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CA METZ (3e ch.), 7 juillet 2020

Nature : Décision
Titre : CA METZ (3e ch.), 7 juillet 2020
Pays : France
Juridiction : Metz (CA), 3e ch.
Demande : 15/03830
Décision : 20/00224
Date : 7/07/2020
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 14/12/2015
Numéro de la décision : 224
Référence bibliographique : 5730 (recevabilité de l’appel), 6054 (clauses de garantie), 6060 (clauses portant atteinte au droit de propriété), 6629 (crédit affecté)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8509

CA METZ (3e ch.), 7 juillet 2020 : RG n° 15/03830 ; arrêt n° 20/00224 

Publication : Jurica

 

Extrait : « En l'espèce, la clause litigieuse selon laquelle la SA Credipar est subrogée dans tous les droits et actions du vendeur nés de la clause de réserve de propriété en application de l'article 1250 alinéa1 du code civil, en ce qu'elle laisse faussement croire à M. X., emprunteur devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, entrave l'exercice par celle-ci de son droit de propriété et a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

En conséquence, cette clause doit être réputée non écrite et la SA Credipar est déboutée de sa demande de restitution du véhicule, objet du crédit affecté. Le jugement déféré est infirmé. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE METZ

TROISIÈME CHAMBRE - TI

ARRÊT DU 7 JUILLET 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/03830. Arrêt n° 20/00224. N° Portalis DBVS-V-B67-D7ZT. Jugement, Au fond, origine : Tribunal d'Instance de THIONVILLE, décision attaquée en date du 16 juin 2015, enregistrée sous le R.G. n° 15/000394.

 

APPELANT :

Monsieur X.

[...], [...], Représenté par Maître Agnès B.-P., avocat au barreau de METZ (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)

 

INTIMÉE :

SA CREDIPAR

[...], [...], Représentée par Maître Jean-Philippe E., avocat au barreau de METZ

 

A la date du 5 mai 2020, l'affaire a été fixée par le président de la chambre en application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, les parties ayant expressément accepté le recours à ces dispositions par formulaire joint au dossier. L'affaire a été mise en délibéré au 7 juillet 2020 par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, les parties en ayant été avisées.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Madame Sandrine GUIOT-MLYNARCZYK, Président de chambre

ASSESSEURS : M. Éric LAMBERT, Conseiller, M. Olivier MICHEL, Conseiller

GREFFIER présent au prononcé du délibéré : Nejoua TRAD-KHODJA

Arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Selon offre préalable de prêt signée le 4 avril 2008, la SA Credipar a consenti à M. X. un prêt d'un montant de 19.073,91 euros remboursable en 60 mensualités avec intérêt au taux contractuel de 10,03 % l'an, affecté à l'achat d'un véhicule Peugeot 407 immatriculé XXX.

En application de la clause de réserve de propriété du contrat de prêt, le véhicule a fait l'objet d'une ordonnance de saisie-appréhension le 23 juin 2014, qui a été contestée par l'emprunteur.

Par jugement du 16 juin 2015, le tribunal d'instance de Thionville a condamné M. X. à restituer à la SA Credipar le véhicule litigieux, rejeté le surplus des demandes et condamné M. X. aux dépens.

Par déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 14 décembre 2015, M. X. a interjeté appel total du jugement.

Il a conclu à l'irrecevabilité de la demande de restitution du véhicule et à son rejet, outre la condamnation de la SA Credipar aux dépens.

La SA Credipar a conclu à la confirmation du jugement et demandé à la cour d'ordonner la restitution du véhicule et de condamner M. X. à lui verser 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle a exposé que si sa créance a été effacée du fait de la procédure de rétablissement personnel, la procédure de saisie- appréhension du véhicule est régulière et la mesure de rétablissement personnel n'y fait pas obstacle.

[*]

Par arrêt avant dire droit du 8 novembre 2018, la cour a ordonné la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture et a invité les parties à présenter leurs observations sur le caractère éventuellement abusif de la clause de subrogation du prêteur dans les droits du vendeur du véhicule s'agissant de la clause de réserve de propriété dont celui-ci bénéficie, réservant le surplus des demandes et les dépens.

[*]

M. X. demande à la cour de déclarer irrecevable la demande de restitution du véhicule et condamner la SA Credipar aux dépens.

Il expose avoir bénéficié d'une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire par décision du 1er juillet 2014, de sorte que la créance de la SA Credipar a été effacée. Sur la demande de restitution du véhicule, l'appelant soutient qu'elle est irrecevable d'une part parce qu'une telle demande relève des pouvoirs du juge de l'exécution et d'autre part, parce qu'au vu de l'avis Cour de cassation du 28 novembre 2016, la clause de réserve de propriété prévoyant la subrogation du prêteur dans la réserve de propriété du vendeur doit être déclarée abusive et réputée non écrite.

[*]

La SA Credipar n'a déposé aucune conclusions après l'arrêt avant dire droit du 8 novembre 2018.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Vu les écritures déposées le 13 février 2019 par M. X. et le 15 avril 2016 par la SA Credipar, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 9 mai 2019 ;

 

Sur la saisie du véhicule :

Le contrat de prêt signé le 4 avril 2008 comporte une clause de réserve de propriété entre le vendeur et l'acheteur, et une clause de subrogation selon laquelle, dès réception du solde du prix de vente par le prêteur, le vendeur subroge ce dernier conformément à l'article 1250 alinéa 1 du code civil dans tous ses droits et actions nés de la clause de réserve de propriété, jusqu'au remboursement complet de sa créance. Il est également indiqué que l'acheteur reconnaît avoir été informé de la subrogation ainsi stipulée.

Pour que la subrogation conventionnelle prévue à l'article 1250 alinéa 1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, soit valable il faut que le créancier subrogeant reçoive son paiement d'une tierce personne. Cependant le prêteur, en ce qu'il se borne à verser au vendeur les fonds empruntés par son client afin de financer l'acquisition d'un véhicule, n'est pas l'auteur du paiement, l'emprunteur et acheteur étant devenu, dès la conclusion du contrat de crédit, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur, de sorte qu'est inopérante la subrogation consentie par le vendeur au prêteur dans la réserve de propriété du véhicule.

En l'espèce, la clause litigieuse selon laquelle la SA Credipar est subrogée dans tous les droits et actions du vendeur nés de la clause de réserve de propriété en application de l'article 1250 alinéa1 du code civil, en ce qu'elle laisse faussement croire à M. X., emprunteur devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, entrave l'exercice par celle-ci de son droit de propriété et a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

En conséquence, cette clause doit être réputée non écrite et la SA Credipar est déboutée de sa demande de restitution du véhicule, objet du crédit affecté. Le jugement déféré est infirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La SA Credipar, partie perdante, devra supporter les entiers dépens et doit être déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement déféré et statuant à nouveau,

DÉCLARE non écrite la clause prévoyant la subrogation de la SA Credipar dans la réserve de propriété ;

DÉBOUTE la SA Credipar de sa demande de restitution du véhicule Peugeot 407 immatriculé XXX ;

DÉBOUTE la SA Credipar de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la SA Credipar aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de METZ et par Madame TRAD-KHODJA, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT