payer à la société Conceptica 7.546,23 € (49.500 Francs) avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 1999, 3.000 Francs à titre de dommages et intérêts contractuels, 2.000 Francs au titre de l'article 700 NCPC.

Le 9 juillet 1999 M. X. qui exerce la profession de boulanger pâtissier a acquis de la société Conceptica une unité de restauration rapide de brochetterie pour le prix de 59.697 Francs TTC payable à raison de 10.197 Francs à la commande et le solde à la livraison. L'acompte a été payé au moyen de quatre chèques, le solde ne l'a pas été et M. X. a invoqué des problèmes de financement.

M. X. déclare avoir signé son engagement dans la précipitation, à une heure de grande affluence dans le magasin et sous la pression de l'agent commercial de la société Conceptica, promesse ayant été faite qu'un crédit lui serait consenti par le vendeur et que seul le premier chèque d'acompte serait encaissé, les trois autres devant l'être lorsque la TVA serait « récupérée ». Or tous les chèques ont été présentés à l'encaissement et il a reçu dès le 28 juillet une lettre de mise en demeure d'avoir à payer le solde du prix. Il fait état du témoignage de son employée et du témoignage d'un autre commerçant et invoque des affaires similaires sur les pratiques douteuses de la société Conceptica. Il soutient devoir être considéré comme un particulier dès lors que le contrat sortait de sa compétence spécifique, fa boulangerie n'ayant rien à voir avec les brochettes, et il estime relever de la protection légale en matière de démarchage à domicile. Il en déduit que le contrat est nul comme ne comportant pas les mentions prévues en la matière, comme ne prévoyant pas la faculté de renonciation, et la société Conceptica ayant perçu des sommes avant le délai de réflexion de 7 jours. A titre subsidiaire, il fait valoir qu'outre les engagements oraux de l'agent commercial et du directeur commercial de la société Conceptica, des indications ont été portées sur le bon de commande comprenant un n° de téléphone et le nom d'une personne à qui s'adresser pour tous renseignements financiers de telle sorte qu'il a cru à un crédit de la société Conceptica et il invoque le dol. Il invoque un manquement à l'obligation d'information, cette information devant être donnée avec sincérité et sérieux alors qu'en l'espèce la société Conceptica a donné une réponse erronée à la question qui lui était posée d'un crédit consenti par ses soins en raison du refus prévisible d'un établissement bancaire compte tenu des faibles résultats du commerce. Enfin il invoque l'inopposabilité des conditions générales de vente portées au verso d'un document dont il n'a signé que le recto et il considère que l'accord des [minute page 3] volontés ne s'est pas réalisé sur ces conditions. M X. conclut à la nullité du contrat, au remboursement de l'acompte de 10.197 Francs avec intérêts au taux légal à compter de la commande, à titre subsidiaire à la résolution du contrat pour manquement à l'obligation de trouver un financement, à titre encore plus subsidiaire à la nullité du contrat pour dol, au manquement à l'obligation d'information. Il demande en tout état de cause 50.000 Francs à titre de dommages et intérêts et 10.000 Francs au titre de l'article 700 NCPC, la condamnation de la société Conceptica aux dépens en ce compris ceux d'une instance en référé pour mainlevée d'opposition à deux chèques, la distraction des dépens d'appel au profit de la SCP Boyer Lescat Merle.

La société Conceptica considère que la preuve n'est pas rapportée de ses procédés contestables car l'attestation de l'employée de M X. est suspecte et l'attestation d'un autre commerçant ne la désigne pas formellement. Elle soutient que les règles relatives au démarchage à domicile ne sont pas applicables s'agissant d'un commerçant qui a entendu étendre son activité. Sur les mentions du bon de commande portant des indications pour des renseignements financiers, elle les explique par une aide au client pour la mise en place d'un financement sans que cette mention puisse être interprétée comme l'engagement de fournir ledit financement. Elle fait valoir que près de la signature figure la référence aux conditions générales de vente dont l'acquéreur reconnaît avoir pris connaissance. Enfin elle fait valoir que la preuve d'un dol n'est pas rapportée. Elle conteste les dommages et intérêts demandés par M. X. et conclut à la confirmation du jugement sauf à porter les dommages et intérêts contractuels à 7.425 Francs et à bénéficier de 8.000 Francs au titre de l'article 700 NCPC avec distraction des dépens au profit de la SCP Cantaloube-Ferrieu-Cerri.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

