CA BASTIA (ch. civ.), 16 février 2004
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 863
CA BASTIA (ch. civ.), 16 février 2004 : RG n° 02/00308 ; arrêt n° 133
Publication : Juris-Data n° 268377
Extraits : 1/ « Au surplus ainsi que l'a justement dit le premier juge : - l'article 3 a une portée limitée puisque l'avis exigé et soumis à l'affichage porte seulement sur l'information du joueur quant à la faculté qui lui est offerte de consulter le règlement et à la nécessaire adhésion à ce règlement quand il engage un pari, - en aucun cas cette disposition n'impose l'affichage du règlement, - de ce fait ce dernier est censé être connu du joueur puisqu'il résulte d'un arrêté publié au Journal Officiel du 3 mars 1999 le rendant opposable à tous les parieurs, y compris à Monsieur X., - Monsieur X. ne démontre pas que l'absence de l'affichage de l'avis exigé l'a effectivement empêché de connaître les règles du parieur tant il est certain qu'il appartient au parieur lorsqu'il décide de jouer de se renseigner à tout le moins sur les règles du paiement et les modalités de perception du gain, - il n'est pas démenti que Monsieur X. est un joueur habituel qui a déjà gagné lors de précédents paris à ce même bar [enseigne] et qui par conséquent connaissait parfaitement la nécessité de présenter un récépissé pour obtenir le règlement de ses gains imposés par le règlement. »
2/ « Monsieur X. invoque l'application de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui dispose que « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des pallies au contrat » pour prétendre au caractère abusif de l'article 21 du règlement du PMU. Cependant le code de la consommation s'applique au contrat portant sur la vente de bien ou de service et tel n'est pas le cas du pari au PMU. Dès lors Monsieur X. ne peut utilement se prévaloir des règles du code de la consommation ».
COUR D’APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 16 FÉVRIER 2004
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 02/00308 C-MCB. Arrêt n° 133. Décision déférée à la Cour : jugement du 07 juin 2001 Tribunal de Grande Instance BASTIA : R.G. n° 99/2162.
APPELANT :
Monsieur X.
[adresse] représenté par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour, assisté de Maître Antoine ALESSANDRI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMÉ :
GIE PARI MUTUEL URBAIN
[adresse], représenté par la SCP R. JOBIN ET PH. JOBIN, avoués à la Cour, assisté de la SCP CHAIN, LAGGER ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 janvier 2004, devant la Cour composée de : Madame Marie-Colette BRENOT, Président de Chambre, Madame Brigitte BERTI, Conseiller, Madame Marie-Florence BRENGARD, Conseiller, qui en ont délibéré. [minute page 2]
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame Martin COMBET.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par Madame Marie-Colette BRENOT, Président de Chambre, à l'audience publique du 16 février 2004, date indiquée à l'issue des débats, Signé par Madame Marie-Colette BRENOT, Président de Chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier présent lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LES FAITS ET LA PROCÉDURE :
Monsieur X. a fait assigner le Groupe d'Intérêt Économique PARI MUTUEL URBAIN (GIE - PMU) à l'effet d'obtenir sa condamnation à lui payer les combinaisons gagnantes n° 1024 à 1042 qu'il a fait valider au bar PMU [enseigne] à [ville] le 19 juin 1999.
Par jugement du 7 juin 2001, le tribunal de grande instance de BASTIA :
- a débouté Monsieur X. de toutes ses demandes,
- a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- a dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration du 29 mars 2002, Monsieur X. a régulièrement interjeté appel de cette décision.
[minute page 3]
LES DEMANDES DES PARTIES :
Par conclusions déposées le 5 janvier 2003 auxquelles il convient de se référer, Monsieur X. :
- fait valoir qu'il ne peut être contesté qu'il a bien validé les formules gagnantes, que l'article 21 du règlement du PMU lui est inopposable pour n'avoir pas été porté à sa connaissance et que le PMU a pris conscience du défaut d'information puisqu'il a modifié ses formules par la suite,
- soutient que l'article 21 du règlement doit être réputé non écrit par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation,
- sollicite la condamnation du GIE - PMU à lui payer la somme de 411.612,34 euros correspondant au montant des formules gagnantes n° 1024 à 1042 de la journée n° 170/1 du 19 juin 1999 avec intérêts de droit à compter de l'assignation,
- subsidiairement au cas où l'article 21 ne serait pas écarté, sollicite la condamnation du GIE - PMU à lui payer la somme de 381.122,54 euros pour manquement à son obligation d'information ayant entraîné pour lui un préjudice découlant de la perte de chance de n'avoir pu percevoir ses gains et ce avec intérêts de droit à compter de l'assignation,
- demande la condamnation du GIE - PMU à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 10.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 08 avril 2003 auxquelles il convient de se référer, le GIE PMU invoque la force obligatoire du règlement du PMU, l'absence d'obligation d'information, la non application des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation et sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur X. à lui verser la somme de 1.829,39 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 4] MOTIFS DE LA DÉCISION :
La réglementation relative au PARI MUTUEL URBAIN résulte de l'arrêté du 13 septembre 1985, modifié par l'arrêté du 18 février 1999 publié au Journal Officiel du 3 mars 1999.
L'article 3 du règlement du PMU dispose : « l’engagement d’un pari au Pari Mutuel implique l’adhésion sans limitation ni réserve à tous les articles du présent arrêté portant règlement du Pari Mutuel » et l’article 21 de ce même règlement ajoute : « pour obtenir le règlement du gain ou le remboursement de leur pari, en dehors des paris enregistrés par téléphone ou par voie télématique, les parieurs sont tenus de présenter leur récépissé. A défaut, aucun autre justificatif de propriété n’est recevable ».
C'est par une analyse pertinente que la Cour adopte que le premier juge a dit que sous peine de dénaturation de cette clause claire et précise, Monsieur X. qui admet ne pouvoir justifier d'aucun récépissé pour les paris qu'il indique avoir engagés le 19 juin 1999 au bar PMU [enseigne], ne peut utilement se prévaloir ni de l'attestation du gérant de ce bar, ni de la bande enregistrée des paris du 19 juin 1999, ces modes de preuve étant expressément exclus et radicalement insusceptibles de permettre l'obtention des gains.
Monsieur X. prétend que l'article 21 du règlement lui est inopposable, le PMU n'ayant pas respecté les alinéas 2 et 3 de l'article 3 du règlement qui dispose que : « le règlement peut être consulté gratuitement sur les hippodromes, ainsi que dans tous les postes d’enregistrement habilités à recueillir les paris en dehors des hippodromes. Un avis affiché sur les hippodromes et dans les postes d’enregistrement du PMU informe les parieurs de cette disposition ».
Il résulte du procès-verbal de constat et d'interpellation dressé par Maître Y., huissier, le 2 novembre 1999 qu'aucun avis n'était affiché tant le 19 juin 1999, jour des paris de Monsieur X., que le 2 novembre 1999, jour du constat dans le bar PMU [enseigne] géré par Monsieur Z.
Cet affichage a été effectué dans ce bar PMU en 1999 ainsi que l'a constaté Maître Y. dans un second procès-verbal du 25 mai 2000.
S'il est certain que l'article 3 du règlement ci-dessus rappelé a été méconnu en l'espèce, Monsieur X. ne peut l'imputer au PMU mais à Monsieur Z. gérant du bar PMU [enseigne] qui aurait dû procéder à cet affichage.
Au surplus ainsi que l'a justement dit le premier juge :
- l'article 3 a une portée limitée puisque l'avis exigé et soumis à l'affichage porte seulement sur l'information du joueur quant à la faculté qui lui est offerte de consulter le règlement et à la nécessaire adhésion à ce règlement quand il engage un pari,
- en aucun cas cette disposition n'impose l'affichage du règlement,
- de ce fait ce dernier est censé être connu du joueur puisqu'il résulte d'un arrêté publié au Journal Officiel du 3 mars 1999 le rendant opposable à tous les parieurs, y compris à Monsieur X.,
- Monsieur X. ne démontre pas que l'absence de l'affichage de l'avis exigé l'a effectivement empêché de connaître les règles du parieur tant il est certain qu'il appartient au parieur lorsqu'il décide de jouer de se renseigner à tout le moins sur les règles du paiement et les modalités de perception du gain,
- il n'est pas démenti que Monsieur X. est un joueur habituel qui a déjà gagné lors de précédents paris à ce même bar [enseigne] et qui par conséquent connaissait parfaitement la nécessité de présenter un récépissé pour obtenir le règlement de ses gains imposés par le règlement.
De plus le fait que dès le lendemain des résultats, Monsieur X. ait déclaré la perte de ses tickets à la gendarmerie démontre qu'il savait qu'il devait présenter ses tickets pour obtenir ses gains.
Enfin il est du plus élémentaire bon sens de constater que tout joueur qui s'engage dans un jeu qu'il soit sportif ou de hasard a adhéré préalablement aux règles de ce jeu.
Monsieur X. ne peut donc sérieusement prétendre que l'article 21 du règlement lui est inopposable, que l'affichage de l'avis prévu par l'article 3 du règlement l'aurait empêché de perdre ses tickets et que le défaut d'affichage lui a fait perdre une chance de percevoir ses gains. Monsieur X. ne rapporte pas la preuve de cette perte de chance et de la probabilité de ce que l'affichage de l'avis l'aurait incité à prendre des précautions particulières pour la conservation de ses tickets.
[minute page 5] Monsieur X. invoque l'application de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui dispose que « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des pallies au contrat » pour prétendre au caractère abusif de l'article 21 du règlement du PMU. Cependant le code de la consommation s'applique au contrat portant sur la vente de bien ou de service et tel n'est pas le cas du pari au PMU. Dès lors Monsieur X. ne peut utilement se prévaloir des règles du code de la consommation. Le jugement sera en conséquence confirmé.
L'équité commande que chaque partie conserve à sa charge les frais irrécouvrables qu'elle a engagés.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Y ajoutant,
Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne Monsieur X. aux dépens.
- 5840 - Code de la consommation - Domaine d’application - Contrat - Nature du contrat - Qualification du contrat - Clauses abusives - Régime général
- 5846 - Code de la consommation - Domaine d’application - Légalité des actes réglementaires - Principe du contrôle
- 6089 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Conditions ne figurant pas sur l’écrit signé par le consommateur
- 6276 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Jeux et loteries