Attendu que les dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile sont exclues lorsque la prestation proposée a un rapport direct avec l'activité du professionnel sollicité ; qu'en l'espèce l'extension à une activité de boulangerie pâtisserie d'une activité de brochetterie, s'inscrit dans le développement de l'activité commerciale de M. X. et c'est à juste titre que le premier juge a écarté les dispositions sur le démarchage à domicile ;

Attendu que le litige porte essentiellement sur le point de savoir si la société Conceptica s'est ou non engagée à procurer un financement pour M. X. ; que si la société CONCEPTICA n'a pas la faculté elle-même d'accorder un crédit, il lui est loisible d'avoir le partenariat d'une société financière ; que certes le bon de commande du 9 juillet 1999 porte mention d'une vente au comptant avec acompte de 10.197 Francs payés le jour même, et il est stipulé dans les conditions générales au verso que l'acheteur fait son affaire du financement qu'il sollicitera auprès d'un organisme de son choix ; que cependant ces mentions sur le désintérêt par la société Conceptica du crédit qui serait obtenu par l'acquéreur sont contredites par les indications [minute page 4] manuscrites du recto qui désignent le directeur financier de la société Conceptica, M. A., outre une personne dénommée Mme B. avec son n° de téléphone « pour les renseignements financiers mardi matin » ; par ailleurs l'acompte de 10.197 Francs, qui aurait été réglé comptant selon les courriers de la société Conceptica, a fait l'objet de quatre chèques distincts ce qui démontre que M. X. avait une trésorerie difficile et que la société Conceptica en tenait compte ; par ailleurs Mme C., dont il n'y a pas lieu d'écarter le témoignage au seul motif qu'elle est une employée de M. X., atteste de façon très circonstanciée sur l'enthousiasme de la déléguée commerciale de la société Conceptica, Mme D., qui vantait un produit très rentable, qui a proposé des arrangements financiers, qui s'est engagée en promettant que si la banque n'assurait pas le financement elle s'en chargerait, qui a téléphoné à son directeur commercial, qui a insisté pour concrétiser sur le champ une vente pour laquelle M. X. demandait quelques jours de réflexion ; que ces éléments confirment la déclaration de M. X. selon laquelle, faute de pouvoir obtenir un soutien de sa banque en raison de ses difficultés financières, la société Conceptica s'engageait à lui procurer un crédit ; que ce mensonge sur un élément déterminant de la vente est constitutif d'un dol et fait encourir la nullité ;

Attendu en conséquence que l'acompte de 1.554,52 euros (10.197 Francs) devra être restitué avec intérêts au taux légal à compter du paiement du 9 juillet 1999 ; que le comportement de la société Conceptica qui conduit dans la précipitation un commerçant crédule à souscrire des engagements qu'il ne pourra honorer est gravement fautif et cause un préjudice matériel et moral important à une personne déjà en difficulté ; qu'il sera sanctionné par l'allocation de 6.000 € à titre de dommages et intérêts ;

Attendu qu'il convient d'appliquer l'article 700 NCPC à hauteur de 1.524,49 euros ;

Attendu que les dépens de l'instance en référé n'ont pas à suivre le sort de la présente instance ; qu'ils resteront à la charge de M. X. qui y a succombé et que les dépens de cette procédure seront à la charge de la société Conceptica ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement entrepris

Déclare nulle pour dol la vente du 9 juillet 1999 entre la société Conceptica et M X.

Condamne la société Conceptica à rembourser à M. X. mille cinq cent cinquante quatre euros cinquante deux centimes (1.554,52 € ou 10.197 Francs) avec intérêts au taux légal à compter du 9 juillet 1999

[minute page 5] Condamne la société Conceptica à payer à M. X. six mille euros (6.000 € ou 39.357,42 Francs) à titre de dommages et intérêts

Condamne la société Conceptica à payer à M. X. mille cinq cent vingt quatre euros quarante neuf centimes (1.524,49 € ou 10.000 Francs) au titre de l'article 700 NCPC

Déboute les parties de toute autre demande

Condamne la société Conceptica aux dépens de première instance et d'appel à l'exclusion des dépens de référé

Autorise la SCP Boyer Lescat Merle à faire application de l'article 699 NCPC